INTERIEUR. 6a ANNÉE. N8 577. DIMANCHE, 15 NOVEMBRE 1846. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Feuilleton. On «'abonne Ypkes, Marché au Beurre, 1et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre. Pour "Yprèsfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro0-25 LePro Tout ce qui conoemela rédac tion doit être adressé, franco, k l'éditeur du journal, Ypres. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine. PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. VIRES ACQUIRIT EUNDO. YPRES, le 14 lïorembre. On ne comprend rien l'acharnement avec lequel les journaux du radicalisme poursuivent les députés qui ont cru devoir se séparer de Y Alliance. Ce sont tous les jours des réproches d'ambition et d'envie de domination qu'on adresse ces hommes qui, en huit mois de temps, sont devenus le point de mire des injures des jeunes libérauxaprès avoir été encensés par eux au-delà de toute mesure. Quel changement s'est donc opéré dans les projets de quelques meneurs du radicalisme? Nous l'ignorons mais nous ne comprenons guère les qualifications d'ambitieux qu'on lance des hommes comme M. Devaux qui n'a jamais été que ministre d'état gratuitement, comme MM. RogierLebeau et De Brouckère, qui ont quitté le gouvernement d'Anvers, de Namur et de Liège, pour rester fidèles leur opinion comme M. Verhaegen qui n'a jamais eu la moindre velléité d'accepter une fonction quel conque. Les autres députés sont des hommes nouveaux qui ont fait preuve de consistance politique, et qui ne paraissent pas vouloir trahir l'opinion qui a placé en eux sa confiance. Que veulent donc MM. les jeunes 9 Démolir des réputations et dénigrer des hommes qui ont rendu par leur persévérance combattre les empiétements du clergé, les services les plus signalésà la nation. Eux sont jeunes, disent-ils, et ils qualifient dédaigneusement du titre de vieux, ceux qui ne sont pas en admiration de vant la spirale indéfinie du progrès et autres utopies ejusdem farince. En outre, nous n'ai mons guère les auxiliaires du libéralisme, car ils l'étaient autrefoisqui ont une petite ban nière eux en poche et dont ils font un usage très-discret. Si MM. les radicaux veulent pou voir mettre leurs principes en œuvre, ce ne seront pas MM. les théocrates qui leur en don neront le loisir. Une ligne de conduite leur était tracée, c'était de combattre d'accord avec le libéralisme constitutionnel aussi longtemps que la domination du clergé pesait sur la Bel gique, car enfin le libéralisme est moins éloigné de leurs idées, que la théocratie. Mais l'impa tience a saisi quelque radicaux et la mauvaise queue du libéralisme de 1830 qui a livré, par légèreté et irréflexion, la nation pieds et poings liés en pâture au clergé, s'est réveillée et, aplatis sous la domination cléricale, ils en sont encore crier Liberté en tout et pour tous. Aucune institution ne se trouve en butte autant d'intrigues sourdes, que le collège com munal de la ville d'Y pies. On dirait que les ennemis de la véritable instruction ne sont ja mais épuisés d'inventions calomnieuses ou dé nigrantes l'endroit de cet établissement. Les succès les plus patents des élèves qui se desti nent des carrières diverses, ne peuvent pas même arrêter ce débordement de fiel et de colère. Et pourquoi parce que le haut clergé n'a pas s'en occuper et qu'il aime bien di riger l'enseignement sa guise, non-seulement dans ses collèges luimais dans ceux où il ne devrait avoir accès que pour exercer les fonc tions de son ministère. C'est ainsi que calomnié d'un côté, nous nous plaisons de l'autre faire connaître nos con citoyens les progrès des études dans l'établisse ment communal d'instruction secondaire. Le rapport général sur le concours de l'enseigne ment a été publié dans le Moniteur. Dans une suite de tableauxpar lesquels la force des collèges peut se présumer d'après la moyenne des points obtenus pour'fous les élèves^l insti- tution de la ville d'Ypres occupe le troisième rang dans la classification de la rhétorique, M. Gustave Van Alleynnes ayant