JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M01.063. 11' Année. Dimanche. 13 Juillet 1851.
Vues acquirit eundo.
INTERIEUR.
LIES MINICRS BŒRVgRI.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50 c. Provinces,4 francs. I Lf. Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
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ypres, 12 Juillet.
Nous ne sommes ni les partisans fanatiques
et quand même de la langue flamande, ni ses
détracteurs ou ses ennemis déclarés. En réponse
i arlicle du Propagateurde mercredi der
nier, nous nous bornerons reproduire les
sages réflexions que publiait naguère une Revue
de la capitale des Flandres, revue remarquable
plus d'un litre. Tout homme sensé, raison
nable et véritablement réfléchi s'y ralliera, nous
n'en doutons pas. Nous osons même affirmer
que la citation qui suit n'est que la profession
de foi obligée de quiconque est, la fois, et
véritablement la hauteur des idées de son
époque, et, quoi qu'en pense notre adversaire,
vrai patriote, belge avant tout, qu'il soit même
flamand, admirateur de sa langue, mais admi
rateur intelligent et éclairé.
N'imaginant pas de plus noble ambition que
celle de substituer des livres écrits en flamand a
des livres écrits en français, les écrivains flamands
oublièrent la vraie raison d'être d'une renaissance
littéraire ils ne comprirent pas que la langue qu'ils
aimaient, n'avait été dédaignée que parce qu'elle
n'était plus l'écho des seulinienls généreux et des
idées progressives.
11 y eut surtout une vérité importante qui fut
complètement méconnue par les partisans du fia—
tll'aiul. Depuis longtemps déjà la langue française
est devenue citez nous l'organe de la vie intellec
tuelle, quelle que soit la forme qu'elle puisse affec
ter. Dans un pareil état de choses, il ne pouvait
suffire aux écrivains flamands de faire aussi bien
que les écrivains français. On ne pouvait songer
s'appuyer sur un public qui avait des habitudes
littéraires profondément enracinées, et qui se serait
difficilement résigné 5 quitter une langue préférée,
«n attendant qu'oïl arrivât trouver dans les œu
vres flamandes de suffisants aliments intellectuels.
11 eut fallu, dès l'abord, aller cette foule qui
balbutie peine quelques mots français et qu'il eût
été grand et noble d'élever au niveau de la civilisa
tion moderne. Pourquoi faut-il que l'itiiluènce
fatale et habilement exploitée de l'amour du pitto
resque et de l'idolâtrie de l'idiome, ait jeté les nou
veaux auteurs si loin de ce peuplcqu'il est pourtant
si urgent de rappeler la vie de l'intelligence et du
(stltt.)
le secret.
Pendant que le dernier des Kerven expirait sur l'écha-
faud de Black-Friars, et que les religieux du monastère
recevaient son corps mutilé,les habitants de Westminster,
fatigués de leur nuit joyeuse, se reposaient encore en
rêvant au plaisir. Le palais qui, la veille, avait été si
animé, si éclairé, était seul paisible et silencieux au sein
ne la ville agitée. Les fenêtres des appartements royaux
étaient fermées, et la cour semblait attendre le reveil de
son maître pour reprendre sa vie bruyante.
En tournant l'angle sud de l'abbaye de Westminster,
on arrivait un pavillon gothique d'un dessin élégant et
riche qui joignait ce palais au célèbre monastère et qui
était habité parla première dame d'honneur de la reine
Elisabeth. Ce pavillon s'ouvrait sur un charmant jardin
semé de fleurs et ombragé par des acacias qui mêlaient
leurs parfums aux senteurs embaumées des parterres.
