JOURNAL D'ÏPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
lf# 900. Année.
•Vcndl. 20 Décembre 1840.
Vires acquint eundo.
INTÉRIEUR.
Ferdoussl, poète persan.
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs. I Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS; Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 30 centimes. être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
¥PRE§, le 19 Décembre.
»9* ANNIVERSAIRE DE LANAISSANCE DES.M.
fête de l'iadestuie ypboise.
Rarement fête nationale a été célébrée plus
brillamment que cette année. Aussi on avait
choisi ce jour pour récompenser les industriels
et fabricants, ouvrier et ouvrières qui avaient
obtenu des.distinctions l'exposition de Gand.
Après le Te Deumauquel toutes les autorités
civiles et militaires s'étaient fait un devoir d'as
sister, une grande parade a eu lieu sur la
Graud'Place. Outre les troupes de la garnison,
le bataillon des gardes civiques actifs et la
demi-batterie d'artillerie citoyenne assistaient
cette revue.
Vers midi, cette solennité militaire était termi
née et une autre cérémonie allait a voir lieu. Nous
voulons parler de la remise solennelle des mé
dailles aux industriels, ouvrier et ouvrières,
qui ont été récompensés l'exposition des deux
Flandres. Une foule nombreuse s'était donné
rendez-vous aux Halles, bien que l'heure fut
peu propice. Outre la médaille décernéeà Gand,
l'autorité communale se proposait d'y joindre
une seconde, en témoignage de souvenir et de
gratitude aux exposants qui ont fait rejaillir de
la célébrité sur la villed'Ypres, par leurs succès
remportés dans cette lutte industrielle.
La cérémonie a commencée par un discours
prononcé par M. l'échevin Ivveins-Fonteyne,
qui a fait sensation. Les fabricants primés
ouvrier et ouvrières décorés ont été appelés et
remise leur a été faite de leur récompense, par
les mains des principales autorités civiles et
militaires. Les fabricants MM. Duhayon-Brun-
faut, Brunfaut-BourgoisDenys-De Bisschop
et Baele-Lonckesont montés sur l'estrade,
chacun son tour, et ont remercié l'autorité
communale, en recevant la récompense de leur
tra vail.
C'était le tour des ouvrier et ouvrières au
nombre de dix, recevoir la médaille. En pre
mier lieu a été appelé De Broycker Charles-
Suite et fin.
Le ministre offrit Ferdoussi de lui payer ses vers
mesure. Le poète préférait recevoir le prix de son travail
quand il 1 aurait entièrement terminé: il voulait avoir
sa disposition une somme assez forte pour faire tout d'un
coup un grand bien sa ville natale, et puis, sans doute,
il lui répugnait d être comme l'ouvrier qui vient un
terme donné toucher son salaire le poète avait de plus
nobles soins que ceux de l'argent de ses distiques: il ne
voulait pas savoir que chacun lui valait un denier; ses
vers lui valaient mieux, la gloire. Celte, proposition du
ministre l'offensa peut-être, parce qu'elle lui fit sentir
qu'il n'était pas compris de lui; le poète sensible, irrita
ble, le montra trop clairement au ministre, et 1 homme
puissant par la force matérielle devint l'ennemi de l'hom
me puissant par la parole: il chercha tous les moyens de
lui nuire auprèsduroi, l'accusant d'être, dans ses poèmes,
contraire aux principes de la vraie foi. Il y avait sans
doute de la jalousie dans le fait du ministre; car le pou
voir est toujours jaloux de l'intelligence qui peut plus
sûrement que lui mais qu'importe, le ministre ne réus
sit pas alors, et la gloire du poète allait toujours croissant
dans les masses. On suivait avec admiration les progrès
de ses œuvres, et les présents lui abondaient de toutes
parts. Il était lout-à-fait dans l'intimité du roi, qui cha
que soir voulait recevoir de sa bouche les poétiques effu-
Louis, tisserand, chez M. Denys-De Bisschop,
né Ypres; puis sont venues les dentellières,
Griffon Justine Calbeyn Rosalie: Willems,
Catherine; Nevelstyn, Annelte; Leurioan, Adé
laïde; Legon Lucie; Van Damme, Nathalie;
Doperé, Régine, et Braem, Virginie,auxquelles il a
été fait remise des signes honorifiques, non sans
que le fonctionnaire chargé de cette agréable
mission, n'ait en récompense et aux applaudisse
ments du public, demandé embrasser celle qui
avait mérité une pareille distinction.
