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JOCRiVAL DAPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M* 1,946. - 19- Année.
Dimanche, 95Décembre 18S9.
Vim acquirit eundo
THEA
LE PNCRES
i\'i-tri'invc fKES [la'lco)i P" trimestre, francs 50c. Provinces,4 francs. Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
•- nnonces, la ligne la centimes. Réclames, la ligne; 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au beurre.On ne reçoit que les lettres affranchies.
Traes, 54 Décembre.
Le rôle d un représenlant qui accomplit
consciencieusement son devoir est toujours in
grat, en présence d'une presse aussi passionnée
■que celle de l'épiscopat, et M. Defré en est un
exemple. Le temps n'est pas éloigné où en
pleine Chambre M. Dumortier, élu Roulers,
«errait M. Defré dans ses bras, en lui disant avec
effusion, qu'il était digne de compter parmi les
membres du Congrès. M. Defré alors était un
indépendant, un homme loyal, franc, libéral et
il avait mérité les éloges de la presse cléricale,
parce qu'il avait défendu la liberté la plus ab
solue de la chaire, l'abus même deuelte liberté
La Patrie de Bruges, avant que le résullat de
l'enquête de Loûvain ne fut connu, ne publiait
que des paroles mielleuses a l'adresse de M.
Defré. Il pouvait seul faire avorter le projet
d'enquête et elle lui accordait aisez d'indé-
dance et de franchise, pour empêcher que la
vérité soit élouffée sous le boisseau.
Voilà comment on parlait de M. Defré le 17
Novembre 11159. La presse cléricale plaçait sa
confiance en la loyauté de M. Defré. Le rapport
sur l'enquête est déposé avec toutes les pièces
l'appui et depuis ce dépôt, un déluge épou
vantable d'injures, d'outrages et de diffamations
tombe sur M. Defré. Tous les journaux dits
catholiques se livrent avec rage l'éreintement
du rapporteur de la commission d'enquête sur
les élections de Louvain. Pas une feuille qui ne
cherche l'envi découvrir une épitbète inju
rieuse lui jeter la face pas un orateur la
Chambre qui ne lui adresse des aménités de
haut goût. Enfin tous les aboyeurs cléricaux
sont déchaînés contre lui M. Boniface, dit
la Patrie du 18 Décembre, lisez M. Defré,
n'est qu'un pamphlétaire de bas étage
M. Defré est un avocat innommé au barreau,
où il n'a jamais brillé que par sa diction vul-
gaire et un accent louvaniste détestable.... M.
Defré est un petit homme qui ne sait ce qu'il
ditLes mensonges et les calomnies du
rapport-libelle ont été mis au grand jour.......
Comment se fait-il qu'à quelques mois de
distance, M. Defré soit tombé aussi bas dans
l'estime de Messieurs du clérical Il n'a eu be
soin, pour se trouver en bulle aux diatribes du
cléricalisme, que d'avoir fait son devoir honnê
tement mais énergiquementet dévoilé les
turpitudes qui ont signalé les élections de Lou
vain. On doit tirer de ce rapprochement la
conséquence que le député qui s'avise de voter
avec indépendance, ne reçoit d'éloges de la
presse cléricale que pour autant qu'il sert les
projets de l'épiscopatet s'il ose refuser de
suivre le mot d'ordre, nul service antérieur ne
lui tiepdra lieu de sauvegarde contre l'éreinte
ment clérical, auquel est condamné sans rémis
sion, tout homme qui refuse de se courber sous
le joug des chefs du cléricalisme et de coopérer
aveuglément leurs projets réactionnaire*.
La médaille et le trophée industriel offerts
M. Charles Rogier par les deux Flandres, en
reconnaissance des services qu'il a rendus l'in
dustrie, lui seront remis, Lundi prochain, 26
courant, l'hôtel du ministère de l'intérieur.
A cet effet, une dépulalion nombreuse se ren
dra Bruxelles, pour prouver l'honorable
ministre de l'intérieur que les populations fla
mandes savent apprécier les hommes qui se
dévouent leur bien-être et la prospérité de
la pairie commune.
Le Journal de Liège annonce que les reli
gieuses de Blankenberghe lui ont lancé une as
signation comparoir, ainsi que cinq autres
journaux libéraux devant le tribunal de Bruges
ipour s'y voir condamner solidairement 23,000
fr. de dommages-intérêts en principal, parce
qu'il a, en janvier 1859, trouvé juste et conve
nable que les écoles dentellières, qui font le
commerce et le trafic, fussent astreintes la
patente; d'autre part de ce qu'il s'est permis
d'emprunter une correspondance publiée par
le Journal de Bruges des détails sur l'organisa
tion de certaines de ces écoles dentellières I
Pendant un an environ, fait remarquer le
Journal de Liègeles religieuses de Blanken
berghe n'avaient pas doutée qu'il y eût possibi
lité pour elles de soutirer 25,000 francs la
presse libérale. Mieux vaut tard que jamais;
seulement, pourquoi ne s'en prendre qu'à cinq
journaux raison de 5000 fr. chacun Ces
dames auraient pu comprendre dans leur assi
gnation un nombre infiniment plus considéra
ble d'organe* de l'opinion libérale, qui ont fait
état, comme nous, de la correspondance du
Journal de Bruges. Elles auraient pu, de la
sorte, décupler le chiffre de leurs prétentions,
qui, vrai d'honneur, sont trop modérées.
