INTÉRIEUR.
6e ANNÉE
JEUDI, 25 FEVRIER 1847-
JOURNAL D'Y PRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Feuilleton.
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VIRES ACQUIRIT ECNDO.
YPRES, le Février.
Les feuilles cléricalessouvent bout d'im
putations calomnieuses, l'endroit du libéra
lisme, ressassent toujours dans leurs colonnes
le même reproche, celui d'ambition. Selon elles,
ce n'est que par le désir immodéré de posséder
le pouvoir que le parti libéral est guidé dans
ses attaques contre le haut clergé et le ministère
qui ne font qu'un. Égoïste et rongéde haine et
d'envie, le parti rétrograde trouve plaisant de
jeter la face de son adversaire, l'imputation
des vices qui ont toujours été son apanage. Et
cependant ces attaques sans cesse répétées au
confessionnal, en chaire et dans les feuilles clé
ricales, ne laissent pas que de trouver des
personnes qui ajoutent foi aux assertions inté
ressées des ennemis du parti libéral.
Cependant, croit-on de bonne foi que la di
rection du gouvernement pour un parti soit
dans les circonstances actuelles, chose bien
enviable! Que voyons-nous? Un pouvoir mé
prisé, en dessous de la position critique que le
défaut de prévoyance a préparé la Belgique,
une misère qui décime des populations naguè-
res au comble de la prospérité, fruit de la mau
vaise direction imprimée l'activité commer-
tiaîc et intl«otnollo p- Et, j..M 1~ 1 -
de malheur, la tête des affaires, des hommes
qui semblent avoir perdu le sens moral, même
dans les questions les plus simples et les moins
difficiles. Les finances, quoiqu'on en dise, se
trouvent en désarroi et l'horison financier n'est
rien moins que brillant; les charges publiques
sont écrasantes et elles ne suffisent pas cou
vrir les dépenses. Chaque année la dette flot-
tantes'accroit,et quand elle est augmentée hors
de proportion avec le budget, on la convertit
en dette consolidée. Une partie de la nation se
trouve sans ouvrage, et par conséquent con
somme sans produire, la condition la plus
efficace pour accélérer la ruine d'un pays, Et
c'est dans un moment de détresse inouie, une
époque calamiteuseque le parti libéral ne
combattrait que pour la possession du pouvoir,
au dire des feuilles cléricales On le voit du
reste, jamais idée généreuse n'a inspiré le parti-
prêtre et il lui serait difficile de croire que
d'autres pourraient être guidés par des mobi
les plus désintéressés.
Le parli, qui depuis quinze ans a présidé aux
destinées de la Belgique, a beau se retourner
de toutes les façons, il ne peut échapper la
responsabilité que la situation actuelle du pays
fait peser sur lui. (1 ne peut repousser ce fait
écrasant, que pendant quiize ans, maître absolu
en Belgique, il est parveiu laisser diminuer
graduellement sa prospénté, au point que les
décès y dépassent les naisances. Cependant les
avertissements ne lui ont vas manqué, le parti
libéral a prédit ce qui devait arriver. Mais on
trouvait moyen d'aveugleï les populations. Les
prophéties des feuilles libérales n'étaient que les
effets de l'envie de ne pas voir leurs patrons au
pouvoir. Seulement les prophéties de malheur,
comme les qualifiaient les organes du clergé et
M. J. Malou, sont tombées dans le domaine de la
réalité maintenant, et nos concitoyens peuvent
s'apercevoir aujourd'hui, quel est le parli qui
fait preuve de plus de prévoyance.
Il est un fait que nous déplorerions amère
ment, ce serait de voir le pouvoir tomber aux
maius du libéralisme sous des conditions telles
que nos adversaires pourraient entraver ou dis
créditer les mesures, qu'on prendrait pour re
médiera la détresse des Flandres. Et cependant
nous devons nous y attendre. L'abîme que le
parti théocralique a mis quinze ans creuser,
du moment que le parti libéral tiendra le li
mon des affaires, devra être comblé desuite et
les traces des maux, qui ont affligé le pays de
vront disparaître inslantaB""*""V "7" Y ~l'
^.r sur tous les tous le
libéralisme d'impuissance. Avec une mauvaise
foi qui ne peut être comparée qu'à son égoisme,
il emplovera son influence non-seulement poli
tique mais religieuse faire avorter les pro
jets d'un ministère libéral et en dernier analyse
il croira avoir remporté un triomphe sublime s'il
empêche ses successeurs au pouvoir, d'introduire
desmesuresqui pourraientaméliorer la situation
du pays.
