INTÉRIEUR.
7e ANNÉE. - N° 722.
JEUDI, 6 AVRIL 1848.
JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
lre Compagnie.
Feuilleton.
LA QUIQUENGROGNE.
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TIRES ACQUIRIT ECNDO.
ÏPRE8, le 5 Avril.
LA MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE.
Chacun se trompe ici-bas:
On voit courir après l'ombre
Tant de fous, qu'on n'en sait pas
La plupart du temps, le nombre.
La Font, livre vi. fabl. 17.
Il est de bon sens de ne pas blâmer une forme
de gouvernement quelconque, parce qu'il porte
tel ou tel nom que ce soit république, monar
chie constitutionnelle ou absolutiste, oligar
chie, etc., car toutes ces formes de gouverne
ment peuvent rendre heureux, les peuples qui
les ont adoptées librement et de leur plein gré.
En faisant choix d'un régime quelconque, car
la faible humanité doit être gouvernée, c'est une
nécessité, une nation aujourd'hui ne désiré que
de posséder le plus de liberté possible pouvant
se concilier avec le maintien de l'ordre public
et de la stabilité. Or, que ce soit la république
qui résolve ce problême ou la monarchie con
stitutionnelle, I important sous un de ces deux
régimes est de posséder réellement la jouis
sance des libertés auxquelles toutes les nations
aspirent, et il est sage, de bon sens, quand on
la possède, que ce soit par des institutions
constitutionnelles ou de forme républicaine, de
ne pas exposer au naufrage ce bien précieux
qu on appelle la liberté, pour un changement
de nom, quant au fond l'adoption d'un nouveau
système ne peut améliorer la position du pays.
Il est de fait que les institutions constitu
tionnelles sainement appliquées, sont aujour-
d hui ce qui paraît le mieux approprié notre
société très-civilisée, pour ne pas dire corrom
pue. Cette forme degouvernemenl permet d'in
troduire toutes les modifications que le temps
et le progrès des idées peuvent exiger. Certes,
cesl là une précieuse qualité, car l'exception
de la forme républicaine, qui ne diffère au fond
en rien pour ainsi dire de la monarchie consli-
tionnelle, tous les autres régimes sont quasi
immuables et aucune modification ne s'opère
sans secousse. Dans la forme de gouvernement
adoptée en Belgique, sous l'empire de cette con
stitution, œuvre si sage du congrès constituant,
j on a pu se convaincre que les pouvoirs sont
justement pondérés et que des changements
piofouds peuvent s opérer dans la direction du
gouvernement par le simple jeu des institutions,
du moment qu'elles sont bien comprises. Cer
tes depuis 1830, nous n'avons pas toujours eu
un ministère qui se soit tenu dans une voie
sage, mais qui la faute? N'est-ce pas aux élec
teurs qu'il faut s'en prendre, car dans un gou
vernement de libre discussion et de forme con
stitutionnelle, les électeurs sont tout prendre
la clef de voule. On peut croire que sien
France, le corps électoral eut été mieux inspiré
et si de meilleurs choix fussent sortis de l'urne
du scrutin la royauté constitutionnelle n'eut
probablement point fait naufrage.
Pour la Belgique, il n'y aurait aucun profit
poursuivre un changement de système et
adopter celui de la France républicaine. Nous
ne pouvons trop le dire, tout ce qui manquait
la France, nous le possédions depuis dix-sept
ans, seulement les électeurs n'ont pas toujours
usé de leurs droits avec sagacité. Mais aussi, il
n est pas prouvé que désormais les choix seront
meilleurs, parce que. par une réforme, on a
appelé un nombre double d'électeurs au ban
quet électoral. C'est un essai qu'on fera cette
année et nous souhaitons que la Belgique sorte
avec honneur de celte épreuve difficile.
Si nous ne devons pas changer la réalité
en matière de liberté pour ce qui pourrait
bien en être l'ombre, nous avons nous, Belges,
un autre motif nous serrer autour de notre roi
constitutionnel, c'est que non» l'avons appelé, il
y a dix-sept ans, et que nous l'avons librement
élu celle époque et qu'il s'est rendu notre
appel. Nous lui devons de la reconnaissance
pour la confiance qu'il a montrée dans notre
esprit nationalcar cette époque l indépen-
dance belge était bien chancelante et bien des
princes eussent redouté de changer une vie
tranquille et agréable pour les déboires d'une
royauté naissante dans un pays qui venait de
briser violemment les nœuds qui l'attachaient
une autre nation.
