W 1,976. w Année. Dimanche, 3 Juillet 1353. JOURNAL DTPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Vues acqoiriteundo. Apres, Jtuilict. A Monsieur POI.ÏjKT, curé liocre (Flandre occidentale). LE PREMIER PAS, lense îbNNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 80 c. Provinces,4francs. TSERT10NSAnnonces, }d ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies. Monsieur le Curé, Depuis plusieurs mois, une accusation de calom nie pesait sur nous, vous nous aviez traînés devant cette cour d'assises où ne comparaissent d'ordinaire que des voleurs et des meurtriers alors, semblables ces animaux carnassiers qui hurlent brutalement là vue d'une proie facile saisir, parce qu'elle est prise au piège dressé par un braconnier habile, alors le Propagateur et la Patrie, organes du parti soi- disant catholique, jetaient des cris de joie et chan gent le le Deum. Malgré ces cris de joie, malgré votre accusation, malgré les préventions que l'a malignité et la calom nie faisaient peser sur nous, nous n'avons rien répondu, nous puisions dans notre innocence, dans la bonté de notre cause, dans la confiance que nous inspirait un jury qui, d'après la loi, n'est composé que de laïques, la force de boire jusqu'à la lie et en silence, la coupe d'amertume que vous nous aviez préparée. Aujourd'hui, Monsieur le Curé, la suite d'un verdict de non-culpabilité prononcé a l'unanimité par le jury, la cour a proclamé notre innocence et comme conséquence, l'inanité de votre plainte; aujourd'hui nous sommes forts, Monsieur le Curé, mais ne tremblez pas, rassureZ-vous, vous n'avez pas faire a l'un des vôtres, nous sommes vos adver saires, mais nous sommes libéraux, rassurez-vous donc. Cependant, Monsieur le Curé, vous avez tâché de nous faire du mal et il n'a pas tenu vous qu'il nous en fut fait beaucoup. Et vous nous avez fait du mal, Monsieur le Curé, car par suite de votre dénonciation non fondée, vous nous avez momentanément exposés au mépris qui couvre les calomniateurs, vous nous avez arrachés notre atelier, nous qui vivons de notre industrie et qui ne trouvons pas comme vous des moyens d'ex istence dans la caisse de l'état et le casuel prélevé sur les fidèles, vous nous avez fait du mal, Monsieur le Curé, car nous avons une famille, et en partant pour la cour d'assises, nous avons vu notre iamille chérie verser des larmes bien amères, tout cela, Monsieur le Curé, a été votre oeuvre, l'oeuvre d'un prêtre du bon DlEU Il eut pu, grâces vous, nous arriver pis encore; si nos juges eussent été de votre avis, Monsieur le Curé, nous étions déclarés calomniateurs, jetés en prison, arrachés l'amour de notre épouse, l'affec tion de nos enfants, l'amitié de notre famille, nous étions ruinés, car nous vivons de notre travail, alors (suite et fin.) La comtesse, jeune, belle, tendre et toute lui La comtesse qui sans doute, il l'espérait du moins, s'était logée au rez-de-chaussée. Malgré les images riantes qui accompagnaient cette pensée; le pas lui coûta beaucoup et lui parut bien long, de Paris la frontière de Bohème. Quelle longue et triste histoire que la rela tion de ce voyage mauvais chemins, détestables auberges, rudes cabots dans les ornières, et enfin, pour couronner tant de déboires, de soucis et de secousses, la voiture qui verse et le voyageur dangereusement blessé. Ce serait un malheur partout, mais rien ne saurait peindre l'horreur de cette situation dans un petit village bohémien. Être là, souffrant, malade, brisé, sur un mauvais lit, entouré de figures étranges et suspectes, soigné par un empiriquemoitié médecinmoitié acrobate Cet état se prolongea si longtemps, que Léopold arriva Carlsbad, le jour et l'heure même où la comtesse montait en voiture pour retourner Paris. Ah vous voHà, dit-elle, c'est bien