Deux allées sablées conduisaient, en se tordant au milieu
du gazon, de la grille d'enceinte générale un gracieux
perron, où le ciseau du sculpteur s'était surpassé. Quatre
fenêtres donnaient sur la face du jardin, et deux sveltes
tourelles encadraient le corps de logis dans leur simpli
cité régulière. Le plus profond silence planait sur le
pavillon, sur le jardin et sur les bâtiments voisins; les
cœur? Pourquoi faut-il que la haioedu français ait
aveuglé les écrivains flamands ce point de n'avoir
d'enthousiasme que pour Iç passé uniquement
parce que l'influence française n'y règne pas sans
rivale
Si l'on avait sondé la réalité sans préoccupation
de système, on ne se fiât pas enchaîné au char de
l'impossible, et tant de torce brillante et dévouée
n'eut pas été gaspillée au service d'une chimère.
Taudis qu'on était naturellement appelé s'engrè-
ner dans le mouvement général du progrès, on se
condamna lutter contre l'esprit du siècle, on de
vint suspect ceux-là même pour lesquels on
croyait travailler, et de mécompieen mécompte,
on s'affaissa jusqu'au découragement. Il y a d'utiles
leçons puiser dans ce spectacle d'efforts ingénieux
et soutenus, qui avortent la fin pour n'avoir pas
su trouver leur véritable point d'appui.
Nous demanderons, pour terminer, au con
frère, pourquoi, s'il trouve dans l'usage du
flamand un moyen pour opposer une digue
aux idées envahissantes de I étranger, pourquoi
il ne se sert pas de cette langue qu il prise tant,
et avec raison, de cette langue si propre mar
quer notre nationalité. Or, le journal de notre
contradicteur est rédigé en français. N'est-ce
pas là le plus fort argument contre ses propres
idées N'est-ce pas là un aveu implicite de l'in
fériorité de l'idiome, en faveur duquel il préteiwl
immoler la belle littérature française? Nous
disons inférioritéet p.our qu'on ne fasse pas
une nouvelle chicane sur ce mot, nous nous
hàt,ons d'ajouter que nous aussi nous formulons
le vœu, dans un intérêt purement national, de
voir la langue de Vondel et de Cats triompher
de l'indifférence publique. Mais qu'il nous soit
permis, au moins, de constater que ce triomphe
n'est pas venu couronner encore l'es efforts de
nos écrivains, parce que, comme nous venons
de l'établir par la citation de plus haut, ils
n'ont pas su trouver la seule voie qui fasse
écho.
Nous avons le plaisir de faire connaître nos
lecteurs que M. Auguste Bôhtn vient d'envoyer
M. son père, en cette ville, deux superbes
tableaux destinés la grande exposition trien
nale de Bruxelles. Ces tableaux représentent les
épais rideaux de damas qui garnissaient les vitraux^ ne
laissaient rien voir au-dedans; et, regarder cette habi
tation délicieuse, au moment où le crépuscule s'efface,
où la nuit gagne, on l'eût prise pour la résidence de
quelque fée amoureuse du silence et de la solitude. Après
avoir gravi les marches faciles du perron et poussé une
petite porte en bois de chêne découpée jour et taillée
en relief, on pénétrait dans un vestibule tendu de riches
tapisseries, orné de vases remplis de fleurs, et qui con
duisait l'escalier des appartements réservés.
C'est dans l'un de ces appartements que nous voulons
amener le lecteur; soulevons une double portière en
velours, et nous verrons Jeanne et Margaret toujours
belles, toujours unies, toujours les mêmes. La marquise
de Courtenay se penchait souvent vers son amie pour
baiser son doux visage, et ses paroles avaient plus de
vivacité, plus d'énergie, plus de gaîté que celles de la
comtesse qu'elle semblait gronder, niais de cette façon
caressante que nous prenons dans la plus tendre intimité.
Après un long silence qui régna entre les deux amies,
Jeanne prit un air rieur qui la rendait ravissante et dit
mademoiselle de Rosières
Je n'approuve pas cette toilette, chère sœur, et je
te prédis que tu deviendras coquette, si lu ne l'es déjà.
Margaret leva ses regards sur ceux de la marquise, et,
rencontrant l'expression de bonté qui les animaient, elle
les baisa aussitôt avec calme et tristesse.
Ma prédiction t'effarouche, mais elle n'en est pas
Environs de Chevreuse (Seine et Oise), et Mare
près de Limours (étude d'après nature).
