JODBIVAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
JTeiaill, 14 Septeijbre 1848.
Vires acquirit eundn.
INTÉRIEUR.
Maurice.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes.Réclames, la ligne 50 centimes.
Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRES, le 13 Septembre.
La liberté de la presse vient d'être enterrée par l'as
semblée nationale de France. Sous la république, le droit
de publier ses idées l'aide de la lettre moulée, n'existe
plus. La feuille qui oserait se permettre une réflexion
mal-sonnantes'exposerait se voir suspendue ou sup
primée. Par un vote solennel, l'assemblée nationale vient
de déclarer par 505 voix contre 248 que l'état de siège
conférait au président du conseil, le droit de suspendre
les journaux, sans formalités préalables, ni sans respon
sabilité.
Le peuple français qui trouvait le régime de la monar
chie déchue trop tyranniquequelles réflexions doit-il
se livrer, actuellement qu'à Paris, le régime du sabre
tient lieu de celui des lois. Les hommes qui ont appliqué
et défendu la mise en état de siège de la ville de Paris,
sont les mêmes qui, en 1832 et 1834, ne trouvaient pas
de mots assez énergiques pour foudroyer le gouverne
ment de Juillet qui avait été forcé de recourir une pa
reille extrémité. Que de rapprochements piquants l'on
pourrait faire entre les doctrines des hommes au pouvoir
aujourd'hui et leurs écrits par lesquels ils battaient en
brèche un ordre de choses qu'ils avaient contribué
fonder.
Il est dans la nature des hommes de rechercher le
changement, et souvent on trouve, au lieu d'une amélio
ration qu'on espérait, une position pire que celle dont on
était si fatigué. C'est ce qui est arrivé la France, et au
jourd'hui la forme républicaine qu'un certain nombre
d'individus est parvenu imposerrépond beaucoup
moins aux besoins légitimes de la société française que
le régime monarchique qu'on a renversé.
Le général Anoul est arrivé en cette ville, avant-hier,
pour passer l'inspection de la Gendarmerie qui se trouve
disséminée dans l'arrondissement. Il a eu lieu d'être
satisfait de la tenue et des manœuvres de cette troupe
d'élite, car le choix fait pour le recrutement de la gen
darmerie est sévère, et les hommes qui en font partie sont
pour la plupart des anciens militaires. On nous a dit
qu'il a montré toute sa satisfaction au lieutenant Kempen,
de résidence Ypres, du résultat de son inspection.
Hier, le comité de la Société d'agriculture s'est réuni
au local de l'exposition pour procéder l'examen des oh
jets exposés et pour désigner les exposants qui méri
tent une récompense. Après avoir accompli ces opéra
tions, les membres se sont rendus chez M. le commissaire
d'arrondissement, leur président, qui les avait invités
un dîner, qui a réuni les personnes qui se sont le plus
intéressées au succès de la première exposition agricole.
iv. one honnête femme. (soite.)
Quand il arriva le lendemain l'hôtelle banquier
était déjà sur pied et l'attendait avec impatience.
Ah! vous voilà enfin s'écria-t-il je venais, mon
cher, d'envoyer chez vous.
L'affaire est donc bien sérieuse
Vous allez en juger.
Le baron approcha son fauteuil de celui de Maurice et
lui dit voix basse, d'un air effrayé
Il peut en résulter les conséquences les plus fâ
cheuses pour mon ménage.
Et Maurice redoubla d'attention.
Je vous dirai, mon cher, continua le banquier, que,
grâce mon adresse, ma femme a en moi la confiance la
plus complète. Je ne vous parle pas de son amour, c'est
connu, et quoique souvent cela me gêne, je suis bon
mari et ne lui en veux pas; mais cet amour deviendrait
un tourment et un enfer, je n'aurais plus ni repos ni li
berté si elle ne se doutait de quelque chose, si le moindre
soupçon venait troubler sa tranquillité ou éveiller sa
jalousie. C'est ce qui est près d'arriver... si vous ne me
vene? pas eu aide.
