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réservait, dans les cahiers des charges, de choi
sir, parmi les soumissionnaires, fût-ce celui
dont les prétentions étaient les plus élevées.
Grâce celte faculté exorbitante. I arbitraire
n'avait plus de frein le favoritisme pouvait
s'exercer au détriment des intérêts du trésor,
enfin les soumissions e! les adjudications publi
ques 11e constituaient plus qu'une garantie
dérisoire.
Un entrepreneur jouissant de protections effi
caces. et placé dans les bonnes grâces de quel
ques hauts fonctionnaires, n'avait pas la crainte
de se voir évincé par des concurrents plus
modérés dans leurs prix, parce que le ministre
pouvait adjuger qui bon lui semblait selon
son caprice, sans rendre compte personne de
ses motifs.
Cet abus scandaleux derrière lequel il était
si facile d'abriter des dilapidations, celte infrac
tion flagrante aux principes d'ordre et d'im-
pat tialitéqui doiventdiriger toutgouvernemenl,
viennent enfin de disparaître.
Le nouveau ministre des travaux publics a
fait supprimer de tous les cahiers des charges
la clause suspecte contre laquelle tant de récla
mations légitimes avaient échoué jusqu'ici.
Quoique M. Frère soit l'un de nos amis poli
tiques, nous ne craignons pas d'être désavoués
par la majorité du pays en louant la mesure
qu'il vient de prendreen l'encourageant dans
les réformes qu'il prépare sans doute, pour
relever son département du discrédit dans lequel
il était malheureusement tombé.
Les feuilles cléricales s'évertuent répéter
que M. Frère est un inconnu, un homme étran
ger l'administration des travaux publics il
paraît toutefois qu'il y a quelque peu rabattre
de ce dernier reproche, puisque M. Frère a su,
dès son débutmettre le doigt sur une plaie
honteuse.
En tout cas, M. Frère a la conscience de ses
devoirs, il veut que la probité et la moralité du
gouvernement ne puissent être l'objet de suspi
cions légitimes; il a raison, et l'opinion publi
que le soutiendra dans la voie qu'il a tracé.
Journal de Liège
On lit dans le Politique:
Le travail pour les révocations et les muta
tions faire dans le personnel des commissaires
de district, est arrêté et sera, paraît-il, soumis
aujourd hui au roi.
Nous apprenons que les membres de la com
mission des monnaies ont adhéré par écrit au
programme politique du ministère. On sait que
cette commission se compose de MM. Thiry,
présidentet deux commissaires généraux,
MM. C. Doignon, ancien représentant, et D. J.
Lejeune, membre de la chambre des représen
tants. Indépendance
Q»<1 <s~
M. Frère vient d'ordonner U suppression de
quinze abonnements XÉmancipation-Cour-
«-
trahir tont ce qu'elle souffrait. Le baron mangeait avec un grand
•ppétit et semblait n'avoir aucune préoccupation. Le ressentiment
de Guillaume perçait sur sa physionomie. Il ne touchait qu'à peine
aux mets qui se sucoédaient devant lui. En rapprochaut les cir
constances sa conviction dans ce qu il avait cru deviner devenait
de plus en plus profonde etde plus en plus irrité par cette idée, il
■e demandait comment il pourrait faire un éclat, sans manquer aux
lois de l'hospitalité et de la bonne compagnie.
Comment se fait-il, Monsieur, demanda tout roupie baron,
que vous ayez choisi pour vos voyages notre pays, qui, sous bien des
rapports est la vivante auatbèse du voire Connaîtriez-vous déjà
l'Italieet seriez-vous blasé sur cette"contrée de prédilection des
poètes, des cœurs ardents et des esprits aventureux
L)ussiez-vous Monsieurme prendre pour un cœur des plus
tièdesrépondit Guillaume je vous avoue humblement que je
11 aime pas l Italie. A ne pas vivre en France, c'est l Allemagne que
je préfère de beaucoup. Pour 11 facilité des relations de la vie quel
pays vaut le vôtre Chez nous la tournure o*ustique de l'esprit
national donne souvent une importance trop exagérée aux choses les
plus insignifiantes pour qu'on renonce légèrement la plus grande
réserve. Est-il par exemple rien de plus simple que retenu hier au
soir par l'orage, j aie eu l'honneur de recevoir I hospitalité chez Mm®
Stilier P fch bien en France, je ne sais si cet incident ne prendrait
pas tout de suite les proportions d'une aventure. Marivaux et Scribe
ont fait des comédies avec bien moins que cela*
M'°* Stiller sourit.
