JOIRXAL D'APRES ET DE E ARRO\DISSEWE\T.
816. 8e Année. Jeudi, Ie Mars 1810.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs. I Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
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IMIKIII IE.
VPRES, le 28 Février.
Le Journal des Baziles. dans un lonjj article
en trois colonnes, refait l'histoire de l'Inquisi
tion, en insinuant que les soi-disant hérétiques
et sectaires, étaient des insurgés et des révolu
tionnaires. Jusqu'ici nous avions cru que les
Américains qui ont été massacrés par millions
au nom de la religion, n'étaient que les défen
seurs de leur pays et de leur religion. Les ré
formés n'ont fait un appel la révolte, qu'après
avoir été traqués avec une barbarie sans exem
ple, et les Maures en Espagne dont la race a été
éteinte par les supplices et l'exil, n'ont jamais fait
de résistance leurs oppresseurs que quand la
tyrannie était devenue intolérable, et le Jour
nal des Baziles les compare aux insurgés de
Juin qui, dit-il, seprétendent condamnés tort.
Pends-loi bienheureux père Loriquet, tu es
dépassé, ton imaginative ne t'aurait point fait
faire celte découverte et cette apologie de l'in
quisition manque ta gloire
Un article communiqué inséré dans le Jour
nal des llazilus injurie directement non plus un
parti, mais des personnes honorables de cette
ville et qui jouissent juste litre de l'estime de
leurs concitoyens. Rarement le cynisme a été
plus loin. Aussi généralement cet article est-il
attribué la plume de certain brasseur connu
par ses variations politiques, son caractère in
téressé et son indélicatessequi se trouvait
encore sous l'impression d'une déconvenue. On
se rappelle qu'il a adressé au gouvernement une
réclamation contre le mode de perception de
l'octroi sur les bières et il venait de recevoir
l'avis qu'elle ne pouVait être prise en considé
ration. De là celle bave, dont il a voulu salir
des hommes dont tout le crime est d être iné
branlables dans leurs convictions libérales. Mais
qu'il continue, jamais ce digne brasseur né fera
croire que des honnêtes gens sont des fripons,
comme on pourrait qualifier juste titre quel
ques individus de sa connaissance.
Le capitaine Mandrin.
XVI.— LE BANQUET DES ADIEUX. (Suite.)
Ce n'est pas tout de nous avoir servi, dit Mandrin
ce nouveau maitre-d'hôtel, vous devriez prendre place
auprès de nous.
Eustaclie demeura saisi cette invitation le geôlier
n'était pas compris dans la permission de réjouissance
accordée pour ce jour-là.
Voyons, reprit Mandrin, c'est aujourd'hui que tout le
inonde doit se réconcilier. Hélas! quand la mort va si
vite effacer toutes les querelles, amis et ennemis peuvent
bien commencer trinquer ensemble Asseyez-vous donc
là, brave geôlier.
Les contrebandiers étaient déjà table; une chaise
restait vide en face du capitaine. Eustache demeura, entre
la tentation de prendre ce bon moment de plaisir et la
crainte de se compromettre. Mais le vin qui coulait déjà
en flots de rubis exerça sur lui une attraction magnétique
et invincible. 11 tomba sur le siège qai était devant lui.
En même temps on voyait, travers la fente de la porte
entrouverte, briller deux yeux qui se fixaient sur la table
du banquet avec une ardente convoitise.
Entrez, mon brave, dit Mandrin au porte-clés, et
venez vous asseoir avec nous, puisque votre supérieur
vous en donne l'exemple.
Le valet de prison se trouva aussitôt placé côté du
POURQUOI ATTAQUE-T-ON
L'A IMIIMMH VTIOX COMMUNALE?
En jetant un coup d'oeil sur la situation de notre ville,
nous défions nos adversaires d'exprimer des griefs sérieux,
ni de prouver qu'à aucune époque l'administration ait
été conduite avec plus d'intelligence et ait atteint des ré
sultats plus satisfaisants.
En effet, l'enseignement primaire gratuit a été organisé
pour tous les enfants pauvres
Les finances de la ville ont été rétablies sans augmen
tation de charges
Une bibliothèque communaleun jardin public un
palais de justice, enfin une musique communale ont été
créés
La ville a conservé sa forte garnison, et de plus elle a
été dotée de l'école d'équitation.
Voilà quelques-uns des principaux bienfaits qui sont
dus aux efforts de l'administration actuelle.
N'importe, l'on doit s'attaquer ses actes en général,
et, sans préciser aucun faitla représenter comme hos
tile aux intérêts de notre cité heureusement nous avons
vu nos adversaires l'œuvre, et sans récapituler tous
leurs actesnous devons rappeler quesous leur admi
nistration l'enseignement fut entièrement négligé, que
la ville fut livrée au pillage et obligée d'acquitter de ce
chef une dette de fr. 169,863-83 et enfin quo les garnisons
lui furent retirées en haine du mécontentement qu'excitait
dans notre bourgeoisie un pareil mode d'administration.
Et l'on voudrait aujourd'hui nous ramener cette épo-
quede maudite mémoire Non, le règne de ces intriguants
étrangers est passé, la bourgeoisie a compris enfin que
ses intérêts peuvent être mieux défendus par des enfants
de la cité, et elle vient de ratifier la gestion de ses man
dataires en leur votant, il y a peu de temps, une médaille
civique et en renouvelant leur mandat aux dernières
élections communales.
Voilà des faits qui répondent aux déclamations de nos
adversaires, et qui résument tous leurs griefs en un
ôte-toi de là que je m'y place.
