JOURNAL D'TPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. N° 709. 8e Année. Dimanche, 31 Décembre 1848. Vires acquint eundo. INTÉRIEUR. Le capitaine Mandrin. ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs. INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes.Réclames la ligne 50 centimes. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout cc qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies. YPRES, le 30 Décembre. Si l'année 1848 est remarquable par la grandeur des événements qui ont eu lieu, ainsi que par leur explosion inopinée, elle ne l'est pas moins par les erreurs, les so- phismes et les utopies qui, pendant son cours, ont égaré les populations. Comme toujours, l'admiration s'est atta chée ce qui aurait dû être conspué, et tel individu qui aurait dû passer pour un fou ou un monomanc et être enfermé dans une petite maison, a été écouté, a formé des sectaires, non moins dénués de bon sens que leur maître. Les paradoxes les plus horripilants ont attiré l'at tention publique pendant l'incandescence des passions révolutionnaires. Des hommes sages, paisibles, ont eu de la peine se garantir de cette épidémie. Pendant vingt ans, nous avons vu un certain nombre d'hommes audacieux, mais illogiques, lutter pour la li berté en France, et peine une révolution qui fut une surprise, leur donne-t-elle le pouvoir, qu'ils font violence aux populations pour leur faire subir un régime qui leur est antipathique. La république pas plus que l'avènement de Louis-Philippe en 1830, n'a attendu la sanction du peuple. Et cependant les Lcdru-Rollin, les Marrast, jouis saient, avant le 24 février, d'une certaine réputation. On se plaisait les élever sur un piédestal ou plutôt, los ar tistes en complots, les amateurs d'émeutes, les conspira teurs émérites se plaisaient leur créer une célébrité factice, qui n'aurait jamais dû sortir des antres des socié tés secrètes. Ce M. Marrast qui se gaussait si agréable ment dans le National de ce fastueux M. Sauzet qui avait, comme président de la chambre, cent mille francs, peine avait-il pris possession du fauteuil présidentiel de l'assemblée nationale, qu'il a laissé demander une indem nité de dix mille francs par mois, donc vingt mille francs déplus que l'ancien président de la chambre des députés. On passionnait avant le 24 février, la France pour des en treprises impossibles. Les casse-cous politiquesne croyaient pas leur avènement au pouvoir si prochain. Aussi quel changement la politique extérieure de la France a-t-elle subi sous leur règne? Aucun, la Pologne n'a pas été dé livrée, et l'Italie est toujours au pouvoir de l'Autriche. Cette politique qu'on reprochait si aigrement M. Gui- zot, on n'a pas même assez d'énergie, ni de connaissan ces pour la diriger comme lui. Aussi la 1 rance, par le suffrage universel, vient de faire un retour sur elle-même et pour président de la répu blique, cinq millions et demi de suffrages viennent d'é lever sur le pavois un ancien prétendant. Les républicains de la veille, de l'avant veille et de naissance ont pu se compter. Us sont peine un million et demi, y compris environ deux cent mille fonctionnaires. Quant aux répu blicains socialistes, les barbares de l'époque, ils sont peine un demi million; mais s'ils sont en petit nombre, ils font du train de façon ce qu'oij les croie innombrables. Une remarque que l'on peut faire dans un temps de troubles, c'est que la sympathie souvent se fourvoit et se porte sur des individus qui ne le méritent pas le moins du monde. Des hommes ardents tentent souvent des entre prises contre l'ordre établi qui font beaucoup de victimes. On aurait tort de croire qucce soient ceux-ci qui excitent la commisération; loin de là, qu'un des promoteurs du désordre soit victime de ses mauvaises passionson pro clame un deuil général comme il est arrivé pour l'exécu tion de Robert Blumqui