V 819. 8e Année. Dimanche, 11 Mars 1819.
JOliUWL D'YPRES ET DE L'ARROYDISSEMEYT.
Vires acquint eundo.
IXTKKIEIU.
Le capitaine xAIasnli'in.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 30 c. Provinces, 4 francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes.Réclames, la ligne 50 centimes.
Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé h l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRES, le 10 Mars.
La Chambre des représentants dans la sé
ance du huit mars, vient de condamner défini
tivement le conseil des mines. Il est supprimé,
mais dans notre opinionmomentanément
toutefois, car par cette suppression, on sentira
d'autant plus la nécessité d'instituer un Conseil
d'état. Le conseil des mines n'était qu'une frac
tion de l'ancien Conseil d'état et on avait senti
le besoin de constituer une espèce de tribunal
administratif pour jujjer des questions spéciales,
mais excessivement importantes. Nous approu
vons le vote de la Cbambre, mais seulement
dans l'espoir que la suppression du conseil des
mines bâtera la création d'un Conseil d'état
institution qui manque notre pays et dont
l'absence est déplorable.
Revenant la discussion sur la réforme pos
tale, la Chambre a définitivement adopté la taxe
dix centimes par lettre simple et il est pro
bable que l'affranchissement sera rendu obli
gatoire. En principe, nousapplaudissons celle
décision, nous avons toujours cru que la réduc
tion du prix des ports de lettres était une me
sure équitableet qui, favorisant l'extension de la
correspondance, finirait par rapporter un re
venu équivalent celui que cette administration
verse au trésor sous l'ancien système, mais nous
croyons qu'il est imprudent dans le moment
actuel de diminuer les ressources de l'état, même
par suite d'une réforme, d'une amélioration
depuis longtemps désirée. [Nous nous serions
rangés de l'avis du ministère qui, chargé d'ad
ministrer doit savoir mieux que la Chambre
quels sont les besoins du pays. Nous admettons
facilement que la taxe vingt centimes n'eut été
qu'une demi-réforme, mais la prudence paraît-il,
eut dû faire préférer une amélioration partielle
un déficit d'un million dans les caisses de l'étal.
Les partisans de la taxe dix centimes con
testent les chiffres du ministre des travaux
publics et trouvent ses calculs exagérés. Mais il
est facile comprendre que le nombre de let
tres transportées par la poste ne pourra se tri
pler en une année de temps et par conséquent
que le trésor subira une diminution de recettes
au moins d'un tiers. Il nous semble que le
moment n'est pas très-popice de dégrèver un
impôt qu'on a toujours payé facilement et qui
XVII.— ONE HALTE EH VOYAGE. (.Suite.)
Mandrin vit travers des planches disjointes arriver
lentement une lumière. Un vieillard ouvrit le guichet.
Après avoir examiné en silence le capitaine, dont l'aspect
lui inspira sans doute de la confianceil ouvrit la porte
etretournant sur ses pas, sembla inviter tacitement les
voyageurs le suivre.
Quand ils furent en haut d'un escalier extérieur, le
vieux domestique leur dit d'attendre là que son maître se
fût retiré de la chambre qu'il occupait et dans laquelle il
allait les introduire. En effet, ils virent la lumière paraître
une autre croisée, et lorsqu'ils entrèrent dans la pièce
du milieu, le mouvement d'une portière qui ondoyait en
core leur apprit que quelqu'un venait de passer dans la
chambre voisine. Mandrin trouva cette manière de rece
voir des visites assez singulière mais il tenait moins la
présence du maître du lieu qu'à un bon feu et quelques
liqueurs réconfortantes pour lui et ses gens. L'un et l'autre
lui furent procurés par les soins silencieux du vieux do
mestique, qui augmenta le bois du foyer et plaça sur une
n'est en vérité que le prix d'un service rendu,
quand la législature éprouve une grande répu
gnance en établir de nouveaux et qu'en fin
de compte les voies et moyens ont déjà subi
une dépréciation par suite des événements poli
tiques.
On nous prie de reproduire la lettre suivante qui a été
remise hier M. l'éditeur du journal lu Commune d'Ypres,
avec prière d'insertion.
A l'auteur «le l'article Inséré dan» la Covt-
mi.VE d'Tpren, et relatif uiiériiause projeté
entre le» Hospices d'Ypre» et AI. Carton.
Monsieur,
Jusqu ce jour, j'ai accueilli avec le plus profond mé
pris les insinuations malveillantes que vous lancez dans
chacun des n°' de la Commune d'Yprescontre moi et
contre ma famille. Ces injures m'ont toujours paru dictées
par de trop mauvais sentimens pour pouvoir m'atteindre
et j'aurais usé de la même réserve l'égard de l'article
contenu dans le dernier n° et relatif mon échange avec
les Hospices, si vous n articuliez des faits de nature porter
atteinte l'honneur de l'administration toute entière,
la considération des deux notaires qui ont été nommés
experts dans cette affaire, et enfinà ma propre délicatesse.
Permettez-moi d'abord de répondre un mot cette in
sinuation calomnieuse, que 1 affiche aurait été arrachée
par mes ordres. Si mon caractère ne me mettait l'abri
d un pareil soupçon, je dirais que l'auteur de l'article est
celui qui avait le plus d intérêt avoir celte aflichc dans
son cabinet pour y puiser les données, qui devaient servir
de bases ses calomnies et ce qui confirme cette opinion,
c'est que d'après la vérification des traces qu'a laissées
cette afficheelle parait avoir été détachée avec un soin
qui fait supposer qu'elle devait servir un autre usage.