En effet dit-elle un militaire une veuve voilà les person
nage* que crayonne profusion le dernier; mais mondiuer serait un
Lieu mince sujet de comédie.
Guillaume sont il son tour.
En Allemagne, oui sans doute, Madame, répliqua-t-il mais en
Fiance, combien ce serait différent Voyez seulement, et tout en
parlant il regardait le baron qui sans savoir où il voulait en venir
#e repentait déjà d'avoir provoqué cette conversation, y aurait-il
rier Belge ces abonnements étaient payés par
le chemin de fer et répartis dans les stations.
Cétail là, chacun peut en juger, une dé
pense parfaitement inutile, et qui constituait
en réalité un subside déguisé.
M. Frère doit s'attendre de nouvelles atta
ques de la part de la feuille des frères Briavoine
mais il semble en prendre assez bien son parti.
Journal de Liège.')
Ainsi que nous l'avons annoncé, l'inhumation du
duc de Praslin a eu lien dans la nuit de vendredi
samedi ou cimetière du Sud.
A une heure et demie l'ordonnateur des pompes
funèbres, syivi des employés et des voitures néces
saires, est arrivé la prison du Luxembourg, où
étaient réunis, sur l'invitation de M. le chancelier
et de M. le préfet de police, MM. le colonel Pozac,
commandant militaire du palais du Luxembourg,
Elouiu, chef de la police municipale, Monvallé,
commissaire de police du quartier, et Trevet, di
recteur de la prison.
L'ordonnateur et les employés ont été conduits
dans la chambre où était déposé le cadavre du duc
de Praslin, et là, eu présence des fonctionnaires
susnommés, il a été enseveli et placé dans un cer
cueil en bois de chêne, puis, transporté jusqu'à la
voiture par quatre employés des pompes funèbres.
M le commissaire de police Monvallé a dressé
procès-verbal constatant les faits, lequel a été signé
par lui et MM. le colonel Pozac, Elouin et Trevet,et
le convoi, composé de trois voitures dans lesquelles
se trouvaient ces fonctionnaires et ces employés, s'est
mis en marshe et s'est dirigé vers le cimetière du
Sud, où il a éié reçu par M. de l'Hôpital, conserva
teur, qui avait élé prévenu la veille et qui l'a con
duit au lieu de la sépulture.
Le cercueil a été descendu dans la fosse désignée
et recouvert en présence^de MM. Elouin, Monvallé
et de l'Hôpital, et un nouveau procès-verbal a élé
dressé.
A deux heures et demie tout était terminé.
Comme nous l'avons annoncé, deux testa
ments de Mm° la duchesse de Praslin ont élé déposés
entre les mains de M. le président du tribunal de la
Seine. Ces deux testaments sont de dates différentes,
l'un est de 184 l'autre de i846.
Dans le premier, on remarque que la duchesse
parle toujours de son mari dans les termes les plus
affectueux. Dans le second, celui de i846, la du
chesse ne confère pas, comme on l'a dit tort,
l'usufruit de tous ses biens son mari elle lui
lègue une partie de son mobilier, et lui donne
l'usufruit d'une de ses terres.
Dans ce même testament de 1846, se trouve une
•clause assez remarquable. La duchesse lègue ses
diamants l'un de ses fils, seulement elle demande
que ces diamants soient vendus, et que le produit
de celte vente soit affecté l'achat de rentes sur
l'État.
D'après le vœu de la testatrice, les arrérages do
ces renies ne devraient pas être employés, mais bien
au contraire capitalisés pour acheter chaque année
de nouvelles renies, jusqu'au moment où lejeune
duc de Praslin songerait se marier.