La cérémonie a été terminée par une allocu
tion de M. le président du conseil des prud'
hommes Van Alleynes, qui a remercié l'autorité
communale d'avoir mis tant de bienveillance et
d'apparat une fête qui sera chère au com
merce et l'industrie.
Un dîner a suivi la remise des médailles et
récompenses; le conseil communal avait offert
un banquet MM. les fabricants primés, ou
vrier et ouvrières décoiés, et les envieux et
les bilieux sont priés de croire que la caisse
communale ne sera en aucune façon grévée
des dépenses faites cette occasion. Une table
de 55 couverts était dressée dans une salle de
l'Hôtel-de-ville, et 3 heures, les convives ont
pris place au banquet. Le dîner était excellent,
bien préparé et les vins étaient de qualité su
périeure; somme toute, il y avait beaucoup
d'animation et d'entrain. Divers toasts ont été
proposés et celui qui a fait le plus de plaisir a
été porté par M. Alphonse Vanden Peereboom,
échevin et représentant. Il a fait comprendre
que le commerce et l'industrie ont toujours
trouvé aide et protection près de l'autorité
communale et que ce n'est que par une fédé
ration entre tous les éléments vitaux de la so
ciété Yproise qu'on parviendra faire refleurir
ce qui a fait anciennement la richesse des com
munes flamandes.
Vers sept heures, le banquet était terminé et
les invités ont pris congé, en remerciant l'auto
rité communale, en la personne du bourgmestre,
de l'honneur qu'on avait bien voulu leur faire,
en promettant, que cela les engagera redou
bler d'efforts pour étendre la renommée d'une
sions de la journée. Mahmoud, prince distingué, disait
communément que dès q'uil se sentait souffrant ou cha
grin, les vers de Ferdoussi pouvaient seuls le soulager et
le guérir: noble et puissant remède que la poésie
Enfin, les poèmes arrivèrent leur terme. La compo
sition de soixante mille dystique. parait avoir coûté
Ferdoussi un travail de trente ans. Le roi, pénétré de
l'excellence de ce splendide monument de génie qui devait
perpétuer son nom, voulut que l'illustre poète fut magni
fiquement récompensé. 11 ordonna, non point qu'on lui
remplît la bouche de perles et d« pierres précieuses, mais
qu'on lui donnât de l'or le poids d'un éléphant. I^e scra-
ble-t-il pas lire les Mille et une Nuits? La haine du
ministre n'était point apaisée, et il résolut de perdre le
poète en le rabaissant: il savait que toute humiliation
l'indignerait, et il comptait sur sa colère. Au lieu du mer
veilleux présent que le roi avait destiné au poète, le mi
nistre lui envoya soixante mille pièces d'argent. Fer
doussi était alors dans un bain publie. De l'argent
s'écria-l-il. Qui ose payer mes vers avec de l'argent?
Us ne pouvaient être payés qu'avec de l'or, la couleur
du soleil. Irrité de cette insulte, il donna vingt mille
dirhems au gardien du bain, vingt mille au vendeur des
rafraichissemenset vingt mille l'esclave qui avait ap
porté l'indigne salaire. Le roi apprendra, lui dit-il,
que je n'ai pas travaillé trente ans pour être récompensé
par de l'argent. Il s'emporta contre le souverain: le
ministre avait bien calculé cette fois: l'homme froid est
ville qui sait reconnaître et honorer les succès
de ses enfants.
