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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M" 1,990. 19* Année.
Jeudi, 97 Octobre 1959.
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LE PROGRES
ïphes, 26 Octobre.
On se demande parfois, au moment du re
nouvellement des coqfeils communaux, pour
quoi l'on place la lutte électorale sur le terrain
politique? Qu'importe, disent quelques gens
courte vue, qu'importe qu'un conseiller com
munal soit catholique ou libéral?
L'expérience comme la raison démontrent
qu'il importe immensément aux communes,
que leurs administrateurs ne soient pas les in
struments du clergé et inféodés au parti clé
rical.
Et en effet le parti clérical est essentiellement
rétrograde, le passé, le bon vieux temps est
pour lui l'idéal, la perfection, en matière admi
nistrative comme en matière gouvernementale.
Les hommes les plus avancés de ce parti, ceux
qui déclarent hautement qu'ils ne veulent pas
rétrograder vers le moyen-âge, proclament
bien haut aussi qu'ils ne consentiront pas
avancer, ils sont fiers de se donner le titre de
conservateurs le statu quo est la base de leur
code politique et administratif, une borne est
leur emblème; pour eux, le progrès est la ré
volution, la libre discussion le protestantisme,
et l'immobilité est la position hors de laquelle
il n'y a de salut ni pour la religion, ni pour les
princes, ni pour les peuples!
Nous le demandons, avec de pareils principes,
que l'on cherche transformer en arlicles de
foi cléricale, est-il possible, alors que tout mar
che et progressed'administrer sagement une
ville et même une commune rurale?
Si la raison seule ne tranchait pas négative
ment cette question, l'expérience serait là pour
lui donner pareille solution. Veut-on des ex
emples? En 1855, trois villes voisines de la
nôtre, Menin, Courtrai et Poperinghe avaient
des conseils communaux complètement dévoués
au parti clérical, du plus beau noir que le génie
des ténèbres avait pu composer.
L'administration de Menin était citée comme
LE ©MUTT®.
(Satie.)
XXXVI.
Cependant le chef de la congrégation du Saint-Office
allait parvenir l'endroit où la sépulture de la sainte
avait été découverte.
Mais, quoique la porte des Catacombes ne fût pas
éloignée de plus d'un quart de lieue, on devait faire tant
de détours, revenir si souvent sur ses pas, avant d'arri
ver au tombeau de sainte Valère, que la route ne durait
pas moins d'une demi-heure, et qu'il fallait une parfaite
connaissance des différents cimetières qu'on parcourait,
pour ne pas s'égarer sans espérances de salut car cette
partie des souterrains avait été tracée comme un labyrin
the avec l'intention de la rendre inaccessible, lorsque les
chrétiens persécutés se réfugiaient dans ces profondes
retraites avec leurs vases sacrés, leurs évangiles et les
reliques des martyrs.
Ce n'était donc pas sans éprouver un effroi secret et
comme un sinistre pressentiment, que le grand-inquisi
teur s'engageait dans les profondeurs de ces cryptes où il
n'était jamais descendu.
11 tournait parfois la tête avec inquiétude, et plongeait
un regard furtif travers cette obscurité redoutable qui
se reformait aussitôt que le cortège qui le précédait avait
passé il ne se rassurait un peu qu'en voyant devant lui
1* lueur des torches et dos cierges, qu'en écoutant les
une administration détestable, quelques veil
leuses fumant au coin des rues portaient par
dérision le nom de reverbères, les finances
étaient obérées, les administrations charitables
voyaient plus souvent le fond de leur caisse que
les écus qu'elles devaient y renfermer. Aussi le
mécontentement était-il général et légitime.
A Courtrai, c'était bien pis encore; l'admi
nistration cléricale qui occupait l'hôtel-de—ville
depuis 1830, avait résolu ce beau problème de
né faire aucune amélioration et de contracter
une dette de 500,000 600,000 fr. Le Bureau
de bienfaisance et celui des Hospices étaient
aux abois, ils devaient puiser sans cesse et sans
nécessité bien constatée, dans la caisse commu
nale or, celle caisse était vide comme la boîte
de Pandore, moins l'espérance d'y voir miroiter
l'effigie d'un souverain quelconque. Le conseil
communal avait inventé le procédé (non-bre-
vêlé) de ne plus payer de subsides aux admi
nistrations charitables, mais de capitaliser les
sommes dues, d'où il résultait pour la ville une
dette nouvelle tous les ans et pour les pauvres
une absorblion de leurs capitaux, c'est-à-dire,
la perspective de voir réduire blemoi le patri
moine des pauvres l'état de souvenir et de
pouvoir céder un prix modique quelqu'épi-
cier le registre des recettes devenu un objet de
luxe. Aussi avant 1855, Courtrai faisait-on le
budget non au mois d'Octobre mais Pâques
ou la Trinité et parfois après la reddition du
compte, moyen ingénieux de ne pas se tromper
sur les évaluations probables des dépenses.
Ajoutons que les propriétés communales et les
monuments tombaient en ruines et que le clergé
était en possession de l'enseignement public
tous ses degrés. En un mot, c'était le gâchis
administratif le plus admirable que l'on pût
imaginer.
