JEUDI, 28 JANVIER 1847.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRÏEDR.
0e AKKÉE. - N* 598.
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TIRES ACQUIR1T EUNDO.
TPRRS, le 27 Janvier.
Le ministère a choisi le meilleur moyen d'é
chapper un échec Bruxelles; il a jtifté
opportun de ne pas établir de lutte. On a bien
tâté le terrain, et sous main, on a jeté en avant
le nom de M. Wyns de Raucourt, bourgmestre
de Bruxelles, mais ce n'est que sous le manteau
qu'on a colporté cette candidature. Les électeurs
de la capitale sont rompus la tactique et la
ruse et l'astuce cléricales, ils opposent la fran
chise et proclament haute voix le candidat de
leur choix.
M. Dindal, avocat, membre de la députalion
permanente, a été élu sénateur. Sur 4216 élec
teurs inscrits, 1097 se sont présentés pour dé
poser leur bulletin. M. Dindal a obtenu 979
suffi âges et M. Wyns, le bourgmestre de Brux
elles qui paraît ne pas avoir été franc de collier
dans cette occurrence, n'en a recueilli que 98.
Ainsi, il est démontré que de l'aveu du mi
nistère lui-même, on reconnail l'inanité de la
lutte contre l'opiniou libérale dans l'arrondis
sement électoral de Bruxelles. Le parti clérical
s'avoue lellement impuissant dans la capitale,
qu il ne lui est même plus possible de trouver
des candidats de sa couleur qui veulent courir
les chances, lel point ses idées et projets
paraissent soulever la répulsion des électeurs
indépendants.
Quand on a reproché au parti jésuitique d'être
condamné par les villes les plus populeuses et
les plus éclairées et de ne se maintenir qu'à
l aide de la prépondérance de l'élément campa
gnard dans les arrondissements qui ont pour
chef-lieu une ville de second ordre, on s'est con
tenté de répondre qu'en France, il en était de
même. Mais en France, Paris, le ministère
lutte il trouve un candidat honorable qui se
mesure avec le membre de l'opposition sur le
terrain électoral. Mais dans la capitale de la
Belgique, nos six-Malou doivent le fuir et si pat-
hasard ils font choix d'un candidat, soyez sûr
que c'est un transfuge du camp libéral qu'ils
adoptent.
Ne serait-ce pas qu'à l'exception de quelques
individus imbus de préjugés d'un autre siècle,
aucun homme qui se respecte ne veut s'abaisser
jusqu'à jeter le pouvoir civil comme une proie
l'ambition épiscopaleque tout homme de
simple bon sens sent la nécessité de maintenir
le clergé dans une sphère qu'il a abandonnée
depuis longtemps pour jouer un rôle odieux
dans les comices électoraux etque la prospérité
de la religion catholique exige qu'on mette des
bornes celte intrusion du prêtrp dans le
domaine politique. En France, le candidat qui
oserait proclamer des principes contraires
ceux que nous croyons devoir être suivis, serait
hué et jamais le parti qui adoplcraitnne bannière
semblable celle de notre parti-prêtre ne par
viendrait se constituer.M. de Montalembert a
voulu faire intervenir les-électeurs catholiques
dans la lutte électorale, mais nulle part, ses
prédications et sa coterie des fils des croisés n'ont
exercé la moindre influence sur le résultat du
scrutin. Nous le répétons, en France, on ne
trouverait pas de candidat qui voudrait assu
mer la défense du système jésuitique que le
ministère doit mettre en pratique sous les aus
pices de l'épiscopat. La voie dans laquelle on
veut nous entraîner est lellement impopulaire
et anli-consliltilionne leque dans quelque
temps, en Belgique ipêmepersonne n'osera
plus se déclarer hautement partisan de la do
mination cléricale.