Telles sont pour le moment les tendances du
parti dominant. Rendre l'exercice du pouvoir
difficile, sinon périlleux des successeurs, c'est
une politique qu'on dirait exhumée des luttes
du moyen-âge et qui ne peut sourire qu'au parti
qui n'a pas d'intérêt voir le pays prospère, ni
lui créer une situation matérielle heureuse.
Qu'importe au parti clérical composé d'éléments
qui, par leur caractère et leur éducation, sont
devenus cosmopolites et ne recherchent que la
prédominance de 1 influence religieuse, que la
Belgique soit prospère, pourvu qu'elle subisse
le joug que le haut clergé lui a préparé par la
révolution faite au nom de la liberté en tout et
pour tous.
Une erreur s'est glissée dans la mention de
la date de l'arrêt de la Cour royale de Poitiers,
cité dans le compte-rendu de la séance du con
seil communal, au 21 avril 1831. C'est le 27
avril 1831, qu'il faut lire.
IXWMi
LE LIBÉRAL MODÉRÉ, D'A PRÈS LE MESSAGER.
Le titre ou le sobriquet de clérical commence
être mal porté, M. de Mérode a dit ses ad
versaires ùlérical vous-mêmes. Dans celte
position, comment concilier le plaisir et la di
gnité, la considération d'Agnès et la liberté de
Frétillon? par un mot on est libéral modéré,
et tellement modéré qu'on ne prononce jamais
un non hydrophobe contre le ministère et ses
appointements, contre l'archevêque et sa pro
tection.
Outre l'honneur suave, ce double masque est
une figure de Janus politique, tourné la fois
vers le catholicisme et le libéralisme. Si le libé
ralisme arrive, on est un catholique si modéré,
qu'on craindrait d'être partial en sa faveur
aussi se garde-t-on bien de l'appuyer; si c'est
le catholicisme, même rôle en sens inverse. On
sert M. de Theux pour lui arracher des mesu
res libérales; on sert M. Rogier pour lui arra
cher des libertés catholiques. Seulement, on
dira, selon la couleur des appointements, un
oui systématique pour M. Rogier, ou le même
r - ir M rln Tlaniir
Le libéral modéré est l'élément condfWunîî^t
d'un ministère Nolhomb, d'un ministère mixte.
Dans la chambre, il est l'appoint de la majorité
catholique; dans le ministère, il est l'enseigne
indispensable. Ce qui n'empêche pas dans les
lois de monopole clérical de l'enseignement
dans toutes les lois ullrà-calholiques, ces libé
raux de se rallier avec leurs confrèrescontre
les institutions libérales.
ir~n n a u b—
Dans toutes les communes où jadis l'indus
trie linière répandait l'aisance, la mortalité est
devenue effrayante. A Hulsle, sur une popula
tion de 2,500 âmesil y a eu l'an dernier
118 décès. Depuis le 1er janvier il y en a déjà
49, et les trois quarts sont des pauvres et des
ouvriers accablés par le besoin. Il n'y règne
aucune maladie épidémique.
Bruxelles, 22 Février.
extraordinaire est arrivé avant-
avec des dépêches pour le roi
réception de ces dépèches, d'au-
ont été expédiés Paris et
assure, en outre, qu'un nouveau
Paris est devenu nécessaire,
aujourd'hui.
Un courrier
hier de Paris
par suite de la
1res courriers
Londres, et on
voyage du roi
S. M. partirait
QM ROMAN ©Mas LIE
[Suite.)—VIII,
Le capitaine Breton avait mis son cheval au galop. Evelin che
vauchait sa droite, Gilbrac sur Giibraille sa gauche; je le suivais
avec Fabre et tantôt galopais de front sur la même ligne que lui j
Akber nous précédait.
