JOURNAL D'ÏPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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YPRESle 9 Mal.
SOCIÉTÉ DE I.TNIOX LIBÉRALE
DE L'ARRONDISSEMENT D'YPRES.
Séance obligatoire du Lundis 7 Mai 1849,
sous la présidence de MCarton, père.
La séance s'ouvre six heures et quart par la
lecture des procès-verbaux des réunions des 18, io,
2i Août et 2\ Décembre 1848. La rédaction en est
approuvée.
On passe l'ordre du jour. M. le président fait
connaître que les recettes pour l'exercice écoulé ne
se sont élevéesqu'àla somme de3oG francset qu'elle
a été dépensée, l'exception d'une douzaine de
francs, en frais de location de voitures pour le trans
port des électeurs les plus éloignés du chef-lieu de
l'arrondissement. M. le trésorier a pensé que la
somme n'était pas assez importante pour en donner
un compte en règle, mais le recouvrement de la co
tisation pour les années i848 et i84q s'opère actu
ellement et il se réserve de présenter la prochaine
réunion obligatoire, un comptedétaillé des dépenses
faites. L'assemblée se déclare satisfaite de cette ex
plication et passe au second objet l'ordre du jour.
Il s'agit de procéder au renouvellement par tiers
du comité. Jusqu'ici il a été composé de vingt mem
bres et dans ce nombre, deux représentaient des
cantons ruraux de l'arrondissement. On propose de
conserver le nombre de dix-Huit membres résidant
en ville, bien que le règlement permette de le porter
vingt et un. Mais en conservant le nombre actuel
on pourra donner plus d'importance aux cantons
ruraux, en adjoignant neuf membres de cette caté
gorie. L'assemblée consultée, approuve celte pro
position et décide que le comité sera composé de dix
huit membres résidant en ville et neuf appartenant
aux divers cantons ruraux de l'arrondissement.
Par suite de changement de domicile, de décès et
de démissions, cinq places sont devenues vacantes,
il s'agirait donc de les comprendredans la première
série des membres sortants. Un tirage devrait dési-
XXV. DERNIÈRES GRANDEURS. [Suite.)
David gardait le silence; il n'avait fait aucun mouve
ment ni rien laissé voir de ses impressions pendant ce qui
venait de se passer: seulement des larmes coulaient len
tement de ses yeux.
Immobile et le front baisséM. de Marillac n'osait pas
remercier le prisonnier de ce qu'il venait de faire, par
quelque effusion de piété et de reconnaissance. Cet
homme n'avait jamais répandu aucune marque de ten
dresse autour de lui; s'il se fût livré en ce moment un
mouvement de son cœur, on l'eût méconnu ou dédaigné.
C'était là sa punition.
Votre fortune, votre honneur, sont maintenant bien
assures, monsieur, lui dit Mandrin vous pouvez y trouver
la récompense de votre vie.
Le fermier-général regardait en ce moment mademoi
selle de Chavailles et le moine franciscain il souffrait
intérieurement que deux personnes connussent son hu
miliation.
Soyez tranquille, monsieur, dit le père Gaspard
qui pénétra sa pensée, votre secret sera bien gardé: il est
enfermé dans le sein de la religion.
Et le sera bientôt dans la tombeajouta Isaure en
répondant pour elle.
M. de Marillac fit un mouvement pour s'éloigner. Il
sentit qu'il y aurait de la faiblesse se dérober ainsi sa
pénible situation, et s'arrêta.
gner le sixième inerahre réélire. En présence de
l'assemblée, on procède au tirage, et le sort désigne
M. Iweins-Fonteyne comme appartenant la série
sortante de 1849. On continue le tirage pour la série
sortante en i85o; sont désignés: MM. Louis Annoot,
Pierre Beke, Jules De Codt, Ernest Merghelynck,
Auguste De Ghelcke et Pierre Verschaeve.
Les membres dont les noms restent dans
l'urne et qui sont MM. Carton, père, Auguste
Vanden Bogaerde Alphonse Vanden Peereboom
Henri Carton De Coene-Lahousse et Charles Van
de Brouke, devront recevoir un nouveau mandat en
851M. le président fait donc connaître que M.
Iweins-Fonteyne est le membre sortant du comité
et que depuis la dernière réunion l'association s'est
accrue de neuf membres. Il annonce qu'il va être
procédé par scrutin secret au renouvellement par
tiers du comité et propose de lever la séance pen
dant quelques instants, pour donner aux membres
la facilité d'écrire leurs bulletin^.
A la reprise de la séance, on passe au vote et les
membres qui sont nombreux, se présentent au bu
reau et remettent leur bulletin M. le président.
On procède au dépouillement du scrutin qui con
state que MM. Van Daele, président de lacommission
des Hospices civils et avocat, M. Boedt, représentant
et notaire, M. Iweins-Fonteyne, échevin de la ville
d'Ypres, Louis Verhille, négociant, Nollet, négo
ciant, Charles Maieur, propriétaire, ont été élus
membres du comité par une grande majorité. M.
Joye a obtenu douze voix. D'autres membres ont eu
quelques voix perdues.
M. le président propose de nommer par acclama
tion, membres du comité pour les cantons ruraux
de l'arrondissement: M\I. Charles De Neckere,con
seiller provincial et bourgmestre de Messines
Behague, bourgmestre de Warnêton, représentant
le canton de Messines; MM. Henri Cauwelier, pro
priétaire, Poperinghe Jean Roelens, fabricant,
Poperinghe; et Vrambout, avocat et conseiller pro
vincial du canton de Poperinghe, pour représenter
ce dernier canton au sein du comité. Ces proposi-
Allez, monsieur, dit Mandrin vous pouvez passer
heureux et triomphant le seuil de ce cachot, vous retrou
verez au-dehors cette opulence, cette considération, cette
vie publique qui vous sont chères, et jamais (oh! vous
pouvez en être bien assuré jamais aucun regret, aucun
triste souvenir du passé ne viendront rompre la glace de
votre cœur et vous troubler dans votre paisible félicité!
