JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° f,OSO IOe Année.
•VetNli, 13 Février 1851.
Vires acquirit eundo.
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 fi-anes.
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Le Pbogrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
INTÉRIEUR.
Ypbes, 19 lévrier.
Les journaux que notre clergé appelle catho
liques, mais auxquels l'archevêque de Paris
conteste et refuse celte qualification, quand il
dit Quelquefois vous croyez y sentir le souffle
de Dieu et quelquefois le souffle de satan; ces
journaux, disons-nous, se donnent une peine
infinie pour détourner l'attention publique et
dissimuler la véritable portée du remarquable
mandement donné par ce vénérable prélat.
Tous les casuisles sont l'œuvre, les fameux
distinguo vont leur train.
Cette mesure (l'ordre donné (au clergé de
s'abstenir dans les luttes politiques), celle me
sure. dit l'organe du clergé Yprois, est toute loca
le. Distinguons, ajoute lecasuiste, entre nos dio
cèses et celui de Paris, Mgr. Sibour ne le pro-
clame-l-il pas lui-même en déclarant que la
position de son diocèse est presque toujours
exceptionnelle.
Cette distinction est purement une subtilité ;i
non, la mesure n'est pas locale et nous allons
le prouver.
Et d'abord où Mgr. Sibour déclarc-t-il que
la position de son diocèse est exceptionnelle?
au chap. V du mandement. Ce chapitre défend
auk prêtres du diocèse de Paris de se porter
candidats aux prochaines élections pour l'as
semblée, ce n'est donc qu'à ce seul cas que
l'exception s'applique, elle ne peut s'étendre
aux principes canoniques du mandement. Ces
principes sont généraux, car ils sont basés sur
le texte et l'esprit de l'évangile et l'évangile est
un comme la vérité.
Mais allons plus loin. Dans quelles circon
stances ce mandement a-t-il été produit? la
suite d'un concile, en vertu d'un décret pris
par celte assemblée. Celte assemblée connue
sous le nom de Concile de Paris, était composée
non-seulement de prêtres de l'archevêché de
Paris, mais encore d'un grand nombre d évê-
ques, de prélats, de théologiens, appartenant
des diocèses suflragants de cet archevêché.
Dans celte assemblée solennelle, les intérêts et
les besoins de la religion dans un grand nom
bre de provinces, étaient représentés. Que disait
ce concile: marchant sur les traces de
VÉglisenousexhorlons vivementlouslesprêtres
et ceux surtout qui remplissent les fonctions du
saint ministère, se tenir sagement en dehors
des partis divers.
En présence de ces faits et de celte déclara
tion canonique, peut-on soutenir encore que les
doctrines du concile et les mesures prises par
lui sont purement locales, qu'elles regardent
uniquement les prêtres du diocèse de Paris?
Nous le répétons, la vérité évangélique est une,
ce qui est vrai Paris doit être vrai Bruges.Que
les patrons du Propagateur s'insurgent contre
celte vérité, qu'ils prétendent que le prêtre doit
influencer telouvrierou tel cultivateur électeur,
la plupart gens simples et dépourvus de culture
intellectuellec'est là une théôrie que le Concile
de Paris condamne et dont l'énonciation pa
raîtra peu flatteuse aux électeurs, qu'un savant
casuiste qualifie d'une façon au inoins peu
bieuveillante.
VILLE D'YPRES. (ovsiai roHMixiL.
Séance publique du Jeudi6 Février i85 i.
Présents MM. le baron Vanderstichele de
Maubus, bourgmestre, président; Henri Iweins-
Fonteyne, éehevin; Pierre Beke, Charles Yande
Brouke, Boedl-Lucien. Legraverand, Martin
Smaelen Edouard Cardinael, Ernest Merghe-
lynck, Boedt, avocat, Louis Annool, conseillers.
Lecture est donnée du procès-verbal de la
séance du 31 Décembre 1850. La rédaction en
est approuvée.
M. le secrétaire donne communication au
Conseil d'une liste de souscription pour un
opuscule la mémoire de la Reine Louise-Marie.
Elle est prise pour notification.
Il est donné lecture d'une lettre de la com
mission des Hospices civils accompagnant
l'envoi du budget de cette administration, pour
l'exercice 1851. H est envoyé l'examen de la
■commission de comptabilité.
Un habitant de cette ville a réclamé contre
son inscription dans la deuxième classe des per
sonnes imposées du chef de indemnité payer
pourla Garde civique Comme celte réclamation
paraît fondée au Conseil, elle est admise et le
signataire payera la somme exigée des habitants
rangés dans la troisième classe.
Le Conseil revenant sur une décision prise
dans une séance précédente, fixe la part payer
par l'administration des Hospices civils et M. De
Codt, secrétaire de la ville, pour l'acquisition
des parcelles respectives de terrain créé par la
voûte exécutée sur l'Yperlée. Comme il reviendra
aux Hospices, au prix de 2,000 francs, 156 mètres
96 centimètres carrés de surface, le prix payer
par M. De Codt, pour 33 mètres 20 centimètres
carrés, est fixé 423 francs.
Le Conseil ajourne la discussion du règlement
organique du Mont-de-piété, pour pouvoir,
avant de prendre une décision définitive, en
tendre l'avis de la commission administrative
de cette institution, sur les points en litige et
les observations présentées par M. le Ministre
de la justice. Il sera mis l'ordre du jour de la
prochaine séance.
