INTÉRIEUR. JEUDI, 15 JUILLET 1847. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. COUP D'OEIL SUR YPRES, Feuilleton. LIS BEUX «MMGUâlMYÉ. 7° MU. - N° 646. On s'abonne Ypres, Marché an Beurre, 1et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimeitre. Pour Ypresfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro0-25 Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adresséfrancot l'éditeur du journal, Y prêt. Le Progrès parait le Dimaii* che et le Jeudi de chaque semaine* PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. 1PKES, le 14 Juillet. VIRES ACQUIRIT ECNDO. A L'OCCASION DE LA DIRECTION ÉVENTUELLE DO CHEMIN DE FER VERS CETTE VILLE. Le vent de l'adversité s'étend depuis près de deux siècles sur Ypres, son souffle malfaisant portera cette ville son dernier coup mortel si, comme on le prétend, elle se voit réduite d'établir extra mur os, la station de son chenriin de fer. Lorsqu'on réfléchit tout ce qui s'est passé pendant la période qui s'est écoulée depuis 1678 jusqu'à ce jour, on demeure convaincu qu'à cha que phase d'événement, notre cité a été victime de la fatalité ou de l'injustice. D'après le traité deINimèguedeladiteannéel678, la villed'Ypres passa titre de conquête sous la domination française: et perdant ses droits et privilèges, elle subit les conséquences de l'asservissement Louis XIV jusqu'en 1713, époque du traité d'Utrecht, par lequel la Hollande stipulant pour l'Autriche, contraignit ce monarque re mettre la ville d'Ypres sous la puissance Autri chienne. Après trente cinq années de conquête, l'Càliluéo h la D Ig - - •- flatter, d'après les principes d'équité et de jus tice, qu'elle allait rentrer dans les droits dont elle avait joui anciennement comme les autres provinces du même État; mais l'Autriche, par un procédé difficile concevoir, traita en ma- ràlre, ses anciens enfants remis dans le girorl de sa souveraineté. Les habitants du pays ré trocédéscontrairement aux formalités des lois fondamentales suivies dans les autres provinces, furent obligés de prêter par l'organe des mem bres de ses étals, serment de fidélité au prince, sans que le prince de son côté prêtât le serment de maintenir les droits du peuple. Selon les pri vilèges du pays, les peuples ne pouvaient être chargés d'impôts sans le consentement de ses états provinciaux. Et cependant Sa Majesté autrichienne chargea, de sa seule autorité, le peuple d'impôts. L'Autriche gouverna sur ce pied jusqu'à l'invasion française de 1794. Alors la ville d'Ypres, après avoir vu ses environs ra vagés, ses faubourgs incendiés, subit uu long bombardement par lequel une partie de ses maisons et édifices furent livrés aux flammes, et une partie de ses habitants périrent par les bombes, et par l'épidémie qui commença pen dant, et dura encore longtemps après le bom bardement. Je ne parle pas de ce que la ville eut souffrir au moment de sa soumission aux armées de la république. Je garde le silence au sujet des taxes de guerre imposées par les représen tants du peuple français, desquelles l'exorbi- tance, bien que s'élevant jusqu'au ridicule n'empêcha pas l'incarcération de nos plus ho norables concitoyens, dans les réduits infects de la citadelle de Lille afin de les contraindre ail paiement de Cet impôt aussi démesuré qu'ar bitraire. Je me bornerai signaler que par une fatalité inconcevable qui dura aussi longtemps que la domination française, Ypres supporta sa part de la surcharge de contributions que le département de la Lys eût supporter au profit des autres départements réunis la France. Et chose non moins criante, c'est que par une erreur inexplicable et qui ne fut jamais re dressée malgré les réclamations, le tribunal d Ypres fut placé dans une classe inférieure celle laquelle elle avait droit suivant sa popu lation et los traitements de ses magistrats furent constamment limités aux taux de ceux -I11P - a Ces atteintes aux principes immuables de l'équité, aux règles positives de la justice dis— Iribulive ont cessé maintenant; mais la ville d'Ypres souffre aujourd'hui de nouveaux pré judices qui blessent évidemment la justice, Ypres une des plus importantes places de guerre de la Belgique 0) Ypres, qui depuis des siècles et en tout temps a été favorisée d'une garnison importante, Ypres, qui d'après l état politique et militaire du royaume de Belgique, devait avoir la certitude de posséder constam ment un corps de cavalerie et qui d'après celte certitude bien rationnelle, s'est résolue des sacrifices énormes, en faisant construire une nouvelle caserne de cavalerie selon les règles de l'architecture spéciale modefne en remplace ment des Casernes bâties sous Louis XIV; en faisant ériger une des plus belles et plus vastes salles de. manège du royaume; en établissant un coûteux abreuvoir presque attenant la [I Missive (te Carnol, représenlant du peuple Pichegru, général en chef de l'armée du Nord, en date du 21 Veutose, an 2 de la répu blique française, une et indivisible. caserne en se procurant indépendamment de plusieurs plaines déjà existantes pour les exer cices journaliers, un beau et vaste champ de manœuvres situéà un quarlde lieu des casernes, destiné aux exercices de l'artillerie et de la cavalerie: Ypres, dis—je, nonobstant ces incal culables dépenses se trouve tout-à-coup privée de toute sa garnison de cavalerie, dans un tems où elle a supporter douloureusement sa part du poids accablant de la disette et de la misère qui accablent les Flandres et cela pour transfé rer cette cavalerie dans des contrées prospères comparativement aux Flandres et dans des villes qui sous aucun règne précédent, ne furent