JOURNAL DTPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
FEUILLETON DU PROGRÈS.
Théâtre d'Y près.
IVe 1,539* 15" Année.
JTcudl, 31 Janvier 1856.
..Vires acquirit eundo.
ABONNEMENTS- Yfnes (frartcd), par trimestre, 3 francs 50Provinces,4francs. Le PKdèrtês paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS Annonces, la ligne i,15 centimes. Réclames, la ligne 50 centimes. être adresse l'éditeur, Rue ah Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
ïpres, 30 Janvier.
i'v' iifjî-:» ni. t v.:ti t.»i
Souvent il nous est arrivé de constater des
points de contact entre les doctrines politiques
des dàlholiqnès pointus et des socialistes. Une
polémique récente laquelle viennent de pren
dre part tous les membres ecclésiastiques sur
vivants du Congrès, vient d'en fournir une nou
velle preuve.
A l'oçcasi'on de l'incident de l'Université de
Gand, la hiérarchie catholique s'est a visée de sou
lever la prétention de faire donner l'enseignement
de l'État dans le sens dé la croyance de la majo
rité.C'est le père D'Anéthan qui a développé celte
belle thèse exhumée du moyen-âge, tant il est
vrai que sur la pente réactionnaire, le parti
clérical ira jusqu'à exiger le rétablissement des
plus odieux privilèges, usurpés pendant l'anar
chie du moyen-âge.
Par cette nouvelle prétention, que devien
nent sôus le goiivernemeht constitutionnel,
fondé pour la protection de toules les croyan
ces, les droits de la miporité? Ne serait-il pas
plus simple, puisque l'ordre politique est séparé
de fait et de droit du domaine spirituel, que
l'État se borne donriter l'enseignement philo
sophique, littéraire et scientifique et abandonne
l'instruction religieuse. aux ministres du culte
et aux soins de la famille
Du temps du Congrès national, figuraient
parmi les illuminés de la liberté en tout et pour
tau», un certain nombre d'ecclésiastiques qui
n'étaient pas des moins ardents pour doter la
Belgique de toutes sortes de libertés La liberté
d'enseignement et d'association, libertés essen
tiellement catholiques, de l'avis de M De Ger-
lache, étaient surtout leur vase de prédilection.
La liberté des cultes avait tellement leurs sym
pathies, qu'ils ne supposaient même pas qu'il
pût être commis des délits l'occasion de l'u
sage de cette liberté. Un quart de siècle nous
Représentatif»)» donnée par MM. les sons-
officiers du 2" régiment de ligue, an profit
des pauvres. ,jii
Éira bien qui rira le derniermot pro
fond et qui chaque jour trouve une application
Douvelle! .Quand Jean-Jacques Rousseau pu
blia ses fameuses lettres sur les spectacles, les
cagots rirent dans leur barbe et conçurent la
douce es.pérance de voir bientôt la scène dé
serte; mais quelque temps de là, on joua
le» Philosophepièce salyrique où l'on vit ap
paraître un homme presque nu, marchant
quatre pattes et venant, au milieu du théâtre,
brouter une laitue la façon des herbivores.
Celait une charge outrée contre l'auteur des
lettres qui, dans son Discour» sur lorigine de
l'inégalité parmi les hommes, avait soutenu la
supériorité de l'étal sauvage sur I étal civilisé,
et prouvé scientifiquement que l'homme est
conformé pour marcher quatre pattes et non
sur ses pieds seulement. Ce fut le tour du pu
blic de rire et il rit longtemps, parce qu'il rit
le dernier. Les dames surtout s'en donnèrent
sépare de cette époque, et depuis', les honora
bles membres tonsurés du Congrès national ont
fait bien du chemin Tous ont repris la plume
pour déclarer que leurs votes en faveur des
articles de la Constitution, concernant te* Belges
et leurs droits, n'ont pas la signification qu'on
leur prête communément et qu'if faut COnsi-
défei- la liberté de conscience non comme un
droit absolu et naturel, mais comme un simple
droit politique. Ainsi MM. les catholiques poin
tus n'admettent la liberté de conscience que
comme un fait, qu'ils aboliraient^ s'ils étaient les
plus forts, et traiteraient comme hérétiques et
rôtiraient comme tels, ceux qui le revendique
raient, A la bonne heure! Voilà ce que parler
veut dire, et pour mieux expliquer son idée,
l'abbé De Haerne, un des treixp républicains du
Congrès, invoque le fanifeux article 131, qui
prévoit la révision de la Constitution. Voici
comme, MM. les cléricaux raisonnent tous les
droits des Belges, et non pas de l'homme,
comme fait observer naïvement l'honorable
abbé De Haerne, (il paraît qu'il y a doute sur
la question de savoir si les Belges sont des
hommes,) sont inscrits dans la Constitution,
qui peut être révisée par conséquent, ce ne
sont pas des droits naturels et absolus, mais
politiques sujets révision.
