.V 835. 9e Année. Dimanche, 0 Mai 1819. JOITtWL D'ÏPRES ET DE L'iRROV HISSERENT. Vires acquint eundo. Le capitaine Mandrin. I ABONNEMENTS Ypjies (franco), par trimestre, a francs 50 c. Provinces, 4 francs. INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes.Réclames, la ligne 50 centimes. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, Marche au Beurre* On ne reçoit que les letties affranchies* LATÉRIEIK. VPRES, le 5 Mal. La tranquillité et la stabilité auront beaucoup de peine s'acclimater dans les pays de 1 Eu rope qui ont été atteints de l'épidémie révolu tionnaire depuis le 24 février. Les institutions qu'ils se sont données, sont trop avancées et ne s harmonisent ni avec les mœurs, ni avec les habitudes des populations. Un peuple ne peut, sans souffrance, passer du despotisme un ré gime libéral sans transition. Un bouleversement subit mène sa suite des froissements doulou reux, qui durent longtemps avant de pouvoir s'user. C'est ainsi que le régime le plus heureux que puisse désirer une nation, est celui qui permet dintroduire graduellement les amé liorations et les libertés politiques, après que déjà elles sont entrées dans les mœurs. Les institutions politiques bien adaptées au génie du peuplé ne peuvent être que l'œuvre du temps, et celles qui n'ont qu'urfe origine ré volutionnaire durent rarement longtemps. L'action violente amène la réaction et souvent le peuple qui croit s'être acquis définitivement une forme de gouvernement démocratique, re cule bien en-deçà du point d'où il est parti. Souvent c'est la faute des hommes qui se trou vent la tête du mouvement, mais plus commu- némentencore la faute des peuples qui rarement savent se conlenler de ce qui est juste et possi ble, et qui presque toujours dépassent le but par leur exaltation démagogique. La Chambre vient d'aborder la question des sucres. C'est une discussion qui durera peut être assez longtemps. Trois propositions sont en présence, celle de M. Mercier qui sacrifie l'exportation et ruine les raffineries, celle de M. Coolsqui arrive au même but, mais par des moyens plus lents; enfin les amendements du ministère, qui renforce le droit d'accise de manière faire verser environ trois millions deux cent mille francs dans la caisse du trésor. Il faut ajouter que M. Sinave a fait une nou velle proposition qui, sans façon, aurait pour conséquence de ne permettre la fabrication et le raffinage du sucre que pour la consomma tion intérieure. Nous ignorons quel système triomphera, mais nous sommes d'avis qu'il se rait inopportun de ruiner l'industrie saccharine. Nous avons déjà assez de ruines industrielles produites par des événemenls en dehors des prévisions humaines, pour que la législature en ajoute encore par des lois trop fiscales. Correspondance. Poperikgue, le 4 mai 1849. Monsieur le rédacteur du Progrès, Si, pour apprécier les qualités et le mérite des hommes appelés surveiller les besoins et les intérêts de notre ville, nous avons pris tâche d'examiner successivement leurs actes administratifs dans chacune des attributions qui leur sont confiées, c'est surtout en portant nos regards sur tout ce qui a rapport la sûreté publique que nous trouvons les preuves les plus patentes de leur inertie et de leur opposition systématique toute idée de progrès. Ici encore les faits parlent plus haut que toutes les intri gues et les préventions aveugles que le parti désunionistc de cette ville a fait valoir en faveur des siens, quand il s'est agi de leur confier la direction exclusive de nos affaires communales. Le délabrement dans lequel est tombée depuis longtemps cette partie du service public, est si profond et l'urgence des réformes qu'il importe d'y introduire, est si généralement reconnue, que force a été l'administration elle-même de faire cet égard les plus humiliants aveux dans une de ses dernières séances publiques. Pour se faire d'abord une idée de la manière dont sont établies en cette ville les lois de police et de sûreté, on n'a qu'à remarquer les agents chargés d'en assurer l'exécu tion. Un simple coup d'œil jeté sur eux suffit pour les juger et pour apprécier ce qu'on peut attendre d'un pa reil personnel. Si l'on en excepte le commissaire de police qui, il faut lui rendre cette justiceremplit ses fonctions avec zèle et activité, le reste, composés d'hom mes invalides ou de sujets que leur indiscipline et leurs habitudes bien connues, privent totalement de l'autorité morale et de l'énergie nécessaires l'exercice de pareil emploi, est absolument incapable de rendre de bons ser vices et d'exercer une action protectrice sur lès intérêts individuels ou collectifs de nos habitants. Aussimalgré toute la vigilance du commissaire qui n'a qu'un contrôle indirect sur eux, ce service est entièrement négligé et n'existe pour ainsi dire que de nom. Non-seulement la police, telle qu'elle est organisée, serait impuissante contre des. tumultes ou des désordres qui viendraient troubler la tranquillité publiquemais elle paraît même [Suite.) XXV. DERNIÈRES GRANDEURS. Deux gardiens de la prison portant des torches de ré sine la main entrèrent dans le cachot et demeurèrent l'intérieurplacés de ehaque côté de la porte. Ils précédaient M. de Marillac et son fils, qui s'avan cèrent lentement. A la vue de ce vieillard, un souffle plus froid que l'air de ces caveaux mortuaires pénétra dans le sein d'Isaure et de Mandrin. La jeune fille se leva précipitamment et se retira dans le fond de l'enceinte par un mouvement de répulsion. Pendant 1 entretien suivant, les personnes présentes se trouvaient ainsi placées Mandrin était debout devant la table sur laquelle brû lait la lampe, calme, assuré, dédaignant même de se parer de