Oui, nous devons le dire, il serait ignoble pour
la Belgique de prêter l'oreille l'avis de quelques
agitateurs de bas étage, républicains par tem
pérament plutôt que par principes, toujours
remuants, ne voulant plus le lendemain ce
qu'ils réclamaient la veille. Ce sont des hommes
malheureux, qu'il faut laisser bâtir des châ
teaux en Espagne, sans y faire attention, car si
on les contrarie, ils se posent en victimes de
l'arbitraire. Celle infime minorité d'esprits cha
grins n'inspirerait pas le moindre soucisi
rusés, astucieux et sachant qu'en arborant leur
bannière, ils seraient conspués, ils ue prenaient
lâche de troubler par des menées souterraines
la Belgique. C'est en exploitant des bons sen
timents qu'ils sèment des difficultés au pouvoir
et qu'ils espèrent arriver leur but, en poussant
la désaffection. Gardons-nous d'écouter ces
hommes de malheur, c'est dans un abîme qu'ils
veulent entraîner la Belgique et Dieu seul sait
quelles intentions les guident dans la croisade
qu'ils ont entreprise contre la monarchie con
stitutionnelle.
Samedi dernier M. Bernard, l'inspecteur de
l'enseignement moyen, est parti de cette ville,
aprèsavoir été occupé pendant trois jours exa
miner les élèves du collège communal. Toutes
les classes ont, l'uneaprès l'autre, reçu la visite de
M. l'inspecteur, qui est parti du collège, en té
moignant sa satisfaction du résultat de la mis
sion qu'il est venu accomplir.
GARDE URBAINE.
Comme nous l'avions annoncé samedi der
nier, les habitants de la ville convoqués en trois
sections l'Hôtel de ville, ont jugé utile de
passer immédiatement au choix des^officiers et
sous-officiers de chaque compagnie. Nous de
vons ajouter que toutes ces nominations sont
provisoires, ainsi que la division des hommes
aptes faire partie de la future garde civique
en trois compagnies. Toute celte organisation
doit être entièrement refaite, quand la loi sur
la garde civique dont la chambre est saisie, sera
promulguée.
MM. Cardinael, Edouard.
Capitaine
Lieutenant
Sous-lieutenants
Sergents
Caporaux
y>
Beke, Charles.
Duval, Ives.
Devarver, Jean.
MM. Antony, Honoré.
Vancostenoble, Liévin.
Podevyn, Henri.
Ceriez, Henri.
MM. Beharelle, Jean-Henri.
Baert, Antoine.
Lapeire, Désiré.
Myle-Vandermeersch.
Rabau, Félix.
Stoffel, Charles.
Vanderghote, Pierre.
Descamp, Louis.
IX. m cabaret de la mère caritas. (Slil/e.)
L insliuot de la conservation poussa l'arquebusier se mettre en
defense, et il Gt voir le jour sa miséricorde; mais il avait le cou
rage de la langue beauooupplus développé que celui du bras; aussi,
«vaut de s engager daus une partie aussi décisive, cbercba-t-il
ramener sou auver.aire des seuliuunts de conciliation.
Ecoutez, maître Martin Gluz, tout ceci est une plaisanterie et
de vaut pas la peine que deux braves se tirent du saug tenez, je
va.s vous rendre 1 argent que je vous ai gagné, et je vous conterai
une histoire par-dessus le marché.
- Aimes-tu mieux que je t'étrangle ou que je te cloue les dés
pipes de chaque cote de la tele? répondit l'imperturbable marin.
ratr.ee vit bien alors qu il n'y avait pas biaiser, et que les bel-
les phrases n étaient plus de saison. Il se mit eu garde.
Tous deux étaient debout, séparés seulement par la table sur
laquelle ils avaient joué. La mere Carilas, assise a sou comptoir,
regardait ce duel sans trop d'émotion et sans rien faire pour le pré
venir, accoutumée qu'elle était des spectacles de ce genre, entre
les matelots qui avaient plus d'une fois transformé la salle dû caba
ret en aiène sanglante.
Ici nous ne pouvous nous empêcher de faire la réflexion que
0 r,Cfli ^nr avo'r vou'B» 0 exemple de son maître, séduire une
jeune 1 e de SaiuUMalo, était sur le point d'être puui exactement
u a meme manière que hui maître. Clément de Charolles était
moi par e poignard, Patrice allait mourir par le poignard. Le mal-
îeurcui ansien avait regardé dans les yeux de Martin Gluz. et il
y avait lu ton arrêt de mort.
