N° 1,021. 10e Année.
Dimanche, 10 Février 1851.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Viresiacquirit eundo.
1HTËK1EIR.
LUS KEftVEN.
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Ypres, 15 Février.
L'admirable mandement de l'archevêque de
Paris, relatif l'intervention du clergé dans les
affaires politiques, continue fixer l'attention
de tous les hommes sérieux en France et sur
tout en Belgique, où la sagesse de cet écrit,
véritablement évangélique, doit si bien être ap
préciée.
Quant nous, pourquoi le dissimuler, nous
avons, en le lisant, ressenti une joie extrême,
éprouvé une indicible consolation. Depuis dix
années bientôt, les attaques les plus injurieuses
nous sont adressées, les accusations les plus
graves nous sont lancées: Vousêtes, nous dit-on,
des impies, des athées, des ennemis implaca
bles de la religion. El pourquoi nous frappe t-on
ainsi Parceque, depuis dix ans, nous osons
soutenir que le clergé doit se tenir en dehors
des lotîtes politiques, que la chaire de vérité
ne peut se faire l'écho des partis, que le prêtre
qui descend dans l'arène où se débattent les
passions humaines, ne peut que compromettre
la robe sacrée qu'il porte, la religion divine
dont il est le ministre.
Ces doctrines qui nous ont mérités de si in
jurieuses accusations, soul exactement celles de
Mgr. de Paris. Le prêtre, dit-il, qui dans sa
vie sociale, dans ses rapports officiels et jour-
naliers avec le monde, se mêlerait aux débats
passionnés de la politique, celui surtout qui
dans l'accomplissement des devoirs de son
ministère et particulièrement dans la prédi-
cation de la parole divine, oubliant le respect
dû la chaire chrétienne, la transformerait
en une espèce de tribune, ou seulement s'y
permettrait des allusions plus ou moins di-
rectes aux affaires publiques, celui-là aurait
bientôt compromis, avec son caractère de
prêtre, les intérêts augustes de la religion;
celui-là frappant lui-même sa foi et son zélé
de stérilité, rendrait d'avance infructueuses
toutes les œuvres de son sacerdoce, au moins
l'égard de ceux dont il aurait froissé les
sentiments par ces démonstrations d'esprit de
parti, démonstrations dès lors plus coupables
encore qu'intempestives, véritablement cri-
minelles aux yeux de Dieucomme des
hommes.
Est-il possible de foraiiler, avec plus de clarté,
d'onction, de dignité et
l'énergie, les doctrines
que nous avons toujouis professées
L'archevêque de l'aris
aux décisions d'un Conci
agissant conformément
e, accorde donc, d'une
manière expresse et formelleson approba
tion canonique nos principes en matière
d'intervention du c'erg
tiques. Celle approb.il
uous, elle nous lave
dans les affaires poli-
on est précieuse pour
l'odieuses accusations,
démontre que nous sommes dans le vrai el
nous donnera une forœ nouvelle pour propa
ger des doctrines qui sont celles de l'archevêque
de Paris.
Libre désormais au Propagateurde nous
qualifier d athées, etc.; ces attaques nous tou
cheront peu, nous n^ rougirons jamais d être
athées comme Mgr. Sibour.
L'État c'était Louis XIV l'État, disent les
catholiques, c'est M. Malou, el ceci n'est pas une
boutade, c'est une conséquence de leurs prétentions.
En effet, M. Malou engage l'Etat pour 200,000 fr.
envers l'industrie gantoise, sur ces 200,000 fr. M.
Malou n'a que le letnps de donner un acompte de
25,000 fr. Donc, disent les catholiques, l'État n'était
pas engagé pour les 175,000 fr. restants, puisque'
M. Malou n'était plus là pour les payer. L'Etat
c'est donc bien réellement NI. Malou. Quand celui-
ci se relire, l'autre n'existé pius.
