Électeurs delà ville! Par l'union, on triom
phe. Que tous les libéraux fassent abstraction
de sympathies personnelles et de camaraderie
pout-ae répondre qu'à l'appel du parti libéral
auquel ils peuvent tenir honneur d'apparte
nir, car c'est lui qui a sauvé l'indépendance
et les institutions belges pendant la tempête
issue des journées de Février. Electeurs cam
pagnards, ne vous laissez pas effrayer par de
sinistres prédictions. Une fois déjà, on vous a
dit que si l'opinion libérale triomphait, les égli
ses seraient fermées, les prêtres persécutés. Le
libéralisme est sorti triomphant de la lutte et
vous avez pu vous convaincre que vous aviez
été indignement mystifiés. N'ajoutez pas foi
aucun de ces sinistres prédicateurs qui, il y a
deux ans, vous effrayaient. Peut-être essaye
ront-ils encore de cette tactique. Déjouez-la et
venez voter pour M. De Langue qui mérite vo
tre estime, sinon vos sympathies, car c'est un
homme droit, ferme et indépendant et qui a
dans sa longue et honorable^carrière, rendu
des services éminents au pays.
Nous apprenons l'instant que dans sa séance de
hier, i5 Juin, la Chambre des représentants vient
d'adopter, la majorité de 37 voix contre 26, un
amendement présenté par M. Ali'H. Vanden Pee-
lieboom, représentant d'Ypres, et ayant pour objet
d'établir un droit de transit sur le bétail.
Ce droit a été fixé 8 francs pour le gros bétail et
6 francs pour le petit bétail.
Cette mesure sera accueillie avec sympathie dans
tout l'arrondissement, car elle intéresse l'élève du
bétail qui est une de nos principales branches
d'agriculture.
Toute la tactique de nos adversaires politiques
peut se résumer en ce seul principe Diviser
pour régner. Dans un long article du Journal
des Bazileson prend tâche d'exciter l'homme
quiseserait, par dévouement àson opinion, mis
sur les rangs pour être sénateur, contre le candi
dat de l'opinion libérale. Souffler la discorde, la
désuuion, toujours et partout, c'est le fort des
journaux jésuitiquesmais ces pratiques sont
connues et font peu ou point d'effet. [Aussi en
sont-ils pour les frais de leurs honteuses machi
nations.
11 parait que l'Association libérale qui est de
venue, sous une plume catholique, un conci
liabule, balançait entre deux candidats Cela
prouve au moins qu'on pourrait faire un
choix, taudis que le parti catholique n'avait
pour tout candidat qu'à nous servir M. Malou,
préconisé par des anonymes, des inconnus qui
récusent la respousabililé de leur œuvre, car
nul ne veut être de la clique catholique-indus
trielle et l'on repousse la qualification de Com
muniste ou adhérent du journal la Commune
comme une injure, comme on renie ta commu
nauté d'opinion avecj le Journal±des Baziles.
interrompit quelqu'un.
Archambaud continua
Mais, pour Dieu! ce que personne ne sait, c'est
que quand je passais pour quitter triomphalement la
lice, j entendis a mon oreille une voix angélique qui
murmura avec une baleine embaumée: minuit, sous
le parvis Notre Dame
Comme vous le pensez bien, messeigneurg, j'at-
trappai ces paroles au vol, avant qu'elles eussent le
temps de tomber terre. Or, n'ayant aucun autre
rendez-vousimportantje me rendis au lieu indiqué,
bien a^ant heure convenue, de crainte d'arriver trop
tard. Je vous atteste, messeigneursquoique je sois
expert en pareille matière, que l'attente me parut aussi
longue qu a n importe quel débutant d'amour.
Tout en parlant ajnsj i ie comte Archambaud avait les
yeux immuablement fixés sur Hugues de Clisson lequel
son tour soutenait son regard, sans faiblir.
Enfin, messeigneurs, minuit venait de sonner,
a lorsque j aperçus l'auge de mon tournoi, la figure her-
métiquement cachée sous les plis de son voile, elle
avanÇait légère et gracieusecomme une apparition
vaporeuse. Derrière elle suivait un levrier d'une beauté
remarquable.
A ces mots, les traits de Clisson exprimèrent une inex
primable férocité on eût ditvoir les étincelles qui
partaient de ses prunelles comme des jets de flamme
électrique, qu un volcan bouillonnait dans sa tète, n'at
tendant que le moment propice pour faire irruption.
Ses mains, placées sous la table, tordaient un des bouts
pendants de son pourpoint.
