INTERIEUR.
7e ANNEE. - N° 728.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
JEUDI, 27 AVRIL 18 48
Feuilleton.
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TIRES ACQDIRIT EUNDO. -
YPRES, le 26 Avril.
FUTURES ÉLECTIONS GÉNÉRALES.
Ce n'est pas sans une émotion profonde, que
nous voyons approcher l'époque de la dissolu
tion des chambres. Les élections prochaines
seront un moment critique pour le pays, car
leur résultai aura la plus haute influence sur
les destinées de la Belgique. A moins d'événe
ments imprévus, la convocation des collèges
électoraux est indispensable par suite de la loi
qui abaisse le cens. Les représentants et les sé
nateurs actuellement nommés, ont été élus par
un plus petit nombre d'électeurs et ceux qui
ont obtenu la franchise électorale peuvent dé
sirer jouir de leurs droits et exercer leur part
de souveraineté populaire dans le choix des
mandataires du pays.
Mais qu'on nous permette, avant d'aborder le
fonds de la question, d'établir la situation politi
que du pays. Avant les événements de février, on
n'a pas oublié qu'il y avait deux partis franche
ment en présence en Belgique, le parti clérical,
vaincu au 8 juin dernier el le parti libéral qui
est venu aux affaires, après une lutte active et
énergique de dix ans. A peine la révolution de
février était-elle connue, que le parti rétrograde
s'est caché sous terre, criant miséricorde et im
plorant l'oubli de tous les attentais qu'il avait
essayés contre la liberté au nom de l'absolutisme
clérical. C elait un revirement complet, le libé
ralisme était aux yeux des catholiques le seul
parti désormais possible et tous ses adversai
res d'hier s'empressaient de s'abriler sous sa
bannière. C était l efifet de la peur. La con
science peu nette des chefs du parti clérical était
troublée et l'on s'avouait en secret, qu'on avait
uu mauvais compte rendre au pays. Cepen
dant un fait parut constant, c'est qu'on lomba
d'accord qui,si au mois de février, le ministère
de Theux-Malou avait été aux affaires, des trou
bles auraient immédiatement surgi dans le pays,
parce que celait une administration réaction
naire, contraire aux vœux et aux sympathies de
la nation. Les catholiques mêmes se félicitaient de
ne plus devoir porter la responsabilité du pou
voirel depuis ce moment, une union sincère
parut s établir entre toutes les fractions du
parlement.
A son avéûement, le ministère libéral avait
stipulé une modification la loi électorale,
c'était l'adjonction des capacités, dans les limites
de la constitution. Ce projet était soumis la
LA QUIQUENGROGNE.
XI. maléfices et sorcellerie. (Suite.)
Voyant qu on ne pouvait espérer tirer de cette malheureuse créa
ture aucun éclaircissement, le gouverneur se retira pour continuer
ses recherchesmais ou ne découvrit pas la moindre trace d un
meurtre. La disparition du capitaine Cléiueut devint au bout de
quelques jours un fait dont il n'y avait plus douter, mais celte dis
parition suffisait.elle pour continuer le lémoiguage d'une jeune
fille s'accusant de l'avoir poignardé.alorssurlout que oelte jeune fille
ne jouissait pas de la plénitude de sa raisou
11 devait donc y avoir dans tout ceci un mystère dont le sens res
terait caché probablement jusqu'au jour où les hostilités cesseraient
d'exister entre la ville et le château, et où il serait possible de pren
dre des informations précises sur la manière dont Raoulelte de
Bmen avait été introduite dans la citadelle.
De conjecture en conjecture, le comte de Charollescn était venu
espérer que le capitaine Clément était au pouvoir des Malouius qui
se vengeaient, par sa captivité, du meurlie de leur prévôt, et de son
côté, il avait voulu se faire de la personne de Raoulelte un otage qui
lui ré^ ondit au besoin de la vie de son fils. Seulement, Déjugeant pas
chambre, quand les événements de France ont
éclaté. Le ministère bien inspiré sous le point
de vue politique, a cru que cette réforme
trop insignifiante en présence des mouvements
qui emportaient l'Europe, allait être écrasée
sous le parallèle qu'on ne pouvait manquer
d'établir entre nos lois électorales et celle que
la France allait se donner. D'un autre côté, il y
avait les fougueux qui, sans vouloir connaître la
portée d'une diminution de cens, sur le résultat
des élections, en voulaient au nom d'un prin
cipe, l'abaissement quand même. Le ministère
crut pouvoir satisfaire tout le monde, en descen
dant jusqu'à la dernière limite de la constitution
el le cens uniforme vingt florins pour tout le
pays, fut adopté.