réputées places de garnison villes qui d'ailleurs possèdent des établissements avantageux et autres sources de bien-être dont Ypres est privée. Si pareille chose était arrivée, il y a trois quarts de siècle, ou eût pu envisager la mesure nécessaire sous le rapport de la salubrité puisqu'alors les inondations qui s'étendaient ail midi et l'ouest de la forteresse pouvaient com promettre l'état sanitaire des habitants mili taires de cette place. Mais comme depuis soixante ans ces inondations sont remplacées par de superbss prairies, et que depuis lors saines lié toiu le royaTm.rèy la-prr.ac.oA-^vo'oi® garnison de la part du Gouvernement est pour la ville d Ypres une mesure d'une iniquité hai neuse qu'aucun homme impartial ne saurait justifier. Le sort injuste ne se fait pas moins sentir l'égard de la ville d Ypres, en ce qui concerne les dispositions relatives au chemin de fer. La Belgique presque toute entière se trouve sillonnée par la voie ferrée toutes les villes de quelque importance, Ypres exceptée, jouissent, soit l'intérieur de leurs enceintes soit leur partie immédiate, les bénéfices du chemin de fer. Une grande partie des débals des Chambres législatives ont eu pour objet de nouveaux éta blissements en faveur de nombre de localités des discussions sérieuses ont eu lieu pour des chemins de fer plutôt de luxe et d agrément que de pure utilité; et 1 insouciance injuste l'égard d'Ypres a été telle que le nom de notre ville n'a pas été plus prononcé que si l'arron dissement d'Ypres ne contribuait aucunement aux charges de l'état. Xlf. le tourlourou. tîn mois environ s'écoula encore Raoul se rendait assidûment chaque soir chez Mme Pavonnrt, pour donner ses leçons Maguettc; mais il dut s'avouer enfin qu'il ne parviendrait jamais lui faire acquérir un certain degré d'instruction. Soit qu'elle n'eût pas grand «prit, comme favait dit la mère Moiuaud soit que ses aptitudes naturelles eussent élé étouffées dans l'espèce d'engourdissement moral où elle avait vécu jtisquà dix-huit ans elle ne faisait aucun piogrès et ne prenait aucun goût 1 étude. Son esprit était net pénétrant mais il ne s'élevait pas au-dessus d un certain niveau et n'atteignait pas certaines idées. Raopl cherchait vainement exciter sa curiosité réveiller sou imagination, elle restai t toujours une bonne et simple fille que les livres ennuyaient mortellement une ouvrière laborieuse qui aimait le travail et ne savait pas employer autrement son activité. Comme elle était fort reconnaissante des bontés de Raool et qu'elle voulait de toute son âme lui complaire elle se trouvait très-malheureuse de répondre si mal aux peines qu il se donnait. L'inutilité de ses efforts la jetait dans une sorte d abatte ment, de morne tristesse dont on ne pouvait la distraire qu'à grand' peine. Un soir que Raoul et le doatcur sortaie nt ensemble de chez M,ne Pavounet celui-ci dit en secouant la téte C'est inutile ■Vous n'en ferez jamais que Maguettc Moinaud. Il est vrai, docteur, répondit Raoul j il faut bien avouer que si demain je î'épouiais elle ne saurait ouvrir la bouche que pour pro noncer le oui s#!euncl mais elle est si belle quand elle se tait I D'ailleurs, il me reste nu espoir qui sait si le spectacle du monde n'agiFa pas sur celte froide imagination qui sait si l'éclat, le bruit de» fûtes, et plus que tout cela encore l'orgueil de son propre succès» le sentiment de sa beauté, de cette beauté sans rivale, ne reveilleront pas dans l'âme de Maguettc des instincts élégantsdes facultés inconnues qui sait si alors elle ne deviendra pas capable de voir d admirer, de comprendre enfiu cet univers qui n'existe pas encore pour elle Le docteur secoua de nouveau la lete et répondit en appuyant un doigt sur le bras dt Raoul: Pygmalion voûs n'animerez pas la statue Cependant, vers la même époque, un changement visible s'opéra dans la manière d'etre de Maguette il y avait dans la façon dont elle abordait Raoul quelque chose d'ému un trouble secret qu'il remarqua avec ravissement. Elle était tour tour avec lui empressee et farouchej tantôt elle n'osait lui adresser la parole} tantôt elle venait vers lui avec un sourire timide, caressant, comme si elle ayait eu solliciter quelque grâce qu'elle craignait de se voir refuser. Elle était plus expansive dans l'expression de sa reconnaissance et souvent elle disait au docteur Le bon Dieu m'a ôté mes parents, mais il les a remplacés par des bienfaiteur» que j'aime et que je respecte comme si j'étais leur fille... Ah I monsieur le docteur que ne vous dois je pas, ainsi qu a M. d'Aglevilie Sans votre secours, je serai* morte de douleur et de faim dans notre mansarde de la rue Pigale... A présentj'ai bien toujours un chagrin au fond de mon cœur je pleure souvent en songeant ma pauvre mère; mais j ai repris cou rage... Et vous comprenez, mon enfant, que vou» pourrez encore «voie une fie heureuse dit le médecin. Oui, répondit-elle avec expression, oui, je l'espère, puisque tout mon bouheur dépend de vous et de M. d'Aglevilie, qui e9t si bon pour .moi. De jour eu jour, cependant, elle perdait davantage sa sérénité; on devinait qu'une pensée inquiète l'agitait incessamment. Le médecin ne savait comment expliquer ces symptômes que Raoul observait avec une sorte d'enivrementet Mia* Payonnet qnil interrogeait parfois, lui répondait en souriant Laissez donc monsieur le doctenr, toutes les jeunes tilles sont comme cela, elles ont des langueurs, des insomnies... la ntiit elles ne peuvent pas fermer l'œil; le jour, elles ont l'airde dormir debout..'

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Le Progrès (1841-1914) | 1847 | | pagina 1