JOÏRML DTPRES ET DE L'ARROVDISSEMEXT.
i\° 0e Année
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Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
LATÉIUEIR.
ÏPIIES, le 1" Septembre.
Le Moniteur publie les premiers résultats de la réforme
postale mise en pratique depuis le 1' Juillet dernier. Ces
résultats sont relatifs au mois de Juillet. Le gouverne
ment a pris pour point de comparaison le mois de Mai
précédent, pareeque chacun de ces mois comprend 31
jours. Pendant le mois de Mai, sous l'empire des anciens
tarifs, il avait été expédié 300,899 lettres, dont 237,014
dans un rayon de 30 kilomètres, et 323,883 au-delà de
30 kilomètres; au mois de Juillet, sous l'empire des nou
veaux tarifs, le nombre des lettres expédiées a été de
631,003 dont 203,168 dans un rayon de 50 kilomètres et
383,093 au-delà de 50 kilomètres, soit une différence eu
plus de 90,104 lettres.
Les recettes générales du mois de juillet 1848 s'étaient
élevées fr. 273,075-29; celles du mois correspondant
en 1849, fr. 353,144-94, soit une différence en plus de
fr. 82,071-65. De ces receltes, il faut déduire la valeur
des timbres vendus et non employés qui peut être éva
luée fr. 93,014-30, de sorte que, malgré l'abaissement
du tarif, le déficit ne serait que de fr. 15,542-85. Il est
espérer que ce déficit sera bientôt comblé.
Voici quelques renseignements sur le mouvement des
lettres au bureau d'Ypres. Au mois de mai d', il avait été
expédié de notre ville, dans le rayon de 30 kilomètres,
2,701 lettres; au-delà de 30 kilomètres, 3,588 lettres;
total 6,259.
Durant le mois de Juillet, le nombre des lettres de la
première catégorie a été de 2,799, de la seconde 4,252,
en tout 7,031soit uuc différence en plus de 772 pour un
mois. 4,320 lettres ont été affranchies au moyen de tim
bres-postes et 2,711 ont payé la surtaxe de 10 centimes,
c'est-à-dire fr. 271-10. Si le nombre des lettres expédiées
d'Ypres reste le même durant les autres mois de l'année,
et il est probable qu'il augmentera, si d'un autre côté on
ne fait pas un usage général des timbres, il en résultera
pour le commerce et les particuliers de notre ville une
perte de fr. 3,253-20 par an et que l'on peut très-facile
ment éviter en affranchissant. Nous dirons que cette
perte volontaire serait charge des personnes d'Ypres,
car on reçoit d'ordinaire une lettre en échange de celle
qu'on écrit et, si on affranchit, on peut exiger l'affranchis
sement réciproque.
Il est vrai qu'un assez grand nombre de lettres d'Ypres,
sont expédiées vers l'étranger, vers la France surtout, et
Yauibo.
i.
Les Anglais avaient conquis depuis plus de quatre-
vingts ans la Jamaïque sur les Espagnols; mais si leur
domination était désormais assurée contre les entreprises
des anciens possesseurs, elle avait, dans l'intérieur même
de lïle, de redoutables ennemis dont les attaques met
taient souvent en péril la fortune et l'existence de la
colonie. Profitant d'une lutte qui ne devait avoir pour eux
d'autre résultat que de les faire changer de maître, un
certain nombre de nègres esclaves s'étaient réfugiés sur
les montagnes bleues. Retranchés dans ces cantons in
connus aux Européens et que la nature semblait avoir
pris soin d'entourer de fortifications inexpugnables, ils
y vivaient des produits de leur culture et de leur chasse,
plus souvent encore du butin qu'ils allaient faire, la nuit,
sur les plantations des Anglais. Ceux-ci avaient essayé
plusieurs fois de les soumettre; mais leurs tentatives
avaient constamment échoué; comment atteindre un en
nemi qui ne marchait que par petites bandes, au milieu
de forêts et de ravins inexplorés, avec le risque de tomber
chaque instant dans une embuscade. Cependant le dan
ger devenait de jour en jour plus inquiétant pour les
colons ce noyau de rebelles ou plutôt d'indépendants
s'était accru de tous les esclaves maltraités qui allaient
ne peuvent être affranchies, et cette circonstance doit
diminuer la consommation des timbres-postes. Du reste,
la Belgique vient de conclure avec la France un traité
en vertu duquel le port d'une lettre simple, transportée
aux distances les plus éloignées entre ce pays et le notre,
est réduit au taux uniforme de 40 centimes. Ce sera là,
pensons-nous, un avantage réel pour nos industriels
Yprois et surtout pour ceux qui ont avec le midi des
relations suivies.