Donc, tous deux se tenaient bien en face l'un de l'autre, et le
mariu s'apprêtait loger son fer entre les côtes du soldat, lorsque
la porte de la rue s'ébranla sous des coups redoublés, et uuc voix
appela Martin Gluz.
Celui-ci, reconnaissant cette voix, suspendit l'attaque et se hâta
d'ouvrir.
Monseigneur vous mande auprès de lui, dit au marin le ser
viteur du vicomte de Frapesles je vous cherche depuis longtemps.
Un ordre du capitaine de la Reine-Jeanne était pour Martin Gluz
quelque chose de sacré, et le meilleur témoignage que nous en puis«
sions fournir, c'est qu'il ne balança pas suivre celui qui venait le
cberoher, ne prenant que le temps de dire au Parisien
Je te retrouverai
Patrice crut de bonne foi que Satan avait fait un miracle en sa
faveur mais ce mot Je te retrouverai laissait une menace de
mort suspendue sur sa tête et il ne pouvait pas raisonnablement
espérer que le même prodige se renouvellerait indéfiniment pour
son salut.
Aide-toi, l'enfer t'aidera, se disait-il, et il sortit du cabaret,
suivant Martin Gluz distance. Il le vit entrer daus la maison du
prévôt et en sortir quelques minutes après, cheval, au grand
galop.
Il prit sa course et lutta de vitesse avec le chevalier, de façon
arriver presqu'eii même temps que lui a la porte Saint-Vincent
où il fallait absolument faire un temps d'arrêt pour baisser le pont,
le-vis.
La nuit était sombre Patrice, se glissant contre la muraille et le
cheval, passa le pont sans être aperçu, et fut bientôt dépassé par
Martin Gluz, qui avait repris le galop. Arrivé la côte de Paramé,
le chevalier, pour ménager sa monture, la mit au pas, ce qui permit
au Parisien de le rejoindre.
Patrice s'approoha en rampant et fendit avec son poignard le
ventre du cheval, qui tomba. Entraîné dans cette chute, Martin
Gluz avait une jambe engagée sotis l'animal, et avant qu'il eût le
temps de se reconnaître trois coups de miséricorde lui avaient troué
le cœur.
Puisqu'il avait tant fait que d'assassiner Martin Gluz Patrice
pouvait bien, sans scrupule, dépouiller le cadavre de l'argent qu'il
portait sur lui c'est ce qu'il fit, et sa récolte dépassa de beaucoup
ses espérauces. Il trouva en même temps ce qu'il ne cherehait pas,
la letlre écrite par le vicomte de Frapesles, et s'en empara sans y
attacher la moindre iraportauce, car Patrice ne savait pas lire. Mais
en revenant il se mit réfléchir que cette lettre, évidemment en
voyée par le prévôt, pouvait contenir des choses que le gouverneur
seiait bien aisé «le connaître et qui le justifieraient lui-même, d'abord
de son absence illégale, ensuite du meurtre qu'il avait commis, si
l'on venait l'en soupçonner; c'est pourquoi, la première chose
qu'il fit, en rentrant au château, fut de porter cette lettre au comte
de Charolles.
L'arrestation du vicomte de Frapesles fut la conséquence de
l'idée lumineuse qui viut Patrice la suite de son exploit noc
turne.
X. la délivrance.
Avant de procéder l'arrestation du prévôt, le comte de Charol
les avait pris ses mesures pour diriger immédiatement son prison
nier sur Ri ois, où la cour se trouvait en ce moment mais son plan
se trouva contrarié par la rencontre inattendue qu'il ht d'Alix de
Kerloguen.
Eu acceptant la-charge de gouverneur de Saint-Malo, il s'était
engagé tacitement faire triompher, dans ce petit coin de la Bre
tagne, les idées du roi François 1er, relativement l'adjonction de
la province tout eulière la couronne de France aussi, eu voyant
de près les immenses dilhcultés de cette entreprise, avait-il déployé
pour les aplanir une patience et une sagesse dignes des plus grands
éloges. La mort du sire de Bizien et l'arrivée du capitaine de la
Reine-Jeannétaient venus paralyser ses eliorls et l'éloigner plus