Cette manière commode pour l'État d'acquitter
ses dettes, pourrait conduire fort loin. M. Malou a
laissé pour 28 millions de bons du trésor, mais il
n'a pas eu le temps de les payer, l'État ne les doit
plus, puisque les titres des créanciers soul subor
donnés la présence de M. Malou.
Un ministre arrivant aux affaires jouirait comme
un héritier ordinaire du bénéfice d'inventaire et ne
devant plus aux tiers les dettes de son prédécesseur,
il ferait faire banqueroute l'État. Comment réfuter
ces excentricités Ou l'a dit, l'absurde ne se rélutc
pas.
Un journal d'Anvers, livrant les secrets du parti
qui voyait dans la crise provoquée l'occasion du
budget de la guerre la semence d'un miuistère-
inixte, ce journal disait que M. Malou était le seul
capable d'arranger nos affaires. En effet, avec son
i système de liquidation on n'a plus de passif et
l'équilibre est tout trouvé, {Ménager.)
Quelques heures peine de sommeil ou plutôt
de rêves délicieux nous séparent de l'instant où nous
avons quitté le bal charmant, magnifique, auquel
LORDRE.
(8C1TE.}
Le visage de Margaret redevint calme et souriant. La
reine jeta sur sa filleule un coup-d'œil rapide et pénétrant,
puis ajouta
Le comte sera privé de sa meilleure lance peut-
être, et nous y perdrons tous... Mais quoi pcnscs-tu,
mon enfant? A ce que vous dites, marraine. Enfin
tout est pour le mieux là haut, n'est-ce pas
Mademoiselle de Rosières baissa ses beaux yeux de
vant le sourire de sa souveraine.
Venez vous mettre là, enfant gâté, reprit Marguerite,
venez vous asseoir sur ce coussin, vous avez assez tra
vaillé. Des mains mignonnes comme les vôtres doivent
se fatiguer aisément, et ce cœur si souvent gonflé vous
distrait de toute besogne... viens, ma Margaret.
La comtesse courut se mettre aux pieds de la reine,
sur un coussin de velours rouge, et cacha son visage sur
les genoux de sa maîtresse, qui la caressa de ses deux
mains comme pour l'endormir.
Nous avons parler d'une grande affaire, dit Mar
guerite, d'une voix tendre. (La rusée jeune fille ne bougea
pas, ne répondit pas)... Je t'avais donné jusqu'à ce soir,
et tu m'as promis de m'avouer... bien des choses-. (Même
silence.) Nous savons qui vous aimez, Mademoiselle, car
vous aimez; et puisque vous ne voulez pas nous le nom
mer, nous vous dirons que vous avez un très-mauvais
goût.
La comtesse leva la tête et regarda sa marraine avec
surprise.
Vous êtes certainement assez jolie, assez riche,
assez bien née, assez gâtée par moi, pour avoir une
inclination de meilleur choix. Mais, je ne vous com
prends pas Madame. Ne fais pas l'étonnée, ton
cœur est trop jeune pour en conter au mien. Fi donc et
tu crois que je consentirai jamais voir tout ce petit
trésor de grâce, de beauté, de bonté, de noblesse, livré
un homme... brave, je le veux bien; loyal, c'est encore
vrai; jeune, c'est probable de bonne maison, c'est juste.
Que voulez-vous donc de plus, Madame, dit Margaret
avec un sourire plein de joie? Ce que je veux? je
veux te voir un peu plus difficile ce gentilhomme est
laid, il a des manières qui sont plus du soldat que du
chevalier il est soinbre, triste, hautain, sans finesse...