Dimanche dernier a eu lieu au Salon
d'Apollon, le bal des sous-officiers de la garde
civique. On s'y est amusé avec beaucoup d'en
train et la fêle n'a fini que très-tard dans la nuit.
Un arrêté royal du 11 Décembre, contresigné
par les ministres de la justice et de l'intérieur,
autorise
a. La commission administrative des Hospices civils
de Neuve-Eglise, accepter
I* Le legs universel fait par testament du sieur Spyns,
Valentin-Dominique-Josephdesservant, Wulver-
ghem, la charge, entre autres, de remettre aux admi
nistrations communales de Keinmel et de Wytsebacte,
les sommes indiquées ci-après, qui leur sont léguées par
le testateur;
2° Le legs universel fait par testament du sieur
Spyns, Philippe-Corneille-Cyprien, curé, àNeuve-Église,
la charge de remettre au conseil de fabrique de l'église
de cette localité, la somme nécessaire pour exonérer le
service annuel fondé par le testateur.
La commission administrative des dits Hospices rem
plira d'ailleurs toutes les autres charges légales indiquées
dans les testaments des frères Spyns.
b. Le conseil communal de Keinmel accepter la
somme de 1,000 francs laissée parle testament du-sieur
Spyns, Valentin-Dominique-Joseph, au profit de l'école
des pauvres de la localité, la charge d'employer cette
somme exclusivement en faveur de l'instruction des
pauvres et d'imputer les revenus des dits 1,000 francs,
sur la rétribution proportionnels du Bureau de bienfai
sance fixer par la députation permanente conformé
ment la loi.
c. Le conseil communal de Wytschaete, accepter
la somme de 4,000 francs, laissée par le testament du
sieur Spyns, Valentin-Dominique-Joseph], au profit de
l'école des pauvres de la localité, la charge d'employer
cette somme exclusivement en faveur de l'instruction
des pauvres et d'imputer les revenus des dits 4,000 fr.
sur la rétribution proportionnelle du Bureau de bienfai
sance fixer par la députation permanente du conseil
provincial, conformément la loi.
d. Le conseil de. fabrique de l'église de Neuve-
Église, accepter les fondations d'un service annuel,
créé par le testament du sieur Spyns, Philippe-Corneille-
Cyprien.
Par arrêté du 13 de ce mois, de la députa
tion permanente du Conseil provincial de la
Flandre occidentale, sont nommés membres de
J
toujours sûr de réussir quand il joue sur l'homme pas
sionné. Il rapporta Mahmoud les outrages que lui avait
prodigués Ferdoussiil changea sans doute les couleurs
tellement que le roi ordonna que son poète favori serait
le lendemain matin foulé aux pieds d'un éléphant il le
traitait toujours en grand homme. Hier, pour le récom
penser, il jetait l'or dans un bassin de la vaste balance,
et dans l'autre un éléphant; demain cet éléphant devait
l'écraser: vicissitudes effrayantes qui passent sur les hom
mes dans les pays de despotes.
Le malheureux poète fut frappé de terreur la nou
velle de l'ordre royal. Il accourut vers le roi, tomba ses
pieds, et, sans se relever, implora sa miséricorde en pro
nonçant un pompeux éloge des gloires de son règne, et
en vantant la générosité innée de son cœur. Le roi, lou
ché du trouble extrême où il le voyait, et ébloui encore
par l'éclat de son génie, révoqua enfin l'ordre.
Sans doute on conçoit que Ferdoussi dut trembler la
menaee d'un supplice pareil aussi peu mérité, et pourtant
on éprouve dn chagrin voir un grand homme s'humi
lier dans une telle terreur. 11 est sage de fuir devant un
cheval échappé, et c'est un cheval échappé que le vouloir
aveugle et sans frein d'un roi absolu il faut s'en ranger
mais rien n'obligeait le poète prostituer sa poésie des
éloges, quand il maudissait au fond du cœur.
Il maudissait tellement en chantant la bonté du cœur
de Mahmoud, que, rentré chez lui, il se soulagea daus une
violente satire oû il flétrissait la dureté de son âme avec