JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M* 1,532. 15" Année.
Dimanche, 6 Janvier 1856.
Vires acquiriteundo.
ÏÏKE FATALITÉ.
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Ypbes, 5 Janvier.
De graves incidents se sont passes ces jours
derniers l'Université de Gand UfK professeur
avait jugé convenable de blâmer le concordat
conclu par l'Autriche et de raéttre en évidence
l'empiétement de l'ultramontanisme sur le pou
voir laïc. De là grande fumeur l'évêché, et
pour jouer un joli tour ce professeur auda
cieux, quatre pieux chevaliers de S'Vincent
de Patil ont dénoncé sort enseignement comme
irréligieux et acatholique. 153 élèves 6nt pro
testé contre celte dénonciation, et le professeur
son tour, tout: en précisant carrément les
tendances de son enseignement, a démenti cer
taines allégations d'accord avec l'unanimité des
élèves, moins les chevaliers de S4 Vincent^ de
Paul.
Mais celte affaire a pris depuis de plus larges
proportions. Père d'Anelhan a interpellé le mi
nistre de l'intérieur sur ce qui a eu lieu Gand
et a démasqué la pensée de l'épiscopat en ma
tière d'enseignement public. L'évêque Van
Bomrael voulait réduire l'état au rôle de cais
sier et les mêmes idées ont été' nettement déve
loppées par le sénateur de Tbielt.
La loi sqr l'instruction primaire donne ay
prêtre un droit de censure sur l'enseignement
du premier degré. La Convention d'Anvers
comble la lacune de la loi sur l'enseignement
moyen et donne au prêtre, dans le bureau ad
ministratif et eu classe, le rôle prépondérant
qui lui revient de droit divin. Au gouverne
ment, dit le révérend père d'Anethan, d'en faire
autant pour l'enseignement supérieur, et la
Belgique bénira la férule cléricale, afin de consta
ter que la Constitution de 1830 n'est plus qu'un
yain mot. Le révérend père De Decker, initié
au secret de la comédie, est venu se frapper la
poitrine en plein Sériai, pour dire qu'il se lais
serait aller aux inspirations de sa conscience.
Allons, avec des saints de cette force, la Bel
gique-ne peut manquer de voguer bientôt
pleines voiles dans les eatix d'urie réaction ul-
tramontaine, qui nous laissera assez de liberté
pour boire de l'eau de la Salélte.
Nous reproduisons un article du Journal de
Liège, sur la querelle épiscopiale (synonime
nailâ'iJir» rîir>; J tî,
(suite.)
Le comte Piranesc serra les mains de Rosa Raima, et
les mouilla de larmes. Il se releva pour parler, et ce qu'il
allait dire lui coûtait tant d'efforts surnaturels, qu'il ne
pût trouver une tournure convenable* mais la comtesse
osa remarquer en elle-même, que ce trouble provenait
d un sentiment plus vif que l'amitié. Quelques scènes
antérieures, toujours présentes la mémoire de la belle
comtesse, 1 avaient d'ailleurs assez prédisposée croire
qu elle interprétait, celte fois, sa juste valeur, le silence
expressif et la reserve du jeune Romain. Aussi, pour le
mettre a l'aise et l'abandonner ses réflexions, elle prit
un prétexte et le quitta sans ajouter un mot do plus. C'est
alors que Giaropolo, isolé dans sa villa, aurait eu besoin
d'un ami pour lui faire une singulière confidence, voir de
quel œil elle serait reçue, et la juger ainsi au point de vue
d.un indifférent malheureusement, Emile Dutrelz était
bien loin. Une lettre du jeune Français, reçue la veille,
se terminait par ces mots désespérants Le dernier décret
du sénat, qui n'est pas le sénat romain, appelle aux
urmes tons les Français de 18 d 60 ans. J'entre avec
d'allemand), suscitée M. le professeur Bras
seur, et il est bien bon de s'étonner, que sem
blables faits s'accomplissent au nom de la liberté
de penser et d'écrire - Quand les Jésuites de robe
longue et courte invoquent la libertéc'est
Jeur profit exclusif et au dépens des dupes qui
ont la bonhomie de leur faire la courte échelle.
