861 865. 0e Année. Dimanche, 19 Août 1849.
JOIRYAL DYPRES ET DE L'ARROADISSEMEYT.
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lAILlUEl».
TPRES, le 18 Août.
Les journaux cléricaux ne se gênent plus; ils se
ruent fond de train sur l'administration libérale.
Le ministre de la justice De Haussy est le point de
mire des diatribes jésuitiques, parce qu'il a appliqué
les dispositions légales en matière de fondations
charitables, de manière ce que le clergé se trouve
dans l'impossibilité de détourner les revenus de ces
biens son profit, comme il ne se gène pas de le
faire là où il en trouve la facilité, le tout en pré
tendant encore ne pas devoir rendre compte, parce
que ses membres sont les oints du Seigneur.
On se rappelle que la veille de l'élection de Thielt,
M. Darras, curé-doyen, s'est avisé de lancer une
circulaire électorale par laquelle il blamait le mi
nistre de la justice, qualiliant sa conduite de oexa-
toire (tevçjend) parce qu'il n'avait pas voulu autoriser
les sœurs hospitalières accepter un legs fait l'hos
pice des vieillards de Thfelt. Le Moniteur a répondu
celte circulaire du doyen, eri mettant néant les
allégations fausses et les questions insidieuses du
saint homme. A cette réfutation péremptoire vous
croyez que le doyen se soit tu? Loin s'en faut il a
repris la plume et a ajouté d'aulresallégaliotis men
songères celles déjà refutées,letoutà la plus grande
gloire du parti catholique qui, tout aussi arrogant
que jamais, prétend que sa volonté et ses intérêts
tiennent lieu désormais de lois en Belgique.
ENTRÉE OFFICIELLE ET RÉCEPTION
DE COE VERNE EH II. LE BARON DE VRIÉRE,
A TPRES.
Si l'un des voyageurs qui connaissent le calme
habituel de notre ville, lut venu Lundi dernier h
Ypres, dans l'espoir d'y acheter ces légers et riches
réseaux si recherchés par les baronnes allemandes,
les citoyennes américaines, les princesses russes et
nos élégantes voisines du midi, quelle n'eut pas été
sa surprise? Pourquoi se serait—il écrié ces longues
avenues d'arbres verts? Pourquoi ces guirlandes
pittoresques? Pourquoi ces drapeaux bicolores, tri
colores, multicolores, toujours dominés par le dra
peau national? Pourquoi ces arcs de triomphe? Ces
décorations variées? Pourquoi ces habits de fêle?
Ces magasins fermés? Pourquoi ces brillants uni
formes étincelants au soleil? Pourquoi cette joie
sur tous les visages? Cette animation joyeuse? Celte
allégresse publique? Parceque, lui eut-on répondu,
Ypres qui, depuis plus de vingt ans, n'a pas eu l'hon
neur de recevoir un gouverneur de la Flandre
occidentale, attend aujourd'hui le haut fonction
naire qui les destinées de la province sont confiées
DE PAR LE ROI, de par le monarque qui, lorsque
l'incendie révolutionnaire éclata eu Europe, dit
Si une goutte de sang de mon peuple doit être
versé pour moi, voilà ma couronne,» dece monarque
qui sût, au milieu des orages politiques, conserver
la Belgique les bienfaits du calme et du repos, de ce
roi qui est le protecteur du faible, l'espoir de l'op
primé, le père du peuple, le premier des citoyens
belges.
Et puis l'on eût ajouté M. le baron De Vrière,
que notre roi a nommé gouverneur de la province,
est on de ces hommes qui a fait du bien partout où
il a passé, qui partout a su mériter les sympathies
de tous, dont les idées sont en rapport avec les
besoins de notre époque et qui, nous l'espérons,
prouvera par ses actes, qu'il éprouve pour la ville
d'Ypres un sentiment de bienveillance auquel nous
ne sommes pas habitués.
