en révolte contre la conscience de leur profonde incapa
cité ou méconnaissant le repos dont ils ont besoin, et
l'obscurité laquelle la nature les a destinés. 11 n'y a
pour ces derniers que l'alternative des émeutes, et, s'ils
sont de mœurs paciGques, des moyens légaux. Mais quels
moyens légaux, bon Dieu, au service de pareils mobiles!
Tel arbre, tel fruit; par conséquent tel général, telles
manœuvres; telles troupes, tels exploits! qu'on ne
s'étonne pas si, pour écrire l'histoire contemporaine, de
nouveaux mots soient créer.
Le scalpel de l'analyse en main, distinguons les nom
breux travers qui constituent le crétinisme de l'espèce
qui nous occupe. Sans de trop longues recherches et a
l'aide de l'esprit d'observation, je vois ou réunis chez de
mêmes individus ou personnifiés isolément, chacun des
vices que voici l'impatienceF ambition proprement dite,
la manie de brouiller hommes et chosesla, jalousie
Carroyance des parvenus, la vanité et l'orgueil, enfin la
badauderie.
Je ne dirai rien du crétin par excellence, la définition
en ayant déjà été donnée par te Progrès, il n'y a pas très-
longtemps (voyez n° 852, 5 juillet). Constatons seulement
qu'au personnage le mieux doué physiquement et mora
lement revient naturellement le commandement en chef
de l'auguste bande.
Les impatients. Il arrive parfois que des hommes de
savoir et de capacité, (voir même des avocats et des ju
risconsultes distingués), ne sachant modérer l'ardeur qui
les porte vers les emplois, usent de peu de scrupule dans
l'emploi des moyens qui y conduisent. C'est ainsi que
voyageant sans cesse d'un parti un autre selon l'état de
l'atmosphère politique, ils font continuellement fausse
route, répudiant leurs vieilles amitiés momentanément
vaincues pour s'enrôler sous des bannières décriées; sus
pects leurs nouveaux amis odieux ceux qu'ils ont
trahis; tolérés par les uns, reniés par les autres, mépri
sés par tous. A juger les choses par leurs résultats, on est
autorisé dire que l'impatience et la promptitude ne sont
pas de moindres défauts en politique que la nonchalance
et l'incurie.
Les ambitieux proprement dits. L'ambition bien enten
due est loin d'être un défaut; sans ce mobile que le créa
teur a mis en nous et qui commande au talent d'étudier,
au génie de produireque deviendraient le dévelop
pement et le progrès de l'humanité? Mais s'il est une
ambition propre faire retourner toutes les choses au
chaos primitif, c'est bien cette ambition qui résulte de la
méconnaissance de soi-même, de ce besoin illimité de se
produire, sans tenir compte du genre d'instruction qu'on
a reçu, de son éducation, de ses habitudes, en un mot de
6a propre médiocrité. Boileau a dit quelque part n'allez
pas vous croire poète, si vous sentez en vous de l'ardeur
et de la facilité pour la rime. On pourrait dire aussi: ne
vous croyez pas appelés au rôle de législateurs et d'écri
vains politiques, parce que vous avez réussi exprimer
en français plus ou moins irréprochable des idées creuses
et sans portée.
Les brouillons. S'il est une catégorie d'individus dont
l'accointance aux crétins politiques ne doive guère nous
étonner, ce sont les brouillons, race part, élevée ot
nourrie dans l'antre de la chicane, êtres incommodes et
insupportables s'il en fut jamais et dont la présence n'im
porte où, suffit pour semer le trouble et la désunion. Nous
nous garderons bien d'envier nos adversaires de pariels
adhérents. Puissent-ils les conserver!