Le Bien Public qui a annoncé vouloir se
charger de tous les procès des écoles dentelliè
res, n'y aura pas suffisamment réfléchi
Dans son discours du 20 M. Devaux a rap
pelé la conduite tenue par la gauche dans la
discussion de 1854 sur les élections de Marche,
et a exprimé le regret de voir que pas un mem
bre de la droite n'eût assez d'indépendance et
de fermeté pour imiter cette conduite, pour
prendre la défense du principe de la moralité
politique. Nous croyons utile de préciser le
souvenir si heureusement invoqué par l'hono
rable député de Bruges.
Comme en 1848une pétition avait signalé
NOUVELLE GRECQUE,
(1779.)
(Suite.) VIF!.
Adossé contre les mari (ta sérail et mystérieusement
■caché seus des berceaux d'orangers, un kiosque semble
étranger A la fête. Seulement, de temps en temps, tes
notes vibrantes d'une gvzla s'envolent dans les jardins,
■et s'éteignent aussitôt dans des massifs de rosiers.
Uu chant de femme s'est fait entendre..... Ne recon
naissez-vous pas cette voix, et le soir, en passant près de
Calamsta, ne vous êtcs-vousjamais arrêté sou* l'ogive du
château vénitien, attiré par ce même air romaïquo?
Si vous êtes tant soit peu curieux de pénétrer ce mys
tère, il nous est permis, grâce k notre privilège, que
respecterait le pacha lui-mèinc, de soulever la jalousie et
■de plonger sans eraintc nos regards dans l'intérieur du
kiosque. D'ailleurs il est nuit," et personne ne se promène
dans le jardin c'est l'ordre du gouverneur.
Des tapis de Perse couvrent le parquet et carressent les
longues franges des velours de Gênes, qui servent de
tapisserie. Des treillis dorés ornent le plafond supporté
par quatre colonnes moresques taillées dans le porphyre
vert-aotique du Taygète. En dépit du Coran, plusieurs
flacons de vieux lesbos et de pérato, ec fameux vin de
Naxie, qui provient, dit-on, des vignes que planta Bac-
ehus, et des corbeilles de filigrane d'or, qui renfer
ment les fruits les plus rares, surchargent une table de
bois de sandal. Les parfums d'Orient brûlent sans cesse
dans.dcs vases d'argent, et les bougies roses répandent
sur toutes ces merveilles une molle clarté.
Certes, jamais favorite de sultan n'a possédé de bou
doirs plus luxueux, si ce n'est dans les contes arabes.
Sur un divan de brocart, une jeune femme chante aux
pieds d'un noble musulman, qui aspire gravement la fu
mée d'un narguilhé.
Chante, Tbéa, chante ton nouvel amour; peut-être les
accents de ta voix étoufferont-ils les remords de ton cœur!
Méliémet-Pacha laisse tomber le tuyau d'ambre, et
caresse d'un air rêveur les beaux cheveux de la favorite.
Tu l'aimais donc bien, ce giaour dit-il ensuite
avec un soupir,
Théa tressaille et parait sortir d'un songe ses traits
expriment une vive inquiétude; elle porte les mains k son
front qui rougit, serait-ce de honte? et cherche k
lire dans les yeux voilés de l'OfinaiiIi.
Hélas je le devais, répondit-elle après un long si
lence et d'une voix émue. Pourquoi ee souvenir vient-
il toujours empoisonner ma tendresse poursuivit l'a
moureux pacha. Oh je l'effacerai sous ines baisers
Mais comment a-t-il pu se faire aimer de toi, si belle,
ce misérable avanturicr, ce vil montagnard Écoute,
maître adoré, les secrets de mou cœur. Va, je no suis
point coupable.
Il y a trois ans, il me sauva plus que la vie en m'arra-
chanl des bras d'ua chef albanais, meurtrier de mon
père. J'étais seule et sans appui. Je voulais fuir Athènes,
il m'offrit un asile auprès de ses montagnes, dans un châ
teau franc; je le suivis, etje l'aimai.... par reconnais
sance. Je suis jaloux de cet homme et sa léte ne me
suffit pas. Mais je trompais mon cœur, s'empressa
d'ajouter la jeune Athénienne en allanguissant son regard.
Aujourd'hui, je suis bien heureuse. Te plaire, mon doux
seigneurl'adorer et posséder tes caresses, c'est le rêve
ardent de ton esclave.
Et sa bouche qui souriait montrait des dents plus bril
lantes que les perles de Ceylan.
Méhémet, devenu soucieux, ne répondit pas.
La belle figure de Tliéa pâlit do douleur ou de dépit,
et quelques larincs brillèrent sous ses longs cils.
Mais je t'aime, dit-elle en cachant sa tête dans la
poitrine du pacha. L'infâme, murmura sourdement
une voix nu dehors du pavillon. Méhémet aspirait avec
une indifférence affectée la fumée de son narguilhé.
Hélas! a'écria la nouvelle favorite, j'ai perdu ton amour;
il ne reste plus qu'k mourir.
Et saisissant k In ceinture de son noble amant un
kandgiar la poignée d'ivoire, elle en appuya la pointe
sur son sein.
Tout k conp la jalousie s'agita, et une téle menaçante
parut l'extrémité du kiosque.
Stéphan!et Théa, laissant échapper le poi
gnard, s'évanouit sur le divan.
On entendit en même temps une détonation suivie d'un
cri do rage.
Les gardes qui accoururent, virent passer une ombre
dans les jardins. Méhéract-Pacha n'était que légère
ment blessé quelques gouttes de sang perlaient sur son
front oue 1» balle n'avait fait qu'effleurer.
4 IX.
L'amour, cette fièvre de l'âme, est semblable k une de
ces graves maladies du corps qu'une grande crise peut
guérir. La réaction qui suit est ordinairement violente, et
l'on a vu souvent des amants très-passionnés l'un pour
l'autre, se prendre subitem.ent en haine et ne pouvoir se
pardonner durant le reste de leur vie.