Voici cet article remarquable
Nos lecteurs ont pu lire hier les étranges inter
pellations que M. d'Anelhan a adressées M. le mi
nistre de l'intérieur, dans la séance du Sénat du 79
décembre.
Le sénateur de Thielt n'a pas craint de provoquer
en quelque sorte la disgrâce d'un honorable profes
seur de l'université de Gand qui s'est permis, dans
sa chaire, d'apprécier un fait historique unjautre
point de vue que celui du père Loriquet.
Les pârôles de M. d'Anethan sont un véritable
chef-dœuvre de perfidie. Il commence d'abord par
une insinuation malveillante envers l'université de
Gand, et parle de griefs antérieurs qui lui seraient
imputables sous le rapport de l'orthodoxie. Puis,
s'attaquant personnellemnt M. Brasseur, il réclame
une enquête en attendant qu'il y ait décret d'accu
sation, et cette mesure intimidante ne s'étaye que
du témoignage de quatre élèves, qui sont démentis
par l'unanimité de leurs condisciples. Au surplus,
il eSt_bon prince, le sénateur il nejaréjuge pas le
résultat de l'enquête; il désire même que l'inculpé
puisse expliquer d'une manière satisfaisante la let
tre qu'il a fait insérer dans les journaux-.
Notons, eu passant, que d'après cette lettre il ne
s'agit plus de savoir si M. Brasseur aurait nié la di
vinité du Christ,calomnie contre laquelle il a pro
testé; mais il importe de réprimer l'audace et la
ficence dont il aurait fait preuve, en tirant de cer
tains faits et événements des conséquences opposées
aux vues et aux doctrines de l'épiscopat.
L'enseignement est libre en Belgique.
pour le clergé; mais celui qui est donné par l'État
doit subir, au nom des pères de famille, le contrôle1
ecclésiastique, ce qui impliquté l'impérieuse néces
sité de certificats de moralité et de religion, comme
aussi le droit de censure des livres servant l'en
seignement. Comment en douter, depuis que la
convention d'Anvers, comme le proclame haute
ment M. d'Anethan, est venue combler les lacunes
delaloide i85o! Pour faire passer cette convention
on prétendait qu'elle n'était que l'application de la
loi... Aujourd'hui le tour est fait, on jette le mas
que, et c'est une lacune qu'on a heureusement com
blée
l'épaulette d'officier dans les chasseurs de la garde.
Quand nous reverrons-nousDieu seul le sait! Adieu.
Emile allait jouer son rôle obscur dans le dénoûment
sublime du drame impérial. Le comte Piranese n'avait
pas d'autre ami, et il se vit contraint de ne prendre con
seil qtle de lui-même dans la plus étrange circonstance
de sa vie. 11 y avait encore la villa trop de fracas et
d'émotion autour de lui pour qu'il put réfléfchir avec
calme et arriver une détermination par une longue
pensée recueillie. Aussi, après avoir parlé seulement sa
mère de quelques affaires d'intérêt qui l'attendaient
Rome, il quitta la campagnol, et se réfugia dans son palais
désert. La solitude est la sourde conseillère des passions.
Le jeune homme qui s'environhe de silence et d'isole
ment pour penser une femme, la retrouve partout, et
mille fois plus dangereuse éloignée que présente. Le
comte Piranese se refusait l'idée d'aimer Rosa Balma,
lui qui était arrivé de l'armée tout brûlé d'amour, tout
fiévreux de désirs pourCécilia grandie. Parfois il croyait
commettre une action déshonnête en abandonnant ainsi
une jeune fille, coupable seulement d'un malheur qui
avait flétri sa beauté; ensuite, il s'accordait lui-même
un pardon facile, en songeant que ce bizarre amour, voué
l'avenir d'une belle enfant, avait été un secret pour elle
Sous le prétexte qu'un professeur se sera montré
hostile au culte de la majorité de ses élèves, il sera
dénoncé par quatre d'entre eux tous les autres au
ront beau protester contre le caractère mensonger
de cette dénonciation, il n'en sera pas moins traduit
la barre, et, comme l'épiscopat est seul Compétent
pour trancher les questions d'orthodoxie, c'est lu»
qui prononcera l'arrêt.
