N' 1.088. - lTAneeee
Rimanche, 5 Oc<ob» e 1851,
JOUItiVAL D'YPÎÎES ET l»E L'ARROADISSEMEM.
Vires acquirit eundo.
INTERIEUR.
NOUV&L ©Ti£
D'INTOLÉRANCE ÉPISCOPALE.
MADAME DE MIREMONT.
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 30 c. Provinces, 4 francs. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS Annonces, la ligne 1S centimes. Réclames, la ligne 50 centimes. I être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tpres, 4 Octobre.
Depuis que le Collège d Ypres existe, tous les
ans une messe solennelle du S1 Esprit était cé
lébrée le jour de la rentrée des classes.
Celte année il n'a pu en être ainsi.
Dès le 27 Septembre, le prieur des Carmes
déchaussés dont la chapelle touche au Collège
communal et où depuis longtemps était dite
chaque année la messe du S1 Esprit, fit con
naître que cette messe ne pourrait y être célé
brée cette année L'administration communale
écrivit au prieur des Carmes déchaussés pour le
prier de revenir de la décision prise par lui.
Le père prieur répondit qu il avait reçu de
iéréchêDÉrENsE de célébrer une messe du S1
Esprit pour le Collège communal.
L'administration communale se hâta d'écrire
au doyen, chef du clergé eu notre ville, pour lui
demander, s il ne serait pas possible d obtenir
la célébration d'une messe du S1 Esprit dans
telle église et telle heure que bou lui sem
blerait.
M. le doyen crut bon de ne pas répondre par
écritmais il fil un des membres de l'admi
nistration une réponse verbale analogue celle
donnée par le père prieur des Carmes déchaussés.
Ladministration communale, d accord avec
la commission administrative du Collège, décida
alors que les élèves seraient conduits 1 église
et qu'ils assisteraient I une des messes dites
pour la généralité des fidèles.
Celle décision a été exécutée.
Tels sont dans toute leur vérité les faits dont
il a été rendu compte au Conseil en sa dernière
séance.
Ces faits sont très-graves, mais hâtons-nous
de le dire, la responsabilité n en peut retomber
sur l'autorité communale qui a fait tout ce qu'il
était possible de faire pour les piévenir, elle ne
peut retomber ni sur les Carmes déchaussés, ni
sur le doyen qui out reçu des ordres formels et
qui dès lors devaient se soumettre et obéir,
mais celte responsabilité doit remonter plus
haut et elle est d autant plus lourde qu elle pèse
exclusivement sur lévêque de la paît duquel
les ordres sont émanés.
Il paraît, du reste, que l'espèce d'interdit lancé
contre le Collège communal d Ypres n'est pas
une mesure isolée et que tous les établissements
dirigés par l autorilé civile seront frappés. En
effet, une circulaire vient d'être élaborée en
haut lieu, elle interdit la célébration d'une messe
du S1 Esprit pour les collèges érigés ou ériger
oar le gouvernement Littera circulons qud
interdicitur celebralio misses S1' Spintûs pro
collions Gubernto erechs vel eriyendis.
Celte circulaire semble même devoir être in
terprétée dans le sens le plus large, c'est-à-dire
le plus despotique, le plus intolérant, puisqu on
l'applique au Collège communal d Ypres éri^jé
non par le gouvernement, mais par la commune.
ÎNous nous abstenons aujourd hui de toute
réflexion sur cet acte inqualifiable d intolérance
épiscopale.
Les cours du Collège communal se sont ou
verts de nouveau le lr Octobre, et I année scolaire
1851-52 vient de commencer. Le programme
vient d être modifié en pienant pour base celui
du Gouvernement pour les allumées, qui a été
seulement inséré au Moniteur le 28 Septembre
dernier. Comme une réorganisation du collège
aura lieu vers le lr Janvier, conformément la
loi sur l'enseignement moyen, on a jugé inutile
de faire imprimer un programme qui n'aurait
été eu vigueur que pendant trois mois.
Les journaux d'hier soir nous ont appris
qu'un de nos concitoyens venait d élie nommé
chevalier de la légion d honneur M. Mieroo
sous-lieulenantdu corps des Sapeurs-Pompiers,
est décoré par le président de la République
française, pour ses anciens services sous le dra
peau français en Espagne.
Hier soir, la musique des Sapeurs-Pompiers
a été lui donner une sérénade et tous les
membres de ce corps sont allés lui présenter
leurs félicilations. Une brillante illumination,
l occasion de celle nomination, avait attiré beau
coup de promeneurs veis la parlia de la ville
habitée par \1. Mieroo.
Mercredi soir est arrivé en celte ville, M. le
lieuleuanl-général Deys, commandant de la
III.
(SCITt).
En ce moment, le galop d'un cheval retentit sur le pavé
de la cour du château; 11"" de Mireinont se leva vivement
en disant
C'est le domestique du marquis Valérie, allez, je
vous prie, voir ce qu'il apporte.
M™" de Miremont avait deviné juste le cheval qu'elle
venait d'entendre amenait le domestique que M. de Bran-
tigny avait promis de lui envoyer, quelle que fût l'issue
de sa tentative auprès de Sirvan.
Valérie, qui s'était hâtée de courir sa rencontre,
revint bientôt apportant une lettre adressée a son amie.