nul mal ne serait arrivé, s'il n'avait couru Vienne pour attiser le feu de l'anarchie. S'il a été victime de son ardeur révolutionnaire, tant pis pour lui, la légalité n'est pas en sa faveur. Quant nous, nous croyons que des victimes innocentes de ces terribles événements sont plus plaindre et cependant qui s'en occupe dans ces moments de désordre moral et politique? Les listes de souscription pour le banquet de l'agri culture, qui aura lieu Samedi, C Janvier, se couvrent de nombreuses signatures; toutes les autorités civiles et mi litaires du cirer-lieu d'arrondissement y assisteront. VIllE D'YPRES. Conseil Commexil. Séance publique du Vendredi, 2(J Décembre 1848. Présents: MM. le Baron Vandeiisticiiele de Maubcs, bourgmestre, président; Alpii. Vanden Peereboom et Iweins-Fonteyne échcvins; Pierre Beke, Gérard Van- dermeerscii ClIAIlLES VaNDE BroL'KE boedt-lucien, Le- graverand, martin Smaelen edouard CaRDINAEL, AuGUSTE De Gqelcke, Ernest Merguelynck Boedt, avocat, Louis Annoot, conseillers. Il est donné lecture, par M. le secrétaire, du procès- verbal de la séance du 4 décembre. La rédaction en est approuvée. M. le président donne communication d'unelcltre écrite par M. Auguste Bohm, pour remercier l'autorité commu nale d'avoir ajoute une médaille commémorative aux ar mes de la ville, la récompense nationale qu'il a obtenue l'exposition de Bruxelles. Il manifeste en très-bons termesla reconnaissance dont il est pénétré pour ses concitoyens et l'autorité communale, sous les auspices de laquelle il a fait les premiers pas dans sa carrière d'artiste et qui l'a toujours guidé depuis. Le compte de l'exercice 1847 de l'administration des (Suite.) YII. une nuit. En étant Isaure la vue d'Alvimar, c'était comme si on lui eut enlevé tout-à-coup l'air et la lumière; elle éprouvait une souffrance positive presque aussi acca blante que les peines de l'âme. Sa vie d'innocence et de paisibles contentements était passée; on lui arrachait sa vie d'amour; elle tombait dans le néant. Ce changement d'existence subit, ce passage des rayons du soleil une ombre glacée, rendirent réelle, la maladie qu'elle avait projeté de feindre afin de demeurer enfermée dans sa chambre. Elle prit une fièvre lente accompagnée de fu nestes symptômes. Dans la crainte que son père ne permit au baron d'Al vimar de venir s'informer de ses nouvelleselle ferma l'entrée de son appartement tout le monde. Son père et sa gouvernante étaient seuls admis. Son confesseur, cependant, venait parfois l'entretenir et, avec une chaleur de langage qu'on ne lui avait jamais connuemettait tout en œuvre pour la fortifier dans sa bonne résolution et la consoler en thème temps mais elle croyait avoir assez fait pour lui et pour sa religion sévère Hospices est déposé sur le bureau, ainsi que le budget pour 1849. Ces pièces sont renvoyées la commission des finances. M. le secrétaire donne lecture d'un rapport sur la situation du musée des beaux-arts qui gagne de l'impor tance tous les ans. Le compte de la bibliothèque publique est déposé sur le bureau. Il présente en recettes une somme defr. 1,400 et en dépense, celle defr. 971-40. Donc avec un boni qui permettra de faire de nouveaux achats de livres, comme le fait remarquer M. le trésorier de cette institution. Il est donné lecture d'une dépêche de M. le gouverneur con cernant un nouveau mais .trop coûteux moyen d'encou rager lés beaux-arts. Elle est prise pour notification. Une seconde missive de M. le gouverneur est lue; elle concerne une demande faite par la ville pour pouvoir ob tenir un subside destiné l'achat de métiers la navette volante. Un crédit sera ouvert la ville d'Yprcs de mille douze cent francs, mais sous condition que la caisse communale ou le bureau de bienfaisance y intervienne. Par suite de l'extension qu'a prise la variole, des mesu res hygiéniques ont dû être prises, et le Bureau de