heureux Mais je suis tombé dans un précipice j'ai eu trois eûtes nos pauvres petits enfants eussent été réduits un jour la misère el tout cela, Monsieur le Curé, eut été votre œuvre, l'oeuvre d'un ministre du bon DiEU Si votre entreprise n'a pu aboutir, il faut être juste, si'nous ne sommes pas eri prison, ce n'est pas votre faute, Monsieur le Curé, vous ou vos conseils avaient si bien pris vos mesuresvous n'avez pas eu hâte de déposer plainte contre nous, vous avez su attendre le temps opportunpuis vous avez écrit au ministre de la justice pour le prier de per mettre que suite fut donnée» votre plainte. Vous avez cru sans doute que nous sommes de ceux qui intriguent pour arrêter le liras de la justice et de ceux qui ont peur de franchir le seuil du palais. Ah Monsieur le Curé, vous nous avez jugés d'après vous-même, car vous qui avez porté plainte contre nous, vous n'avez pas osé franchir ce seuil, vous avez lâchement fui, comme l'a dil notre avocat, vous avez peut-être bien fait du reste de ne pas affronter le regard du jury et de la cour, ce regard eut été terrible pour le prêtre qui a mené devant les tribunaux un père de famille innocent. Mais, Monsieur le Curé, rassurez-vous, nous som mes libéraux, nous savons pardonner, d'ailleurs votre position nous fait pitié, vous avez cédé peut- être de mauvais conseils dictés par de détestables passions politiques; vous êtes prêtre, votre rôle mérite nos respects, nous ne chercherons donc pas vous punir, nous venger, nous vous accordons, au contraire, grâce et merci; puissiez-vous trouver grâce aussi devant le tribunal de l'opinion publique, devant vous-même, et surtout devant ce souverain juge qui doit nous juger tous un jour Quoique vous fassiez, Monsieur le Curé, l'opinion publique prononce ses arrêts, dès ce jour elle a prononcé son arrêt sans appel sur le fait même que nous avions reproduit d'après la rumeur publique, que cet arrêt vous soit favorable ou hostile au fond, l'opinion publique et vos amis mêmes déploreront longtemps encore la détermination prise par vous, ministre d'un Dieu de paix, de poursuivre devant la justice humaine un de vos concitoyens, un de vos frères; longtemps encore, quand vous passerez dans nos rues, le public s'arrêtera votre vue et, vous montrant au doigt, se dira voyez-vous là-bas, ce prêtre, c'est M. le curé de Locre, ce curé qui a poursuivi devant les assises, l'éditeur du Progrèt, qui, s'il n'eut été acquitté, eut été jeté en prison, et alors tout le monde se dira longtemps encore c'est bien mal un ministre d'un Dieu de miséricorde de ne pas savoir pardonner Du reste, Monsieur le Curé, l'opinion publique n'est pas seule un tribunal pour vous; tout homme porte en lui-même un juge, sa conscience, et ce juge a pour exécuteur de ses arrêts, pour bourreau, le remords. Votre position, Monsieur le Curé, est terrible devant ce juge et ce bourreau Votre juge vous dira sans cesse: ministre d'un Dieu de bonté infinie, vous n'avez été ni bon ni clément, et votre bourreau vous infligera alors de brûlantes tortures. Quand vous réunirez autour de vous les petits enfants de votre paroisse pour leur apprendre le calhéchisme, quand vous leur enseignerez l'acte de charité, quand vous leur direz un chrétien doit aimer son prochain comme soi-même pour l'a- moùr.de Dieu a vous rougirez, Monsieur le Curé, vous souffrirez,caralors votre juge vous condamnera sans appel et votre bourreau vous demandera en ricanant: Mais vous-même, avez-vous aimé votre prochain Quel sarcasme poignant Quand vous monterez dans la chaire de vérité pour y prêcher le pardon des injures, votre juge et votre bourreau y monteront avec vous, ils seront assis vos côtés et vous ne pourrez supporter leurs reproches, vous, Monsieur le Curé, qui n'avez pas eu la force de nous