Afin d'activer autant que possible le mouvement postal,
le ministre des travaux publics a adressé aux chambres
de commerce, une circulaire qui renferme des considéra
tions très-sages et qui, nous en sommes convaincus, sera
communiquée aux commcrçans et industriels de tout le
pays.
La réforme postale est peut-être la plus belle réforme
que le pays ait réalisée; pour qu'elle soit complète il faut
que le port d'une lettre soit uniformément réduite 10
centimes. Or, la loi porte expressément que ce taux sera
adopté, dès que les produits nouveaux auront Rtteint le
chiffre de l'ancien produit. Encore un effort, et ce résultat
sera obtenu comme le prouvent les chiffres cités ci-dessus.
Le Journal des Daziles contient un article qui est un
chef-d'œuvre de fourberie. Une lettre a été insérée dans
ce carré de papier par laquelle un homme honorable de
cette ville était vilipendé sur le simple soupçon qu'il
pouvait être l'auteur d'un articulct du Progris. Il a été
prouvé l'éditeur du Journal des Cafards que la per
sonne maltraitée n'était pour rien dans cet article. Au
lieu de convenir qu'on avait frappé côté et qu'on avait
eu tort d'insulter quelqu'un gratuitement, le soi-disant
auteur de la lettre, après avoir outragé et injurié bénévo
lement quelqu'un d'étranger l'article qui a piqué l'édi
teur du journal, fait dire placidement, qu'il n'a eul'inten-
lionni d'injurier ni de calomnier personne. Cette lettre dé
goûtante de personnalités aussi plates que méprisables
est qualifiée d'agréable plaisanterie. C'est ainsi que se
conduisent ceux qui font de la calomnie et de la diffama
tion, métier et marchandise. Ces pieux croquants conser
vent un anonyme discretcar ils seraient tellement
méprisés, s'ils étaient connus, qu'ils n'oseraient plus se
trouver dans un lieu public bien famé.
Avant hier jeudi, est arrivé en notre ville le bataillon du
KPquiaété tenir garnisonàNieuport et Ostende. Le même
jour trois cent cinquante hommes du même régiment
sont partis pour Nicuport pour y rester en garnison.
chercher sur les montagnes un asile contre la fureur de
leurs tyrans, et la cruauté des Anglais en rendait chaque
année le nombre plus considérable.
Celte émigration incessante causait un double préju
dice la colonie: d'un côté, elle augmentait la force de
ses ennemis; de l'autre, elle occasionnait une pénurie de
travailleurs laquelle on ne remédiait qu'imparfaitement
et avec de grandes difficultés. Les navires expédiés aux
côtes de Guinée ne ramenaient plus un nombre suffisant
d'esclaves; il fallait la traite des noirs joindre la traite
des blancs. Des bâtiments amenaient d'Angleterre une
foule d'hommes aveuglés par l'espoir d'une fortune rapide
ou raccolés l'aide de porter et de rhum, que le lendemain
de leur arrivée on exposait en vente sur la place du mar
ché. Le seul avantage qu'on accordât ces esclaves blancs
sur les noirs, c'était qu'on les nommait des engagés et
qu'ils n'étaient privés de leur liberté que pour sept ans.
Du reste, on ne les traitait ni avec plus d'égards ni avec
plus de douceur que ceux que l'on avait fait veuir des
côtes de Guinée. Crorawell employa ce moyen pour se
débarrasser de dix mille Irlandais et Ecossais.
Il arrivait encore quelquefois que les engagés et les
nègres étaient insuffisants; c'était alors une occasion de
fortune que les pirates s'empressaient de mettre profit.
Deux ou trois navires équipés la hâte faisaient voile pour
l'île de Cuba on descendait 1 improviste sur un des
points de la cote; deux ou trois cents Espagnols étaient
Yprès, le 1er Septembre 1849.
