H° 1.047- 11* Année.
Dimanche, 18 Mai 1851.
JOIRYAL D'VPRES ET DE L'ARRO.V DISSEAIENT.
Vires acqumt eundo.
INTÉRIEUR.
ISft DlRNBKftS (ftiaVÊM.
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ÏPRES, 17 Uni.
Pendant dix-sept annéesles ministères soi-
disant catholiques ont puisé impunément dans
la poche des contribuables et administré, avec
beaucoup de laisser-aller, lesfinances de l'Etat.
S'il y avait un déficit, on émettait des bous du
trésor. Quand ces titres étaient en assez grand
nombre en circulation pour pouvoir causer des
embarras, on consolidait la dette et tout allait
au mieux dans le meilleur des mondes possibles.
Mais, force d'user de ce système, la dette publi-
quea pris un tel accroissement, que les emprunts
deviennent moins faeiles, d'autant plus que les
intérêts et l'amortissement exigent une tren
taine de millions annuellement.
Aujourd'hui, que par suite decette négligente
gestion des finances de l'Etat, les dépenses ordi
naires dépassent tous les ans les ressources
ordinaires, et qu'il faut avoir recours des expé
dients qui n'ont que trop souvent le défaut d'en
gager l'avenir, le ministère libéral, après avoir
introduit l'économie la plus stricte dans les
services publics, a cru devoir mettre la situation
financière, sans déguisement, sous les yeux de
la Chambre, en lui demandant s'il n'y avait pas
lieu d'augmenter le budget des voies et moyens.
Plusieurs projets de loi ont été proposés
droit sur les successions en ligne directe; modi
fications au régime des accises sur les bières et
les genièvres, tendant faire rentrer, dans les
caisses du trésor, le droit que les fabricants
prélèvent sur le consommateur, et sont censés P'u* justes, puisqu on n est tenu de les payer
S'agit—11 des distilleries, c'est l'intérêt agri
cole qu'on invoque; cest la nourriture pour
le bétail, l'engrais pour les terres, l'emploi des
grains qu'on met en avant. Mais, encore une
fois, les distilleries ne pourraient-elles exister
si elles payaient réellement les droits d'accises
qui sont légalement dûs et qui sont comptés
au consommateur?
Enfin, il y a dans notre machine gouverne
mentale une singulière anomalie. Du moment
qu on propose de voler des dépenses, tous les
députés y prêtent les mains sans trop grande
difficulté. Cependant pour faire des dépenses
il faut des ressources ou des emprunts. El si le
ministre des finances demande la création de
nouveaux impôts, ceux qui ont voté les dépen
ses, jettent les hauts cris et déclarent le projet
présenté le plus détestable, parce que c'est
celui-là dont on sollicite l'application. On en
présenterait d autres qui tous, la suite les
uns des autres, seraient au plus blâmables,
toujours parce qu'il est bien agréable et bien
populaire de voler des dépenses, sans songer
aux ressources pour les solder.
D autres, dans le but de battre en brèche la
créaliou de nouvelles ressources, vont partout
criant, qu il ne faut plus de droits indirects,
que c est restreindre la consommationIl nous
semble que ces économistes sont tout fait
la hauteur des idées qui ont cours dans les
pays, où la civilisation est la moins avancée.
Les impôts indirects sont indispensables et les
payer au fisc; un droit sur le tabac et le débit
de cigares.
A peine ces projets sont-ils connus que les
intéressés se liguent, se coalisent, s'entendent,
sous prétexte de défendre I industrie et en réa
lité pour pouvoir continuer le système com
mode de faire payer au consommateur des
droits au versement desquels les fabricants
trouvent le moyen d'échapper.
Les belles phrases ne manquent pas l'ap
pui du système s'agd-il de la bière, c'est la
]ue pour autant que I on consomme. Les im
pôts directs froissent bien plus le contribuable,
et le principe qu'il ne faut frapper des coulri
butions que sur la richesse acquise, est juste,
mais ne peut donner au gouvernement assez
de ressources, pour satisfaire aux exigences des
sociétés modernes.
Anciennement, quand le gouvernement se
bornait maintenir l'ordre public et surveiller
la justice, on pouvait exiger moins de reve
nus. Mais I Etal, de nos jours, est devenu une
boisson du pauvre, c'est la liqueur la plusseconde providence et. dans les malheurs pu-
hienfaisante comme si le pauvre payerait plus blics comme dans les accidents privés, on coin-
son verre de bière, si le brasseur versait au fisc nieuce par blâmer, s'il y a moyen, I État, quille
les droits qui sont dûs et qui sont prélevés sur après invoquer son aide, si l'on espère de
la consommation. I obtenir. Somme toute, les sociétés modernes
LE PORTE-CLIP*.
(«cite.l
Le porte-clefs regarda le comte de travers, avala une
dose de genièvre, et s'accouda silencieusement sur la
table. Vos prisonniers seront jugés demain; leur con
damnation, comme c'est la règle, leur sera communiquée
pendant la nuit; ce sera vous qui ouvrirez la porte de
leur cachot au justicier, et quand celui-ci aura fiai de
déclamer la sentence de mort, vous oublierez de refermer
la cellule; voilà tout.