Passons au fait
II est exact, que je suis en instance pour obtenir de
l'administration des Hospices 2 h. 6G a. 70 c. de labour
situés S' Jacques-lez-Yprèsdont h. 38 a. 50 c.
sont occupés par moidepuis seize ans au prix annuel
defr. 114 92
Et 1 h. 28 a. 20c., par le nommé Gillebcrt,
au prix defr. 100 62
Donc donnant ensemble un revenu réel de fr. 215 54
Et cela en échange de neuf parcelles situées dans les
communes de Boesinghe, Langhemarck, Iloogledc et
S'-Jean, toutes contigues ou enclavées dans des propriétés
des Hospices et toutesl'exception de deux petites par
celles Langhemarckdéjà tenues en bail par les occu-
peurs de cette administration; or, ces neuf parcelles
donnent un revenu de 288 fr., c'est-à-dire un revenu
table des cruches de vin et des viandes froides.
Quand ils se furent réchauffés par de bonscoups de vin,
les deux soldats de Mandrin, laissant leur maître les
peaux d'our^ qu'ils portaient roulées sur leurs chevaux
se couchèrent terre et s'endormirent bientôt profondé
ment.
Le chef demeura table, la tête appuyée sur sa main,
et plongé dans ses réflexions.
Au bout de peu d'instants, un nouveau coup de sifflet
se fit entendre la porte d'entrée. Le taciturne valet ral
luma la branche de pin qui lui servait de torche pour
traverser la cour, et revint aussitôt en introduisant un
étranger. C'était un officier du régiment d'Harcourt nou
vellement envoyé de France, et, comme nous l'avons vu
guerroyant depuis son arrivée contre la troupe de Mandrin.
Le jeune homme la figure épanouie, l'uniforme bleu
et argent, salua gracieusement, jeta son chapeau d'un
côté, son manteau de l'autre, courut s'asseoir en se frot
tant les mains au coin du feu pétillant, et sourit ce
consolateur des nuits d'hiver.
Mandrin avança une chaise de l'autre côté de la table
sur laquelle étaient encore des mets substantiels, et invita
dépassant de plus du tiers celui des biens appartenant
aux Hospices.
De plus, je paie l'administration des Hospices une
soulte de fr. 256-53. Je laisse d'après cela juger, si
l'échange proposé sur ces bases ne donne pas aux Hospices
au-delà du tiers en sus.
Tout échange d'ailleurs est accompagné d'une estima
tion faite par deux notaireset celle dont s'agit porte la
valeur des biens que je donne la somme de 9,197 fr.,
tandis que ceux que je reçois ne sont évalués qu'à 7,090
francs.
Et ne comprenez-vous pas que lorsque vous contestez
l'exactitude de cette évaluation, vous attaquez la loyauté
de deux honorables notaires de la ville plutôt que la
mienne? Vous insinuez que ces messieurs auraient forfait
leur devoir en sacrifiant les intérêts de l'administration
mes intérêts privés. Or, peut-on supposer, que des fonc
tionnaires publics, dont la probité n'a jamais été mise en
doute par personne, risqueraient de compromettre leur
réputation de délicatesse? Peut-on supposer qn'une ad
ministration toute entièrecomposée des hommes les
plus honorablesaurait prêté la main une spoliation
du domaine du pauvre? Peut-on supposer enfin que moi-
même dont aucun acte n'a méritéje ne dirai pas les
réserves du parquet, mais le moindre soupçon d'indé
licatessej'aurais voulu profiter d'un acte aussi infâme?
Au contraire, et j'ose invoquer ici, le témoignage de l'ho
norable notaire, que j'avais choisi pour mon expert, pré
cisément parce que je ne l'employais pas ordinairement
et que j e ne pouvais être taxé d'avoir sur lui de l'influence,
et il pourra dire, si plusieurs reprisesje ne lui ai pas
déclaré, qu'en cas de contestation avec l'expert de l'ad
ministration il ne devait lésiner en aucune manière.
Eh bien c'est sous cette impression que l'estimation a
réellement été faite et ce qui le prouve, c'est que ces neuf
parcelles récemment achetées par moi en adjudication
publique et des conditions très-favorables, m'ont coûté
fr. 9,577 60, ce que je puis prouver tous les jours par
des actes authentiques. Bien plus, considéré sous le rap
port du revenul'estimation de ces parcelles a été faite
au denier 31 et je demande si l'on peut souvent acheter
ce prix.
Vous voyez donc, Monsieur, que l'évaluation, servant
de base l'échange, est fondée la fois sur l'estimation
des notaires, sur le prix auquel les biens ont été récem
ment vendus en adjudication publique et enfin sur le re
venu réel des propriétés.
Vous avez feint d'ignorer toutes ces données que vous
pouviez connaître aussi bien que la valeur cadastrale, et
cela pour ne vous tenir qu'à celte dernière; or, vous
savez très-bien qnc les évaluations cadastrales sont sou
de la main l'officier s'y asseoir.
Monsieur est sans doute le maître du logis? dit
celui-ci.
Je ne suis que son hôte comme vous, monsieur;
mais, arrivé le premier, je vous fais les honneurs de l'hos
pitalité.
Et le seigneur du château, reprit l'officier, en re
gardant avec un sourire les murs lézardés et les meubles
de bois, est sans doute absent de chez lui
Je l'ignore, répondit Mandrin.
Il ne disait pas tout-à-fait la vérité, car depuis qu'il
était là, des pas, tantôt lents, tantôt rapides et agités qui
se faisaient entendre dernière la portière, ne lui laissaient
pas de doute sur la présence de son singulier hôte dans la
pièce voisine.
N'importe, reprit le nouveau-venu en regardant
Mandrin, entre gentilshommes comme nous on est bientôt
en connaissance.
Puisposant le doigt sur son jabot en s'inclinant légè
rement:
Le vicomte d'Arcydit-il.
Mandrin répondit par un faible salutmais ne jugea