La scène émouvante des lugubres préoccupations du pauvre Gil
nous avait profondément pénétrés. Notre course était rapide ar
dente, silencieuse. Le capitaine éperonnait son cheval Gilbrao dé
chirait les flancs de son âne; l'impétueux Evelin, l'œil fixe, pâle, les
membres raidis précipitait convulsivement le pas de sa monture
un nuage de poudre s'élevait autour de nous; nous courions, lancés
dans le désert, de toute la vitesse de 110s chevaux...
Les sables déroulaient devant nous d'instant en instant plus arides,
plus échauffés, plus vastes. Lesoleil nous pénétrait douloureusement,
ses rayons éclatants, reflétés par la blancheur des plaines, nous brû
laient les yeux. L'air chargé de poussière calciuée acre irritait la
gorge et nous sufloquait. Nos vêtements étaient trempés de sueur,
nos chevaux blancs d'écume. Nous courions inatleutifs muets
réfléchis.
Des buissons de gommiers des nopals des dattiers dépouillés
apparaissaient encore et là sur l'immense surface blauolie du
désert. Toutefois pas un soufle de vent n'arrivait nous pas un
bruit ne se faisait entendre. Le sible fléchissait sous le pas des
chevaux. Tout, autour de nous, était mort, dévasté, pesant.
Mais Jenny Jeuuy Nous pourmivions l'indigne ravisseur de
Jenny, l'impatience de noire inquiétude, dans cette première course
haletante, nous emportait aveuglément.
La peur des panthère? avait secoué le sang de nos chevaux et du
pauvre Giibraille. Les malheureuses bêles, bien que brisées de fati
gue, se précipitaient, sous le coup le cette épouvante, hors d'haleine,
en avant.
Nous passions, rapides comme tne troupe de zèbres, lancés 6ur les
traces du perfide Yousef. Déjà, inus avions laissé loin derrière nous
la grotte de la panthère.
Nous courions confiants dan? Akber la haine qu'il portait
Yousef nous assurait de sa fidélit». Aucun chemin, aucun tracé, du
reste ne nous guidait nous remontrions seulement d'intervalle erf
intervalle des monceaux de cailluix puis des citernes taries et des
herbes desséchées.
Des troupeaux de lièvres, des guelles des buffles des autruches
traversaient de temps autre la direction que nous suivions sou
dains comme l'éclair, et se perdàent l'horizon.
Pas uu motpas un murmure pas un crin'était entendu; nous
gardious tous le silence, repliés, pensifs.
Cependant Evelin paraissait vivemeut excité ses yeux ardents
tantôt fixes tantôt d'une mobilité couvulsive avaient des regards
étranges la sueur coulait de son front pâlises lèvres blêmes gre-
lottaieut comme sous l'action d'un froid polaire, des frissonnements
nerveux agitaient ses membres.
Evelin avait passé près de Jenny ses jeunes années; il l'aimait, et
cet amour profondément enraciné n'avait jamais entrevu d'obstacle,
n'avait jamais été contrarié. La rivalité de Fabre au cœur de la
jeune fille n inquiétait pas Evelin. Fabre était grave plein de ré
serve et de réflexion il entreprenait peu et se tenait toujours avec
une extrême discrétion près de Jenny; Evelin au contraire expausif,
passionné, dominait la jeune fille. Il croyait avoir conquis son amour,
et l'aimait véritablement de toute la fougue de son sang généreux.
Cet enlèvement de Jenny parce misérable Yousef le bouleversait;
toutefois nous étions loin d'attendre le malheur qui devait bientôt
nous frapper de sou côté.
Le capitaine Breton était triste réfléchi; des frémissements agi
taient ses lèvres; il poussait sou cheval par saccade avec impatience;
sa noble et belle figure était douloureusement altérée.
Le pauvre Gilbrac coiffé de sou bizarre turban, galopait sur Gii
braille son côté, sérieux, morne, grave; des nuages passaient dans
ses yeux. Il ne disait plus rien ses rires, ses chansons, sa folle joie,
Yousef, ayee Jenny, avait tout emporté.