JOURNAL O'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Vires acquirit eundo.
IV 866. 92 Année.
Jeudi, 23 Août 1813.
I\5ilÂaElIE.
Le neveu «S un Connétable.
1
ABONNEMENTS Yprès (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces,4 francs. I Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS: Ankosces, la ligne la centimes. Réclames, la ligne 30 centimes, j être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRES, le Août.
Nous sommes revenus au beau temps du
dévergondage de la presse épiscopale menson
ges, diffamations, calomnies, perfidies, émail-
lenton ne peut plus heureusement, les saints
carrés de papier. Ils rentrent armés de toutes
pièces, sur la scène d'où ils avaient disparu
pendant que la frayeur les tenait paralysés.
Cependant, malgré la pyramidale mauvaise foi
du parti catholique, il est une assertion qui
devrait soulever les clameurs du pays, chaque
fois qu'une feuille jésuitique ose l'énoncer, c'est
celle qui consiste insinuer que le ministère
libéral n'a rien fait pour améliorer la situation
des Flandres. Nous ne disons pas précisément
que celte accusation se lise dans les journaux
qui s'impriment dans les provinces flamandes
où I on peut s'assurer par soi-même de la situa
tion réelle des choses, mais ce sont les pieux
libelles qui s'impriment dans les villes de se
cond et de troisième ordre des autres provinces,
sous le patronage du clergé, qui ont l'impu
deur de propager des allégations aussi absurdes.
Nul n'ignore que sous le ministère De Theux,
un député des Flandres, transporté d'indigna
tion l'aspect de la froide insensibilité du
pouvoir en présence de tant de maux s'est
écrié: Vous voulez donc laisser les Flamands
mourir de faim. Alors la misère élait son
comble. Les aumônes que les cabinets catho
liques ont répandues ne pouvaient plus suffire
atténuer la consomption qui avait atteint nos
provinces jadis si prospères. Le parti libéral,
depuis longtemps, avait demandé qu'on ne
s'obstinât pas remonter le courant et engagé
le pouvoir introduire la nouvelle industrie
linière dans le pays avec le tissage d'autres
étoffes qui jusqu'ici n'avaient pas été fabriquées
par nos tisserands. Enfin, l'opinion libérale
croyait qu une modification dans la condition
de l'industrie de nos provinces, était le plus
efficace de relever les Flandres de la décadence
où un gouvernement rétrograde les avait laissé
s'abimer.
VIII. LE PAVILLON. [Suite.)
Pendant qu'ils causent ainsi, nous allons revenir quelque
peu en arrière, pour comprendre la cause des aboiements
et de l'appel qui leur avait succédé.
Depuis près d'une heure un cavalier, soigneusement
enveloppé d'une houpelande dont le capuchon était ra
battu sur son visage, suivait la route qui conduisait au
fief du donjon; il montait un genet d'Espagne qui mar
chait l'amble.
Derrière, suivait un levrier au poil fauve, ayant au cou
un collier rouge orné d'une plaque sur laquelle s'étalaient
des armoiries.
A mesure que cette petite troupe avançaitle cavalier
tirait la bride de son cheval par mouvements saccadés.
Le chien, de plus en plus folâtre, aboyait avec tant d'ar
deur que son maître en paraissait soucieux.
Déjà les créneaux de la châtellenie se dessinaient
comme une ombre noire sur le bleu foncé du ciel.
Le levrier redoubla l'agilité de ses mouvements et ses
cris semblaient tellement mécontenter l'homme la houp
pelande, que celui-ci cria d'une voix sourde en portant la
main la garde de son poignard
Tais-toi, Rapide... tais-toi!
A partir de ce moment l'intelligent animal, soumis la
Depuis dix-huit mois, l'application des idées
du libéralisme sur celte question ont été faites
et l'on devrait être aveugle pour nier qu'une
amélioration sensible ne se soit produite dans
les localités qui ont le plus été éprouvées par le
paupérisme; le travail s'est relevé, d'autres
modes de tissage ont été vulgarisés par les
ateliers d'apprentissage, et au lieu de n'avoir
qu'une corde son arc, l'ouvrier tisserand peut
aujourd bui exécuter divers tissus qui lui per
mettront d'essayer de celui qui offrepour le
moment, le plus de bénéfices.
L'exposition de Gand a fait ouvrir les yeux
ceux qui de bonne foi ne croyaient pas la
régénération de la population ouvrière des
Flandres et s'étaient laissé tromper par les
mensonges calculés de la presse catholique
Aujourd hui, on a pu, par les richesses indus
trielles accumulées dans les salons de l'hôtel-
de-ville de Gand, s'assurer qu'il était inutile de
songer l'émigration pour trouver un remède
au paupérisme des Flandres. Une nouvelle com
binaison de 1 industrie et de l'agriculture, mais
sous d'autres conditions que celles qui régis
saient l ancienne industrie linière, est le moyen
le plus efficace de rendre aux Flandres un vi
goureux essor. C'est la transformation de l'in
dustrie au point de vue économique, qu'exigeait
la déplorable situation de nos provinces. Le
pouvoir catholique ne s'en est jamais douté et
si une autre impulsion n'avait été donnée, si le
ministère libéral n'avait pas mieux compris la
question, la Flandre devenait une autre Irlande.
SPÉCIMEN' DE LITTERTAERE CLLRICO-
POL1TIQVE.
Ilisum tcncalis, aniioi.