accorder le pardon d'une injure involontaire. Et quand vous irez offrir le divin sacrifice, qnand le nom du Rédempteur qui,en mourant,implorait le pardon de son père pour ses persécuteurs, quand ce nom se présentera sur vos lèvres, qu'éprouverez-t vous, Monsieur le Curé, vous qui avez écrit la justice humaine, afin que rian ne nous fut pardonné? Enfin, Monsieur le Curé, vous devez le savoir, car vous l'enseignez tous les jours, après la mort vient le jugement, et si Dieu est infiniment bon, il est aussi infiniment juste, que répondrez-vous quand le juge suprême en courroux vous demandera compte, vous, son ministre, de vos actions, de vos actes, que répondrez-vous quand il vous reprochera vos péchés (et le juste pèche sept fois par jour), que répondrez- vous alors, Monsieurle Curé? vous n'au rez rien répondre, car vous ne pourrez pas même vous jeter aux genoux de votre juge, en vous écri ant Seigneur, pardonnez-noue no* offentet, comme noue avont pardonné ceux gui nout ont offentét l Le Progrès. Nous avons pour habitude de nous informer des succès que remportent nos artistes dans les expositions de tableaux des villes de Belgique et l'étranger, et la sympathie que nous portons auxarts, nous engage communiquer au public de notre ville, les comptes-rendus des œuvres enfoncées, et c'est peine si je suis rétabli Vraiment! eh bien, soignez-vous, prenez les eaux; nous nous rever rons Paris. La comtesse fit Léopold un geste d'adieu plein de grâce. Ses chevaux partirent au grand galop. Une heure après, Léopold était sur la route de Paris. Encore un pas, dit-il; encore un. coûte que coûte Un rendez-vous, longtemps sollicite, lui fut accordé. Léopold allait enfin recevoir le prix de tant de soins, de fatigues et de persévérence. La comtesse avait en sa faveur les meilleures intentions du monde; malgré toute son étourderie, elle lui avait assez formellement manifesté ses bons sentiments; s'il n'y avait eu rien de mieux que des protestations, c'était la faute des événemens et non la sienne. La séance commença sous les plus heureux auspices; mais quelques minutes s'étaient peine écoulées, lors qu'un grand bruit se fit entendre la porte. On pouvait distinguer ou deviner que la femme de chambre voulait en vain faire respecter sa consigne. 11 faut vous cacher dit la comtesse Léopold. Et au lieu de lui montrer, comme jadis, la porte de l'appartement, elle lui indiqua la porte d'une armoire, Réduit commode et qui semblait disposé tout exprès pour une pareille hospitalité; une armoire serrer les amans. De là, Léopold entendit le sifflement aigu des reproches; de vives paroles échangées de part et d'autre. Puis on marcha droit l'armoire avec un grand bruit de bottes éperonnées; la clé tourna violemment dans la serrure, la porte s'ouvrit. Monsieur le comte, dit Léopold en sortant de son asile, il ne faut pas trop vous hâter de juger sur les apparences... Pourquoi m'appelez-vous monsieur le comte répondit une voix rude et courroucée. Surmontant sa confusion et sa peur, Léopold leva la tête. Il croyait avoir affaire au mari, il se trouva face face avec un inconnu. Mais qui êtes-vous donc, monsieur, demanda-t-il avec un étonnement qui triomphait de sa vive émotion. Vous êtes bien curieux reprit l'autre... Cependant je veux bien vous dire que le chevalier Victor de L capitaine de lanciers, vous prie de sortir d'ici au plus vite Mais mon cousin, de quel droit?... dit la com tesse qui n'avait pas encore pris la parole. Je vous le dirai quand nous serons seuls, répondit froidement le chevalier. Léopold salua et sortit. Décidément, il en avait assez, ce pas devait être le der nier; mais il raconta l'aventure ses amis qui lui dirent

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Le Progrès (1841-1914) | 1853 | | pagina 1