JOIRVAL D'ÏPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
-V 821. 8f Année.
Dimanche, 18 Mars 1849.
Vires acquirit eundo.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs.
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Le Procrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
lATÉMELll.
1PRES, le 17 litrm.
Dernièrement le Jourtial des Caméléons s'est
occupé d'un projet d'échange de biens entre
les Hospices civils et M. Carton, propriétaire
en cette ville. L'appréciation de cette feuille
était évidemment empreinte de cette malveil
lance haineuse qui fait le fond de la polémique de
ce carré de papier. Raisonnant sur des données
incomplètes et avouant lui-même que l'affiche
annonçant l'enquête ne donnait pas la conte
nance de tbutes les parcelles, le diffamateur
juré n'en a pas moins tâché de porter atteinte
la délicatesse et la probité d'un honnête
homme.
M. Carton a répondu et après avoir remis
l'insertion de sa lettre un autre jour, un sup
plément a paru jeudi dernier contenant la ré
ponse de M. Carton et les observations du
gratte-papier. Il est curieux de voir les efforts
faits par ce scribe, pour mitiger et masquer sa
mauvaise foi et les tours de force qu'il essaye
pour soutenir sa thèse. En premier lieu, il re
vient sur l'insinuation qu'il a lancée, que M.
Carton pouvait être l'auteur de la disparition
de l'affiche et par suite du charlatanisme qui
est propre certains industriels .- il le prouve
l'aide de la disparition de la feuille en question
de la Concorde et de plusieurs estaminets.
Puis qu'on revient toujours sur l'enlèvement de
ce journalnous croyons que c est fait dans le but
de lui donner du retentissement et de doubler
le nombre d'exemplaires payés. Il nous semble
que les escamoteurs ne peuvent se trouver
ailleurs que dans les rangs de ces industriels
qui tous les moyens sont bons pour faire du
bruit et qui ont escamoté bien autres choses
que des feuilles de papier.
Mais passons. Pour rendre la méchanceté de
ce journal évidente, il suffit de faire remarquer
que l'auteur de l'article aurait pu se rendre
l'enquête et faire ses observationss'il avait
simplement été mu par de bonnes intentions
et alors il n'aurait pas dû raisonner sur des
données incomplètes, il aurait pu examiner le
dossier qui, certes, lui eût donné toutes les ex-
plications nécessaires. Mais, faut-il le dire, cette
conduite n'eut pas rempli le but, il fallait une
occasion de dénigrer un homme hohorable et,
sur des chiffres évidemment incomplets, on
s'est haté de sonner laltaque. Mal lui en a pris,
car de tout son échafaudage, il ne reste que
l'intention clairement indiquée d'avoir lâché
de diffamer un de ses concitoyens, une admi
nistration publique et deux notaires.
Dans les échanges entre pai ticulierset admi
nistrations publiques, on ne prend pas exclu
sivement pour base la contenance car on
pourrait échaoger plus de surface pour une
valeur moindre, contre moins d étendue, mais
d'un prix plus élevé. C'est pourquoi la na
ture du terrain, la situation doivent être consi
dérées. Il en résulte que si l'on se basait sur
l'évaluation cadastrale, seule, les administra
tions pourraient perdre. On a donc dû suivre
une autre marche. Deux notaires sont nommés
pour expertiser les biens et c'est sur leur rap
port et leurs évaluations que l administration
établit le projet d'échange. Cette marche a été
suivie par les parties qui poursuivent l'échaDge,
et il a été bien arrêté que la part qui devait
revenir aux Hospices, devait avoir la valeur du
tiers en sus. La convenance était de même de
deux côtés. Si la partie des Hospices tenait la
propriété de M. Carton, les parcelles qu'il offrait
en échange étaient conligues ou enclavées
dans des propriétés des Hospices. Sous ce rap
port, il y avait égalité d'avantages.
Mais on semble étonné que de petites par
celles aient donné lieu une évaluation plus
élevée, que la pièce de terre d'un seul tenant.
C'est du contraire, nous paraît-il, qu'on aurait
dû être surpris, car dans les ventes publiques
des petites parcelles isolées ne se vendent-elles
pas un prix exorbitant, tandis qu'une ferme
ou une pièce de terre d'une certaine conte
nance peut encore s'acquérir un prix relati
vement raisonnable. Il faut avoir la rage de
critiquer tort et travers, pour oser avancer
des contrevérités aussi flagrautes.
On conteste la valeur des parcelles récem-
mentachetëes en vente publique par M. Carton,
et depuis cette époque les prix des biens-fonds
ayant diminué, on pense qu'il y aurait de la
perte, s'ils étaient remis en vente actuellement.
