Chronique politique.
Une queation grave qni oocupé le conseil pendant un grand
nombre de sessions, a été résolue enfin par la législature l'admi
nistration de la rivière l'Yser et du canal de Plasschendaele vers
Dunkerque a été reprise par l'État. Mais cet aete législatif, eu con
sacrant le principe que les grandes voies navigables doivent faire
partie do domaine publie du pays, qui, en retour des avantages
généraux que ces voies proonrent. doit supporter les charges qui y
sont afférentes, a pourtant posé des limites oes obligations, en
exigeant une part contributive des provinces, des communes et des
propriétaires intéressésdans l'exécution des grands travaux
d'amélioration.
La loi du 1" jain 1854. loi issue d'uue discussion laborieuse,
pendant laquelle s'étaient révélés tant de besoins d'amélioration que
toutes les ressources de l'État n'auraieut pu y suffire, s'est natu
rellement ressentie des circonstances au milieu desquelles elle a vu
le jour; en présenoe d'une situation qui menaçait le trésor d'une
aggravation considérable de charges, la loi ne pouvait revêtir ce
caractère de libéralité dont sont empreintes quelques lois antérieu
res. par lesquelles de vastes travaux publies ont été décrétés, pour
rémedirr l'imperfection de certaines astres voies navigalrles et
pourvoir de nouveaux moyens d'écoulement.
La députation permanente mettra sous vos yeux, messieurs, le
dossier de cette affaire qu'elle vous priera de lui renvoyer, en lai
conférant des pouvoirs pour résoudre, de la manière la plus favo
rablement possible aux intérêts de la provinoe, les questions
d'application très-dilficiles qai restent décider. Quoiqu'il arrive
de celles-ci, le résultat que le oonseil a déjà obtenu, fera époque
dans l'bistaire de l'administration de cette prorince, et je me
félicite qu'il m'ait été donné de joindre mes efforts ceux de l'As
semblée et de sa dépatation, pour ramener une disposition législa
tive depuis si longtemps vainement poursuivie.
Nous continuons nos instances auprès du Gouvernement pour
que le port de Nieuport devienne une charge exclusive de l'État.
Cette reprise découle nécessairement des principes qui ont servi de
base la loi du lr janvier. Aussi, espérons nous, que la session pro
chaine de la législature ne se passera pas, sans que la Province
obtienne également cet aote de justice.
La vigoureuse impulsion donnée aux travaux pnblios, n'est qu'un
des éléments nombreux qui contribuent 4 élargir la sphère, déjà si
étendue, des devoirs de l'autorité. Chaque progrès, chaque amélio
ration sociale, pour ainsi dire, amène une nouvelle somme de travail
tous le^degiés de l'échelle administrative; et pourtant de nombreux
fonctionnaires ne sont guères mieux rémunérés que les plus humbles
artisans. D'antres, après avoir consacré leur vie entière la chose
publique, ne sont pas certains de trouver une existence assurée
quaod l'âge les force la retraite. An nombre des premiers sont les
secrétaires communaux. Je dirai, tout-à-l'heure, quels sont les
fonctionnaires dont il conviendrait de mieux assurer l'avenir.
Des voeux se sont fait entendre, diverses reprises, dans cette
enoeinte. pour que la position des secrétaires communaux fut
améliorée, at ces témoignages d'intérêts pour une classe d'agents
dans laquelle il est si nécessaire de recruter des hommes zélés et
capables, ont toujours été accueillis par l'Assemblée, avec la plus
grande faveur.
Un nouveau pas a été fait vers la réalisation de ces vœux, par
lïniliative du fonctionnaire plaoé la tête d'un de nos arrondisse
ments les plus considérables. Ce fonctionnaire a proposé aux com
munes de son ressort l'adoption d'une échelle de traitement
graduée d'après le chiffre de la polulalion. Cette proposition, oonçue
dans le but d'établir autant que possible, une proportion équitable
entre le traitement et le travail du secrétaire, a été adoptée dans le
Flus grand nombre des communes de cet arrondissement. J'ai
intention de soumettre cette mesure aux délibérations de tous
les conseils communaux. Je la crois juste, nécessaire même; et
j espère qu'elle sera d'autant plus généralement accueillie par ses
collègues, que la situation tendue des fiuances communales n'a pas
été perdue de vue par l'auteur de la proposition.