Les jaloux. De tous les vices qui rongent le cœur hu
main et minent l'existence, il n'y en a pas de plus grand
que la jalousie. Il n'y a pas d'être plus malheureux sur la
terre, plus charge lui-même et aux autres qu'un ja
loux. Il y a plusieurs catégories de jaloux. Ceux qui se
dessinent le mieux sur la scène politique sont représen
tés par des personnages, jouissant de fortunes honnête
ment et laborieusement acquises et dont la basse envie et
la haine aveugle ont surtout pour objet ce qu'ils appel
lent les riches de naissance. Pour assouvir leurs inqua
nées. Après s'être fait chasser d'une riche maison de
Londres, au service de laquelle il avait commencé sa for
tune en qualité d'intendant, il était venu s'établir planteur
la Jamaïque. C'était un petit homme d'une vaste cor
pulence, dont la face courte, large et aplatie accusait une
foule de mauvais instincts et de penchants vicieux. Ses
sourcils gris formaient deux touffes saillantes au-dessus
de ses petits yeux verts d'où s'élançait un regard cupide
et cruel. Ses grosses lèvres sanguinolentes attestaient les
habitudes de gourmandise et de lubricité. Il mangeait
buvait, dormait plus qu'un autre planteur, et il savait
encore trouver le temps de se faire exécrer de ses esclaves
et de ses domestiques. Il ne marchait jamais sans être
arméd'un fouet dont il se servait également pour exprimer
sa colère et sa satisfaction malheur aux épaules nues de
l'esclave dont les bras tombaient un moment alourdis par
la fatigue Mais en revanche le zèle d'un travailleur plus
ardent que les autres venait-il éveiller sa bonne humeur,
il s'empressait d'en témoigner son approbation par un
sourire accompagné d'une demi douzaine de petits coups
de fouet en guise d'encouragement. Il n'était pas jusqu'à
sa nièce Maryblanche et frêle créature, peine âgée de
seize ans, belle comme une ange résignée comme une
sainte, qui ne fût en butte aux bizarreries de son carac
tère exigeant et brutal.
Cependant de tous les êtres qui l'entouraient, Mary
était la seule qui eût le pouvoir d'adoucir par moment l'a
physionomie terrible, le geste violent, la parole emportée
de Stevens; semblable au luth de David dont les sons
harmonieux calmaient comme par enchantement leg fu-
lifiablcs passions, ils se font hommes de partis, se feraient
démagogues s'il le fallait, et montrent parmi leurs co-as-
sociés un zèle qui va jusqu'au sacrifice. N'exigez pas en
eux la délicatesse de l'éducation, le calme et la dignité.
Venus la plupart du village et arrivés où, vous le voyez,
par la caserne et le cabaret, n'attendez d'eux pour des
raisons que des transports de colère, pour arguments des
coups de poings sur les tables.
Les parvenus. J'admire le fils deses œuvres qui force
de travail et de labeur arrive, au bout d'une carrière lon
gue et honorable se créer une position indépendante
mais je haïs comme le plus odieux des |p"ans, comme le
plus méprisable des hommes celui qui, oublieux de son
passé, veut abuser des bienfaits de la fortune, en cher
chant non-seulement primer orgueilleusement sur ses
égaux d'autrefois, mais supplanter ceux dont naguère
il recherchait les saluts avec tant d'humilité et de bas
sesse. Le plus détestable des parvenus c'est celui qui a
recours l'astuce et l'hypocrisie pour faire aboutir sa
cupidité. J'en connais pour ma part qui en public s'affi
chent comme les plus chauds partisans des intérêts de la
bourgeoisie, qui poussent quelquefois la générosité jus
qu'à nous entretenir de la petite bourgeoisie, mais qui
une foisau pinacledu pouvoir "éprendraient leur naturel,
c'est-à-dire, seraient les plus odieux des despotes; j'en
connais qui ont constamment le mot modération la
bouche et dont le cœur n'est que fiel et venin, l'âme,
qu'irascibilité et rancune.
Les vaniteux. Tel en se choisissant une carrière, a dû
un concours de circonstances heureuses des succès
inespérés et inattendus. Il se croit un aigle et n'est qu'un
sot. Qui n'a vu des individus de cette espèce le point de
mire des plaisanteries et des quolibets? Ils ne voient pas
le sourire qui suit leur démarche affectée, le haussement
d'épaules qui accueille leurs vanteries. Sans s'en douter,
ils se trouvent sur la pente, qui conduit Bicètre. Que de
pareilles gens soient mal venues chez ceux capables d'ap
précier le vrai talent, le vrai mérite, ne nous étonne
guère; qu'ils soient reçus bras ouvert dans l'autre
camp, nous étonne encore moins. Il y a des airs de fa
mille, auxquels on se reconnaît; une mère reconnaît
instinctivement ses petits: c'est la loi de la nature.