On nous adresse de Poperinghe la lettre ci-jointe,
que nous insérons avec empressement.
Monsieur le rédacteur du Progrès,
Le comité libéral de Poperinghe étant d'avis de publier
une suite d'articles concernant l'administration commu
nale de cette ville, l'effet d'éclairer l'opinion publique
sur les abus qui s'y commettent tous les jours et les ré
formes indispensables qu'il importe d'y introduire, a cru
ne pouvoir mieux commencer cette publication que par
'exposé d'un des principaux griefs qui pèse ici sur les
habitantset dont le redressement projeté par le parti
progressiste a surtout été la cause de l'échec qu'il a subi
aux élections communales
Si la tentative faite au 22 Août par quelques hommes
généreux et dévoués s'était uniquement borné amener
la réalisation d'une réforme partielle dans l'administra
tion, peut-être le parti qui tient depuis si longtemps la
ville sous sa domination eût-il pu la tolérer, tellement le
besoin d'une modification ou d'un changement dans la
composition du conseil communal; se fait vivement sentir.
Mais côté de cette question de réforme administrative
restait une difficulté résoudre. Les hommes que les
électeurs éclairés et indépendants désignaient spéciale
ment pour prendre place au conseil étaient réputés libé
raux, et en cette qualité n'auraient-ils pas manifesté le
désir de voir par eux-mêmes de quelle manière était
employé le subside de 2,500 francs que reçoit annuelle
ment le collège épiscopal de. cette ville? N'auraient-ils
pas projeté dans le conseil communal, la formation d'un
comité d'inspection, comme cela existe partout ailleurs
pour tous les établissements publics subsidiés?... Vous
voyez, monsieur le rédacteur, que la question est déli
cate, car, comme jusqu'ici la ville n'a eu l'honneur que
d'être le très-humble caissier de Mr le principalelle n'a
jamais eu rien voir dans l'organisation du collège uni
quement et exclusivement faite pour le parti catholique.
L'instruction qu'on y donne ne répond qu'à cette fin, et
le latin constitue lui seul la branche la plus importante
de l'enseignement. L'étude de la langue française, des
mathématiques et d'autres branches indispensables, si
elle n'y est pas totalement négligée, est généralement
reconnue insuffisante pour les jeunes gens qui ne se
destinent pas l'état ecclésiastique, tel point que beau
coup de pères de famille se trouvent dans l'impérieuse et
inévitable nécessité d'envoyer leurs enfants, lorsqu'ils ont
atteint un certain âge, dans quelque pensionnat on dans
une autre institution, où l'enseignement se trouve mieux
être en rapport avec les besoins de l'époque.
Certes, cette initiative de la formation d'un comité
d'instruction dans le sein du conseil ne peut que recevoir
l'approbation unanime de tous les hommes bien pen
sants l'intérêt personnel des habitants exige que l'in
struction moyenne soit plus large, et si les subsides aux
quels la ville se résout actuellement, étaient reconnus
insuffisants, il faudrait de toute nécessité une augmenta
tion de sacrifices. La ville, comme j'ai déjà eu l'occasion
de le dire, accorde annuellement un subside de 2,300
francs au collège mais c'est bien sous la condition tacite
que l'enseignement qu'on y donnera profite la généra
lité des citoyens et non pas une classe particulière ou
privilégiée. Il faut que cet établissement qui, par le fait
seul de son existence comme, collège épiscopal subsidié
par la ville, rend impossible côté de lui toute institu
tion rivale, réponde tous les besoins de l'instruction et
offre toutes les garanties qu'on est en droit d'en exiger.
Il ne suffit pas pour les habitants de Poperinghe que
l'enseignement y soit uniquement destiné former des
prêtres et quelques rares avocats ou médecins, tout le
monde ne peut pas prétendre ces états mais il faut en
core qu'on y donne une instruction convenable aux jeu
nes gens qui n'aspirent aucune de ces professions.
