INTÉRIEUR. 7e ANNÉE. - N° 716. JEUDI, 16 MARS 1848. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. On s'abonne Ypres, Marché au Beurre, 1, et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE D'ABONNEMENT, par trimestre. Pour Ypres. fr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro0-25 Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé, Jranco,\ l'éditeur du journal, Ypres. Le Progrès paraît le Diman che cl le Jeudi de chaque semaine, PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. TIRES ACQDIR1T EUNDO. P II S le 15 mars. Hier, dans la soirée, les bruits les plus alar mants élaient répandus dans notre ville. On par lai tde troubles qui avaient éclaté Gand, Bruges et autres lieux sans compter qu'on se préoc cupait sérieusement de l'invasion d'une légion belge-française sous le commandement d'Ernest Grégoire, Bien jusqu'ici dans les journaux n'a confirmé toutes ces nouvelles sinistres, l'ex ception de quelques scènes de désordre Gand, où jusqu'ici le tout s'est borné une démon stration contre une congrégation religieuse. A Bruges, tout doit être tranquille, car les journaux de celte ville ne font mention d'aucun mouvement populaire, qui aurait agité la cité. Quant l'invasion d Ernest Grégoire, nous ai mons en douter. De la part de la France, ce serait mal tenir ses promesses et d'ailleurs, il nous semble, que les journaux du déparlement du Nord devraient en savoir quelque chose, si des bandes se rassemblaient la frontière. Voici du reste, ce que l'Observateur dit des troubles qui ont eu lieu Gand: Des troubles graves, disait-on, auraient éclaté Gand, pendant la nuit dernière et ce malin. 11 parait que tout s'est borné quelques manifestations hostiles contre certaines congré gations religieuses. Un rassemblementaprès avoir brisé des carreaux de vitrés au collège des jésuites, se serait disposé se rendre Tronchiennes, pour y continuer des scènes de désordre. Un esca dron de cuirassiers aurait été immédiatement envoyé sur les lieux et les attroupements tu multueux se seraient dissipés. Ce malin, neuf heures, au départ du con voi du chemin de fer de nombreux attroupe ments s'étaient formés sur la Place d'Armes ils étaient devenus assez compactes pour entra ver la circulation. Nous ne pouvons qu'engager sérieusement nos concitoyens se tenir en garde contre les rumeurs sinistres qu'on met en circulation et qu'on propage avec une légèreté inconcevable. Césl ainsi, que la confiance disparaît, que la crainte, la peur des troubles peuvent engendrer le désordre. Avec une pareille disposition des esprits, il est impossible que les transactions commerciales puissent être très-aclivesl'en combrement des produits en est une suite iné vitable elle a pour conséquence directe la mise sur le pavé d'un grand nombre d'ouvriers, qui ne demandaient qu'à gagner un salaire que les chefs d'industrie ne peuvent plus leur donner, par suite de l'impossibilité de vendre et par l'épuisement de leurs capitaux convertis en marchandises. Dans les temps de crise, il im porte de ne répandre que des nouvelles dont l'authenticité soit prouvée, si l'on tient ne pas coopérera l'œuvre de ceux qui aiment pêcher en eau trouble. Les derniers événements accomplis en France, tout en réagissant d'une manière désastreuse sur toutes les relations commerciales existantes entre ce pays et le nôtre, ont plus particulière ment affecté l'industrie dentellière, dont la prospérité est subordonnée aux exigences du luxe, lequel ne se développe qu'au sein de la paix et de la prospérité publique. Paris, et les autres grands centres de population, qui venaient nous prendre les produits de notre principale fabrication ont complètement cessé leurs vieilles relations avec