JOURNAL D'ÏPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Dimanche, 10 Décembre 1848.
Vues acquiril eundo.
INTÉRIEUR.
Le capitaine Mandrin.
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ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs.
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YPRES, le 9 Décembre.
LES ÉCONOMIES.
Depuis que la chambre des représentants est réunie
clic a bien perdu du temps. A la recherche d'économies
elle a soulevé des questions qui ne promettent pas que la
session soit très-fertile. Loin de là, bien qu'elle n'ait pas
eu de vérification de pouvoirs, ni d'adresse voter, elle
est moins avancée que les législatures précédentes, qui
au moins, cette époque, avaient discuté presque tous
les budgets. La cause gît, croyons-nous, dans le grand
nombre de nouveaux membres que les dernières élections
ont investi du mandat de représentant. 11 en résulte que
les travaux dans les sections n'avancent pas aussi rapide
ment. Puis chacun a un petit projet, une légère améliora
tionune notable économie présenter, produire dans
les sections. Heureux encore s'il ne le fait pas par un
amendement impromptu jeté au milieu des débats de la
chambre et qui y jette le désordre et le désarroi.
Aujourd'hui ce sont les économies qui sont l'ordre
du jour. Pour obtenir une diminution de cent mille francs
sur un budget, on risquerait de donner lieu un million de
dépenses nouvelles et sans s'en douter encore. Malheu
reusement on n'examine en rien les conséquences des
votes qu'on émet, et du moment qu'il s'agit de consacrer
une Iésinerie, on vote tour de bras, sans s'inquiéter des
résultats qui pourraient s'en suivre.
La chambrepar sa conduite irréfléchie et inconsidé
rée, a déjà produit beaucoup de mal. Les fonctionnaires
sont inquiets sur la position qu'ils ont si dillicilement
obtenue. Celui qui travaille et fait son devoir, se décou
rage, car il semble par le vent qui souille, que le fonc
tionnaire public est un parasite qu'il faut réduire la
portion congrue sans retard. Ensuite, par la loi sur les
incompatibilitésles employés du gouvernement de tout
grade sont exclus de la représentation nationale et, par
conséquent, cette classe de la société n'a plus de défen
seur de ses intérêts la représentation nationale. Le
ministère qui doit sauvegarder la position des employés
de l'état, leur a déjà fait subir de grands sacrifices, et la
chambre parcimonieuse l'excès, veut dépasser toute
limite et rogner sans pitié ni merci. On doit convenir que
l'esprit qui anime la chambre n'est ni digne d'un des
premiers corps de l'état, ni politique, et que s'il ne se
modifie bientôt, on en verra des effets que ne pourront
IY. UN JOUR MÉMORABLE. (Suite.)
Près d'une jeune fille privée de mère, la bonne gouver
nante avait pris quelque chose de ce titre saintet sa
condition s'en était relevée. Elle avait passé du grade de
nourrice celui de dame de compagnie; en récompense
de son attachement et de ses services, elle était mainte
nant l'hôtel sur un pied d'égalité avec les maîtres elle
paraissait au salon et table, même les jours de réception.
Aussi pour reconnaître autant que possible cette bonté,
elle mettait ces jours-là son immense coiffe de linon
rubans bouton d'orsa robe de pékin mordoréeet son
fichu clair empesé, sur lequel pointait sa croix de diamants.
Assise très-près de mademoiselle de Cbavailles, elle
lançait des regards en dessous au bel étranger, et les ra
menait ensuite sur sa jeune maîtresse.
llein mademoiselledisait-elle tout basquel beau
cavalier
Tais-toi doncil pourrait t'entendre.
Il avait entendu, en effet; le baron d'Alvimar avait
l'ouïe assez fine et l'esprit assez exercé, pour ne pas perdre
un mot de ce qui se disait vers la fenêtre, tout en conti
nuant son entretien de la manière la plus suivie.
A quoi penses-tu donc, Blondeau? dit la jeune fille
déjà fâchée que sa gouvernante lui eût obéi.