1. Dieu me damne! poursuivit Archambaudsi
L'Association qui compte dans son sein cent
cinquante électeurs, paraît un rien du tout au
gré du journal catholique. Nous aurions désiré
qu'avant de faire fi de ce qu'il ne connait
pas, il eût voulu proclamer le nombre des
électeurs qui composent le cénacle catholique
et décliner leurs noms publiquement, comme
les libéraux portent la connaissance du pu
blic les décisions de l'Association. Mais on se
tient prudemment dans l ombre, et l'on doit se
méfier juste titre de ce qui ne peut supporter
la lumière du jour. Ainsi donc nous engage
rions le journal catholique suivre l'exemple
du libéralisme avant de se permettre des criti
ques aussi ridicules; alors au moins nous sau
rions, qui nous avons combattre et la lutte
gagnerait en moralité ce qu'elle pourrait perdre
en mystère.
Depuis quelque temps les deux journaux
cléricaux de la ville s'occupent beaucoup de la
famille Carton, des cartonnés, lancent des car-
tonnadesenfin se permettent les exercices les
plus incroyables pour amuser leurs béats lec
teurs. Il nous semble que sans vouloir troubler
les amusements de certains scribes, nous pour
rions émettre l'opinion que la tactique n'est
pas étrangère la persistance avec laquelle ils
font des lazzis sur le mot carton. Sauf erreur
nous pensons, que c'est pour détourner l'at
tention publique du plan imaginé dans le
cénacle catholique d'emtnalouiner l'arrondis
sement d'Ypres, au nom du père, et du fils et
du saint esprit. Amen.
Ne sachaut comment attaquer la candidature
de M. De Langue on s'est avisé de le faire pas
ser pour un orangisle. Tous ceux qui le con
naissent, savent combien cette assertion est
dénuée de toute vérité. Mais un journal jésui
tique ne recule pas devant un mensonge, et
parce qu'il n'a pas approuvé dans le principe,
la loi qui excluait la maison de Nassau de tout
pouvoir en Belgique, 011 l'accuse «j'avoir voulu
une restauration orangisle. Noutf croyons ce
pendant qu'il eût été sage de ne pas voter une
pareille loi, car la nécessité et la raison cl état,
peuvent la faire transgresser, nous en avons
un exemple en France. La famille Bonaparte
en était bannie, et le suffrage universel l'a rap
pelée. Cet exemple suffit pour prouver que si
les sympathies du peuple rappellent un souve
rain ou des princes bannjs, la loi est impuissante
l'empêcher. Convaincu de celte vérité, M.
De Langue croyait que le Congrès ne devait pas
se lier et les événements ont fait voir que ce
n'était pas cette loi qui avait empêché une res
tauration mais le vif désir qu'avait le peuple
belge de conserver son indépendance.
Odette de Champdivers, maîtresse de notre vénéré roi,
n'était morte depuis déjà trois mois, j'aurais pu croire,
u lorsque mon inconnue leva son voile pour me sourire
que c'était Odette que j'avais devant moi.
Enfinsires chevaliersje mets qui que ce soit au
défi de montrer pareille miniature, j'excepte toutefois
Hugues de Clisson de ce défi.
Parbleu dit un imprudent.
Hugues de Clisson était redevenu aussi calme que s'il
eût été complètement étranger cette scène. Pas un mou
vement ne trahissait en lui l'émotion, pas un regard n'ex
primait la colère. Seulement ses deux mainstoujours
cachées sous la tablecontinuaient tordre silencieuse
ment un des pans de son juste-au-corps.
Archambaud du Donjon continua
Nous causâmes longuement: il y avait dans sa
conversation un charme cuivrant, faseinateur ou vou-
drait vivre et mourir dans l'ivresse qu'amène un pareil
bonheur.
Un peu avant le jour, un bruit assez significatif, parti
n ma droitesous le porchem'obligea tourner la
tète. J'aperçus alors une longue robe noire dans une
niche pratiquée au mur cette ombre lançait sur nous
deux yeux aussi luisants que des esearboucles. Sur
mon âmeme voyant si près d'un saint menaçantje
me signai par trois fois, puis je m'avançai hardiment
vers lui.
Maintenant, devinez quel était ce saint maudit
Probablement des rats, ou plutôt une innocente
araignée filant sa toile hasarda un incrédule.
Du tout fit Archambaud tu n'y es pas Gaston
c'était un page blond, délicat, rosé, que ma ravissante
Le Journal des Baziles réellement fait
preuve d'une ignorance crasse, et tronque les
faits probablement par stupidité de mauière
exciter la pitié de tous ceux qui connaissent les
faits dont il a la prétention de s'occuper.
