INTÉRIEUR.
6' ANNÉE. N' 571.
DIMANCHE, 2o OCTOBRE 1846-
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
feuilleton.
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TPRE8, le 24 Octobre.
L'on se rappelle le toile général qui eut lieu
dans la presse cléricale, l'occasion du voyage
de MM. Rogier et Veydt dans les Flandres. Les
feuilles du clergé se disputaient qui aurait
jeté le plus d'injures ces honorables députés
qui ne venaient cependant pas visiter leur ar
rondissement électoral, mais voulaient s'assurer
par eux-mêmes de la situation des Flandres.
L'Organe des Flandresle grand-prêtre de la
ligue contre le paupérisme, trouva bon d'appré
cier le voyage des honorables représentants d'An
vers sous un point de vue hargneux et déloyal.
Aujourd'hui M. le baron de Mooreghem,
nouvel élu du sénat par le district de Roulers,
fait le même voyage et dans le même but, ce
qu'il annonce. C'est un sénateur dévoué au parti-
prêtre, on ne saurait en doutera la manière
dont le voyage de M. de Mooreghem est jugé
par la presse cléricale. Cependant on nous af
firme que sa tournée dans les Flandres et
surtout dans le district de Roulers, n'est pas
désintéressée. Voici comment le Journal de
Bruges relève le Nouvelliste qui. en fait de stu
pidité, ne le cède qu'au Journal des Baziles
de la localité
Nous avons fait ressortir l'inconséquence du Nou
velliste qui loue chez M. le baron de Mooreghem la
même démarche qu'il a si fortement blâmée chez
MM. Rogier et Veydt. La feuille cléricale se justifie
de cette manière
La tournée faite dans nos Flandres par ceux qui
avaient refusé de s'occuper au sein du Congrès
libérâtre de la misère qui ronge nos malheureux
compatriotes, avait plulôt un but politique qu'un
j> but philanthropique. En effet, MM. Rogier et
Veydt ont été rendre visite aux coryphées de
leur parti, mais nulle part ils ne se sonl adressés
ceux qui ne partagent pas leurs utopies poli-
tiques.
Quelle admirable logique! Ce que le parti catho
lique, qui exploite le pouvoir depuis iG ans, qui est
encore en ce moment au timon des affaires, qui a la
majorité dans les chambres, n'a pu faire pour le
salut des Flandres, le Nouvelliste reproche deux
représenlants du parti libéral, du parti qui est eu
minorité la chambre, de ne pas l'avoir fait. En
raisonnant comme le Nouvelliste quelle réception
devraient faire les Flandres ceux qui gouvernent
et qui depuis tant d'années n'ont pas su user du
pouvoir qu'ils ont en main, pour arrêter ou empê
cher les progrès de la misère?
La visite des deux représentants de l'opinion
libérale avait plutôt un but politique qu'un but
philanthropique, dit le Nouvelliste.
Jusqu'à présent le Nouvelliste n'avait assigné
cette visite qu'un but gastronomique 5 le désir de
manger des œufs de vanneau aujourd'hui il a dé
couvert un but politique, nous le félicitons de cette
nouvelle preuve de perspicacité.
MM. Rogier et Veydt ne se sont adressés qu'à
ceux qui partagent leurs utopies politiques.
Nous ne croyions pas les idées libérales aussi
répandues dans les Flandres, MM. Rogier et Veydt
auront été étonnés de trouver dans les pauvres caba
nes qu'ils ont visitées, de malheureux tisserands qui
partagent leurs principes politiques. Le Nouvelliste
oublie de nous parler de l'opinion des fileuses, nous
ne serions pas fâchés de la connaître, elle ne doit
pas être très-favorable son parti, car, malgré son
opinion flatteuse sur les propriétés que leur salive
communique au fil, si elles peuvent comprendre
que c'est l'indifférence du parti catholique qu'elles
doivent l'horrible misère qui les conduit elles et
leurs enfants au dépôt de mendicité, elles pour
raient très-bien être, comme les tisserands, libé
rales sans le savoir.
On voit quels extravagants arguments 011 doit
avoir recours pour soutenir une mauvaise cause. Le
Nouvelliste ne peut sortir de ce dilemme si M. le
baron de Mooreghem a bien fait de visiter les
Fland ces, MM. Veydt et Rogier qui les ont visitées
dans le même but ont également bien fait. Qu'il soit
donc un jour de bonne &»t et qu'il dise avec nous
que ces messieurs ont bien agi tous les trois.
On écrit de Roulers que, dans la nuit du 13
au 19, une servante a lue son enfant nouveau-
né en le jetant dans les latrines. La coupable a
été arrêtée.
Un journal de cette ville avançait que M. le
gouverneur De Muelenaere était en route pour
Paris afin de renouer les négociations avec le
cabinet Guizot pour obtenir l'union douanière
avec la France.
Juste au moment que le journal qui faisait
courir M. De Muelenaere sur la roule de Paris,
était mis en circulation, le gouverneur mettait
le pied dans son hôtel, de retour de Bruxelles
où il avait été appelé, du moins ce qu'on as
sure pour assister un conseil de cabinet où
les moyens propres soulager la misère de nos
ouvriers, ont été débattus, mais dans lequel il
n'a été nullement question d'une union doua
nière avec la France.
Nous ignorons ce qui peut pousser certaines
gens mêler constamment le nom de notre
gouverneur un projet qu'eux-mêmes, tout en
premiers, savent impraticable pour le moment.
(Impartial de Bruges.)
Il y a eu avant-hier un conseil des ministres
qui a duré depuis une heure jusqu'à cinq heu
res de l'après-midi.
Hier matin les ministres se sont réunis de
nouveau chez M. le ministre de l'intérieur.