obtenu trois cent dix points. Les athénées de Namur et de Gand précèdent seulement le collège d'Ypres. Eu ma thématiques, il n'y a pas eu de composition. M. Gustave Van Alleynnes qui était appelé com poser, n'ayant pu pour cause de santé, prendre part cette lutte. La classification de la cinquième est tout aussi satisfaisante; elle occupe le onzième rang et précède les athénées de Gand, Bruges, Namur et le collège de Mons. Le rang que la classifi cation générale donne au collège d'Ypres est le treizième, malgré la perle des points qu'on devait faire entrer en ligne de compte pour la composition de mathématiques qui u'a pas eu lieu. Ce résultat doit augmenter la confiance des pères de famille et les convaincre davantage que le corps professoral de cette institution est entièrement la hauteur de sa mission. Les chiffres que nous avons qité prouvent, qu'en moyenne, nos élèves sont aussi instruits que ceux d'établissements qui ont plus de réputa tion, et qu'on peut trouver ici une instruction aussi solide et aussi bonne que dans aucun autre collège du pays. DE L'EXTINCTION DU PAUPERISME, PAR F. P.j MEMBRE DU CONSEIL PROVINCIAL DE LA FLANDRE OCCIDENTALE. Tous les publicisles, tous les philanthropes, sont l'œuvre pour trouver un remède la plaie du paupérisme qui ronge les Flandres. rDe toute part, on émet des avis, on imprime des brochures; les journaux du clergé, croyant distraire l'attention de l'opinion publique des faits et gestes du parti clérical, ont inventé la ligue contre le paupérisme. Elle a eu peu de succès parce que ce n'est pas d'une ligue clé- rico-libérale qu'il fallait at'endre une mesure capable d'empêcher le développement de cette plaie hideuse qui démoralise nos populatious. Ce qu'il y a d'étonnant parmi les écrivains qui ont traité ce sujetc'est que tous veulent ua remède immédiat ce fléau, qui n'est que la conséquence de l'inintelligence des ministères catholiques qui se sont succédé, et de la mau vaise direction qu'a donnée le gouvernement aux tentatives faites pour modifier le régime industriel dans les*Flandres, sans faire atten tion qu'il a fallu des années pour que celle calamité qui tous les ans gagnait du terraiu parvint ne plus être qualifiée d'invention anti-ministérielle et qu'elle frappât l'attention des ministres éblouis par la prospérité crois sante du pays. Mais le mal aujourd'hui est patent, évident, et malgré qu'on en ait, le pouvoir doit s'en oc cuper autrement qu'en donnant des aumônes. Beaucoup de projets ont été mis en avant les travaux publics, les défrichements ont été pro posés, mais ce ne sont là encore que des pal liatifs et ce dernier moyen est long et dispen dieux. Quelques-uns et Mr F. P. est de ce nombre, veulent un remède héroïque et de mandent la colonisation sur une vaste échelle. Celle manière de voir en elle-même estjusle, mais les difficultés ne se présentent en foule, que quand on arrive au mode d'exécution. La colonisation est certes un moyen effi cace de combattre le paupérisme amené par PmiRIRIi U®UT®M. XYIII. A DEUX DE JEU. Le lendemain dans le cours de la matinée Pierre ne quitta pas le pavillon qu'il occupait» 11 lui était facile d'y demeurer seul et l'abri de l'espionnage. A la suite d'arrangements qu'il avait pris Zéphyr devait pourvoir tout son service et déjà ce fidèle compa gnon s'était mis la besogne, brossant les habits, nettoyant les chaussures, introduisant dans cette partie assez négligée de la maison j un peu d'ordre et de propreté. On ne s'attendait aucune visite et Pierre étendu sur un sopha réfléchissait sa situation nouvelle quand on frappa sa porte. Il s'empressa d'aller ouvrir. C'était le commissaire extraordinaire, non tel qu'on a pu le voir la veille dans uu costume sévère et administratifmais dans un habit de cheval comme en portaient les merveilleux de l'époque bottes la Souwaroff, culottes de daim grandes rosettes, veste de chasse boulons d'argentcravate blanche dont les pointes mena çaient le cielcol empesé qui semblait servir de support aux deux oreilles, cheveux la Caracalla