Mais aujourd'hui est venu le moment de
pressentir l'effet probable de celte mesure sur
les choix que feront les électeurs et hâtons-nous
de le dire, le désenchantement commence
percer. Quelques-uns de ces idéologues qui ne
procèdent que par principes, commencent se
douter que l'abaissement du cens loin d'avoir
fortifié le parti libéral, n'a en réalité, que donné
le moyen nos adversaires, de ressaisir la ma
jorité la chambre.
Il est hors de doute que si en 1842, le parti
catholique, au lieu de résister toute demande
de réforme électorale, s'était avisé d'abaisser
lui-même le cens, il aurait posé un acte de très-
bonne politique son point de vue, el aujour
d'hui il est probable que le parti libéral, au lieu
île désirer l'extension de la franchise électorale,
voudrait la voir restreindre. L'abaissement du
cens ne serait que demi-mal, si le parti catho
lique ne se préparait intervenir activement
dans la lutte. Déjà les craintes que la républi
que française avaient soulevées, sont amorties
et les partis reprennent tout doucement leurs
anciennes allures.
Déjà le clergé intrigue au confessionnal con
tre les journaux libéraux et peut-être aussi en
faveur des candidats futurs la représentation
nationale et au sénat. Enfin, nous croyons qu'il
est nécessaire de ne plus se faire illusion de
prendre leur juste valeur les protestations des
journaux du clergé et de s'accoutumer l'idée
de lutter avec la caste sacerdotale comme il y a
quelques mois.
Nous avons toujours eu peu de confiance
dans l'abnégation du parti clérical, aucun parti
ne se plie mieux tous les rôles, aucun nejoue
mieux tour-à-tour et le maître hautain et le
conseiller insinuant. Mais dans ses transforma
tions successives, il porte un cachet indélibile,
il est toujours facile reconnaître. Après 1830,
il n'a pas immédiatement leve le masque, il a
travaillé souterrainement pendant trois ou qua
tre ans et le moment venu, il s est montré dé
couvert aux yeux étonnés des libéraux de bonne
foi, qui ne pouvaient s'expliquer par quel fatal
aveuglement, ils s'étaient laisse berner.
Nous considérons cette recrudescence de lutte
entre le parti catholique et 1 opinion libérale
comme un mauvais symptôme pour la tran
quillité de la Belgique. Il est un fait hors de
doute, c'est que les doctrines catholiques sont
peu libérales et ne jouissent pas de la sympa
thie publique. Travailler les faire triompher,
c'est aller contre le courant aujourd'hui qu'on
voudrait saturer les sociétés de libertés politi
ques. 11 nous paraît surtout inopportun dans
l'intérêt même du parti clérical, de descendre
dans l'arène des partis. S'il ne réussit pas, il est
perdu pour toujours. S il a le malheurde triom
pher, il jette l'irritation dans le pays et alors il
serait impossible de dire jusqu'où le méconten
tement et la désaffection pourrait le pous
ser. Dans les circonslances graves que les évé
nements ont amenées pour la Belgique, tous
les hommes indépendants et éclairés, dévoués
aux institutions du pays, doivent concourir de
tous leurs moyens faire sortir des élections
une législature pour ainsi dire entièrement li
bérale. Nous dirons dans un prochain numéro,
pourquoi nous attachons ce résultat lexis-
tence pour ainsi dire de la Belgique.