Telles étaient, en effet, les causes de ce mouve
ment géuéra) de l'allégresse publique qui ont facilité
l'organisation de fêtes brillantes, que nous cherche
rons, narrateurs fidèles, décrire.
Lundi, io heures, se trouvaient réunis, l'hôtel-
de-ville, quelques autorités et les divers corps,
confréries et sociétés qui s'étaient spontanément
offerts pour composer le cortège; nous disons spon
tanément, car aux termes des décrets, le collège
des bourgmestre et échevius et un détachement de
la garde civique devaient seuls se porter la ren
contre du gouverneur.
A peu do distance de la ville, hors de la porte de
Dixrnude, avait été dressé un arc de triomphe ma
jestueux, puis un pavillon élégant, ces décorations
étaient parfaites,car elles avaient été dirigées par
M. Bôbm dont le goût est connu de tous. C'est là
que s'arrêta le cortège organisé pour recevoir M. le
gouverneur.
Bientôt un gendarmeenvoyé en estafette, annonça
le chef de la province. M. le gouverneur accompa
gné de madame la baronne De Vrière, de M. Vram-
bout, membre de la députatiori permanenteet M. H.
Carton, commissaire d'arrondissement, mit pied
terre; notre vénérable bourgmestre le complimenta
et M. le gouverneur répondit par un discours sym
pathique aux paroles éloquentes de notre premier
magistrat.
Bientôt le capitaine Coenegracht, commandant
du cortège, donna le signal du départ.
Divers arcs de triomphe étaient dressés entre le
pavillon de réception et la porte de la ville au-
dessus de laquelle avait été placée une gigantesque
décoration ornée d'immenses bannières flottant dans
les airs, portant des inscriptions, des chronogram
mes charmants que nous regrettons de ne pouvoir
faire connaître, parce que nous n'avons pu en pren
dre copie.
La rue de Dixmude était parée avec un goût
exquis, nous pourrions presque dire avec profusion,
car il y avait dans cette seule rue assez de décors,
de guirlandes et de drapeaux surtout, pour orner
les principales rues de la ville.
Le cortège longeant la halle, fit le tour de la
Grand'l'lace au milieu d'une population immense.
En ce moment surtout le coup-d'œil était ravis
sant. Toutes les fenêtres étaient garnies de dames;
le cortège circulait lentement avec ensemble; et
quel cortège! Négligeant ces parades grotesques, ces
mascarades peu convenables, Ypres avait voulu or
ganiser une joyeuse entrée comme Ypres seule,
grâces ces institutions, ses gilden et sociétés
admirablement constituées, peut en organiser.
Un peloton de gendarmerie ouvrait le cortège,
puis venaient des détachements de notre belle Garde
civique (infanterie et artillerie), précédés de la mu
sique du bataillon; ces détachements étaient suivis
de la musique du corps des Pompiers, de la société
Guillaume-Tell en tenue toujours coquette et dont
un membre avait peine porter le riche écusson,
couvert d'un grand nombre de médailles, souvenirs
chéris des victoires remportées par la société.
Derrière le médailler donné par la ville et digne
des belles médailles si glorieusement conquises, par
deux fois, aux concours de Bruxelles, marchait la
Société des Chœurs qui toujours se inoutre prête
embellir non-seulement nos fêles par ses chants,
mais eucore nos cérémonies par sa présence. Enfin,
venait l'antique confrérie de S1 Sébastien, avec son
brillant drapeau et son riche collier de médailles.
Les autorités suivaient en voitures. Nous avons re
marqué les curés des quatre paroisses, une députa-
tion de la Garde civique, l'autorité communale et
les administrations charitables.
Dans la dernière voiture, qui était celle de M. le
bourgmestre, se trouvaient M. le gouverneur de la
province, M™ De Vrière, M. le bourgmestre et M.
le commissaire d'arrondissement.
Quand la tête de la colonne fut arrivée la maison
de M. le bourgmestre, où M. le gouverneur logea
durant son séjour Ypres, les divers corps se ran
gèrent en bataille et celui qui était le héros de la
fête put inspecter une dernière fois le brillant
cortège qui l'avait précédé.