A te dire vrai; je soupçonne un peu sa fidélité; ces visages
M. le baron De Vrière et son aimable compagne
avaient convié la société brugeoise Des flots d'har
monie retentissent encore nos oreilles nos yeux
sont encore éblouis il nous semble respirer encore
avec délice les suaves émanations de mille fleurs si
urtisteinent groupées et distribuées avec profusion
partout où il a été possible d'en mettre sans gêner
la circulation (.'est, qu'en effet, c'était là résoudre
un difficile problême que de permettre eept cent
cinquante incités, car bien peu sans doute ont su
résister l'attrait d'une aussi belle fêle) de se pro
mener, de causer, de danser sans gêne et sans con
trainte dans un local qui naguère nous paraissait si
restreint, si borné A la vérité, si nos aimables
hôtes ne possédaient un véritable génie d'artiste, ce
problème n'eût pas été résolu, mais grâce ce génie
aussi fécond en ressources que simple dans les
moyens qu'il emploie, nous n'avons plus été,comme
jadis, nous heurter avec la foule.au fond de l'antique
chapelle, jadis aussi si mal éclairée qu'on risquait de
s'y rompre le cou, el par un élégant couloir, habi
lement ménagé, nousavons pu,sansdevoir retourner
sur nos pas, regagner les autres salons.
Enfin, il n'est pas jusqu'à la salle manger,
complètement transformée, qui n'ait été livrée aux
flots brillants des danseurs, et là ils étaient conduits
par un second orchestre placé au fond de la serre
toute grande ouverte et caché derrière un massif
de camélias, splendidement ou plu tôt délicieusement
éclairé par des fleurs lumineuses et par des lampes
invisibles, cachées dans des toufles de roses, Tout
ceia, nuus 10 icjjciuiio, eut véritablement feenque
et la plume est impuissante pour donner une idée
exacte de toutes ces magnificences, rehaussées par
l'éclat des bijoux, des diamants, des toilettes les
plus suaves et les plus fraîches! Parlerons-nous d'un
autre article, plus matériel, il est vrai, mais non
moins hautement apprécié par tous, c'est-à-dire
des comestibles les plus délicats, des vins de toutes
sortes, offerts avec une profusion princière? Dirons-
nous enfin qu'on a rencontré ce bal, sans contredit
la plus belle fête de la saison, toutes les autorités
civileset militaires de Bruges, les premiers fonction
naires de la provincç, les présidents et juges des
tribunaux d'Ypres, de Courtrai, de Furues, M. le
colonel Pirson, gouverneur de Nainur, plusieurs
consulsétrangers el un grand nombre de notabilités
de Gand et de quelques autres villes du royaume.
Nous avons, certes, vu déjà bien des fêtes, mais il
n'était qu'une voix pour reconnaître que celle-ci a
été belle parmi les belles et qu'elle a dépassé toutes
le9 espérances. Il est vrai que Madame la baronne
De Vrière en était l'âme, et qu'elle se multipliait
pour faire les honneurs de ses salons, avec celte
aménité parfaite, cette grâce exceptionnelle qui la
en dessous sont souvent trompeurs. Oh! Madame, que
vous le connaissez peu et de. grosses larmes tombèrent
des yeux de la comtesse sur les mains de la reine. En
un mot, il faut être folle, pour aimer ce lord VVenlock...
Lord Wenlock s'écria Margaret. C'est d'ailleurs
combattre tous mes projets; car je t'avais choisi, moi, un
jeune seigneur, qui t'aurait rendue heureuse, et aurait
fait ton orgueil C'est inutile, marraine mais...
Ah je comprends nousavons la tête perdue pour ce
lord... J'ai cet homme en horreur, Madame. vous
vous êtes trompée. Je le hais je le hais Ah
et pourquoi? demanda Marguerite étonnée. Je ne sais;
mais, de même que dans ce pauvre cœur que vous voulez
sonder, il existe un amour pur, chaste, profond, sans
bornes, de nicmc j'ai de tout temps éprouvé une aversion
naturelle, insurmontable, instinctive pour deux hommes;
et, depuis peu, ce lord Wenlock surtout m'épouvante,
ajouta la comtesse en soupirant. Comment depuis peu?
Je me trompe sans doute, mais je crois cet homme
lâche, cruel et traître... Il s'est d'abord attaché mes
pas, m'a entourée de soins, s'est fait l'esclave de mes
moindres désirs, est parvenu enfin découvrir mon
secret chéri! il s'est offert pour me secourir, me consoler,
me servir, et comme une pauvre femme, bien malheu-