Aussi l'évaluation des notaires ne s'élève-t-elle
qu'à 9,197 francs, tandis que le prix d'achat
était de fr. 9,577-60. Mais le scribe croit que
la partie des Hospices eut pu avoir une valeur
plus forte que celle qu'on lui affecte actuelle
ment. Cela est possible et la valeur des pro
priétés dépend quelquefois de tant de causes
diverses, qu'il est fort difficile de les apprécier
toutes. Mais faisons ressortir le singulier rai
sonnement du gratte-papier. 11 voudrait prendre
pour terme de comparaison, les prix exorbi
tants d'il y a quelques années, quand il s'agit
du bien des Hospices, mais s'en tenir pour fixer
la valeur des parcelles données en échange par
M. Carton aux prix actuels, aujourd'hui qu'il
y a une certaine dépréciation. C'est ainsi qu'il
cite l'achat fait par le sieur Vanden Bulcke, en
1837 ou 1838, au prix de 8,500 francs, pour
environ cinq mesures et demie, et il conteste
comme trop élevé le prix d'achat des pièces de
terre de M. Carton, quelques lignes plus haut.
Cela revient dire, quand il s'agit du bien des
Hospices, qu'il faut forcer la valeur autant que
possible, et diminuer outre mesure celle des
pièces offertes en échangeparce qu'il s'agit
d'un homme qu'on tient en haine. Cela s'ap
pelle des arguments de mauvais procureur.
En dernier lieu, le scribe s'explique difficile
ment la différence du prix de location, il en
est étonné, comme il s'étonne de beaucoup de
choses qui ne surprennent que les gens de mau
vaise foi. Les locations des Hospices se font
avec toutes les conditions de publicité et de
concurrences voulues, et M. Carton loue la
partie qu'il occupe un peu plus que le fermier
Gillebert. Il faut bien peu connaître les prix
de locations des biens-fonds et s occuper habituel
lement supputer les intérêts légaux ou même
usuraires pour s'étonner de la différence qui
existe ordinairement entre le prix de bail d'une
petite parcelle et d'une ferme entière.
Libre au gratte-papier de trouver que l'é
change n est pas favorable aux Hospices. Ce
pendant qu on nous permette de faire remarquer,
que si les administrations publiques pouvaient
faire une opération de ce genre avec tous leurs
biens, en fort peu de temps, dix mille francs de
revenus s'élèveraient 13,333-33 fr., et cette
augmentation de ressources ne serait pas
dédaigner. Mais il est permis tout le monde
d être absurde et d'avoir l'esprit pointu comme
une boule, au point de soutenir le noir et le
blanc quelques lignes de dislance.
Du reste, malgré les airs de Don Quichotte
que se donne le scribe, il a un peu baissé le
ton, et il finit par demander quoi bon l'en
quête, si l'on ne peutlibrement exprimer sa pen
sée. C'est ce que nous demandons aussi et c'est
l'enquête qu'il aurait fallu exposer vos injusti
fiables allégations et, seulementdans un journal,
quand il vous aurait paru qu'on n'ait pas fait
droit vos observations. Voilà ce qu'un hon
nête homme aurait fait. Mais il nous semble
que ce n'est pas là votre métier, celui que vous
faites est triste et ne vous vaudra que le mé
pris public.
Le Journal des Baziles pour esquiver le re
proche que nous lui avons adressé, d'exciter la
haine et la discorde entre les diverses classes
de citoyens et d'adopter la tactique des rouges
qui attisent en France la haine entre les riches
et les pauvres, nous répond qu'il a beaucoup
de respect pour les nobles. Il dit les avoir sou
tenus, mais nous devons ajouter non comme
nobles, mais comme catholiques, comme nous
pouvons les avoir combattus comme adversaires
de l'opinion libérale et non comme nobles.
QuaDt au dernier nom cité, il faut avoir le
toupet des écrivains jésuitiques pour dire que
ce sont les libéraux qui ont combattu la réélec
tion de ce candidat. Mais c'est la tactique ordi
naire, quelqu'un échoue a une élection, quand
même le parti catholique ne lui eut donné au
cune voix, c'est la faute des libéraux et surtout
des omnipotens, des triumvirs, etc., etc.
Le Journal des Caméléons est accouché d'un
semblant de profession de foi. Certains l'accu
saient d'avoir cultivé le chou catholique, avant
d'avoir senti la nécessité de caresser la chèvre
libérale. Mais comme le libéralisme est sorti
triomphant de ses épreuves, on a jugé utile de
prendre ses couleursquitte travailler la
culture du chou catholique mieux que jamais.
Aussi arbore-t-il la bannière de la modéra
tion qui est celle de celui qui n'a pas de prin
cipes, ni de conviction. On peut-être modéré
dans le parti catholique comme dans les rangs
libéraux, comme dans le parti républicain.
Etre modéréc'est un mol qui par lui-même ne
fait pas connaître les principes qu'on professe.
Avec la modération, vous pouvez pratiquer
toutes les politiques, même celle d'Escobar,
mais la condition de la mettre en usage mo
dérément.
Du reste, nous apercevons que cette dernière
politiquea toutes les sympathies des scribes de la
feuille couleur gorge de pigeon. Tous les hypo
crites, les tartuffes ne sontpasdans les rangs du
clergé; il en existe parmi les laïcs qui sont
aussi dangereux. Il y a des hypocrites ambi
tieux qui nejouent certain rôle que pour parvenir
au but de leur convoitise, et nous en connais
sons même qui se font libéraux et ne se sont
présentésdans uneassocialioQ libérale que pour
la mettre en désarroi.