Je pense, répondit celle-ci en ramenant toujours sur
le baron d'Alvimar des yeux dont l'âge n'avait pas trop
compenser beaucoup près toutes les lésineries qu'on
aura pratiquées.
Les traitements diplomatiques ont beaucoup eu souf
frir. On envoie des chargés d'affaires Constantinople
au prix de 15,000 francs; il faut l'avouer, c'est bon
marché. Que fait-on avec 15,000 francs de revenu
Bruxelles? une figure très-ordinaire. Et Constantinople,
la vie est-elle meilleur marché? non. En ce cas, il faut
croire que l'agent qu'on y enverra, s'il ne possède une
fortune privéereprésentera la Belgique tirant le diable
par la queue, et mettant ses représentants l'extérieur
la demi-rationce qui donnera de nous une haute idée
aux pays avec lesquels nous devons entretenir des relations.
Avouons que cela est ridicule, d'un ridicule achevé. Si
l'on ne veut pas de diplomatie, soit. Rappelez tous les
agents et faites comme les Chinois, brisez toute relation
avec les autres peuples. Cela se conçoit plus facilement
que l'envoi d'agents qui devront faire des sacrifices per
sonnels pour soutenir l'honneur de leur pays ou se tenir
l'écart, faute de pouvoir vivre convenablement. Les pre
mières discussions donnent une pauvre idée de la chambre
assez mal avisée pour croire que l'État seul possède le
privilège de garder de bons employés sans les rémunérer
convenablement, tandis que l'industriel, le commerçant
s'ils veulent être bien servis, sont obligés de faire des sa
crifices plus coûteux que le gouvernement. Cc système
ne durera pas longtemps, car bientôt on s'apercevra que
le vieux dicton est encore juste et qu'on ne sera servi
que pour son argent.
Par erreur, dans le dernier compte-rendu du conseil
communal, nous avons dit que les cartes d'entrée en ville,
pendant la fermeture provisoire des portes, auraient été
valables jusqu'au lr Mai 1849; c'est jusqu'au 31 Mars
qu'il faut lire.
Le roi de Prusse vient de dissoudre l'assemblée natio
nale dont la majorité était radicale, et d'octroyer une
constitution. C'est le seul moyen de faire renaître la tran
quillité en Prusse.
Nous apprenons que les deux membres de la Compagnie
spéciale d'artillerie qui ont été exemptés du service de la
garde civique, ont résolu de donner une preuve de sym
pathie, la demi-batterie. Pour démontrer combien ils
sont attachés cette institution, ils viennent d'inviter
indistinctement tous les artilleurs un banquet qui aura
éteint la noire prunelle, je pense que cela ferait une jolie
figure de mari l'église Notre-Dame et au bal de noces.
Chut! ne dis pas cela*
Oui et plus jolie que celle de M. David.
Que peux-tu trouver de mal en cc jeune homme?
11 ne rit jamais, il ne porte que des habits noirs, et
quand il vous regarde avec son air mystique et contrit
on dirait qu'il lit les psaumes de la pénitence sur votre
visage.
Fi Blondeau toi qui es si pieuse et qui aime tant
voir chez les autres des sentiments religieux
Il y a temps pour tout, et M. David ne trouve jamais
celui de vous faire la cour.... Je suis sûre que notre beau
baron s'en tirerait bien mieux. Il a des yeux une bou
che! un sourire! qui feraient l'amour tous seuls! sans
qu'il le voulût lui-même.
Tu trouvesdit Isaure en souriant.
Et quelles belles manières quelle grâce quelle
toilette
Tu en parles comme de mes oiseaux des Indes, tu
ne vantes que son plumage.
En ce momentayant soulevé les yeuxelle rencontra
un regard d'Alvimar où semblait se peindre, avec l'extase
la plus ardente, une tendre piété. Elle tressaillit, pencha
la tète sur son métier et travailla en silence.