Le comte reprit Vous aurez remis dans la journée
lin billet vos prisonniers pour les prévenir du complot;
ils sortiront une heure fixée, Kilderkin sera de garde,
et les laissera passer sous uu déguisement, auquel nous
pourvoirons; le chef du poste de lu barrière recevra une
somme énorme vous accompagnerez les fugitifs, et des
chevaux préparés d'avance vous mettront hors de pour
suite. Votre fortune sera faite. Par saint Georges, ce
eapucin parle comme un lansquenet, et je veux trinquer
avec lui... Holà lié miss Kennet milady Kennet
femme de Satan Ah enfin, la voici L'hôtesse que
Burn n'avait encore aperçu, était cependant accoudée
exigent souvent l'irppossible des gouverne
ments et quanti ceux-ci demandent des fonds
pour pouvoir faire face des besoins Constatés,
tout le monde ferme les cordons de la bourse.
Si un vice doit perdre les sociétés modernes,
c'est l'égoïsme, car nul ne sait faire un sacrifice
dans un but d intérêt général, toujours entamé
par l'intérêt privé, bien autrement actif et
persistant.
■■uuumilm
On nous annonce, pour la semaine prochaine,
l'arrivée de la sous-commission nommée pour
examiner l'état et la situation des établisse
ments d'instruction militaire. Elle s'est déjà
rendue Lierre, pour examiner l'école des
enfants de troupe, et l'école militaire de Brux
elles a été inspectée par elle. Le but de son
arrivée Ypres est d apprécier la situation et
l'organisation de l'École d'équitalion militaire
et des services qu'elle peut rendre I armée.
Si nous ne nous trompons, c'est M. Henri
De Brouckere qui préside celte sous-coruinis-
sion chargée avec d autres, de préparer les
éléments du travail nécessité par le voeu de la
Chambre de soumettre nos institutions militaires
uu nouvel examen.
Les dernières pluies ont occasionné, dans
l'arrondissement d Ypres et de Fnrnes, d'énor
mes dommages Des débordements de cours
d'eau et de ruisseaux ont, sur plusieurs com
munes, entièrement couvert d eau une forte
quantité de terres labourables. Sur la commune
de Moorslede, il a été impossible jusqu'ici de
planter des pommes de terre, des fèves et du
lin. Plusieurs autres villages sont dans la même
situation. Le long de l'Yser, les inondations
ont la même hauteur qu'en plein hiver et I on
peut calculer que plus de quatre mille hectares
de prairies ne fourniront qu'une demi-récolte
d'un foin malsain et de mauvaise qualité.
Si I on voulait calculer depuis dix ans seu
lement. ce que la vallée de l'Yser a perdu par
suite de la non-exécution de quelques travaux
évalués un million, on pourrait déjà avoir
fait des ouvrages trois fois plus considérables
avec la valeur des pertes subies, et qu'avec plus
de prévoyance, ou aurait pu éviter.
contre la porte, regardant et écoutant ses convives. Elle
s'approcha brusquement du geôlieret lui dit Vous
vous faites bien prier, recors de Bohême, pour une misé
rable bagatelle. Oh ob ma belle elfarouchéevous
appelez bagatelle l'histoire de me faire couler du plomb
fondu dans les oreilles, et bouillir le ventre dans une
chaudière. Eli bien, tu ne boiras plus, et je veux trin
quer seule avec Kilderkin arrière, ivrogne demi.
Ivrogne demi s'écria le geôlier furieux, pour qui me
prends-tu? Je suis le roi des buveurs. Kilderkin défends-
moi, soutiens mon honneur.
Sauve ces pauvres enfants! Mais mon cou, femme
infernale, mon cou El que vaut-il pour que tu
fasses tant de bruit; je l'estime autant qu'un goulot de
bouteille vide. Allons, je te promets un grand verre de
xérès le jour où tu passeras devant ma porte pour aller
la potence. Charmante créature et pour le moment
que me donneras-tu De l'aie et du porter, cl du
genièvre te faire brûler vif comme un inabomélan.
j Que voulez-vous doue que je vous dise, mes véuérés
J pères en l'Évangile
i Les deux pèlerins levèrent tout-à-coup la léte avec
espoir et joie. Nous voulons, reprit l'hôtesse, que tu
nous jures, par uu serment que nous te pourrons répéter
demain, de suivre la lettre tout ce qu'on te commandera
pour délivrer le chevalier de Kerven et son page. Ah!
misérable lu abuses de mon respect mes serments
d'ivrogne. El cette condition, nous trinquerons avec
ce porter épreé, ton salut en l'autre monde. Et tu
m'embrasseras en amitié Oui, vilain dogue, Eh
bien que ce toast m'étrangle si je ne fais pas tout ce
qu'on me commandera pour délivrer ces chers agneaux;
et maintenant me donneras-la boire, et me donneras-tu
le baiser de paix, vieille harpie, duègne d'amour.
Le comte allait parler, lorsque l'hôtesse lui fil signe de
se taire, en mettant un doigt sur ses lèvres.
Le geôlier ne s'arrêta plus dans ses rasades. Il glissa
une secundo fois le long du mur, et demeura couché sur
les dalles, sans mouvement, sans parole. Vous pouvez
vous retirer, dit l'hôtesse, nous avons son .serment,
occupez-vous de préparer les moyens d'évasion je me
charge de le réveiller et de lui rafraîchir la mémoire.
Tenez, ma fille, dit le comte en se levant pour Sortir,
prenez ce faible gage de ma reconnaissance; Dieu récom
pensera bien mieux votre bonne action, et il mit quelques
pièces d'or dans la main de miss Kennet, qui fit une
souple révérence, et accompagna ses liôtes avec une lampe
pour leur épârguer les périls de son méchant escalier.
(La suite au prêchai" A'*.)