Dans le temps, on se rappellera le rôle joué
par le fameux article 131 de la Constitution
dans la petite église républicaine. Alors aussi les
quelques démocrates juraient toute la Consti
tution mais en faisant remarquer qu'en vertu
de l'art. 131, on pouvait la renverser. MM. les
rétrogrades suivent les traces des républicains
et donnent, par leur conduite, raison aux socia
listes, qui ne veulent pas reconnaître le droit de
propriété. On a pu croire que l'homme avait le
droit absolu et naturel aux fruits de son labeur.
Mais d'après la doctrine catholique et les res
trictions mentales aidant, l'article 131, admel-
cœurrjoie elles avaient conçu une haine vio
lente pour ce malotru de philosophe, qui pensa
les priver de spectacles et ramener le beau
sexe aux temps fortunés, où notre mère Ève
n'avait pour toute parure qu'une feuille de ba
nanier.
Il y a quelque temps, notre bonne terre de
Flandre vît surgir d'autres philosophes qui,
avec moins d'esprit que n'en avait Jean-Jacques,
s'avisèrent de ressusciter ses vieux arguments
contre les spectacles et voilà qu'aussitôt les
théâtres se rouvrirent. A Menin, par les soins
de quelques amateurs qualifiés de loups, dans
un sermon du Massillon de l'endroit Ypres
et Courtrai, par l'initiative de l'armée, tou
jours prêle concourir aux œuvres d'agrément
et de charité; l'attrait du fruit défendu s'ajou-
tanl au plaisir de la chose, on rit beaucoup
dans ces trois villes et on eut la satisfaction de
rire le dernier. Ainsi, malgré les sermons et
cause des sermons peut-être, Thalie triomphe
et la charité non-ecclésiastique n'en gémit point.
Dimanche encore, les loups d'Ypres, dans
une représentation des plus attrayantes, ont fait
rire le public, tout en lui prenant doucement
dans la poche, quelques centaines de francs,
destinés au soulagement des familles pauvres,
tant la révision, on peut supprimer la propriété
comme là liberté de conscience et toutes les
autres libertés, que la loi fondamentale n'a ga
ranties. qu'aussi longtemps qiïé catholiques et
socialistes seront dans l'impuissance de les abro
ger, ce qiïi n'aura jamais lieu, il faut l'espérer,
pour le bonheur de l'humanité.
On nous communique Un relevé delà recette
faite la représentation'donnée, au profit des
pauvres, par MM. les sous-ôfficiers du 2a rég?-l
ment de ligne. On a distribué dés cartes pour
une somme de 412 fr. et l'on doit y ajouter celhJ
de 20 fr., payée par la caissecombiunale, pour
faire face au prix du loyer de la salle quand
la-représentation est donnée aû bénéfice des
indigents; soit donc un total de 4321 fr. Léà
dépenses s'élèvent une sotnme totale dé
fr. 1136-43 elles consistent en indemnité pàyée
au machiniste, en frais d'éclairage et de châ&fii
fage, d'achats et de changement de costumes,
en payements des impressions d'affiches,1 ef'dtl
droit dé location dé la sallé, dont l'équivalent a
été renseigné en recette. Il reste donc un prdb
duit net de fr. 245-57.
v
C'est un beau don faire aux indigents. Il
arrive assez rarement qu'on puisse affecter uu
produit net aussi considérable secourir des
malheureul, la liquidation de fêtes philan
thropiques, et même ceux qui n'ont que le
mol de charité la bouche, distribuent assez
rarement des aumônes aussi importantes. Nous
devons dire aussi, que l'honneur en revient,
pour une .bonne part, M. le lieutenant adju
dant-major Fabra, qui a su distribuer, avec un
tact parfait, les rôles et surveiller-tous les détails
de cette soirée, avec un zèle dont tous, pauvres,
l inlention desquels cette représentation a été
donnée, et auditeurs, qui ont passé une agréa
ble soirée, doivent lut savoir gré.
et ces familles, désolation n'ont pas trouvé
le pain donné par leurs frères les soldats, moins
bon que celui de la société de S4 Vincent de
Paul
La représentation était annoncée pour six
heures; les portes de la salle ne dêvaient s'ou
vrir qu'à cinq heures et demie, et déjà avant
le moment fixé pour l'ouverture du bureau, la
faille se portait vers le théâtre et la salle était
garnie dè spectateurs et spectatrices qui, dans
leur impatience, auraient bien voulu ce jour-là
donner au Temps des ailes plus rapides. Uq
petit journal de cette ville, connu par l'élégante
clarté de ses articles de fond et l'urbanité ex
quise de sa polémique, avait engagé ses ouailles
ne point se laisser tenter par les gaudrioles
ide MM. les sous-officiers, qu'il accuse défaire
des réclames philanthropiques(bonnes récla
mes, ma foi qui apportent trois quatre cents
francs aux pauvres et du plaisir aux habitants
aisés 1) Eh bien malgré les vertueuses re'corh-
mandations du pudibond Propagateur, là salle
était bien remplie, le parterre accusait dés dis
positions joviales et les facés de Carêmé bril
laient par leur absence. Nous félicitons vivement
notre honorable confrère du succès de son 'élo
quence et du triomphe inespéré de sa doctrine.