Mon Dieu! que faites-vous donc, mademoiselle,
reprit au bout d'un instant la duègneon dirait que vous
brodez points perdus voilà votre bouquet de rose tout
lieu Jeudi prochain l'Hôtel de Gand. Nous aimons
constater ce fait, parce qu'il prouve tout l'intérêt que por
taient cette compagnie, des membres qui n'ont qu'un
regret, celui de se séparer de ceux dont ils s'estimaient
heureux et fiers d'être les camarades. Communiqué
Hier soir, une sérénade a été donnée devant la maison
habitée par M. Emile Yandcn Bogaerde, Bruges, qui
vient d'être nommé ingénieur-mécanicien du chemin de
fer de la Flandre occidentale.
Cette sérénade avait été organisée par les ouvriers des
ateliers
On nous écrit de Westvlctcren, en date du 7 Décembre
1848:
Hier a eu lieu dans cette communel'installation du
bourgmestrele sieur Cappoenhomme généralement
aimé et estimémais qui avait rencontré de l'opposition
sa réélection, par suite de la fermeté qu'il avait montrée
l'endroit du curéqui voulait jeter la commune dans
des dépenses exorbitantespour satisfaire ses caprices.
A une heure donc, les échevins se sont rendus la de
meure du bourgmestre pour le conduire, sur un char
orné de drapeaux la commune. Sur son passage, cinq
portes de triomphe avaient été élevées. Une garde d'hon
neur de vingt cinq cavaliers l'accompagnait et plus de
soixante personnes armées de fusils et formées en pe
lotons, escortaient le cortège qui, arrivé l'aggloméré du
village, a été accueilli au son des cloches et des vivais de
la population.
Des discours ont été prononcés par les échevins pour
féliciter le bourgmestre sur sa nomination. Deux cents
pains ont été distribués aux pauvres et dix hectolitres de
bière ont été mis en perce. La fête a duré jusqu'à dix
heures du soir et le concours de personnes qui ont assisté
l'inauguration du bourgmestre a été très-considérable,
chacun voulait contribuer donner de l'animation la
fête.
Ajoutons cependant que le clergé de la paroisse, qui
avait fait tous les efforts, pour empêcher le bourgmestre
d'être réélu et qui aurait bien voulu un autre chef de la
commune, brillait par son absence. Le curé s'était absenté
le jour avant la fête. Du reste, tout s'est passé sans le
moindre désordre et rarement les habitants de Weslvle-
teren ont eu l'occasion de voir une cérémonie qui a donné
lieu des manifestations plus joyeuses.
barbouillé de fils bleus
Isaure n'eut pas l'embarras de répondre cette obser
vation, on vint annoncer que le diner était servi.
La jeune fille qui, pour la première fois, avait une émo
tion tenir secrète et voulait se tirer son avantage des
honneurs de la table qu'elle était chargée de laire prit
une. assurance et une vivacité d'emprunt qui colorait ses
joues et animait son regard, tandis que le trouble enfermé
dans son âme, donnait ses traits une expression qu'on
ne leur avait jamais vue. Elle n'était habituellement que
jolie, elle devint belle en ce moment.
Malgré les diverses préoccupations qui absorbaient se
crètement l'esprit des convivesl'arôme des vins délicats,
des liqueurs choisies, ce léger enivrement, qui voltige
dans le cerveau sans toucher la raison, amena la fin
du repas, un moment de gaîté et d'oubli, dont on sentit
le besoin de jouir. On ne voulut pas encore s'occuper
d'une affaire agréable, mais sérieuseen ce qu'elle tou
chait tout ce qu'il y a de plus imposant dans la vie.
M. de Chavailles fit apporter une table de piquet sous
la lente garnie de lauriers roses qui ombrageait l'entrée
du salon, et après s'y être placé avec le père dominicain,
engagea sa fille profiter des derniers moments du jour
pour montrer M. d'Alvimar les plantes étrangères qu'elle
avait réunies dans son jardin.
Isaure, accompagnée du baron et de son inséparable
Blondeau, descendit les degrés de la terrasse.
David lit un mouvement pour les suivrepuis il s'ar-