Lundi dernier, la commission qui a organi
sé la fête civique, offerte au magistral de !a ville,
au mois d'Août dernier, est venue faire hommage
au conseil communal réuni dans la salle de
ses séances, du rapport fait par M. Frédéric
Gorrissen, professeur de rhétorique au collège
communal, au nom de la commission, ainsi
que du chant allégorique, paroles de M Albert
Denoyelle, professeur au collège communal et
musique de M. Duhayon-Brunfaut. Un exem
plaire du rapport et un du chant ont été remis
M. le bourgmestre, pour être déposés aux
archives, et après une allocution de M. le séna
teur Malou, des membres de la commission ont
remis chaque conseiller un exemplaire du
rapport et un de ce chant allégorique qui a
fait sensation Bruxelles au concours de chant
d'ensemble. M. le bourgmestre a répondu M.
Malou qu'il était excessivement sensible, ainsi
que le conseil, celte marque d'estime, et que
convenable de garder cette jeune Glle prisonnière dans la citadelle,
il la fit conduire Blois, eu l'adressant madame Louise de Savoie
laquelle il faisait parvenir en même temps le récit de ce téné
breux événement.
Cette translation faillit coûter cher la pauvre Raoulette. Elle
fut d'abord traitée avec douceur par la reine-mère qui avait pris
cœur d'arriver la connaissance de la vérité, et qui espérait que ses
bons procédés lui attireraient la confiance de la jeune fille mais
s'étant aperçue que oe moyeu ne lui réussissait pas. elle commença
changer de manières son égard, la tint plus étroitement renfer
mée, et ne donna accès auprès d'elle qu'à un ecclésiastique chargé
de provoquer une confession laquelle Raoulette se refusa. Celui-ci
ne pouvant attribuer qu'à une déplorable impiété l'obstination avec
laquelle elle repoussait l'intervention d'un ministre de l'église
soupçonna la jeune Bretonne de sorcellerie et fit'partager cette opi
nion madame la Régente qui, ne croyant plus devoir garder de
ménagement, livra la coupable la justice séculière.
En présence de ses juges, Raoulette ne voulut pas se départir des
réponses qu'elle avait faites au gouverneur de Saiut-Malo,et ma
dame Louise de Savoie elle fut condamnée mourir par le feu,
après qu'elle aurait été préalablement soumise la question ordi
naire et extraordinaire, pour la forcer avouer qu elle avait des
communications avec l'esprit-malin et que c'était par magie et sor
cellerie qu'elle avait fait disparaître le capitaine Clément.
La publioité donnée aux débats de ce procès, suscita un défen
seur la condamnée, dont la présence Blois avait été un secret
pour tout le monde, jusqu'au jour où le tribunal's'était assemblé
pour la juger.
Le chevalier d'honneur de madame Renée de France, le jeune
baron de Rohan, gentilhomme de Bretagne, allié la famille de feu
le sire de Bizien.chez lequel il avait vu souvent le vicomte de Fra-
pesles, avant le départ de oe dernier pour l'Amérique, était venu par
curiosité voir juger la prétendue magicienne, et il n'avait pas été
médiocrement surpris en reconnaissant la jeune fille qu'il avait vue
enfaut Saiut-Malo, et qu'il retrouvait sous le coup de la condam
nation la plus infamante qu'il fut possible d'infiiger alors.
Bit n que l'interrogatoire qu'il avait entendu d'un bout l'autre
le disposât assez penser qu'il pouvait y avoir de la sorcellerie dans
celte mystérieuse affaire, cependant il crut son honneur engagé
éloigner d'une personne qui était sa compatriote et presque sa pa
rente, une accusation dont il rejaillirait quelque chose sur lui-même,
et il supplia la princesse Renée d'intercéder auprès de la reiue-wière,
afin que Raoulette ne fût pas atteinte par le terrible châtiment dont
ellle était menacée.
Renée de France fut vivement intéressée par les détails que lui
donna le baron de Rohan sur notre héroïne, et elle se montra d'au
tant plus empressée seconder ses désirs que son grand savoir la
mettait l'abri de toute idée superstitieuse et qu'elle ne croyait
point aux sorciers. Elle alla visiter Raoulette dans sa prison la
questionna sans en rien tirer de plus que ce qu'elle ayait répondu,