Alors le prix originaire des diamants ainsi aug
menté par les intérêts annuels, devrait servir
l'achat des diamants destinés la nouvelle épouse.
rien de plus naturel qu'un homme jeune comme moi commençât
par parler galanterie une jeune femme comme vous? Mais pour
emprunter les termes de ma profession des propos galants ne sont
que des escarmouches et des combats d'avant-garde. Vient cnffn la
bataille, c'est à-dire l'amour. Ou ne badine pas impunément avec
le feu. Ne suffit-il pas d'un mot ou d un regard au milieu d'une
conversation frivole pour faire découvrir le trésor le plus inappré
ciable un cœur capable de devoùmenl et de passion Voilà donc
la pièce nouée Madame c'est là comme vous le savez, le plus
difficile.
Je ne suis pas tout fait de votre avis, Monsieur, dit le baron,
qui ne fut que sec lorsqu'il voulait être impertinent On ne peut pas
se servit d'une plume comme Alexandre se 6ervit de sou épée, et du
reste il ne s'agit pas seulement de défaire ce qu'on a noué les
personnages ne doivent pas se trouver la fin de la pièce vis vis
l'un de l'autre dans la même position qu'en commençant*
Un dénouement ne serait pas difficile trouver.
A h voyons
Je laisse de côté le dénouement fait et refait cent foig celui
dans lequel la femme après s'être assurée qu'elle iuspire un amour
véritable consent le récompenser. J'admettrai si l'on veutque
trompée par un premier mariage heureux elle se croie incapable
d'éprouver un nouvel amour; mais que, se sentant trop jeune pour
se passer d'un guide et d'un protecteur dans la vie elle ait agréé la
recherche d'un homme l'extrême limite de l'âge mûr.
Ici le malaise du baron devint de plus en plus visible. Guillaume,
ne regardant que luine remarqua pas que l'embarras de Béatrix
croissait chacune de ses paroles.
Ce rival heureux snrvient, poursuivit-il, et comme le bonheur
porte facilement l'iDsolence, il se fie un peu trop son âge, et finit
par exciter la juste colère du jeune homme. Je ne sais pourquoi
niais je suissûr que le personnage est lâche, bas et vil.
De qui parlez-vous ne put s'empêcher de demander le baron.
Pardon Madame je mets en effet un peu trop de chaleur
Nous empruntons la Patrie les détails qui
suivent sur l'interrogatoire de M"° de Luzy
Interrrogée le 19 août par M. Rroussais, juge
d'instruction, au moment où elle venait d'être
écrouée la Conciergerie, comment elle avait appris
l'horrible événement, elle répondit que c'était M.
Rémy, professeur de littérature des demoiselles de
Praslin, et sa femme, qui vinrent le lui annoncer,
lis la trouvèrent si troublée qu'ils l'emmenèrent
chez eux, rue de la Ferme-des-Malhurius, où elle
resta jusqu'à huit heures du soir. C'est là que vint
la chercher un agent de police.
Aux demandes du magistrat sur de graves torts
qu'elle aurait se reprocher envers la duchesse de
Praslin, en ce qu'elle au l'ail tenté d'enlever l'épouse
l'affection du mari et la mère celle de ses enfants,
M"* de Luzy dit
Non monsieur jamais jamais A mon ar-
ritée dans la maison de Praslin, le ménage était déjà
dans un état fâcheux. M. le duc voulait seul diriger
l'éducation de ses enfants, du moins M™ la duchesse
me l'a dit. M®' de Praslin ajouta, après m'avoir en
tretenue longtemps de cette prétention de son mari,
queceseraità M. leduc que j'aurais rendre compte.
M. le ducde son côté m'en dit autant. Trois gou
vernantes s'étaient succédé dans la maison en quel
ques mois Madame n'avait pu s'accorder avec
aucune.
M"* de Luzy ajoute que M. de Praslin lui avait
dit d'abord qu'elle logerait seule avec les enfants
dans une partie de l'hôtel qu'elle mangerait seule
avec eux et qu'ils ne feraient que voir leur mère.