David releva enfin la tête et prit la parole voix haute
Et moi! dit-il Mandrin, crois-tu que je veuille
jouir d'une fortune acquise par un mensonge envers le
monde et une cruauté envers toi? Non, cette opulence,
cette considération me brûleraient le front de honte ce
séjour de la ville me serait un enfer, je souffrirais plus
de ce calme, de ce bien-être de chaque jour, que de la
misère, de la ruine et de l'exil...
Malheureux! que feras-tu donc? dit son père avec
effroi.
J'irai dans un lieu où ce nom, ce rang, cette richesse
qu'on nous laisse ne pèseront pas sur moi... Car, dans la
retraite que je choisirai, asile intermédiaire entre la vie
et la mort, on a déjà perducomme dans la tombe, ses
richesses son rang, et jusqu'à son nom
Oh mon Dieu serait-il possible
On n'a plus, sur ce rocher désert de la Grande-
Chartreuse, qu'un nom de religion et la robe de bure
commune tous les frères.
David mon fils
Oh pas un mot pour me détourner de cette réso
lution je jure devant Dieu qu'elle est irrévocable
lions sont admises l'unanimité et aux applaudis
sements de la réuuion, qui n'ayant plus rien son
ordre du jour, se sépare sept heures et demie.
On n'ignore pas qu'il y aura dans le courant du mois
de Mai, au vœu de la loi, le Lundi de la Pentecôte, 28
Mai, une élection pour la nomination d'un membre du
conseil provincial en remplacement de M. Donny, membre
de la députation permanente, décédé. Les dernières lut
tes électorales ont fait surgir en notre ville, une coterie
qui se dit composée de commerçants et d'industriels, qui
ne rêve que commerce, industrie, négoce, cultivant
l'exclusivisme jusqu'à proclamer que le commerce est tout
comme autrefois le tiers-état et le reste rien. Ces honnê
tes égoïstes ont un journal qui vient de faire connaître
l'univers entier, et en mille autres lieux, que lui, la ban
nière du commerce et de l'industrie, vient d'accoucher
d'un candidat pour représenter ces deux branches de
la richesse publiquel'exclusion de toutes les autres.
Oui, les fougueux Don Quichottes du commerce et de l'in
dustrie ont fait choix pour les représenter au conseil provin
cial de M. Beke, Joseph avocat -propriétaire!!! Qu'il soit
avocat, passe; les avocats plus ou moins délicats défen
dent toute espèce de causes, on pourrait donc la rigueur
se passer la fantaisie de faire représenter le commerce de
certains industriels par cet avocat, mais faire choix d'un
individu du genre propriétaire qui est la bête-noire de
ces caméléons, voilà ce qui dépasse de cent coudées l'in
conséquence la plus pyramidale. En effet, pour le conseil
provincial, la même feuille n'a-t-elle pas blâmé le choix
d'un candidat, sous prétexte qu'il n'était pas commerçant,
et maintenant elle désigne un avocat-propriétaire, sous
prétexte qu'il est fils de négociant. Du reste, M. le can
didat prétend qu'il avait refusé la candidature et que les
rédacteurs de la feuille commerciale lui ont fait violence,
en mettant son nom en avant. Ce n'est qu'une plate
comédie qui a déjà eu plusieurs représentations, car l'on
doit se rappeler que quand le même candidat se mettait
sur les rangs Haringhe, probablement pour représenter
l'agriculture, c'était alors une surprise qu'on voulait lui
faire. Il y a des candidats qui il arrive toute espèce
d'événements drolatiquescomme d'entendre vanter
leurs capacités administratives, quand ils ignorent les
plus simples règles de l'administration, et d'être célébrés
comme des financiers de premier ordre, quand on ne sedou-
te pas du premier mot des prescriptions essentielles de la
Marillac sentit bien cet accent de vérité qu'il n'y avait
rien espérer. Il dit avec un soupir étouffé
Je serai donc seul sur la terre.
Seulmon père... Si vous appelez être seul vivre
séparé de votre filsil y a longtemps que vous en avez
pris l'habitude.
Malheureux amidirent en s'approchant de lui le
prisonnier et Isaurevingt anst'ensevelir dans un
cloître
Vous voyez bien qu'il le faut, répondit-il en les
embrassant du même regard car désormais je ne pourrai
plus vous aimer qu'en priant pour vous.
L horloge de la prison sonna. Les gardiens avertirent
qu'il était l'heure de se retirer.
A ce moment d'adieuIsaure et David sentirent un
déchirement affreux; ils levèrent les yeux sur Mandrin
et le virent si grand, si imposant de force et de sérénité,
que par un mouvement spontané, ils se jetèrent tous deux
genoux et prirent ses mains, en s'écriant:
Oh! toi. condamné donne-nous du courage
11 est impossible de rendre ce moment d'étreintes et de
larmes.
Mais en sortant des bras de Mandrin David était plus
fort, plus calme.
Il se retira avec son père.
Adieu... toi aussi dit Mandrin en pressant Isaure
sur son cœur.
-— Nonpas encore adieudit le père Gaspard nous
reviendrons demaincette heure.