Après avoir reçu toutes les autorités de la ville,
le chef de la province, visita, accompagné de M™ De
Vrière, les principaux établissements de la ville.
Les archives, le palais de justice, le jardin public, la
bibliothèque, l'école communale, la prison, l'école
gardienne, furent successivement visités par lui, et
partout, nous assure-t-on, il témoigna la satisfac
tion la plus vive aux personnes chargées de la sur
veillance ou de l'administration de ces institutions.
Mais voici encore une belle fête. Il est cinq heures,
le bataillon de la Garde civique au grand complet
est rangé en bataille sur la Place. L'air martialkde
nos citoyens soldats, leur immobilité, le silence qui
règne dans les rangs, permettrait de croire que l'on
a là, devant soi, un bataillon de vieilles troupes.
Le gouverneur arrive, se place devant le front du
bataillon, puis en passe la revue, suivi de quelques
fonctionnaires. On s'attendait un défilé pur et
simple quelle ne dût pas être la surprise de M. le
gouverneur et des nombreux spectateurs, quand on
entendit M. le major Vanden Bogaerde commander
une série de manœuvres dont les militaires regar
dent l'exécution comme peu facile.
Nous devons le dire, une espèce de crainte saisit
d'abord ce public qui, comprenant l'utilité delà
Garde citoyenne, mais ignorant combien son éduca
tion militaire était avancée, craignait qu'elle ne se
tirerait pas avec un succès complet de cette difficile
épreuve. Mais bientôt on comprit que celte appré
hension n'était pas fondée. Toutes les manœuvres
furent exécutées avec un aplomb, un ensemble et
une précision qui méritèrent les félicitations vives,
les compliments flatteurs que M. le Gouverneur
adressa, après la revue, M. le commandant de la
garde.
Il était permis de croire qu'après une journée
ainsi remplie, tout était terminé pour ce premier
jour, maison comptait sans son hôte, et cet hôte
était le bourgmestre de la ville.
Un banquet de 35 40 couverts réunissait toutes
les autorites de la ville et quelques bourgmestres
des communes voisines. Ce banquet était charmant
comme tous ceux que donne M. le bourgmestre les
brillantes fanfares de la Garde civique, la bonne
musique du corps des Pompiers et l'harmonie du
io" régiment qui fait toujours un plaisir nouveau,
contribuèrent embellir ce banquet officiel.
Après le banquet, un grand nombre de dames
furent présentées par M-" la baronne Vanderstichele
de Maubus M. le gouverneur et Mmo la baronne
De Vrière, et durant cette soirée la Société des
Chœurs fit entendre, avec son talent ordinaire, ses
chants les plus harmonieux.
Enfin M. le gouverneur, ayant appris qu'une
illumination brillante avait été organisée spontané
ment, proposa une promenade dans les principales
rues de ia ville et termina cette tournée et la pre
mière journée de son séjour Ypres, par une visite
la Société de la Concorde.
Le mardi malin, M. le gouverneur se rendit
Messines, y inspecta l'établissement et visita la ville.
ous connaissiez, sans doute, les appartements
de l'hôtel—de-ville, la salle du conseil, cette espèce
desalleà inoitiéaclievée, que, par ironie sans doute,
011 appelait Salle du trône, et puis la salle dite
Bleue. Toutes ces salles étaient peu propres, EU
bien c'est là qu'a été offert au gouverneur et Mm>
la baronne De Vrière un bal comme rarement on en
a vu Ypres... Mais, car il y a un grand mais, il y
a douze jours, M. De Bruck qui décore avec tant de
gout, s était charge de métamorphoser ces chambres
nues et incoloies en salons élégants; il a tenu pa
role, sa baguette magique, je veux dire son pinceau
et sa brosse ne lui ont pas fait défaut, Tousceuxqui
ont assisté au bal de mardi ont pu s'en convaincre.
Qu elle est élégante la salle jadis plus ou moins