JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. LE MARKGRAVE DES CLAIRES. H" 1,621. 16" Année. Jfeudi, 13 novembre 1850. Vires acquirit sunda. ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. —Provinces, 4 francs. INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies. ïpbes, 13 Novembre. Souvent nous avons signalé nos enragés mo dérés comme des révolutionnaires de la pire es pèce, des anarchistes qui se livreraient tous les excès. Ou criait l'exagération; on ne pouvait supposer nos fanatiques cléricaux capables^de semblable déportement. II y a cependant beau coup parier qu'ils y viendront avec des évêques de cape et d'épée comme ceux qui ne font pas l'ornement des deux Flandres et qui menacent directement la Nation d'un appela la force, si elle ne se laisse pas abêtir sous le joug épiscopal. La Patrieorgane officiel de l'évêque de Bru ges, le plus remuant et aussi le plus hautain de nos prélats, dans son n° 263, du Samedi, lr Novembre 1836, publie un article qui doit être considéré comme le manifeste du parti clérical outrance. Après avoir dit que la guerre contre l'église est le mol d'ordre de la presse libérale et lancé énormément d'injures l'adresse du libéralisme, ce pieux journal faif de l'histoire, comme les jésuites, et passe sous silence, la couardise de ses patrons en 1848, qui alors se gardaient bien de revendiquer la moindre des choses. Elle donne un coup de sabot béni au ministère conciliateur perpétuel et trouve que, dans une position aussi tranchée, la neutralité la conciliationl'hésitation ne sont plus de saisonne sont plus possibles. On parle sanscesse de la Constitution, continue la Patrie, de l'attachement la Constitutiondes grands principes de la Constitution, des libertés qu'elle garantit, des droits qu'elle consacre. Fort bien! que l'on porte hardiment sur ce terrain la lutte qui s'engage, et que l'on pose nettement au point de vue constitutionnel les graves questions qui s'agitent en ce moment. Nul n'est plus intéressé que nous savoir comment les libertés constitutionnelles doi vent être entendues et pratiquées. Il s'agit pour nous desavoir nettement, catégoriquement, 9i la Constitu tion belge est une arme forgée au service exclusif du rationalisme; il s'agit de savoir si cette charte,qui est notre œuvre,doit être invoquée contre les plussain- 11. lucy-haï a la flaque-baru. (suite.) Les rames frappèrent alors activement la surface du Broeklandt, et l'on ne tarda pas apercevoir sur l'onde étineelante, le profil sombre d'une barque qui gfissait en avant avec des mouvements de serpent. Il fallait que ce lui qui la conduisait eût une bien grande force dans le poignet, et une bien grande activité dans l'exercice des rames, car la barque avançait avec une rapidité surnatu relle. En quelques secondes, elle franchit une distance assez considérable, et vint mourir dans les roseaux de la rive. On vit alors un petit homme maigre ctchétifse dresser au milieu de la barque, et croiser les bras sur sa poitrine: c'était Jéroboam. Jamais la rêveuse imagination des poêles du Nord n'inventa de personnage plus fantas tique. L'ensemble de cet être chélif avait une couleur de clair de lune,et vert-d'cau. Ses membres, grêles et angu leux, flottaient dans de larges vêtements sans forme ar rêtée et de couleur indécise. Ses' yeux étaient de ce gris-verdâtre qu'on est convenu d'appeler bleu, je ne sais trop pourquoi. Deux lèvres décolorées s'ouvraient tous son nez large et épaté comme celui de la lune, et ses joues creuses avaient dans leur pâleur quelque chose de vert et de blafard. Des cheveux d'un blond pâle en cadraient cette bizarre figure,dont le front était étrange ment couronné de roseaux et de fleurs de nymphéa. Tel était Jéroboam. Son caractère, quoique fantastique el tes, les plus inaliénables de toutes les libertés, la liberté de l'Église juger les doctrines, la liberté des pasteurs d'élever leur voix cort tre l'erreur, la liberté des catholiques de ne point concourir de Ieurs(écus fonder un enseignement que leur foi désavoue, la liberté du père de famille chrétien de ne point en voyer son fils des écoles de blasphème. Voilà la question, el il faudra qu'elle se résolve La presse libérale a beau donner le change, a beau invectiver contre l'intolérance des évêques, contre l'inquisition, contre l'obscurantisme, et tous les épouvantails de l'espèce, nous en appelons nous la constitution, la constitution entendue dans ses véritables principes, h la constitution pratiquée dans l'esprit qui animait ses auteurs. Toutes les in ventions de la perfidie et de la haine, toutes les invectives que nous entendons résonner autour de nous, toutes ces clameurs qui peuvent étourdir un instant, tout cela ne décide rien, tout cela ne prouve rien, si ce n'est ce redoublement de rage que nous signalions tout l'heure,cette reprise plusénergique des vieilles hoâlilités. Mais si, comme nos adversai res le prétendent, comme ils nous le répètent sans cesse, les droits constitutionnels sont ici en cause et le sont dans le «eus qu'ils indiquent, nous osons le dire, l'avenir de la Constitution elle-même est en jeu, et de gré ou de force, NOUS SERONS PLACÉS DANS UN TEMPS PEU ÉLOIGNÉ DEVANT LE DILEMME DE L'ABATTIS RÉVOLUTIONNAIRE OU DU CHANGEMENT LÉGAL D'UNE LOI SI C0NTRADICTOIREMENT ENTEN DUE. Nous comprenons que devant une position ainsi faite, les passions s'agitent plus violentes, el l'armée ennemie toute entière convoque ses soldats, bientôt la bataille Ainsi, voilà qui est entendu, l'évêque