Les amateurs qui déjà, plusieurs reprises,
ont pu apprécier le talent de notre concitoyen,
ont l'espoir fondé que ces deux ouvrages d'art
seront couronnés de succès.
M. Bôhm s'occupe en ce moment donner
la dernière louche un troisième tableau qui
est également destiné la même exposition.
n ai
On nous écrit de Nieuport
Le festival organisé par la régence de notre ville,
a l'occasion de la kermesse, a été très-brillant; six
sociétés de musique des localités environnantes y
assistaient et le corps de musique du n' régiment de
ligue, par une faveur spéciale du ministre de la
guerre, est venu pour donner cette fête tout l'éclat
que l'on pouvait souhaiter. Toutes les sociétés ont
donné des preuves incontestables de bon goût musical
et toutes ont généralement excité l'admiration des
spectateurs eu tenant cependant compte des moyens
toujours très-reslreints dont disposent les petites
localités.
La musique d'Houdschoote (France) s'est particu-
lièrement distinguée par le bon choix des morceaux,
par la belle exécution et par la brillante tenue des
exécutants, ils avaient tous La grande tenue de la
Garde nationale.
La musique du n1 régiment de ligne nous est
arrivée la veille de la kermesse; aussitôt que l'on
avait appris son arrivée, une grande affiuence de
inonde se transporta sa rencontre. La commission
des fêles est venue la recevoir la barrière. Pqur son
entrée en ville elle a joué des pasredoublés; déjà elle
voulait nous donner un échantillon de son savoir-
faire. Le soir elle a donné quelques sérénades aux
autorités civiles et militaires. La ville entière était
en émoi, on n'entendait que des applaudissements
et des bravos cent fois répétés.
Chacun retournait chez soi en attendant avec im
patience la journée du lendemain qui leur promet
tait tant de délices, aussi leur espoir n'a pas été
trompé; lesartistes de ce régiment se sont surpassés!
Quelle délicieuse exécution quelle perfection! quel
ensemble'!
Au festival ils ont joué le Pot-pourri du Prophète
et le Pot-pourri National. Jamais ou n'a vu tant de
personnes réunies sur la Grand'Place de notre ville.
Cette foule écoutait silencieusement, ou aurait dit
qu'elle craignait de perdre une note. A peiue les
moins prophétique. Dis-moi si ce n'est pas folie de se
mettre en deuil, un jour comme celui-ci, moins que ce
ne soit par coquetterie, parce que cette robe noire, parce
que ces bracelets de jais, parce que ces festons vous vont
merveille, petite rusée. -
Margaret posa son mouchoir ses yeux, et poussa un
soupir qu'étouffa un sanglot.
Tu pleures, chère enfant tu pleures! Mais pour
quoi ce chagrin? Ne suis-jc plus ton amie et ta sœur Ne
me confieras-tu que la moitié de tes pensées Margaret,
ma bien-aimée, réponds? Je sens battre mon cœur avec
violence, tu souffres. Qu'as-tu tes mains sont brûlantes.
Oui, je souffre; mais ne t'inquiète pas, ma sœur...
Je suis une pauvre folle, je suis sans doute ingrate envers
Dieu qui, aujourd'hui m'a comblée. Cependant, je l'ai
bien remercié j'ai tant prié aujourd'hui, làaux pieds
de ce Christ, depuis ma sortie du bal jusqu'à ce moment
que mes genoux en étaient brisés, mon cœur gonflé, mes
lèvres tremblantes.
- Eli bien il faut se résigner, mon enfant nulle
séparation n'est éternelle.
Hélas au moment d'entrer dans cette éternité
dont tu parles, les cœurs les plus fervents se troublent,
les âmes les plus pieuses hésitent.
Qui le parle de l'éternité chère Margaret... Tu
m'effraies avec tes mots sinistres, toujours suivis de
pleurs... Viens au jardin, le grand air changera tes idée»
sombres... Et d'abord, causons plqs gaiment, le veux-tu?