(La suite et fin au prochain m").
Du 9 an 14 Juillet.
Le lord-maire de Londres a convoqué ces jours
passés, un meeting Mansion-Housse, l'effet de
délibérer sur un projet de festival destiné célébrer
l'union de la France et de l'Angleterre, auquel
seraient invités les ministres d'Etat et d'autres
personnages éminents de France.
Ce serait comme une réponse l'accueil cordial
fait, il y a trois ans, au lord-maire et autres députés
de la Cité de Londres, lors de leur voyage en France.
Les ministres, consultés par la commission d'or -
ganisation, ont donné leur approbation la pensée
et l'objet de la manifestation.
Cette tirade achevée, le gros et joyeux Saint-Amant
s'éventa avec la plume de sen feutre. Un auditeur de plus
lui plaisait assez, et l'idée de rencontrer peut-être un
protecteur inconnu dans l'étranger le comblait de joie.
L'orgie et le cabaret étaient les seules classes de ce poète
éraillé, plus connu par un quatrain au Palais-de-justice
que par ses œuvres. L'Italien le considéra d'un air dédai
gneux.
Vous ne répondez pas, mon cher compagnon je
vois bien que le vin ne vous tente pas. C'est dommage,
celui de maitre Philippe est excellent. Un gaillard qui a
la promesse de fournir la eave de M. de La Meilleraye
je vois bien qu'il faut que je vous parle de la jolie
Mariette... Apprenez donc que pour cet objet glorieux...
ce brasier, ce soleil, on met chaque soir le glaive au
poing. Moi-même, je vous le confie, j'en suis férule
dard m'est entré là... ajouta Saint-Amant en touchant
son cœur, et il n'est pas de jour où je ne lui fasse des
vers miracle... Le cabaretier m'adore et je la vois
tout heure... Écoulez plutôt
J'ai vu ses beaux cheveux blonds, charme des regards,
Sous l'ivoire du peigne l'entour d'elle épars,
Représenter au vrai Pactole en sa source
Mais ce qu'il y a de cruel, Monsieur, c'est que c'est
la fois un miroir de beauté et de vertu Je l'aime, oui je
l'aime, malgré le gris de ines cheveux; elle a le sceptre
de inou cœur, mais elle s'en moque En un mot, vous la
verrez, et vous direz ensuite comme moi que c'est là une
fille inexplicable. Je connais Céphise, Amarantlie, Sylvie
Le Time* cependant n'approuve pas ce projet. Il
trouve le moment mal choisi pour se livrer des
réjouissances publiques qui peuvent être si cruel
lement interrompues.
Que serait-ce, dit-il, si, pendant que nos aldermcn et
le lord-maire s'abandonneraient leurs solennels entraî
nements, nous avions publier la nouvelle d'un événe
ment pareil celui de la perle du Tigerou du déplorable
accident qui a eu lieu l'autre jour, dans le golfe de Bothnie?
Tout Français raisonnable qui observe attentivement
la marche de la guerre actuelle et qui est capable d'en
apprécier les éventualités, doit avoir l'esprit tristement
préoccupé. Il ne s'ensuit pas, au reste, que nous ayons le
moindre doutequant au résultat définitif. Unies ensemble,
la France et l'Angleterre ne sauraient reculer dans une
lutte avec le monde entier contre elles. Mais ce qui nous
frappe péniblement, c'est le prix dont il nous faut payer
les victoires les plus complètes, les triomphes les plus
décisifs. Il y a quelque chose de dégoûtant dans les
phrases ronflantes et empâtées d'hommes qui ont dîné,
et dans leurs éloges pour la bravoure avec laquelle ils ne
rivalisent qu'en paroles et le verre la main. Pourquoi
ne pas laisser la guerre suivre son cours Pourquoi ne
pas se décider la poursuivre dignement jusqu'à la fin,
comme il convient des hommes de sens et de cœur, et
ne pas s'en tenir ce que nous avons résolu
Après d'autres considérations du même genre sur
l'inopportunité du banquet projeté, le Time* fait re
marquer tous les inconvénients qui résultent d'un
projet imposé des hommes publics qui ne l'accep
tent que par déférence pour les démarches et les
sollicitations qu'on fait auprès d'eux, afin d'obtenir
leur adhésion, qu'ils n'accordent qu'à regret. L'opi
nion générale elle-même ne sesoumetàceschoses-là
qu'avec répugnance.