de Bruges, par la voie de son journaln ous promet un abattis révolutionnairesi la Nation ne veut pas du joug clérical, car toutes les phrases alam- jaiquées concernant la façon de comprendre la Constitution et son application, sont une façon de mystifier la Nation En tirant la quintessence de cette déclaration furibonde, on arrive ceci ou la Constitution sera appliquée comme nous. enragés modérés, le voulons, ou nous vous ferons jouir d'un abattis révolutionnaire! Tenons-le nous pour dit, le parti clérical, eapricieux, restait toujours doux et inoffensif. Ce pauvre innocent c'est ainsi que les gens des Claires désignent çfeux qui parmi eux sont affectés d'une folie tranquille passait sa vie pccher aux brochets dans le haut Broek landt "et telle était sa douceur, que, pour cette pêche, jl ne se servait ni d'hameçon, ni de fouine, ni de fusil, mais bien d'un nœud coulant en fil de laiton, suspendu une corde attachée une perche. Il avait la singulière adresse de passer ce nœud coulant au corps des brochets lorsqu'à midi ils dorment au soleil au-dessus de l'eau, et de les tirer brusquement dans sa barque H approvision nait ainsi l'abbaye du Verger, et joignait celte chétive industrie le métier de passeur du Broeklandt. Il condui sait quiconque l'appelait d'une rive l'autre, cl lorsque le passager n'était pas aussi pauvre que lui, il en tirait parfois quelque léger salaire. Quelques-uns nommaient Jéroboam l'ami des bêtes. 11 parait que lcà gestes et sur tout le regard de ce fou possédaient une telle puissance de magnétisme et de fascination, que les animaux les I plus sauvages le craignaient, et même lui obéissaient. Le vacher du mnrkgrave Pavait vu en maintes circonstances arrêter un taureau furieux, rien qu'en regardant l'animal en face et se posant devant lui, immobile et les liras croisés. Il ne craignait point les cerfs l'époque où ils sont en rut et dépassait un cheval la course. Cet étrange personnage habitait avec sa mère, vieille femme sexagé naire, une misérable butte délaissée par des lourbicrs. .Mais la plupart du temps il passait les nuits la belle [étoile dans quelque tronc d'arbre ou l'abri d'un rocher forcé d'acclamer la Constitution de 1831, l'occasion du vingt-cinquième anniversaire du Roi, songe la renverser ou la fausser, sou» peine d'un abattis révolutionnaire. Un jour ou l'autre, on verra la milice de M. Malou, l'évêque de Bruges, descendre dans la rue, armée de pied en cap car enfin l'ordre des choses exis tant ne se bouleversera pas tout seul, et alors on verra de quel côté se trouveront les révolu tionnaires, du côté de ceux qui luttent pour maintenir ce qui existe et qui a donné (a Belgique vingt-cinq années de paix et de pros périté, ou du côté des gens qui, sous prétexte de religion, veulent asservir la Nation et con fisquer ses libertés au profit de la tyrannie et du fanatisme de l'épiscopat. Les critiques et publicistes religieux mitres ou non milrés, tonsurés ou non, ont la manie de n'approuver et de ne louer que ce qui est pensé et écrit par des bouches ouvertes par l'église. Tout le reste sout des pauvretésd'après M. Malou,de»absurdités,d'après M.Delebecque, des niaiseries, selon le Journal de Bruxelles des stupidités, selon la Patrie de Bruges. C'est du ridicule élevé |a dixième puissance mais c'est clérical; tout ce qui n'est pas approuvé,cen suré et patroné par les bouches ouvertes par l'église, est une peste effroyable. Il est fâcheux que les œuvres de tous ces grands docteurs re ligieux passent chez l'épicier, tandis que les ouvrages si malmenés par les censeurs religieux, sont lus et exercent une influence que tous les grands hommes produits par l'église peuvent délester, mais non annuler. Résultats de la charité ecclésiastique, dite privée. Un débat vient d'avoir lieu au conseil com munal de la ville de Bruxelles, qui jette un nouveau jour sur la charité ecclésiastique dite privée. Il s'agissait d'allouer, sur la proposition du bourgmestre M. De Brouckere, te grand protecteur des Petites Sœurs, un subside de et restait quelquefois plus de huit jours sans rentrer la hutte. Dès qu'il eut amarré sa barque, le valet de chiens et le boquillon y déposèrent le markgrave et prirent place son côte. Jacques-le-Vcneur et Lucy-SIaï s'assirent la. poupe et Bob se tapit sous leurs pieds. Jéroboam éprou va d'abord un mouvement de surprise en voyant entrer tant de monde dans sa barque, mais lorsqu'il eut consi déré le doux visage de la religieuse, son étonnement se métamorphosa en joie folle, cl il poussa de longs éclats de rire. Silence donc, innocent! grommela le boquillon. C'est qu'il y a un ange qui vient de descendre de ce nuage là haut pour venir sur ma barque, répondit le fou en redoublant les roulades argentines de ses éclats da rire. Silence! fit son tour le valet des chiens en lui montrant du doigt le markgrave. Le fou se pencha curieusement vers la litière, et, après avoir examiné le blessé, il murmura en hochant triste ment la,tète Il y a un sommeil dont le rire ne rcvciMc point.... Je comprends maintenant pourquoi l'ange est descendu d en haut; il est sans doute le gardien de cet homme. Ne le reconnais-tu doue pas, innocent? reprit k voix basse le valet des chiens. Jéruboam se pencha de nouveau et s "écria soudain: Les corbeaux voudraient-ils donc se repaître de chair noble? Le fou avait dit cela d'un ton de profonde mélancolie qui fit tressaillir tout le monde; il se c«urba ensuite sur t

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