Mtu de Luzy refusa d'agréer celte proposition et
déclara qu'elle n'accepterait pas la place qu'on lui
offrait. Le duc alors décida que l'institutrice et les
enfants mangeraient avec la famille mais que les
enfants resteraient sous sa tutelle et sous sa direction
exclusive.
M"* de Luzy attribue une ancienne gouver
nante tous ses différends avec la duchesse. Cette
gouvernante prétendit qu'elle éloignait les enfants
de leur mère.
Plus tard, pendant un séjour an château de Van-
dreuil, où M11" de Luzy était seule avec la duchesse,
cette dernière concourut aux lectures et la direc
tion des éludes de ses huit enfants. A son arrivée
le duc l'ayant appris, en fut très-mécontent il
exprima un peu vivement ce mécontentement, et
la duchesse s'abstint. Au château de Praslin où
l'institutrice et les huit enfants vécurent tout-à-fait
part, honnis les repas, qui se prenaient en famille,
M"* de Luzy se défend d'avoir jamais cherché
éloigner les enfants de leur mère.
11 existait, dit M"* de Luzy, entre leduc et la
■duchesse des causes de dissensions qu'il n'était pas
en son pouvoir de faire cesser.
J'ai eu grand tort, dit-elle, peut-être, d'accepter
celte position mais je n'ai jamais cherché blesser
volontairement la duchesse.
MUe de Luzy avoue que parfois la duchesse
exprimait son égard des sentiments de jalousie
qui n'étaient pas fondés le moins du monde; cepen
dant la plupart du temps Mw de Praslin était
envers elle convenable sans être affectueuse; souvent
même cela lui a fait oublier son injustice. Mlle de
Luzy n'avait pas de fortune, aucun ami Paris; elle
devait tenir conserver une position acquise, avec
d'autant plus de résignation que le duc lui avait
promis, dit-elle, de lui faire une pension, si
crayonner l'esquisse d'une comédie. Vous le savez: s'il esl des cœurs
sur les quels le temps u'a pas tie prise, combien en est-il qui perdent
avec la jeunesse tous les penchans généreux Donc, eu renonçant
faire du rival heureux une nature originairement dégrad-e je puis
du moins lui donner le caractère de son âge l'égoïsme et certaines
habitudes de volupté. Je puis ouvrir les yeux de l'héroïne et lui faire
comprendre qu'il y a toujours lolie vouloir unir les contraires et
que de toutes les disonanoes la plus dangereuse braver est celle
de l'âge. Le héros de la comédie n'épousera donc pas mais il fera
rompre un mariage et c'est bien quelque chose il n'obtiendra pas
de l'amour mais une amitié tendre sentiment rare et divin dont
nn de nos auteurs a dit que c'était la oho-te la plus délicieuse au
monde, quand il était a cordé par une jolie femme, ayant toutes les
qualités d'un honnête homme. Je me trompe peut-êtremais oe
dénouement de la pièoe me semble suffisant.
Stiller resta pensive.
Ce ne serait là Monsieur qu'une comédie de genre dit le
baron. Si j'avais l'honneur d'être votre collaborateur j'aimerais
mieux en faire un drame, en faisant battre les deux hommes.
Vous avez trop de bon goût et d'expérience, Monsieur, répondit
Guillaume pour que je ne suive pas comuie des ordres les conseils
que vous daignez me donner.
Non, Messieurs, dit Béatrix avec «ne fermeté dont jusqu alors
elle n'avait pas donné de preuves le drame me fait mal aux nerfs
elles acteurs qui le jouent me dégoûtent. Tenons-nous-en la
comédie, on peut en changer le dénouement.
A cea mots elle se. leva de table, et prit pour passer au salon le bras
de M. de Winter.
Qtielq ues instants après, elle se plaignit d'une violente migraine.
Le bâton et le vicomte demandèrent leurs chevaux, qui furent
bientôt prêts.
Us partirent ensemble; ma»s arrivés au bout de l'avenue ils se
séparèrent, se lançant pour adieu un regard de haine et de défi.
{La suite au prochain n°.)