MJ 1.082, 11e Année.
Jeudi, 18 Septembre 1851.
JOlItiYAL DYPitES ET DE EAItltOVIUSSEAIEYT.
Vires acquirit eundo.
INTÉRIEUR.
Union libérale
MADAME DE MIREMONT.
ABONNEMENTS: Ypues (franco), par trimestre, 5 francs 50c. Provinces,4francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes.
Le Proorês parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Ypoes, 17 Septembre.
DE L'ARRONDISSEMENT D'APRES.
Le Comité a l'honneur de convoquer M Mles sociétaires
l'assemblée généralequi aura lieu /'Aigle n'on,
Y près, le Samedi, 20 Septembre 1851, 5 heures de
relevée. L'heure sera strictement observée, afin de per
mettre aux personnes de la campagne d'assister d la
réunion.
ordre du jour
Choix définitif d'un candidat pour l'élection au Sénat.
Ce 15 Septembre 1851.
i.b président,
H.-F. CARTON.
pour le secrétaire absent,
P. Bkke.
Pourquoi nouai ronlon* l'impôt eu ligue
directe
A moins de prétendre que l'on puisse exécu
ter des travaux sans argent, il faut convenir
que de nouveaux impôts sont nécessaires pour
pouvoir exécuter les travaux réclamés sur les
divers points du pays c'est en présence de
cette nécessité que le gouvernement a pensé
que l'impôt en ligne directe était la fois le
plus équitable et le moins lourd en ce qu'il ue
frappait que secondairement le fermier, le
marchand et le locataire. Le Sénat n'en a pas
jugé ainsi et, loulen reconnaissant comme nous
la nécessité de créer de nouvelles ressources, la
Chambre haute a proné les impôts de consom
mation qui, comme l'a si bien dit M. Frère, sont
autant de réductions sur les salaires.
Quels étaient d ailleurs les impôts que voulait
le Sénat? Nous regrettons sincèrement qu'il ne
s'en soit point expliqué, c'eut été un nouveau
grief sa charge, car il eut été prouvé une fois
de plus qu'il ne lui en coûtait rien pour grever l'a
griculture, l'industrie ou le commerce; u'avons-
nous pas entendu en effet ceux qui répudiaient
(SUIT*).
II.
Le retour de la cavalcade fut rapide et silencieux car
le marquis, la vicomtesse et Valérie avaient été profondé
ment remués par les diverses circonstances de leur court
séjour au milieu des ruines de Courcenay. Le premier,
surtout, avait dans sa taeiturnité quelque chose de sombre
qui eût empêché ses compagnes de chercher le distraire
alors même qu'elles n'eussent pas été sous la coininunica-
tive influence d'impressions peu près semblables. Cette
espèce de mendiant infirme et orgueilleux, trônant en
maître sur les débris d'une vieille demeure féodale, était
resté dans le souvenir des trois visiteurs comme une ap
parition fantastique du génie des révolutions; et, en effet,
comment ce rapprochement ne se serait-il pas présenté
l'imagination de M. de Branligny, puisque Courcenay
avait fait partie pendant plusieurs siècles du riche patri
moine de sa famille Sirvan avait trouvé dans l'héritage
de sa mère ce domaine acheté nationalemeni, et il s'était
toujours refusé le revendre au marquis, bien que celui-ci,
depuis son retour de l'émigration, se fût ino lié dispose
en redevenir possesseur au prix des plus grands sacri
fices. Ce soir-là, le vieux gentilhomme avait trouvé son
successeur plus intraitable que jamais, et, en le quittant,
il s'était dit qu'il devait perdre toute espérance, puisque
Sirvan, qui, jusqu'à cette époque, avait habité un village
des environs, venait de déclarer qu'il s'était définitivement
établi dans son château on se rappelle que c'est ainsi
qu'il avait nommé les ruines lorsque les promeneurs
tout droit direct sur la propriété, recommander
les centimes additionnelsun droit sur la cul
ture du labac, une augmentation de droits d ac
cises sur les bièresenfin un droit titre d'as
surances obligatoires; or, nos yeux tous ces
droits grèveraient le fermier, le marchand, et
ce litre nous les repoussons de toutes nos forces.
Nous nous sommes occupés des centimes addi
tionnels et certes il ne faut pas de grands rai
sonnements pour prouver qu il ne frappe que le
locataire.
Occupons-nous du droit sur la plantation du
tabac.
Et d'abord par qui serait payé le droit? Ne
serait-ce pas peu près exclusivement par la
classe nombreuse des travailleurs. La perception
de cet impôt nécessiterait d'ailleurs des tracas
series qui répugnent nos mœurs et qui entra
veraient le développement de celte branche
importante de l'industrie agricole.
L'accise sur la bière est déjà élevée non par
l'augmentation du droit en lui-même, mais
parce que ce droit sera perçu dorénavant sur la
contenance réelle de la cuve matière, de telle
sorte qu'une nouvelle aggravation de droit nous
paraît impossible.
Quant au système des assurances par lElat.
nous l avons toujours combattu parce qu'il con
siste rendre l'assurance obligatoire et fixer
la prime au double de ce quelle devrait être,
pour couvrir les risques afin de donner au
gouvernement un revenu annuel de 4 5 mil
lions Cette prime n'esl-elle pas alors un véri
table impôt et cet impôt ne toinbe-l-il pas en
core sur le fermiersur le marchand et en
général sur les locataires en vertu des stipula
tions qui sont insérées dans tous nos baux.