Monsieur le rédacteur, si je ne croyais abuser de votre
patience et des colonnes de votre journal, je voudrais
encore vous représenter les efforts surhumains tentés par
la jeune ef belle intelligence pour amalgamer et coordon
ner hebdomadairement les riches matériaux dont je viens
de vous donner une esquisse dans les détails qui précè-
deut; et puis les transports d'admiration, les applaudis
sements, les trépignements des badauds, meute qu'il est
facile de faire aboyer derrière soi, quand il s'agit de
battre en brèche un pouvoir quelconque l'aide de ca
lomnies, d'insinuations et de réticences perfidement cal
culées. Quel pouvoir, en effet, a été jamais et sera jamais
populaire?
Enfin, pour terminer, Monsieur, quand avec cette em
phase, cette forfanterie, cette insolence dignes des gens
que je viens de dépeindre, je vois une fois par semaine la
doublure cléricale, prier, intimer, commander avec me
naces et colère aux dépositaires du pouvoir de déguerpir
dans le plus bref délai, afin de faire place la généreuse
et radieuse intelligence et ses dignes acolytes, je me le
figure prenant l'attitude de ce capitan du théâtre espagnol
qui s'écrie en enllant la voix, comme pour se donner du
cœur
Est-il quelqu'ennemi qu'à présent je ne dompte!
Paraissez Navarrois, Maures et Castillans,
Et tout ce que l'Espagne a produit de raillant.
J'ai l'honneur, Monsieur le rédacteur, d'être en toute
sincérité,
on bourgeois qui reconnait l'aristocratie d'intelligence.
Par arrêté royal, le sieur Grandjean (Désiré), substitut
du procureur du roi près le tribunal de première instance
reurs de Saûl. Bonne et complaisante, elle était la di
vinité tutélaire des esclaves de la plantation et l'amour
qu'elle leur inspirait ne pouvait être comparé qu'à la
haine qu'ils ressentaient pour son oncle.
Le matin du jour d'où nous faisons dater le commen
cement de cette histoire, Stevens était allé visiter sa su
crerie. Mary l'accompagnait. L'aspect du maître occasionna
soudain un redoublement d'ardeur chez les travailleurs
placés le plus près de l'entrée et ce mouvement se com
muniqua bientôt de procite en proche jusqu'aux esclaves
les plus éloignés. Stevens faisait remarquer avec orgueil
sa nièce le bon effet produit par sa présence lorsque,
en passant près d'une chaudière confiée la surveillance
de D. Gaspar, il aperçut un nègre qui se blotissait dans
un coin, afin de se dérober ses regards.
Que fait là ce fainéant? demanda-l-il en fronçant le
sourcil et en brandissant son redoutable fouet.
Puis se tournant vers le nègre, sans attendre la réponse
de D. Gaspar:
Approche, misérable
L'esclave tremblant vint se mettre genoux devant
Stevens
Maître, depuis huit jours j'ai la fièvre, mes forces
sont épuisées il m'est impossible de travailler.
Ta maladie, chien c'est la paresse, tiens voilà un
spécifique pour te guérir.
Et d'un coup de pied dans la poitrine, il l'étendit
terre sans connaissance.
Mon oncle, qu'avez-vous fait, s'écria Mary effrayée.
Grimace! fit Stevens, tu vas le voir revenir tout
d'Audenarde, est nommé en la même qualité près le tri
bunal de première instance de Gand, en remplacement
du sieur De Wylge, appelé d'autres fonctions.
VILLE D'YPRES.Conseil connuax.
Séance publique fixée au Lundi, 5 Septembre 1849,
neuf heures du matin.
ordre du jour
1" Procéder au règlement de compte de la ville pour
l'exercice 1848.
2" Approuver les actes de bail de quelques parcelles
extra-muros, affectées au dépôt de fumiers.
5° Émettre un avis:
a. Sur les locations de quelques biens ruraux apparte
nant au Bureau de bienfaisance, lesquelles ont eu lieu le
26 Février et 26 Juin dernier.
b. Sur la location publique d'une ferme et d'une partie
de terre appartenant aux Hospices.
c. Sur l'échange projeté entre cette administration et
M. Henri Carton.
d. Sur une radiation d'inscription hypothécaire prise
pour sûreté de capitaux prêtés par les Hospices.