Voilà où nous.en sommes. Ajoutons que M. d'A
nethan consent, pour le moment, spus notre régime
constitutionnel qui proclame la liberté et l'égalité
des cultesne pas invoquer l'appui de sa thèse,
un décret du 17. mars 1808, rendu sous l'empire
d'une religion de l'Etat,et qui statuait que l'Univer-
sité de France, prendrait pour base dé son enseigne
ment les préceptes du cafholîcisrtie
Mais qu'aura répondu M. le ministre de l'intéri
eur aux prétentions monstrueuses du sénateur de
Thiôlt? I.ui'aura-.tril fait comprendre que sa théb-
rie est oppressive, qu'elle- supprime la liberté de
conscience? Lui, chef de l'instruction publique,
aura-t-ildit un mot en faveur du professeur violem
ment dénoncé la tribune parlementaire? Non, M.
de Decker se lève pour dire tout simplement qu'il
puisera dans les inspirations de sa conscience les rè
gles suivre en présence des faits graves dont l'ins
truction se poursuit
Conclusion if n'y aura plus désormais en Belgi
que d'autre enseignementque celui qui seraaulorisé
par la cour de Rome. La philosophie et l'histoire
seront travesties pbur complaire au clergé. Si l'on
apprécie le moyen-âge, la lutte de la papauté con
tre ÉEmpire, il faut, sous peine de destitution, que
l'on se prononce pour le Pape contre l'Empereur.
On ne peut ni discuter, ni contester les doctrines de
Grégoire VII, que Rome cherche faire prévaloir
dès qu'elle le peut, ainsi que le prouvent les con
cordats faits avec l'Espagne et avec l'Autriche.
On ne peut reconnaître les bienfaits de la réforme
du XVI" siècle et applaudir au principe du libre
examen, qui est la base même de nos institutions,
comme le déclare M. de Gerlache lui-même, sans
s'exposer être expulsé de sa chaire professorale!
Et tout cela va s'accomplir au nom de la liberté
des cultes et de la liberté de penser et d'écrire.
Dans les deux Flandres, on n'entend que des
plaintes et des réclamations contre les change
ments introduits dans les heures de départs et
d'arrivées, des convois du chemin de fer de
l'État, et, comme conséquence, des reproches
l'adresse des sociétés concessionnaires qui sup-
l
et pour tout le monde, et qu'ainsi le scrupule le plus
exigeant ne pouvait demander' réparation d'un tort qui
n'existait pas. De Cécilia, hélas! jamais déshéritée de
toute adoration, il remontait l'éblouissante image de la
mère; souvent, par une de ces illusions,qu'on aime se
créer dans une faute, il se persuadait que la comtesse
Rosa avait toujours été l'unique objet de sa passion, et
que cet impossible amour, qu'il croyait avoir mis sur la
tête d'un enfant, avait été excité en lui par une divinité
si majestueuse, qu'elle obligeait l'adorateur détourner
les veux et chercher un objet terrestre dans le voisinage
de 'son piédestal. Et quand il se l'appelait le bal de la
villa, où des bouches calomnieuses avaient osé flétrir
l'honneur de cette femme, cause de lui, ob! alors, il
n'hésitait pas donner une réparation éclatante que le
devoir lui eût dictée défaut d'amour; il se disposait
offrir sa main celle qui avait été soupçonnée dans sa
vertu, en s'applaudissant d'agir en honnête homme bien
plus qu'en homme passionné. Celte résolutiod prise, il
sortait de son palais pour courir la villa, et se mettre
aux pieds de la comtesse, puis il s'arrêtait aux portes de
Rome, épouvanté l'idée de ce mariage improvisé, de
cette union indissoluble qui brisait un avenir de gloire,
de voyages, de plaisirs, d'ambition, qui l'enchaînait