Voilà pourquoi nous repoussons tous ces
impôts, et cest parce que nous repoussons
ceux-ci que nous considérons (impôt en ligne
directe comme indispensable pour assurer l'exé
cution des travaux publics
MM. Malou et leurs organes sont toujours
prétendre que nos recettes sont en équilibre
avec les dépenses et qu'il ne faudrait pas pour
cela des impôts nouveaux. Nous n'avons pas
l'espoir de modifier l'opinion de ces honorables
représentants de l'arrondissement d'Ypres;
mais pour qu'elle ne s'accrédite pas dans l'esprit
des électeurs Yprois, nous répétons pour la
vingtième fois que c'est là une contre-vérité que
I on ne peut avancer qu'en portant défi au bon
sens des électeurs Nous ne reviendrons pas, du
reste, sur les discussions qui ont eu lieu ce
sujet la Chambre et au bénat il nous suffit
de rappeler qu'après la retraite de M. le Minis
tre Malou, il existait un déficit de 45 millions
de Francs couvert en bons du trésor, que celte
situation a nécessité l'emprunt forcé de 1848 et
a failli, celte époque, compromettre notre
tranquillité et jusqu'à notre existence politique.
Si d ailleurs les dépenses n'avaient pas pendant
de longues années excédé les recettes, d'où
serait provenu ce déficit créé sous les différen
tes administrations catholiques qui se sont
succédées. Il est tout simple du resle que ces
Messieurs chercheut dissimuler la gravité
d une situation qui n'est due qu'à leur impré
voyance ou leur incapacité; mais nous croyons
qu il aurait été plus loyal de leur part de ne
pas refuser leur concours une administration
qui s'est donnée la pénible mission de rétablir
I ordre et l'équilibre dans notre situation finan
cière.
Nous ne pouvons d'ailleurs invoquer l'ap
pui de noire opinion une aulorilé plus respec
table que celle de M. De Baillel, vice-présideut
du Sénat et I un des plus fougueux adversaires
de la loi. «Il faut, d une manière ou d autre,
disait I honorable sénateur eu 18 i7, auginen-
ter les ressources du trésor, nous en avons
souvent reconnu la nécessité dans cette en-
ceinte. Tout le monde est d'accord sur ce
principe mais quand il s'agit de l'applica-
lion, la difficulté commence chacun ap-
porte sa panacée, mais convenons-en fran-
chement, chacun préfère voir puiser dans la
poche de son voisin.
l'avaient rencontré dans un des sentiers de la bruyère des
Fantômes.
La famille de Branligny était une des plus considérables
de la province et une des plus illustres de la monarchie.
En 1790, le marquis, veuf, avait émigré, laissant en
France, affreuse douleur pour son cœur de père et de
gentilhomme, un (ils de vingt ans qui s'était pass.onné
pourdes idées nouvelles, et qui,disait-il, voulait travailler
les faire triompher. L'exil avait donc été doublement
cruel pour ce noble chef de race. Il s'était battu dans les
rangs de l'émigration armée, avec l'opiniâtreté de la foi
politique et le courage du désespoir. En 1796, n'ayant,
depuis six années, aucune relation avec sou fils, il avait
appris la fois que ce fils toujours aimé malgré ses
erreurs, était mort, et que sa terre de Courcenav avait été
achetée par la fille d'un de ses anciens fermiers. Dix-huit
mois après, M. de Brautigny, qui regardait toujours
comme un devoir de ne pas laisser éteindre son nom,
s'était remarié en Allemagne, et, en 18U3, veuf pour la
seconde fois, il avait obtenu la permission de rentrer en
France, et il amenait avec lui un fils unique âgé de trois ans.
Pendant toute la durée de l'empire, M. de Branligny
s'était exclusivement consacré l'accomplissement de
deux devoirs: donner sou fils Raoul une éducation
brillante et solide, et ré.ablir sa fortune de manière
laisser après sa mort son héritier dans une situation en
harmonie avec le rang que sa naissance l'appelait tenir
au milieu de la sociélé reconstruite par le génie créaleur
d'un grand homme.
Toutefois, un de ses désirs, le plus ardent peut-être,
n'avait pu triompher d'une obstination plus puissante que,
la sienne. Le château de Courcenay, berceau séculaire de
sa famille, était resléaux mains dans lesquelles les hasards
de la destinée l'avaient fait tomber. Celle circonstance,
qui blessait bien plus le marquis dans ses sentiments que
dans ses intérêts, était pour lui une souffrance de tous les
instants, et elle répandait sur ses dernières années une
mélancolie irritable que rien ne pouvait détruire.
Depuis le rétablissement de sa fortune, le marquis
habitait une de ses terres situées huit lieues de Cour
cenay. Au moment dont nous parlons, il était venu,
comme cela lui arrivait fréquemment, passer quelques
jours chez la vicomtesse de Miremont. La vicomtesse
était fille d'un de ses anciens amis, et il avait pour ello
une affection toute paternelle, laquelle elle répondait
par une confiance sans bornes et un dévoûuient-qui ne
s'était jamais démenti.
Ils sont de retour de cette promenade commencée dans
la joie et finie dans la tristesse, et Valérie vient de de
mander la permission de se retirer; peine a-t-elle quitté
le salon, que la vicomtesse tend affectueusement la main
M. de Branligny, assis côté d'elle dans une altitude
qui trahit sa pénible préoccupation.
Le marquis porta ses lèvres cette main consolatrice,
puis il la laissa échapper comme s'il avait reçu avec indif
férence le témoignage de sympathie qu'on venait de lui
donner avec une sincère effusion de cœar.
Que je regrette de vous avoir proposé celte .prome
nade dit Mme de Mireniont sans se laisser décourager par
le mauvais succès de sa première tentative.
Je l'aurais faite seul demain malin, dit le marquis,
et dans la disposition d'esprit où je me sens, cela eût été
J