.1 J ttirx) OL_»
Nous avons parlé dans un des derniers
numéros <le notre jsrfirnald'une tentative
d'assassinat commise sur la nommée Nathalie
Lewylliefermière au hameau de Cruys-Eecke,
territoire de la commune de Wervicq. D'après
le bruit public et les déclarations de celle qui
se prétendait victime de ce méfait, un vol d'une
certaine somme d'argent et d'un billet de ban
que de 300 francs aurait eu lieu. Des individus
même ont été arrêtés Courlray et confrontés
avec la fermière Leioylliequi a déclaré ne pas
avoir l'entière conviction que ce fussent eux qui
eussent commis le crime.
Eh! bien, tout cela n'était qu'une fable, et
la justice a été sur le point délie mystifiée.
Heureusement qu'on est parvenu temps dé
couvrir la ruse ourdie par la soi-disant Lewyl
liequi n'est autre que intrigante Virginie
Callens, dont les journaux et la cour d'assises
de Gand se sont déjà occupés.
Nos lecteurs se rappelleront que dans le jour
nal du 3 décembre 1843, n°271, nous avons,
l'occasion d'un vol domestique commis par un
individu au préjudice de M. Smits,de Gand, fait
l'historique de la vie et des faits et gestes de
Virginie Callens, qui, était déjà signalée Oost-.
vleteren, par des coquineries sans nom.
Rappelons brièvement que celte femme
épouse d'un nommé Pierre Clinckemailliele
suivait comme aide-paveur, et que sur la route
de Furnes, habillée en homme, Virginie Callens
aborda le curé de la commune d'Oostvleteren
en prétendant qu'elle n'était pas baptisée. Elle
se donna le nom de François Lepetin et déclara
être née dans un village près de Rome.
Le curé prit en amitié cc$e qu'il croyait être
un jeune homme malheureux et abandonné de
ses parents, il l'instruisit dans la religion chré
tienne, le protégea, et François Lepetin passa
six ans environ dans ce village bien choyé, bien
nourri, s'avisant même un jour de s'amoura
cher d'une jeune fille qu'il promettait d'épou
ser. Mais la demande des papiers nécessaires
l'accomplissement de cet acte au prétendu vil
lage près de Rome faillit amener des décou
vertes qui firent abandonner les intentions de
mariage celui qu'on appelait Sisje van den
pastoor.
Un habitant d'Oostvleteren, en relation d'af
faires avec M. Smits, de Gand, lui recommanda
François Lepetin en qualité de domestique; un
vol de 3,000 francs fut commis en l'absence
des maîtres et avec effraction d'un coffre. La jus
tice ne put fixer ses soupçons desuile sur le
domestique venu d'Oostvleteren, cl enlretemps
Lepetin ou Virginie Callens échappa aux attein
tes de la police, en s'enfuyant en Hollande.
Nous ignorons la suite de ses pérégrinations,
lorsque la justice, dont lesdoutess'étaient éveil
lées par les noms singuliers et inconnus de la
fermière soi-disant assassinée, fit des perquisi
tions très-sévères et découvrit une lettre qui mit
l'autorité judiciaire sur la voie. Lundi dernier,
le juge d'instruction et le procureur du roi se
sont rendus pour la troisième fois sur les
lieux, accompagnés du garde du jardin public,
Leboucq. En apercevant la fermière Lewyllie,
ce dernier a affirmé son identité avec Virginie
Callens qui a été ramenée Ypres et écrouée en
la prison d'arrêt de cette ville.
L'histoire du vol et de l'assassinat, forgés par
celle femme, devait avoir pour résultat de la
débarrasser pour un certain temps des poursui-
Fcuillctoii.
UK1 ROMAN ©AKIS LU ©ÊSHIRT.
m.
La discussion sur le chemin suivre était, entre nos deux guides,
âpre, colère sauvage. Les yeux d'Akber étiuoelaient cependant
1 Abyssin parlait d un ton grave tt solennel il accusait Yousef de
vouloir nous égarer. Yousef s'irritait il iuvoquait Allah il acca
blait Akber de reproches il disait qu'Akber voulait nous conduire
l oasis de la Désolation misérable refuge de Bédouins qui pillent
les caravanes du désert.