Monsieur le rédacteur du Progrès,
Je ne vois plus reparaître dans la lice le satyrique
Mr R. Dédaigne-t-il poursuivre un ennemi qui fuit pour
échapper ses coups? Il faut convenir qu'il est d'assez
bonne composition avec ses adversaires. S'il les a un peu
rudoyés comme des enfants indociles, c'est bien eux-
mêmes qu'ils doivent s'en prendre. Peut-on être aussi
maladroit que de venir dire en toute humilité de grâce,
dites-nous qui nous sommesfaites notre portrait
qu'est-ce qu'un tartufe d'ambition et tomber ensuite
dans des convulsions de colère et de rage, parce que cette
prière n'a pas rencontré un cœur désobligeant? Pour tout
dire, et pour observer les lois d'une stricte impartialité,
je dois ajouter qu'une violente attaque de nerfs, succé
dant aux convulsions qui ont fait craindre pour les jours
précieux du malin journaliste, a éveillé soudain en lui
des lueurs d'intelligence, au point qu'il a très-bien com
pris dans un numéro subséquent de votre journal, cet
autre terme nouveau l'aristocratie du crétinisme et
qu'il s'est bien gardé d'en demander cette fois-là la défi
nition. Tout en rendant hommage la sage modération
de Mr R., qui n'accorde ses adversaires que juste ce
qu'ils réclament de son obligeance, j'essaierai, si vous le
permettez, Monsieur le rédacteur, cette définition, au
risque de réveiller de nouvelles colères, dont je me soucie
peu, vu que j'ai pris la résolution de me faire accompa
gner quand je sortirai le soir et que je fuirai aussi cer
tains lieux publics devenus suspects aux bourgeois paisi
bles, qui trouveraient là un faible délassement leurs
travaux, exposés qu'ils y seraient au bruit des déclama
tions furibondes et des vociférations toujours prêtes
dégénérer en voies de fait.
Crétinisme est synonime de petitesse et de faiblesse.
Les crétins de la nature sont des êtres disgraciés, petits,
laids et difformes et dont l'intelligence répond parfaite
ment l'exiguité de leur conformation physique. De
droit, ils tiennent évidemment la première place parmi
ceux du monde politique, qui, il s'en faut de beaucoup,
ne portent pas tous sur leurs traits et sur leurs personnes
des marques de décrépitude et de caducité. Ce qui diffé
rencie ceux-ci des premiers, c'est qu'ils ont imputer
eux-mêmes leurs infirmités, tandis que ceux-là sont les
tristes victimes d'un fléau, que la science, malgré ses im
menses progrès, n'est pas encore parvenue dompter.
Le crétinisme politique est un phénomène nouveau et
curieux étudier dans les temps modernes. Tandis que
les liens, qui depuis des siècles tenaient (pour le malheur
de l'humanité) les individus fatalement cloués sur le mé
tier qui les avait vus naître, se brisaient coup sur coup
sous le souffle des révolutions, on a pu voir dans les
masses comme une ébullition produite par ces mouve
ments divers d'hommes courant au plus vile pour parve
nir, pour se caser là où le mérite les appelle, mais dont
malheureusement le plus grand nombre (ce qui cause et
causera encore des bouleversements) sont des personnages
enlevés, sans distinction de qualité ni d'âge, et, le lende
main, les marchés de la Jamaïque recevaient leur contin
gent d'esclaves.
C'était la suite d'une de ces expéditions que Don
Gaspar de Ilcrrera se trouvait, en 1730, soumis, comme
engagé, aux plus rudes travaux, sur la plantation du
colon Stevcns, dans la paroisse de Kingston.
D. Gaspar était un grand et beau jeune homme de
vingt cinq ans dont le front large et découvert annonçait
une intelligence peu commune. De ses yeux noirs jaillis
saient des étincelles et parfois aussi un regard d'une dou
ceur et d'une tendresse inexprimables. La distinction de
son origine se révélait dans la noblesse et la pureté de
ses traits. II avait la taille bien prise, la démarche fière
sans raideur, le geste gracieux, quoique pourtant un ob
servateur eut pu facilement y reconnaître l'indice d'un
caractère énergique et résolu. Vêtu d'un simple caleçon
de toile et d'une chemise grossière, coiffé d'un large cha
peau, avant les pieds nus dans ses souliers, il était plus
remarquable peut-être sous cette livrée de la misère qu'il
ne l'avait jamais été sous le brillant uniforme d'officier
espagnol. Si l'esclavage imprime le sceau de l'abrutisse
ment sur le visage d'un homme dépourvu de courage et
d'intelligence, il donne au contraire la physionomie
d'un homme fortement trempé un nouvel éclat puisé dans
l'indignation et dans la méditation de la vengeance.
Le colon Stevens pouvait avoir une cinquantaine d'aa-