la ville d'Ypres, et il est résulté de cet état de chosesd'une part; une stagnation d'affaires inévitable, de l'autre, de graves et de légitimes inquiétudes pour l'a venir de notre commerce. Personne ne peut prévoir où et quand finira la crise qui pèse si lourdement sur notre ville. Déjà I insuffisance des récoltes de 1 fî 53 et de 1846, et la gène qui en fut la conséquence, avaient paralysé en partie les affaires, en dé tournant la classe moyenne de faire des emplet tes de pure fantaisie il en était résulté un encombrement inusité de marchandises, par tant, un abaissement des salaires, et, au moment où il était permis d'espérer des jours plus heu reux, une commotion nouvelle est venue ag graver la situation. Dans cette conjoncture, et afin de pourvoir aux éventualités de l'avenir, eu empêchant autant qu'il est en eux, que notre laborieuse classe ouvrière ne manque de travail, les fabri cants de dentelles de la ville d'Ypres se sont réunis lundi dernier en assemblée générale. Vingt-deux personnes, fabricants et fabricantes, ont répondu l'appel qui leur avait été fait. L'assemblée a adopté l'unanimité la propo sition de déléguer vers le Ministre de l'intérieur trois de ses membres pour lui remettre une requête tendante obtenir du gouvernement un secours pécuniaire, dont pussent user les fabricants, au cas où la crise actuelle se prolon geant indéfiniment, les mettrait dans (im possibilité <îe continuer donner du travail leurs ouvrières. Une commission a ensuite été nommée au scrutin secret. Elle a pour mission de rédiger la requête adresser au Ministre, et de faire, tant auprès du gouvernement, qu'auprès de nos magistrats communaux, dont les sympa thies pour leurs administrés sont bien connues, les démarches les plus propres atteindre le but proposé. Celle commission se compose de MM. UUII.WON-BRUN FAUT. NAVEZJOYE. BRUN F AUX- BOURGOIS. JOOS-VERSCUAEVE. BEGEREM. Le nombre dès électeurs généraux de l'ar rondissement d'Ypres sera porté de 1,060 1,979, par suite de l'abaissement du cens 20 florins. Le nombre des électeurs dans la ville est plus que doublé par suile de la diminution de trente florins sur le ceusp de 237, il s'élève à-^IUL,. A Uoperinglîe ,-fl est doublé, mais l'abaisse ment n'est que de 15florius de 137 il a atteint le chiffre de 260. Voici l'effet de la nouvelle loi électorale #ùr le nombre respectif des électeurs du chef-lieu et de l'arrondissement. Sous le régime de l'an cien chiffre du cens, la ville ne comptait que 237 électeurs et le restant de l'arrondissement 823. Maintenant la ville comptera 588 électeurs et les campagnes seulement 1,399. Proportion gardée, Ypres a gagné beaucoup plus d'élec teurs que l'arrondissement, puisque le nombre des électeurs de la campagne n'est pas môme doublé, tandis que celui de la ville est aug menté de 351. L'effet de l'abaissement du cens est très-sen sible pour quelques communes. A Boesinghe, le chiffre est plus que doublé, de 15, on est arrivé 33. A Comiues, seulement une augmentation de 15 électeurs, de 25 40. A Haringhe, on comptait 46 électeurs, il y eu aura 80. A Langhemarck, la liste électorale contenait 70 noms, elle en comptera maintenant 120. A Dickebusch, le chiffre est triplé, au lieu de 6 il en aura 18. La liste d Elverdinghe de 14 en comptera 23 celle de Gheluwe de 36 s'est élevée 48 électeurs. Messines, de 37 47 Feuilleton. LA QUIQUENGROGNE. YI. découverte. (Suite) Pendant que la bouche de la malheureuse enfant implorait l'intervention divine, c'était Yorik de Frapesles qu'elle invoquait dans sa pensée, car l'image de ce jeune homme occupait son cœur tout entier, el il ne lui semblait pas que l'aide dont elle avait si grand besoin pût venir d un autre que lui. Quel