M. De Langhe était favorable au creusement
du canal de l'Espierres et l'autorité communale
et la chambre de commerce d'Ypres s'oppo
saient la construction de ce canal et préfé
raient celui de Bossuyt. Il était certes permis
de différer d'opinion avec la chambre de com
merce et l'autorité communale sur un travail
d intérêt public. Ce qu'il y a de plus curieux,
c'est qu'on y trouve matière pour dire £qua
l'Association libérale, composée d'autant de
commerçants pour le moins que d'avocats, de
médecins et de propriétaires, a choisi M. Di
Langue pour faire tort au commerce. Quant au
reproche qui lui a été adressé, d'inertie et d'in
curie, le ministre avait dit que les députés
n'avaient point fait connaître la crise qui se
manifestait au dire de la chambre de com
merce et de l'autorité communale. Mais celte
situation avait été assombrie pour engager le
gouvernement nous créer des voies de com
munication qui malgré des démarches réitérées
et quoique nous ayons eu pour ministre un de
nos représentants catholiques, ne sont pas en
core réalisées. On s'est saisi d'u/ie mauvaise
défaite d'un ministre pou* accuser M. De Lan
gue qui a expliqué sa conduite au conseil com
munal et qui a eu le tort de ne pas rendre sa
réponse publique comme avait^été l'accusation.
On nous communique un discours de M. De Langue,
prononcé le 18 décembre 1829, aux États-généraux. Il
s'agissait du vote des budgets. Le langage ferme, net,
concis de ce député, l'époque de nos démêlés avec la
Hollande, est oublié aujourd'hui de bien du monde. Son
désir de voir la plus sévère économie présider aux dépen
ses de l'état, était déjà exprimé cette époque et le dis
cours que nous reproduisons, prouve qu'en matière de
comptabilité, il s'y entendait assez bien pour n'avoir pu
être aveuglé par l'administration hollandaise qui enve
loppait beaucoup ses opérations financières d'une obscu
rité impénétrable.
Nobles et Puissans Seigneurs,
Après une discussion déjà bien longue, j'oserai ré
clamer pendant quelques instans l'attention de V. N. P.
pour leur exposer les raisons qui me porteront donner
un vote désapprobatif aux projets de loi soumis nos dé
libérations.Je les prendrai d'abord dans les budget*
eux-mêmes. En premier lieu l'exorbitance des dépenses,
car quoique le chiffre des budgets paraisse diminuéon
a démontré clairement que comparé aux budgets précédent
il doit être considéré comme montant 82,012,319,73.
La différence consiste en distractions de dépenses et d«
recettes équivalentes. 2° Montant trop élevé du budget
décennal en comparaison du budget annal. Je crois notre
administration susceptible de beaucoup de simplification*
et par conséquent d'économies, et le transfert d'un hui
tième ne me parait pas suffisant. 3° Défaut de justification
inconnue avait fait cacher là afin de s'assurerpar elle-
même, si je n'étais pas plus craintif l'endroit du diable
que quand il s'agissait de rompre une lance avec un valé-
reux et féal chevalier. J'ai dit, et si quelqu'un de vous ma
prouve que le fuit ne soit pas rigoureusement exact
j'offre en don ma chàtellenie, mon hôtel, ma suzeraineté,
mes trois seigneuries et mon palatinat.
Aucune contestation ne s'éleva.
Après Àrehambaud, ce fut le tour de son voisin ds
droite subir l'épreuve d'un aveu.
On nous dispensera de redire les historiettes plus ou
moins excentriques, plus ou moins fantasques qu: furent
racontées successivement par chaque membre de la ré
union.
Elles ne valent guère la peine d'être écoutées que dans!
ces moments de bonne indulgence où le vin échauffe les
têtes, anime la parole, fait pétiller les saillies mousser
les bons mots.
Il ne restait plus qu'une personne confesser l'impres
sion d'un souvenir c'était Hugues de Clisson.
On attendait qu'il se décidât; et depuis cinq minutes
que son tour de rôle était arrivéil n'avait pas encore
paru remarquer l'attente générale.
Eh bien! Clisson, dit enfin Archambaud, n'as-tu pas,
dans quelque coin de ta mémoire, un pauvre conte ou
blié? Comme tu ne peux pas échapper la loi commune,
nous écoutons.
Ce disant, il appuya ses deux coudes sur la table, posa
son menton dans la paume de sa main droite, et, fixant
inexorablement celui auquel il s'adressaitil s'apprêta
dans un silence religieux, se concentrer dans ses oreilles.
(La suite au prochain