Il est donc de la plus haute importance que l'organi
sation du collège tende ces deux fins et remplisse ce
double but. L'unique moyen pour y parvenir, c'est la
formation, comme je viens de le dire, d'une commission
de surveillance dont le principal ferait partie de droit, et
dont les attributions communes seraient d'organiser les
différents cours de l'enseignementet de statuer sur
l'admission des professeurs appelés y diriger les études.
Mais cette prétention légitime, manifestée par le comité
libéral, n'a pu trouver grâce auprès du parti dominant,
accoutumé depuis longtemps tout faire par lui-même
et ne voulant pas tolérer la moindre gène dans ses allu
res. En adversaire rusé, il n'a nullement ébruité la série
d'améliorations que le parti progressiste eût introduite
dans l'enseignement moyen, dans l'intérêt bien entendu
même de la ville, mais il a fait adroitement répondre par
ses séides, que les libéraux, une fois au pouvoir, étaient
d'intention de provoquer, de manière ou d'autre, la sup
pression du collège, et par là, ajoute-t-on charitable
ment, ils prouvent qu'ils en veulent même la religion
et ses ministres.
Jugez, Monsieur, de l'effet qu'a dû produire sur nos
Disposez de moi, monsieur, vous le pouvez.
C'est ce que j'ai fait, lui répondit le baron en lui
serrant la main, certain que vous ne me désavoueriez pas.
Qu'est-ce donc et de quoi s'agit-il? dit Maurice avec
quelque inquiétude.
Le voici: Imaginez-vous que cette petite Fœdora,
qui ne fait que des extravagances, avait acheté des dia
mants ce n'est que demi-mal mais vous allez voir l'ab
surdité!... elle en envoie toucher le prix ici... chez
moi... comme si j'étais garçon comme s'il n'y avait que
les garçons dans le monde Je ne sais en vérité où elle a
de tête et quoi elle pense, mais la facture est arrivée
hier pendant que ma femme était là... Refuser de solder
ce mémoire entraînait une foule dèxplications plus dé
sastreuses les unes que les autres, et puis un banquier,
lorsqu'il tient son crédit, doit toujours payer bureau
ouvert... J'ai donc payé, et sans hésiter...
En vérité! s'écria gaîment le jeune homme.
Parbleu ma femme était là, et pour lui ôter tout
soupçon, j'ai dit d'un air indifférent Je sais ce que c'est
C'est pour Maurice, dont je suis le banquier.
Maurice poussa un cri de désespoir.
Comment, monsieur, un tel mensonge, sans m'en
prévenir, sans penser au tort que cela peut me faire.
Du tort et lequel Ne vous avisez donc pas de me
démentir, d'autant qu'il m'a semblé, au trouble de ma
femme, qu'elle avait conçu quelque doute.
Elle était troublée s'écria Maurice avec anxiété et
en même temps avec-joie.
Oui, vraiment parce qu'on a beau avoir de l'esprit
et de l'aplomb, quand on est pris ainsi l'improviste et
au dépourvu, on a toujours un air gauche et embarrassé
qui donne des soupçons... Si j'avais eu le temps de ré
fléchir et de combiner, j'aurais inventé autre chose.
Cela aurait mieux valu, dit Maurice d'un air con
sterné.
C'est ce que nous avons fait hier avec Fœdora,
qui j'ai reproché son étourderie, et, pour la réparer (car
elle a du bon), elle a inventé un moyen bien supérieur au
mien, et qui ne permettra pas ma femme de conserver
le moindre doute.
11 faut l'employer, et ,1e plus tôt possible! s'écria
vivement Maurice.
C'est ce que nous allons faire ici même, ce matin, si
vous nous secondez.
Comment, je vous suis encore nécessaire
Indispensable.
Et quel rôle me destinez-vous
Le plus aisé, rien faire, qu'à attendre la réplique
qu'on vous donnera.