ne dut pas être son étonnement, lorsqu'à la suite de cette invocation mentale, elle vit entrer le vicomte de Frapesles en personne. D'abord, elle ne voulut pas croire la présence de cet être adoré. Sa raison se refusait admettre que le ciel eût fait le miracle de lui envoyer le sauveur qu'elle appelait, dans uu moment où il était si peu probable qu'il se présentât Yorik apparaissait comme un fan tôme, sans dire une parole, sans qu'on entendit le bruit de ses pas amorti par le tapis, la figure severe, mais calme comme celle d'un juge qui vient prououcer une sentence ce ne pouvait donc être que par l'effet d'une surexcitation cérébrale qu'il lui semblait voir de» vant elle ce défenseur désiré, et ce qui contribuait encore entre tenir en elle cette idée, c'est que Clément de Cbarolles n'avait pas f fait un signe indiquant qu'il se fût aperçu de l'arrivée d'un qua. trième personnage. Raoulelte était restée agenouillée, mais ses yeux ne se tournaient plus du côlé de la vieille Berihe pour la supplier; ils restaient atta chés sur l'apparition dont ils suivaient le mouvement, dont ils étudiaient la physionomie, épiant un indice d'après lequel il fût possible la jeune fille de reconnaître si c'était bien Yorik de Fra pesles qu'elle voyait réellement, ou si ce n'était qu'une image, un mensonge de son délire. Mais elle ne put s'y tromper longtemps c'était bien Yorik lui- même qu'elle avait devant elle, c'était un vengeur que le ciel lu1 envoyait» Lorsqu'il était arrivé la porte de la pièce où se trouvaient réunis Raoulelte, la vieille Berthc et Clément, il avait entendu le bruit de deux voix dont l'une lui était inconnue, et l'intérêt puissant qu'il avait connaître ce qui se passait dans l'intérieur, ayant fait taire les scrupules qu'il aurait eus en toute autre circonstance, il s'était arrêté pour prêter l'oreille, et, grâce cet espionuage, il savait quoi s'en tenir sur l'enlèvement de Raoulette et sur la complicité que la vieille Berthe prêtait aux abominables projets du capitaine Charolles. La folle de la tour était si éloignée de s'attendre l'intervention d'Yorik, et sa présence contrariait ses manœuvres tel point, qu'elle perdit son sangfroid habituel, et qu'elle recula comme frappée d'épouvante en voyant entrer le jeune homme, elle qui ne s'épou vantait de rien. Qu'allait-il faire enfin Douée d'un pouvoir extraordinaire sur elle-même et sur les autres^ quand il s'agissait de diriger des événements qu'elle avait prévus ou fait naître, elle se trouvait paralysée lorsqu'elle était surprise par eux l'iniproviste. Elle ne doutait pas qu'Yorik n'eût tout entendu, et elle ne pouvait s'empêcher de frémir en songeant que la mort de Raoulette allait sans doute devenir un crime nécessaire, puis qu'elle ne voyait plus d'autre moyen d'empêcher le fatal mariage. Le capitaine Clément, qui tournait le dos la porte et qui était occupé délicieusement se dire que le désespoir rendait Raoulette plus belle et plus adorable, n'avait remarqué ni l'arrivée du vicomte de Frapesles, ni la pantomime de la vieille. 11 ne fut tiré des pensées voluptueusement cruelles auxquelles il s'abandonnait, qu'en recevant en plein visage une flagellation qui le Gt bondir de rage et d'étoii- nement. Yorikl'avail frappé rudement de son gantelet de maille en disant: Je suis le fiancé de mademoiselle de Bizien. Clément de Charolles avait poité la main n côté pour y cher cher son épée, niais s'apercevaut qu'il avait négligé de la prendre Pas d'armes!... pas d'armes! s'écria-t-il, qui donc me donnera une épée?... Vous avez votre poignard, monsieur,et j'ai le mien, fit observer Yorik. -» C'est vrai!.,. Êtes-vous gentilhomme, monsieur?

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