bienfaisance a été invité donner des habillements aux familles dont un ou plusieurs membres ont été atteints de la petite vérole. Pour faire face celte dépense, cette n.. pnngpîi i'autorisation de pouvoir en leur sacrifiant son bonheur, et elle recevait mainte nant ses pieuses exhortations avec des mouvements d'im patience nerveuse. Un soir, Isaure dit que la lumière qui restait dans sa chambre, et la présence de la personne qui la veillait, quelque silencieuse qu'elle fut, la tenaient éveillé et la fa tiguaient davantage elle voulut rester seuledans l'es pérance de mieux reposer. Maisce moyen fut infructueux minuit était venu sans qu'elle ait encore fermé la paupière. Elle se leva et sentit un vif désir d'apercevoir son jardin au milieu des ombres de la nuit. Il y avait plus de trois semaines qu'elle était privée de ce bonheur. Dans la journée sévèrement enfermée dans sa chambre, elle n'osait même tourner les yeux du côté de la fenêtre qui donnait sur la terrasse, dans la crainte d'en trevoir d'Alvimar et de manquer ainsi son serment. Elle ouvrit doucement la croisée et s'avança sur le balcon. Elle retrouvait ses trésors de jeune fille avec un indi cible plaisir; elle revenait une douce tendresse pour ce jardin qu'elle avait tant aimé elle aurait voulu que tous ces arbres toutes ces (leurs ne fussent qu'un seul objet pour pouvoir l'embrasser, le presser sur son cœur. Il lui prit une envie irrésistible d'aller parcourir ce sol, faire usage d'un crédit qui ne peut être utilisé que de commun accord avec l'autorité communale. Elle est ac cordée. L'adjudication du produit des lieux aux casernes a été faite, mais un prix bien moindre que l'an dernier. L'of fre est seulement de 60 70 centimes par hectolitre, tandis que l'an dernier, on offrait un franc. Le Conseil n'approuve pas l'adjudication, parce que d'après les rap ports qui lui sont faits, on soupçonne qu'il s'est formé une coalition. Le collège est autorisé prendre telles mesu res que de besoin et de façon tirer de cet engrais le meilleur parti possible. Le cahier des charges, clauses et conditions pour la location de quelques propriétés rurales des Hospices est soumis au Conseil qui l'approuve sans observation. Une question longtemps agitée vient d'être portée devant le Conseil. Il s'agit de savoir si l'adminis tration des Hospices est tenue de rembourser les frais des femmes en couches et des enfants-trouvés dans les loca lités autres que leur domicile de secourstandis que si l'accouchement ait lieu ici ou que l'enfant-trouvé soit entretenu en ville, le bureau de bienfaisance soit char gé de donner les secours nécessaires, faute d'une fondation se mêler cette verdure. Elle n'avait qu'un étage descendre, et ne pouvait rencontrer cette heure personne qui s'opposât son dessein. Seulement la chambre de madame Blond eau était placée côté de la siennelaquelle elle servait pour ainsi dire de rempart, et il fallait la traverser pour gagner l'escalier. Isaure no s'inquiéta pas de cet obstacle, puis que, après tout, si la bonne gouvernante s'éveillait et ve nait s'apercevoir de sa fugue, ce n'était pas un grand malheur d'être surprise dans une innocente fantaisie de malade, qui ne pouvait être funeste la santé, vu l'ex trême chaleur de la nuit. Elle passa donc une robe, ouvrit la porte et sortit sans bruit. Blondeau était assis sur son lit, la lampe d'un côté le rameau béni de l'autre. Elle était toute coifféetoute vêtue de sa grande cami sole blanche, pour être plus tôt prête au moindre appel de sa jeune maîtresseet tenait un livre d'heures ouvert aux prières pour les malades. Cependant, après tant de nuits de fatigue, le sommeil avait surpris la bonne dame, et elle dormait profondément; mais dans son sommeil même, elle était encore demi levée et toujours prête voler au secours de sa clière enfant.

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