bagues tous les doigts, cravache éperons et autres accessoires. Cette toilette était rehaussée par un jabot qu'éclairait de ses teux un magnifique solitaire. En somme c'était un éblouissant cavalier rasé de frais et couvert du plus beau linge. Ce négligé avait du lui coûter deux heures de travail.. Il entra dans le pavillon avec la majesté d'un homme pénétré de ses avantages et habitué produire un certain effet. Pierre ne lui donua pas cette satisfaction,et l'accueillit avec une politesse froide. Zéphyr, au contraire fut fasciné cette épingle en brillants plantée en pleine poitrine, semblait lui causer une émotion extraordinaire. C'est bien M. le capitaine Maxime Grandval que j'ai l'hon neur de parler? dit en entrant le commissaire extraordinaire. A lui-même, monsieur, que peut-il pour votre service Ici, entre Ces deux hommes, se passa uu mouvement de panto mime qui se prolongea pendant quelques secondes. Par un geste Pierre invitait le comte Gabriel s'asseoir, tandis que celui-ci cher chait faire comprendre Pierre qué la présence d'un tiers était de trop dans cette entrevue. Le prétendu capitaine Maxime comprit le premier ce jeu muet. Ne faites pas attention monsieur, dil-il au comte, ce garçon est tout son affaire: il m'est d'ailleurs très-dévoué. Vous pouvez parler librement. Zéphyr remercia son capitaine par un regard et profita de l'occa sion pour admirer encore l'étincelante épingle puis il se Ternit au travail comme un homme indifférent ce qui se passe autour de lui. Je vous l'ai dit monsieurajouta Pierre, o'est un garçon sans conséqueuce expliquez-vous, je vous écoute. Le comte Gabriel parut coutrarié de cette circonstance et ne s'assit qu'avec uue mauvaise humeur évidente. Cependant après aveir raffermi ses lunettes, il prit la parole Puisqu'il en est aiusi. capitaine, j'entrerai en matière. Je ne sais si l'on vous a appris quelles fonctions je suis venu remplir auprès de leurs altesses impériales. Mais piousieur ibme semble qu'elles sautent aux oreilles, vos fonctions. Vous y mettez assez de zèle Le souvenir que venait de rappeler Pierre n'était pas de ceux qui pouvaient flatter l'amour propre du visiteur. Aussi un peu de dépit se laissa—t-il voir sur sa physionomie. L'état de l'âme se trahit même par l'agitation des lunettes j mais le comte Gabriel maîtrisa ce mouvement. -s Capitaine dit-il ayee gravité j vous êtes un homme d'épée j c'est au militaire que je viens de parler au nom de S. M. l'empereur et roi. Hier nous étions nos plaisirs aujourd'hui nous sommes nos devoirs. Ces paroles contrastaient avec le costume de matin du visiteur et Pierre le lui fit sentir en l'examinant de la tète aux pieds. De son côté, Zéphyr, tout en continuant frotter le meuble, épousseler ranger et là les objets épars, ne pouvaitse défen Ire de reporter les yeux vers la poitrine du comte et se livrait uu monologue opiniâtre Diable d'escarboucle se disait-il j pas moyen de l'éviter ça vous crève les yeux. Cependant Pierre avait trop d'intérêt oe que le comte s'expli quât pour pousser les ohoses au-delà d'une juste mesure. Il répondit presque sur le champ Puisqu'il sagit d'affaires de service monsieur je suis vos ordres, et je tâcherai d'y apporter tout l'intérêt qu'elles méritent. Eh bien I capitaine, vous saurez donc, poursuivit le comte que je suis ici eu mission extraordinaire. C'est le ministre de la police qui m'envoie. Le ministre de la police répondit Pierre devenu plus attentif. Lui-même Il veut purger le pays d'uu chenapan qui fait des sienues d'un drôle qui infeste les grands chemins d'un nommé Pierre Mouton... Ah Pierre Mouton, dit le faux capitaine Maxime. En même temps il échaugea un sigue rapide avec Zéphyr, qui Venait de heurter brusquement uu guéridon. Vous le connaissez donc lui demanda le comte Gabriel. Pierre Mouton? repliqua-t-il. Qui neconnait pasi'ierre Mouton dans le département du ar Uu fieffé coquiu n'est-ce pas Une barbe noire des yeux de travers grêlé affreux comme tous les scéletats.

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