a Si tels sont nos embarras, dit le Time* en finis
sant,quels ne sont pas ceuxque doivent éprouver les
personnages distingués de France, qui sont menacés
de ces fâcheuses invitations? Evidemment, ils
n'ont pas choisir. Plus d'un Anglais peut se tenir
l'écart, mais il est bien peu de Français qui, recevant
une invitation, puissent refuser de répondre l'ap
pel d'un magistrat municipal anglais; ils crain
draient qu'on ne leur attribuât des sentiments de
froideur ou d'hostilité envers la nation anglaise,
En parlaut de ce projet de festival, la Gazette de
Francequi conserve toujours le préjugé anti-na-
glais, dit que le cri de guerre et le cri de paix de
l'Angleterre, qutèoo soit après une bataille ou avant
un dîner, est toujours: Faites avancer les cotons! >i
Elle fait remarquerque dans le meeting de iVIansion-
House, un M. Tite, qui n'a pas perdu sa journée,
dit-elle, en énumérant les avantages de l'invita
tion, n'a pas oublié celui qui consiste montrer aux
Français les résultats de la liberté du commerce dont
on jouit en Angleterre, et préparer l'union com
merciale, en même temps que l'uniou politique des
deux pays.
Le Moniteur fronçai* publie une lettre de Berlin,
où il est dit que les dernières informations de Sainl-
Pélersbourg indiquent une froideur marquée envers
lès puissances allemandes. C'est facile croire; il
doit même y avoir autre chose que de la froideur.
Uu peu décoléré et même beaucoup serait parfaite
ment admissible.
Le même journal ajoute qu'à Vienne et Berlin
on considère le mouvement rétrograde des Russes
comme un changement de front, hostile l'Alle
magne.
et Macette, elles ne sont pas dignes de lui embrasser les
pieds. Et cependant c'est une simple cabaretière Le
cavalier Marin brûlerait pour elle ses sonnets, son maître
ses futailles, Paris son Pont-Neuf, et vous, par ma foi,
vous vous noieriez
L'Italien se prit sourire. La bonne humeur de Saint-
Amant l'avait gagné, c'était aussi la première fois qu'il
entendait parler du cabaret de la Pomme-de-Pin. La
résolution extrême qu'il avait prise cédait peu peu, non
qu'il y renonçât, mais il voulait peut-être jouer celte fois
son dernier coup de de contre le hasard. Le passcux
attachait alors sur Saint-Amant un regard épais, ébloui.
Le babil bouffon du poète le plongeait, son insu, dans
le même étonnement naïf que lui eussent causé Tabarin
ou Gautier Garguille.
Bacchus a rarement trahi Saint-Amant reprit l'é
trange poète allons, mon gentilhomme, prenez-mai
pour votre guide. Je suis un homme de plume, vous un
César, la cape et l'épée vont bien ensemble Encore un
coup, ne vous noyez qu'après avoir vu Mariette. En
attendant, voguonsjusque là l'aide de ce brave passeux.
Ça, mon laquais, Mardochée est déjà loin...
Et comme l'étranger semblait encore hésiter
Ce n'est pas, reprit le poète, un (ils de la Gascogne
que j'inviterais, eroycz-le. Mais votre teint j'ai vu tout
de suite que j'avais faire un enfant d'Espagne ou
d'Italie... Or, ces deux pays sont les deux seuls créanciers
que je reconnaisse. Nous autres poètes, nous leur em
pruntons beaucoup L'Inconnu s'inclina et salua Saint-
Hier, suivant la même feuille, l'armée autrichienne
se serait mise en mouvement le 3, pour entrer dans
la Valachie. Une dépêche de Vienne en date du 4,
revient la première version, d'après laquelle l'en
trée rie sera ordonnée qu'après la réponse attendue
de Saint-Pétersbourg.
A tout cela il faut ajouter des bruits qui courent
Vienne et Berlin, d'après lesquels l'empereur de
Russie consentirait négocier. On dit même les con
ditions qu'il y met; mais ces bruits sont si vagues
et les conditions paraissent si singulières et si peu
admissibles, que ce n'est pas la peine d'en parler.
A Berlin, suivant des nouvelles du 4» on n'atlen-
dait la réponse du Tzar que le 8.