Que dire de Poperinghe, sinon que Poperin
ghe en 1855 ressemblait Courtrai et Menin
caisse en désarroi instruction publique entre
chants d'église psalmodiés par des voix calmes et pieuses,
auxquelles il eut voulu associer la sienne, si le cérémonial
ne l'avait pas forcé de garder le silence.
Enfin, les chants éclatent avec plus de ferveur, et le
cortège s'arrête. On est arrivé près du corps saint.
Entre toutes les sépultures, ouvertes ou non, qui ont
été pratiquées dans les parois de la galerie, il en est une'
plus grande que les autres, encore fermée d'un morceau
de marbre blanc, sur lequel on lit cette inscription sur
montée d'une croix Sub siyno requiescit ad vilam eter-
nam.... De chaque côté de la fosse sont scellées dans la
terre deux lampes et deux fioles de verre irisé par le
temps.
Tous les yeux se fixent vers le marbre qui cache le
corps saint. Les chants continuent, en alternant sur deux
modes différents, selon les habitudes du plain-cbant de
l'Église romaine.
Monsignoï c Badolfo, accompagné de ses officiers d'hon
neur masse d'argent et verges rouges, assisté de son
porte-croix, s'approche de la sépulture, s'incline et s'a
genouille.
11 a l'air de prier, mais il ne prie pas; son esprit est
trop troublé, trop rempli de terreurs et de remords. II se
relève, et la cérémonie commence.
Il prend des mains d'un des deux fossoyeurs désignés
le marteau d'argent, et il frappe doucement la plaque de
marbre en murmurant Aperihe portas Domini puis il
prend le marteau, et l'autre fossoyeur lui présente la pelle
en vermeil chargée d'un peu de terre. Badolfo jette cette
les mains du clergé, éclairage public détes
table, pavage sur lequel les quadrupèdes ferrés
pouvaient seuls se mouvoir sans danger bref,
toutes les branches administratives présentaient
le spectacle d'une nature morte sans vigueur
ni sève.
Voilà ce que les administrateurs cléricaux
avaient fait des pauvres villes de Menin, Cour
trai et Poperinghe jusqu'en 1855! Heureuse
ment depuis lorsMenin a secoué le joug
clérical, et déjà le progrès y fait sentir ses
bienfaisants effets. Le gaz a remplacé les lumi
gnons dont nous venons de parler; la situation
financière devient normale, les administrations
charitables ne donnent des secours qu'à ceux
qui en ont besoin, et les refusent aux paresseux.
De jolies aubètes d'octroi annoncent une petite
ville proprette, une bonne caserne nouvelle
ment appropriée est pour Menin un titre l'ob
tention d'une garnison permanente; en un mot,
tout annonce un reveil.
Courtrai s'est émancipée depuis 1855; tous
les conseillers cléricaux, bourgmestre compris,
ont été rendus aux douceurs de la vie privée et
Tbi>t songer aux douceurs de la ^lcl~
nelleloin des vaines grandeurs de ce bas
monde. Aussi que Courtrai est changé l'im
mense dette a été réglée les intérêts réduits,
l'amortissement fixé (e bureau des Hospices,
envahi par des novateurs de libérâtres de la
pire espèce suffit ses besoins, au moyen de
ses ressources; le subside du au bureau de Bien
faisance peut être réduit moitié,l'ensemble de la
situation financière quoique grevé d'une lourde
dette, triste souvenir de l'administration cléri
cale, est régularisée et permet d'exécuter de no
tables améliorations administratives; l'hôtel-de-
ville était un ignoble amas de pierres on en a
fait un charmant monument; des trottoirs sont
établis, un abattoir est construit, une salle
de spectacle qui sera coquette est la veille
d'être achevée et bientôt l'administration libé—
terre contre le marbre, trois reprises, puis il se remet
genoux, dans l'attitude de la prière.
Les chants redoublent, qui expriment la joie des fidèles
accueillant les reliques d'un martyr. Alors les hères délia
f'ossa travaillent ouvrir la sépulture ils détachent le
ciment qui maintient le couvercle de marbre ils ébran
lent ce couvercle avec précaution ils se disposent l'ôter,
et tout le monde se prosterne au bruit de la sonnette
agitée par le maître des cérémonies. Les chants ne se
ralentissent pas, quoique la tombe ait été mise décou
vert.
Mais quelle est la surprise, la consternation générale,
quand on s'aperçoit que la fosse est vide, et qu'il n'y
reste pas même un ossement
Les frères délia fossacroyant i on prestige du démon
ou une illusion surnaturelle, plongent leurs torches
dans la cavité pour y chercher du moins une apparence
de poussière humaine au risque de commettre un sacri
lège, ils remuent avec leurs doigts la terre sainte qui a
dévoré tout ce qui fut un homme ou une femme, un païen
ou un chrétien ils se regardent avec stupeur, et ils
accusent Satan d'avoir dérobé malignement le corps d un
bienheureux, soit pour empêcher qu'on lui rendît un
culte soit pour montrer qu'un des assistants est encore
en état de péché mortel.
Cette pleine idée a frappé en même temps Badolfo, qui
considère d'un œil morne cette sépulture sans cadavre et
sans ossements il se reproche d'être cause d'un prodige
que Dieu a permis pour lui faire honte, et il se dit, dans