La vicomtesse l'ouvrit avec précipitation et la parcourut
rapidement des yeux avant de l'avoir lue en entier, elle
avait posé machinalement la main sur le cordon d'une
sonnettç qui se trouvait sa portée et elle le secoua
violemment dès qu'elle eut terminé sa lecture.
Qu'on mette tout de suite deux chevaux au phaclon,
dit-elle au domestique qui se présenta la porte de la salle
de billard.
Il n'est riea arrivé de fâcheuxj'espère demanda
Valérie.
division territoriale des deux Flandres. Cet
officier supérieur a pour mission de passer l'ia-
speclion du bataillon du 12" régiment, qui
actuellement compose toute notre garnison.
En quittant Ypres, >1 »e rendra Nieuport.
Le résultat des élections est diversement apprécié
par les journaux. C'est l'histoire de la bataille de
Toulouse, qui est gagnée ou perdue, d'après le point
vie vue où l'on se place.
Examinons donc avec calme la situation que les
élections oui faite au pays.
Les électeurs étaient consultés l'occasion d'une
question d'impôt que ses adversaires déclaraient
immoraleinjuste et surtout impopulaire.
Une dissolution sur une question politique est
toujours une chose grave; mais une dissolution sur
une question d'impôt est un acte d'une hardiesse
extrême, sans précédent, peut-être, dans le régime
constitutionnel.
Pour réussi r sur une question politique il faut les
sympathies du pays, mais il faut avoir deux fois ces
sympathies, pour réussir lorsqu'on doit compter
non-seulement avec ses adversaires politiques, mais
avec toutes les répugnances qu'un impôt soulève.
Néanmoins, qui a perdu du'tei rain dans la lutte
Est-ce le ministère ou l'opposition Evidemment,
c'est l'opposition.
L'opposition a perdu numériquement, et morale
ment tlle a subi une cruelle défaite.
Dans tout pays il y a certains centres de popula
tions où 1 esprit politique est plus prompt et plus
développé, et dont les manifestations ont une auto
rité que la passion peut nier, mais que le bon sens
est lorcé d'admettre. En Angleterre, c'est le IVett-
Ridinrj de Londres, et quoiqu'un membre élu par
Cardigan ou Moiilgommery ail la même autorité
constitutionnelle que les représentants des premiers
districts, et puisse même avoir une autorité person
nelle bien supérieure, ou n'eu rirait pas moins au nez
de celui qui voudrait donner la même signification
politique aux manifestations de ces divers collèges.
De même, eu Belgique, peut-on sérieusement oppo
ser comme expression de la conscience publique
telle petite bourgade des b la nd res nos grandes ci lés?
Or, les deux métropoles industrielles comme la
métropole commerciale, celle-ci comme la métro
pole politique n'ont eu qu'une voix sur la question
posée; la majorité a même dépassé les prévisions des
deux partis.
Mais, dii-ôn, il y aura partage de voix au sénat,
et dés lors la question est jugée contre le ministère?
Comment des trois branches du pouvoir, deux
Au contraire, mon enfant; car M. de Brantigny me
mande... mais, tenez, lisez plutôt sa lettre pendant que
j'irai mettre mon châle et mon chapeau.
Valérie prit la lettre,'voici ce qu'elle contenait
J'ai scrupuleusement obéi vos ordres, ma chère
vicomtesse, c'est-à-dire que je suis resté calme quoique
je n'aie rien obtenu de Sirvan. Je lui rends cependant
la justice de dire que j'aurais eu mauvaise grâce le
maltraiter, car il s'est montré parfaitement convenable
et je dirai presque respectueux aveemoi. Pendant notre
conversation, qui a duré plus de trois heures, il a été
souvent question de vous, et j'ai cru voir que si cet
homme extraordinaire pouvait subir une influence,
c'était la vôtre. Cette découverte n'a pas peu contribué
ine donner de l'empire sur moi-même, parce que je
me suis dit que je n'avais que ce moyen de donner
votre intervention tout le poids qu'elle peut avoir. J'ai
laissé Sirvan dans de bonnes dispositions, comparati-
veinent ce qu'il était hier soir, et si vous pouviez vous
rendre près de lui ce matin, j'ai l'intime conviction que
n vous en obtiendriez tout ce que je désire. Pour ce qui
est des conditions, je vous laisse toute la latitude ima-
ginable elles me sembleront toujours bonnes si vous
réussissez.
Excusez ce griffonnage et le décousu de mon billet.
Je suis fort troublé, et je vous écris avec un mauvais
crayon, sur' le pommeau de ma selle qui me sert de
table. Adieu je croirais l'aire injure votre amitié si
j insistais sur l'importance que j'attache au se rvice que
je vous demaude. Brantigny.
Du milieu de la bruyère des Fantômes, onze heures
du mutin.
Eli bien que pensez-vous de tout cela demanda
la vicomtesse qui venaililc rentrer dans la salle de billard.
Qu'une négociation dont vous vous mêlez ne saurait
échouer.
Madame de Miremont secoua la téte, et sa physionomie
exprima un sentiment pénible de doute et de décourage
ment.
On vint annoncer que la voiture arrivait au Las du
perron.
Vous voudriez bien m'accompagnerma chère
Valérie reprit Mm° de Miremont comme si elle répondait
au regard suppliant que sa jeune compagne tenait attaché
sur elle.
C'est la vérité, madame.
Cl moi je serais bien heureuse de vous emmener;
mais la présence d'un tiers suffirait pour mécontenter
Sirvan, et vous seriez désolée si cela arrivait par votre
faute.