L'escadre anglo-française, destinée bloquer les
ports russes de la Mer-Blanche, est arrivée, le 3o
juin, Hammerfest, port norvvégien situé 23 kilo
mètres du cap nord, et le plus septentrional de
l'Europe. Cette escadre se compose de 19 navires,
dont une frégate et 9 corvettes anglaises, et 9 cor
vettes françaises.
Conseil provincial de la Flandre occidentale.
Session de 1854. Séance du 8 juillet.
Présidence de M. le baron Ch. Pecsteen.
Il est donné lecture de la demande de l'adminis
tration communale de Langhemarcktendant
obtenir l'autorisation de fixer au 28 août, la foire
annuelle aux chevaux qui depuis un temps immé
morial se tient dans cette commune le 5 avril, et
d'y annexer un marché aux bestiaux.
M. de Lesclute expose au conseil, que dans le
temps, l'assemblée a pris une décision en. vertu de
laquelle les pièces adresseés au conseil et qui ne se
raient pas parvenuesau greffe de la province avant le
ir juin de chaque année, seraient envoyées la dé-
putation pour être reproduites l'année suivante. Il
propose que l'on suive cette marche eu ce qui con
cerne ia demande de Langhemarck.
Cette proposition est appuyée.
M. le baron Pecsteen fait remarquer que la déci
sion laquelle M. de Lesclusefait allusion, n'est pas
aussi absolue que l'on pourrait le croire, qu'elle
admet des exceptions dont le conseil a faire l'ap
préciation.
M. Vramhout fait observer que dans l'espèce, il
s'agit d'une demande qui n'a pas encore été soumise
une pari nslrucl ion quelconque; qu'il est convenable
que la commission en soit saisie, laquelle, vu l'ab
sence de tout rapport surcetteaffaire, proposera sans
doute, le renvoi la députation, afin qu'après parin-
struction ce collège fasse un rapport en i855.
M. Roel* dit que la demande dont il s'agit, se
rattache une question dont la 2" commission se
trouve saisie en ce moment et qu'il lui semble que
dès lors, il y aurait lieu de joindre la nouvelle
demande au dossier principal.
M. Vramhout répondant M. de Lescluze, fait
observer que la décision invoquée par l'honorable
conseiller n'a pas la portée qu'ou veut bien lui
attribuer. La plupart des affaires dont le conseil est
saisi n'ont été complétées qu'après le ir juin dr,
queiquelques-unes même n'ont été envoyées Bru
ges, pour être soumises aux délibérations de l'as
semblée, que postérieurement cette époque. D'ail
leurs, il doit être généralement reconnu que la
décision dont il s'agit, est tombée en désuétude.
Ainant d'un air railleur.
Eli bien vous êtes décidé A découvrir par
tous les moyens ce que je cherche, reprit l'Italien en
attachant un regard fixe sur maître Gérard. Peut-être
m'instruirai-je la Taverne de la Pomme-de-Pin.
Maître Caron poursuivit Saint-Amant en s'adressant au
passcux, songe bien mener ta barque Tu nous descen
dras, ce gentilhomme et moi, au pont Marie... Le cabaret
de maître Philippe fait l'angle du quai des Ormes. Suffit,
dit Gérard, ce n'est pas d'aujourd'hui que je connais la
Pomme-da-Pin. Seulement mon maître, ajouta voix
basse le passeux l'Italien, ayez en ce lieu la bouche
close, observez-vous-y, c'est essentiel.
La barque fendit la Seine, et atteignit vite les arches
noires du pont Marie...
Le poète et l'inconnu sautèrent terre; droite, devant
eux, brillait un grand fallot retenu au mur par un bras
de bois peint en rouge.
C'était l'enseigne du cabaret de la Pomme-de-Pin.
Comme ils abordaient ce seuil renommé l'Italien et son
compagnon entrevirent dans l'ombre un cavalier de
moyenne taille tnuché jusqu'aux yeux dans sa cape; il
s'arrêta devant une petite porte basse, tira une clé de la
poche de son pourpoint, et se glissa prestement dans
l'allée de maitre Philippe Gruyn.
Bravo murmura Saint-Amant, voilà quelque bache
lier qui fait son siège Avec Mariette, le cabaret ne doit
point chômer. Entrons.
(La suite au prochain n").