Sur la demande de la commission des Hos
pices civils et sur le rapport de la commission
du contentieux, le Conseil approuve la délibé
ration de cette administration charitable, qui
demande être autorisée accepter le legs fait
par feu l'avocat De Souter, ainsi que le pouvoir
d'ester en justice. Même décision est prise con
cernant le legs fait la ville, qui demande, par
l'organe du Conseil, être autorisée accepter
et, s'il y a lieu, défendre ses droits devant les
tribunaux.
Le Conseil émet un avis favorable sur le pro
jet de cahier des charges pour la location de
quelques biens ruraux appartenant aux Hospi
ces, ainsi que sur ta demanda du Rureau de
bienfaisance tendant être autorisé recevoir
le prix au denier vingt, du rachat d'une
fondation perpétuelle créée par la famille
Du Buus.
L'assemblée approuve en outre la vente du
bois taillis et des arbres croissants sur une par
tie de terrain boisé d'une contenance de 50 ares
environ, faite, main ferme, pour la somme de
mille francs, et accorde en outre l'autorisation
de procéder au défrichement de ce petit bois
dont le terrain est loué pour treize ans, raison
de 32 francs, un nommé Lacour, fermier
Reninghe. Ces conventions seront soumises
l'examen de la députation permanente.
Le Conseil saisi de la question desavoir, si la
création de foires au bétail, par la commune de
Neuve-Eglise, serait préjudiciable aux intérêts
delà ville d'Ypres, est résolue négativement par
le motif que les besoins de cette localité exigent
du bétail d'une qualité particulière et qui se
présente rarement sur nos marchés.
Enfin le Conseil épuise son ordre du jour
public en émettant un avis favorable la radia-
LUS BËUlNIEIlft KgRVËN.
(suite.)
l'ordre.
Le soleil avait caché son disque derrière les coteaux de
Plessis-les-Tours le jour était parvenu cette heure
fraîche et délicieuse où peine et plaisirs, tout se calme.
A une lieue d'Amboise environ, une barque de marinier
était échouée sur un banc de sable qui brillait Heur
d eau de tout l'éclat'dc ses fins coquillages. La brise sou
levait des petits flots qui frappaient en cadence le bois de
la nacelle, et lui imprimaient une oscillation légère.
Deux hommes étaient nonchalemincnl couchés dans
cette barque, les yeux fixés vers le ciel, et rêvant comme
en extase c étaient nos deux vieillards.
Oui, mon vieux compagnon, dit l'un des pèlerins,
telle fut ma vie de jeunesse, tels étaient les trésors que
cette femme renfermait en elle. Mais quel cœur eût pu
deviner ce que le sien contenait d'artifices Je ne t'avais
jamais parlé que de mes souffrances, et tu n'as partagé
que mes aventures périlleuses. Jamais je ne t'avais dé-J
peint cette créature céleste et maudite, je n'en avais pas
eu le courage; mais je l'ai retrouvée: c'est bien elle, c'est
bien elle Quand je l'ai entendue parler, j'ai senti mon
cœur défaillir; quand je l'ai vue sourire, quand je l'ai
vue marcher, grand Dieu et cependant il y a de Cela
si longtemps et, depuis, j'avais amassé tant de haine
dans mon cœur contre son souvenir je l'avais vouée
tant d'exécration Ami, l'homme n'est qu'un roseau
fragile entre les mains de Dieu Eh bien mon bon
sire, pardonnez sa mémoire, aimez sa fille et faites la
joie de deux unfants. Aimer sa fille! répondit le comte,
aimer sa fille pardonner sa mémoire me ferais-tu
donc l'injure de croire que je poursuis son souvenir pour
me venger moi seul Non je sais par quelles tortures
j'ai passé je sais de quels affreux dangers la Providence
m'a dégagé. Je sais quelle jalousie déchirante les dédains
de cette femme, ses caprices, sa déloyauté m'ont inspiré.
Ah si dans mes jours heureux ia mort fût venue me
frapper, j'aurais béni la mort; si le coup n'eût porté que
sur elle, ne pouvant lui survivre, je me serais envolé aux
pieds du Seigneur, soutenu par la chasteté de mom
amour, comme par les ailes d'un ange... Mais nonfJ
Dieu m'avait condamné; il m'a fait vivre assez longtemps
pour découvrir en elle un abîme impur où s'est enfoui
mon bonheur, où se sont flétries mes espérances. Depuis
le jour où il m'a si cruellement déchiré, rejeté, j'ai
souffert d'horribles supplices et si ce n'est pas de ma
main qu'elle est morte, c'est que j'ai été lâche au point
de ne pas oser frapper. Tu veux que je pardonne sa
fille Pauvre fou, s'écria de nouveau le vieillard avec un
rire convulsif mais qui te dit que j'en veux sa fille?
Ce que je veux, c'est sauver mon fils, c'est le ravir
cette femme qui, maudite comme sa mère, lui prépare
un sort semblable au mien, et, sur mon âme, j'y par
viendrai. Assez, assez, monseigneur votre exaltation
m'épouvante. Qui sait quel crime elle peut vous con
duire A quel crime répéta le comte. Écoute, je
ferai pour mon fils ce que Dieu aurait dû faire pour moi.
Horreur Non, vous êtes trop bon, trop juste, trop
noble, monseigneur de Kerven. Bonté, justice, no
blesse, je foule tout aux pieds; je tuerai cette femme.
Quoi si jeune si belle vous oseriez? Je la briserai
comme on brise une fleur dont l'épine déchire. Mai»
vous tuerez votre fils, qui vous maudira en mourant.