M. le comte de Muelenaere et M. Desmai-
sières ont assisté ces deux conseils.
On pense que la série des. mesures proposer
l'ouverture de la session, d'abord pour parer
la cherté des subsistances, ensuite pour le sou
lagement des fileuses et des tisserands de l'an
cienne industrie linière la main sera définiti
vement arrêtée dans un second et dernier
conseil de ministresindiqué pour cet après-
midi. Émancipation
T-TDOriQ—
On lit dans le Moniteur de ce jour
Les journaux se sont occupés de la dys-
senterie épidémique qui règne dans quelques
communes des arrondissements de Termonde,
de Matines et de Bruxelles.
Nous pouvons annoncer avec certitude
qu'aucune mesure n'a été négligée pour amener
l'extinction de celte maladie. Nulle part les
soins de la médecine n'ont fait défaut aux po
pulations indigentes; des subsides ont été
accordés aux communes pauvres, tant par le
Gouvernement que par les provinces; les mem
bres des commissions médicales ont été délé
gués pour prescrire les soins hygiéniques et
médicaux jugés nécessaires; les médecins des
localités où l'épidémie a pris le plus d'extension,
ont été réunis pour se concerter sur le moyen
de traitement, et, enfin linspecleur du service
de santé civil a été chargé d'aller s'assurer de
l'exécution de toutes les mesures sanitaires or
données par l'administration supérieure.
La maladie est en décroissance dans la plu
part des communes.
Un des inconvénients des images daguer-
riennes était de ne pas reproduire les dégra
dations d'ombres. Tout y était noir ou éclairé,
les objets disparaissaient dans les demi-teintes,
ils manquaient de saillie dans les points lumi
neux. MM. Lefebvre et Foucault viennent heu
reusement de remédier cette imperfection.
XIV. la fuite. (Suite.)
Ln place était dangereuse Pierre s'empressa de la quitteret
reprenant la jeune fille entre ses bras, il s'engagea de nouveau dans
les profondeurs du souterrain. Désormais plus tranquille, il modéra
le pas et s'avança aveo précaution. Celte partie de la caverne lui
était peu connue il ne l'avait parcourue qu'une seule fois et pour
y chercher un asile contre une révolte qui avait mis ses jours en
danger. Aussi cherchait-il reconnaître les indices qui l'avaient
alors frappé, les mouvements du terrain la disposition des voûtes.
Il savait qu peu de distance de la casoade se trouvait placée une
issue qui débouchait sur un ravin. C'était là qu'il voulait aboutir.
Du reste le chemin offrait peu de difficultés il avait cessé de se
diriger vers les flancs de la montagne et semblait, au contraire,
tendre au sommet par une montée fort peu rapide. Cette circon
stance inquiéta le chef des bandits il n'avait rien remarqué de
semblable dans sa première exploration; quelques doutes commen
cèrent le gagner. Cependant il marcha encore pendant un quart-
ci heure dans la nie me direction et au sein des galeries de plus en
plus spacieuses. Ses souvenirs étaient tout-à-fait dépaysés; il comprit
qu'il s'était trompé de route et qu'il s'égarait de plus en plus. Il
s'arrêta.
Mademoiselle, dit-il d'une voix triste,j'ai trop compté sur mon
expérience des lieux je ne sais où nous sommes. Il vaut mieux re
tourner sur nos pas.
Ce danger était de ceux auxquels la pensée de Laure n'était pas
accoutumée et l'horrible perspective qui s'y attachait la frappa vi
vement
Égarés s'écria-t-elle nous sommes égarés Cherchons bien
monsieur cherchons
En même temps, elle se dégagea des bras qui l'enveloppaient, et
toucha de sa main les rochers dout elle était entourée.
Point d'imprudence poursuivit Pierre vous pourriez mettre
le pied dans quelque crevasse. Ne me quittez pas, je vous en prie.
La voix du chef des bandits avait quelque chose d'affectueux;
Laure y céda et se rapprocha de son guide.
Tenez la main appuyée sur inon épaule et suivez-moi, ajouta-
t-il en se remettant eu route.
Pierre jugea qu'en compagnie d'une jeune fille, il était imprudent
de pousser plus loin celte reconnaissance il préféra revenir sur ses
pas et chercher l'issue par laquelle il avait déjà pénétré. Le bruit
de la chute d'eau devait naturellement lui servir de guide et le ra
mener vers un point qui lui était familier. De là en poussant des
découvertes en divers sens il était impossible qu'il ne retrouvât
pas la direction qui devait les reconduire vers la lumière. Il exécuta
donc ce projet en procédant avec plus de soin qu'il ne l'avait fait et
en ne négligeant aucun des indices qui pouvaient lui servir se
reconnaître.
A mesure qu'il s'avançait ainsi doucement et prudemmentune
surprise plus grande s'emparait de lui. Il avait cru rebrousser che
min et s'était engagé dans une route nouvelle. Le terrain avait
changé de nature la roche n'offrait plus ni les mêmes configura
tions, ni les mêmes gisements. La voûte s'était abaissée et des suin
tements humides s'y faisaient sentir sous les doigts; l'eau même
dégouttait de loiu en loin. Ensuite pas le moindre bruit; rien qui
révélât l'approche de la cascade l'orientation mèuie présentait un
nouveau contraste; le chemin semblait par moment plonger sous le
sol et il fallait qne Laure s'appuyât fortement sur son guide pour
ne pas rouler le long de ces rampes glissantes t raidrs. Cri le suite
de mécomptes jetait Pierre daus un extrême étonnemeut et lui
cotisait quelque inquiétude. Une sorte de fatalitéfemblait peser sur
lui et le menacer alors qu il se croyait le plus près de sou salut. Se*
efforts mêmes semblaient lui créer des embarras nouveaux, et après