tout le courage qui remplissait son âme et ne mon trant qu'une tranquillité froide et quelque peu ironique; M. de Marillac en face de lui, les yeux attachés la terre, redoutant moins les regards de Mandrin, que ceux de son fils et de la noble jeune filledont les généreux senti ments étaient un reproche son égoïsme Davidentre on père et le prisonnier, les bras croisés, la tète penchée sans défense, par la mésestime qu'elle inspirepour ré primer les rixes et les disputes dans les rues, l'arrogance des vagabonds et des mendiants, voire même la turbu lence des gamins qui nulle part ailleurs ne sont aussi méchants, ni aussi mal élevés qu'ici. Si ensuite on la considère sous le rapport de ses devoirs relatifs la répression des délits et des contraventions de police qui portent atteinte aux propriétés, elle ne nous offre pas plus de garantie ni plus de confiance. Outre la nécessité qu'il y a d'établir un service plus actif la cam pagne ou dans la banlieue pour prévenir les vols et les dégâts qui se commettent sur les produits des champs, (service que la population rurale de Poperinghe est ce pendant en droit d'attendre de notre conseil communal, comme une juste récompense de l'appui qu'elle lui a donné aux dernières élections)nous avons encore de nombreux griefs articuler relativement des délits du même genre commis sur les propriétés des habitants de la ville. Le défaut de surveillance va si loin, qu'cnlr'au- tres personnes lésées nous connaissons ici en ville un né gociant qui a essuyé des vols tellement fréquents sur une partie de ses marchandises déposées dans un enclos fermé, que, n'ayant plus rien attendre de la protection d'une police qui ne protège rienil ne voit enfin plus d'autre moyen pour se soustraire ces incessantes ra pines, que d'abandonner sa demeure actuelle pour établir son négoce en un lieu plus sûr. Quant la surveillance que la police est appelée exercer sur la voirie et sur tout ce qui intéresse la sécu rité et la liberté de la voie publique en ordonnant, par exemple, la réparation de murs et autres dépendances de bâtiments qui menacent ruine, en ordonnant l'enlèvement des décombres, chariots et autres objets qui obstruent la circulation tant pendant le jour que pendant la nuit, en empêchant qu'on mette en danger les habitants par la course trop rapide des chevaux ou voitures, en interdi sant la divagation des chiens des époques déterminées de l'année où la rage de ces animaux est le plus crain dre, etc^ Nous pouvons dire qu'elle est encore complète ment nulle ou sans la moindre efficacité, et qu'on retrouve encore ici, la même insouciance qui en définitive ne peut être imputée qu'au peu d'autorité que l'administration exerce sur ses agents. Une partie du service qui se rattache la sûreté pu blique et qu'il importe surtout de faire observer stricte ment, parce que la moindre négligence peut donner lieu de grands malheurs, c'est celle dont sont chargés les veilleurs de nuit. Des plaintes ont maintefois été arti culées leur charge, et un cas d'incendie encore récent sur sa poitrine,non en signe de faiblesse et d'abattement, mais avec une expression de recueillement et de résolu tion profonde Isaure et le père Gaspardun peu plus loin, dans l'embrasure d'une fenêtre murée, assis tous deux sur la pierre d'appui et au milieu du vaste cintre sculpté, la jeune fille appuyée sur l'épaule du religieux. Si la vie est toute entière dans les sentiments, ce cachot du condamné mort où l'homme ne descend que pour un jour, ce creux sombre aux entrailles de la terre était plus animé en ce moment que bien des somptueux édi fices; l'existence morale y abondait. 11 y avait là le cou rage le plus grand, celui du condamné devant l'écbafaud, la révolte de l'ange de l'orgueil et sa punition le maté rialisme exprimé par l'attache sans borne aux biens positifs, l'amour son dernier degré d'exaltation, le fanatisme religieux, austère, inexorable pour les autres et pour lui-même et côté de luila religion toute de cœur, qui ne recueille et verse autour d'elle que douceur et consolation. Les vives expressions de ces sentiments divers se peignaient sur les traits des personnages groupés dans le caveau. La lueur rouge des torches que les soldats tenaient la porte d'entrée éclairait ces figures sombres et exaltées et l'entour, dans les profondeurs du souterrain, flot taient les grandes ombres des pilliers et des arcades sé pulcrales. Un morne silence régna quelques instants. C'était M. de Marillac le rompre; mais ses lèvres sèches et pâles avaient peine s'entrouvrir. Si on eût pu voir ce qui se passait en lui, cet homme si fier de son intégrité, de sa fortune rudement acquise parle travail, forcé en ce moment d'implorer un bandit condamné la roue, eût peut-être inspiré de la.pitié. Mandrindit enfin le fermier-généralvous avez tenu votre parole, pendant le cours du procès, vos yeux ont bien voulu ne pas me reconnaître. N est-ce pas, mon oncle, je vous ai regardé, je vous ai parlé comme si je vous eusse rencontré alors pour la première fois. A ce titre d'oncle donné par Mandrin M. de Marillac le moine et Isaure relevèrent vivement la tète et écoutè rent avec surprise et émotion. Il est vraicontinua le prisonnier en souriantque vous axez parfaitement imite ma discrétion: vous m'avez chargé de tout le poids de votre témoignage, comme si je n eusse été pour vous que le chef de brigands ennemi de la province vous m avez entendu condamner mort sans froncer le sourcil.... Et vous aussimon oncle vous me regardiez en ce moment avec la plus parfaite indiffé rence, comme si vous m'eussiez vu pour la première fois.

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Le Progrès (1841-1914) | 1849 | | pagina 1