4° Délibérer sur le règlement organique du Mont-de-
piété de cette ville lequel, aux termes de la loi du 30
Avril 1848, doit être soumis l'approbation royale.
5" Fixer le nombre des enfants indigents qui doivent
recevoir l'instruction gratuite pendant l'année scolaire
1849-1850.
6° Délibérer sur une observation de M. le ministre de
la justice, tendante ajouter un article additionnel au
règlement de police sur les femmes publiques.
7° Revoir la délibération du 29 Mai dernier, concer
nant la construction d'une voûte sur l'Yperlée et la de
mande d'un subside.
8° Émettre un avis sur le projet d'établir en la ville de
Roulers un marché au bétail, le mardi de chaque semaine.
9° Arrêter les comptes de la caisse d'amortissement
pour 1847 et 1848.
10° Autoriser, s'il y a lieu, l'admission d'un vieillard
ayant son domicile de secours en ville, sans être son lieu
de naissance, l'hospice du Nazareth.
11° Arrêter le budget de l'instruction primaire pour
1850.
Par arrêté royal, le sieur Dauwe (Charles-Hyacinthe),
substitut du procureur du roi près le tribunal de Ter-
monde, est nommé procureur du roi près le tribunal de
première instance de Furnes, en remplacement du sieur
VandeVelde, appelé d'autres fonctions.
On nous écrit de Roulers
Les prévisions sur la transformation du personnel du
petit séminaire se développent de jour en jour. Outre le
principal, revêtu maintenant du vicariat-général de votre
ville, et l'économe, d'autres professeurs ont reçu l'ordre
de quitter. Monseigneur veut réveiller sa pépinière de
son assoupissement, car la fin des vacances on y ensei
gnera la philosophie.
L'examen des élèves propres l'état ecclésiastique qui
se faisait ordinairement Brugesa lieu Roulers.
L'évèque s'y trouve.
On a annoncé, d'après un journal de Courtraique
M. Jules Coucke de Courtrai, avait remporté le premier
prix, accordé par le gouvernement, dans le concours
ouvert dernièrement Bruges entre les élèves les plus
distingués des écoles primaires supérieures de la province.
Nous apprenons aujourd'hui que le premier prix est par
tagé entre M. Coucke de Courtrai et Joseph de Tilly,
élève de l'école primaire supérieure de Bruges, et que ce
dernier l'a même emporté d'un quart de point sur son
concurrent bien qu'ils eussent été placés sur la même
ligne. Nous rectifions ce fait avec d'autant plus de plaisir
l'heure. Le nègre poussa un cri déchirant, le sang avait
jailli de sa figure sous le fouet du planteur.
Mary essaya de retirer le bras de son oncle, qui la re
poussa avec rudesse et l'envoya tomber sur un banc.
Alors D. Gaspar ne put réprimer un premier mouve
ment d'indignation, il avança vivement sur Stevens, mais
songeant aussitôt que son imprudence ne ferait qu'ag
graver le mal, il se contenta de lui dire:
Monsieur, ce n'est pas en tuant vos esclaves ma
lades que vous exciterez le zèle de ceux qui sont bien
portants.
Que veut ce raisonneur? s'écria Stevens dont les
joues s'empourprèrent de colère; tu ferais beaucoup
mieux de garder ta langue pour te justifier toi-même.
Allons, donneur de conseils, au large, et laisse-moi
passer.
En parlant ainsi, il lui cingla le visage d'un coup de
fouet; puis saisissant Mary par le bras, il la fit marcher
en avant et continua sa visite comme s'il ne s'était rien
passé d'extraordinaire.
L'heure du repas était arrivée, les engagés et les nègres
quittèrent leurs travaux pour se retirer dans leurs cases.
D. Gaspar resta dans la sucrerie. La tète appuyée sur
ses deux mains, le regard fixe, il songeait l'affront qu'il
venait de recevoirl'impuissance où il était de se
venger.
Le cœur lui bondissait dans la poitrine, et par mo
ments, sa fureur s'exhalait en cri de rage et de désespoir,
Tout-à-coup il s'aperçut qu'il n'était pas seul.
(Lu suit* au prochain n°.)