Le degré d'abaissement dans lequel les écrivassicrs du
journal jésuitique et de. son digne auxiliaire ont jette la
presse locale, inspire un profond dégoût tous ceux qui
ont le cœur honnête, peu importe quel parti ils appar
tiennent. Ces journaux ont depuis longtemps quitté le
terrain des principes et consacrent leurs colonnes des
personnalités dégoûtantes. Rivalisant de perfidie ils in
ventent hebdomadairement des calomnies diffamatoires
dans le but de démonétiser les personnes honorables qui
se trouvent la tête de l'Association libérale, espérant ainsi
M Ml IIIl iOBÊOÏiSZm
volonté qui le commandait, se contint tout craintif, les
oreilles basses.
Arrivé une portée d'arbalète des fortifications re
tranchées, l'inconnu descendit de son cheval qu'il aban
donna au hasard. Il attacha ensuite le levrier un chêne,
et après l'avoir menacé de nouveau pour se bien assurer
de son silence, il s'avança seul vers les fossés du manoir.
Là, portant ses lèvres l'orifice d'un cornet de chasse,
il y souilla avec vigueur.
Au bout d'un instant, une téle se montra par une
meurtrière, pratiquée au haut du mur crénelé qui lui
faisait face. Voyant qu'on n'avait faire qu'à une per
sonne seule, de laquelle on ne pouvait redouter aucune
surprise, la tête sortit lentement de son poste d'obser
vation.
Bientôt la herse rendit un son criard et les madriers
du pont-lcvis s'abaissèrent pesamment.
L'étranger marcha d('un pas ferme au-devant d'une ser
vante qui accourait pour le recevoir: ils se joignirent
moitié du pont-levis. Une ombre humaine se dessinait
droite et immobile peu de distance.
Cette ombre, c'était encore Guillaume Cornu, le ma
jordome. Cette duègne, qui remplissait ainsi les hautes
fonctions d'intermédiaire, c'était Martha que nous avons
déjà aperçue chez Jehanne d'Oisy.
Martha! dit voix basse l'inconnu.
Qui vous a dit mon nom?
parvenir désorganiser une société qui est le grand obsta
cle la domination du parti ultramontain dans cette ville.
Quelques personnes, confondant l'agression avec la dé
fense, souhaitent voir la suppression des trois journaux
qui sèmentdisent-ilsla zizanie entre les habitants et
jusques dans le sein des familles. Ils comprennent dans
une égale proscription Le Progrès et ses adversaires, ils
les accusent tous trois de provocation la désunion, d'ex
travagance et de mauvaise foi.
Ce sont là des allégations contre lesquelles, pour ce qui
nous regarde, nous devons protester. Que ceux que les
passions n'ont point totalement aveuglés, se souviennent,
que le parti libéral et surtout les libéraux qui ont fondé
le Progrès ont été pendant dix années hebdomadairement
insultés et calomniés parla feuille du clergé, sans qu'aucun
d'eux ait répondu ces lâches attaques qu'ils se souvien
nent que ce n'est que, poussés bout par des allégations
diffamatoires constamment renouvelées, qu'ils ont songé
créer un journal en opposition au libelle avoué, rédigé
et protégé par des hommes qui se disent les ministres
d'un Dieu de paix; qu'ils se rappellent que vingt fois
depuis la création de ce journal ceux qui le rédigent ont
été des mois, des années mêmessans répondre ces at
taques qu'ils considéraient comme parties de trop Las
pour pouvoir les atteindre et que si force de provoca
tions, ils ont, de rares intervalles, eu le tort de descendre
sur le terrain de leurs adversairesau moins ils peuvent
invoquer l'excuse de la légitime défense. A en croire les
coryphées du parti politico-catholique, l'arrivée de hauts
fonctionnaires civils et ecclésiastiques devait ouvrir une
ère de conciliation et mettre un terme toutes ces dé
goûtantes personnalités: c'était l'opinion exprimée par
les hommes éminents du clergé et le désir du parti li
béral. Eh bien! pendant qu'on se serrait la main, la
feuille catholique donnait un spécimen de sa bonne foi et
des intentions bienveillantes de ses patrons l'égard do
ceux dont il invoquait l'amitié et le concours. Cette pièce
nous la reproduisons ici en entier, non pas seulement
parce qu'elle donne la mesure du savoir-faire de nos
faux dévots, mais parce qu'elle est de nature épanouir
la rate de nos lecteurs
UN ENTRETIENT.
PERSowiGFj. En grand Pacha; un Barbu
Ribcrou; un .Mirabeau de l'I'perléc; et un
Rouie-dogue surnomme lord PouflT.
Le grand pacha. Voilà donc encore un gredin du clé
ricalisme qui vient de se faire installer dans la chambra
Je suis un ami de ton maître, fit l'homme la houp
pelande.
Puis, il ajouta
Veux-tu gagner ton pesant d'or?
Oui, s'il ne faut pas exposer le salut de mon âme
répondit la duègne.
Ni ton repos, ni ton âme reprit l'étranger.
Martha s'approcha davantage encore de lui, et leva les
yeux pour l'examiner un reflet de la lanterne qui pen
dait aux créneaux.
C'est étonnantfit-elle avec stupeur en éloignant
ses deux mains la hauteur des épaules; c'est étonnant
votre voix me rappelle celle de mon pauvre jeune maître,
monseigneur Hugues de Clisson.
Hugues de Clisson répéta l'inconnu comme pour
rappeler ses souvenirs; mais il est mort, Hugues de
Clisson
La duègne, comprenant que jamais de mémoire hu
maine, on n'avait assisté au miracle d'une résurrection
oublia son impression première.
Il est vrai d'ajouter qu elle n'avait pu voir la figure de
l'étranger entièrement cachée sous son capuchon. Elle
n'entrevoyait qu'une moustache noire, longue et épaisse.
Celui-ci, qui n'avait sans doute pas de temps perdre,
lui demanda
Où est ton maître?
Martha, de plus en plus indécise,hésitait le satisfaire.