La situation était embarrassante deux chemins, deux guides
deux avis; il fallait deviner il fallait choisir. L'un de nos deux
guides avait certainement des intentions de trahison; lequel?...
J'étais porté en faveur d'Akber le capitaine Breton appuyait
Yousef.
Du reste l'endroit où nous étions arrêtés la bifurcation des
deux chemins formait au milieu des sables une sorte de petite
oasis. Les buissons de gommiers y étaient touffus deux palmiers
s'élevaient au bord d'une citerne abondante; des dattiers, brûlés par
U Simoun, dressaient, et là, leurs tiges dépouillées de feuillages
»ce«, trêle», «xcoriés, ils ressemblaient effectivement de« hampes
de javelot Djerrid), nom qui leur est donné par les pèlerins arabes.
Nos chevaux s'étaient instinctivement approchés de la citerne
bien qu'aucun ne parût tourmenté de la soif cépendant il s'élevait
de cette citerne une douce fraîcheur en outre les deux palmiers
plantés sur sou bord fournissaient un peu d'ombre. Le désert était
calme, le ciel pur, la solitude silencieuse. Le soleil réfléchissait sur
les sables ses larmes ardentes. Toutefois, la chaleur n'était pas en
core ce que bientôt elle devint un souffle de brise nous arrivait des
plaines cultivées.
Nous formions donc, réunis autour de la oiterne, un groupe com
pacte. Nous discutions le chemin suivre véritablement inquiets»
Nos yeux se perdaient sur l'immense surface blanche du désert
de hautes tiges isolées se dressaient de loin en loin inutiles jalons
de routes inconnues.., Gilbrac, imperturbable dans sa gaîté avait
rapproché son âue du dromadaire de Jenny. Jenny caressait le
singe aux yeux rouges et s'amusait des espiègleries du méchant
animal, des hardiesses euphoniques de Gilbraillc. Le baudet, victime
douloureuse disputait vainement ses oreilles contre les ongles du
petit singe; et il écorchait les nôtres sans pitié de sa voix rauque et
formidable. Gilbrao et Jenny riaient follement de.s contorsions du
pauvre Gilbraille des grimaces de son bourreau. Evelin et Fabre,
plus sérieux, écoutaient la discussio-n.
Sous l'animation ardente des apostrophes qu'il adressait Yousef,
Akber s'excitait de moment en moment, sou noir visage prenait un
fond de teinte rouge (t), la flamme jaillante de ses yeux on eût
dit un masque de bronze chauffé la fournaise. Le visage de Jousef
était blême, oonvulsif, altéré.
Nous les écoutions attentivement.
Cependant le capitaine Breton interrompit Akber, il dit
-« PourquoiAkber, accusez-vous Yousef de vouloir nous égarer,
nous perdre dans les sables? En admettant que cette route qu'il
indique ne soit pas la véritable, qu'elle nous éloigne de l'oasis de la
rivière d'Or ne pouvez-vous supposer que Yousef se trompe sim
plement Pourquoi songerait-il nous trahir Nous n'avons eu
jusqu'ici qu'à nous louer de son dévoûment et du vôtre.
L'Abyssin se tourna vers Breton, et, plus calme, il répondit
Le soleil est brûlantAllah est juste A travers les monts les
plaines et les rivières, le serpent suit tout bas la gazelle qui marche,
qui marche et court devant lui. Il fait les détours qu'elle fait il la
suit jour et nuit sur ses pas. Il rampe inaperçu, il la pousse en avant,
il l'isole... Puis un soir, dans un lieu solitaire, il l'enlace tout coup,
la souille de sa bave et la devore... Pourquoi le serpent ne songe-
t-il pas attaquer de front la gazelle parce qu'il est serpent. Le
soleil est brûlantAllah est juste Le serpent aime la gazelle
(1) Il est superffu de faire observer qus la rougeur et La pâleur
sont sensibles, méine chez les nègres.