TOUJOURS LA MÊME TACTIQUE.
Divide ut imperes.
Fuyant le terrain politique, nos adversaires ne cher
chent plus qu'à diviser les hommesils cessent de pro
clamer qu'il faut vaincre les libéraux en masse, mais ils
essaient de les désunir et de les démolir l'un après l'autre;
cette tactique n'a pu échapper personnemais elle
geôlier. Il n'y avait déjà plus aucun remords dans l'esprit
des deux invités, et le repas commença le plus gaiment
du monde.
Le cercle des contrebandiers offrait un aspect pittores
que et bigarré il y avait là des hommes de toutes les
physionomies, des hommes glanés sur tous les champs de
la civilisation. On y voyait le grand et robuste Franc-
Comtois, taillé en force comme le taureau de ses plaines
le Provençal olivâtre, petit et grêle, mais fier comme un
géant; le Bourguignon, le Languedocien, le Savoyard, le
Piémontais, rusé, gai et jovial jusqu'à la mort, dévot ca
tholique jusque dans le meurtre et le pillage.
Mais les habitudes de leur vie commune imprimaient
un cachet uniforme sur toutes les figures. Des jours rem
plis de courses vagabondes et de combats, des nuits pas
sées dans le cœur des forêts, sur la grève humide, ou
dans les cavités des rochers dont l'abime gardait l'appro
che, avec un court sommeil, interrompu par l'avalanche
ou par les coups de fusil des douaniers, toute cette rude
existence qu'ils partageaient leur donnait tous une ap
parence étrange, des mouvements brusques, saccadés et
sauvages. L'habitude de vivre au désert et d'épier au loin
les pas de l'ennemi, mettait dans leurs yeux une scintil
lation continuelle, un feu errant et rapide; ne marchant
que le fer et la flamme la main, n'ayant de rapports
avec les hommes que des coups de sabre et de pistolets
échangés avec eux; l'ardeur de la guerre animait seule
échoueranous en sommes assurésdevant le bon sens
public
Dans plusieurs articles, les journaux cléricaux de cette
ville louent le caractère du chef de notre parquet et celui
de quelques membres du conseil communalmais ils de
vraient se rappeler que nous avons soutenu la candida
ture de tous ces hommes, alors que leurs patrons les
combattaient par les armes les plus déloyales.
Pour ne parler que de la première, chacun se rappelle
qu'en 1837, vous avez combattu la nomination du chef
de notre parquet la représentation nationale.
Aujourd'hui vous voulez bien rendre justice son ca
ractère; or, il suit de là, qu'alors vous dénigriez sciem
ment les hommes les plus honorables de notre ville.
Êtes-vous changés depuis?
Définitivement nos adversaires ont déserté le terrain
politique: battus sur les questions de principe, ils s'atta
quent aujourd'hui aux personnes; leurs diatribes s'adres
sent surtout aux membres d'une famille honorable qui
depuis longtemps ont consacré tous leurs efforts la dé
fense des intérêts de notre cité notre position vis-à-vis
de quelques-unes de ces personnes nous commande, une
certaine réserve quc_chacun appréciera nous dirons ce
pendant que les sales invectives, pas plus que les calom
nies du Journal des Baziles, ne sauront atteindre des
hommes honorables et justement considérés; la considé
ration ne se commande pas, elle ne s'acquiert que par la
probité et la délicatesse que l'on apporte dans les fonc
tions, et par les services que l'on rend la chose publique.
Voilà sans doute pourquoi les patrons du Journal des
Baziles n'en jouiront jamais.
On nous communique la pétition) suivante que les
sauniers de la ville se proposent d'adresser la Chambre.
Les motifs qui peuvent être invoqués l'appui [sont
clairement énoncés dans la pétition et nous dispensent
d'y ajouter des réflexions.
Les sauniers de la ville d'Ypres la Chambre des
Représentants.
Messieurs,
La Chambre française vient de réduire l'impôt sur le
sel de 30 10 fr. les 100 k°". Ce dégrèvement aura pour
résultat certain la ruine de beaucoup de salines de notre
pays, ainsi qu'une perte notable pour le trésor.
En effet, l'impôt sur le sel fixé 30 fr. en France,
n'était que de 18 fr. en Belgique; cette différence avait
leurs traits. On eût dit que le démon du carnage les avait
tous bercés sur ses genoux.
La réunion commençait devenir animée et bruyante
tandis que l'on voyait toujours se promener devant la
croisée la lente et monotone sentinelle chargée de main
tenir l'ordre par sa présence.
Hé! l'ami, cria Mandrin au soldat, si vous êtes las
de monter la garde au grand air, et que vous vouliez
venir faire une petite faction table, il y a place pour
vous en vérité.
Le fusilier, voyant tout le monde de si bon accord, et se
croyant autorisé boire avec les détenus par l'exemple du
geôlier, sauta lourdement dans la chambre, et alla s'as
seoir côté d'Eustachc, dans l'intention de prendre seu
lement un verre de vin, pour retourner bien vite son
poste.
Et toutes les autorités de la prison se trouvèrent
table.
11 y avait d'un côté, Mandrin, au centre de la bande
qui se déroulait de chaque côté de lui, entre ses deux
acolytes, et derrière eux, Lolotte, qui circulait tout au
tour de la table, en versant la ronde.
D énormes pièces de bœuf et de gibier disparaissaient;
les verres n'étaient plus assez grands, on buvait la bou
teille toutes ces bouches ardemment occupées suffisaient
manger, parler, rire, jurer et chanter la fois. Les con
trebandiers, exaltés par la fièvre de leur résolution, se