Concert do la Société des Chœurs. Rapport sur la marbrerie, par M. Charles Roussel, «l'ITpres. Je serai bref, mes chers lecteurs, et voici pourquoi ou me reproche de traîner parfois mes chroniques en longueur, et pourtant, si on connaissait comme moi le naturel cha touilleux du musicien, on serait plus disposé l'indulgence et on avouerait que louer con venablement n'est pas toujours chose facile Gare au moindre oubli, c'est un crime de lèse-majesté musicale, témoin cet artiste (ce mot est des deux genres, je crois,) qui l'autre jour s'est fâché tout rouge parce que dans le compte-rendu du concert des Francs-Arbalé triers, j'ai omis, par déférence, de mentionner line particularité qui le concernait Je serai donc aussi court que possible, et plaise au ciel que je me concilie par là les botines grâces des lecteurs un peu trop nerveux du Progrès! Le concert a réussi au-delà de toute ex pression pas une note discordante dans l'ac cord des appréciations qui se sont produites; il n'est pas jusqu'aux nombreux artistes qui assistaient la fêle et qui ont la louable ha bitude de ne pas trop bien s'entendre, qui n'aient été unanimes dans leurs éloges! Voilà pour l'ensemble de la soirée quant aux dé tails les voici L'exécution des deux chœurs couronnés Bruxelles prouve, d'après ceux qui ont assisté ce concours, que si les cho ristes avaient conservé là-bas, dans le Chant des amisle même calme et le même aplomb que Jeudi dernier, le premier prix leur aurait été décerné par acclamation. M. Jlaelewyckbasson solo au 10® régi ment de ligne, est un artiste consciencieux dont les progrès depuis quelque temps d'ici sont vraiment remarquables; son air varié de Verroust et la partie concertante qu'il a par faitement soutenue dans le trio de Anna Bo- iena(el non Lucrezia BorgiaM. le rédacteur du programme), lui ont valu des applaudis sements nombreux et mérités. MM. Coflyn et Thiebault ont chanté le magnifique duo du Cbâlet, la satisfaction générale du public; seulement nous aurions voulu que leur accompagnateur eût transposé ce morceau d'un ton, ils auraient été plus l'aise pour développer les excellentes qualités de leur voix. MM. Decoene et Swekels ont le talent de choisir des morceaux tout fait appropriés leurs moyens; les chansonnettes et les scèoes bouffes leur vont ravir aussi ont-ils été amusantsau possible dans le trio de la Grande Duchesse de Gerolslein leur partenaire, M. Em. Vande Brouke est pour nous le vé ritable type du comique spirituel et ébourif fant soit qu'il se présente en scène en habit noir comme dans le Commissaire priseur, soit qu'une main originale et artistique le transforme en Portieren Vieille radoteuse ou en quelque autre personnage burlesque, on retrouve toujours chez lui du tact, de l'assurance, de la finesse et de la verve, on rit toujours aux larmes, et toujours on l'applau dit avec un nouveau plaisir. Quelle jolie pastorale que le Retour au pays chanté par M. Baratto! et dire qu'avec une voix pareille on se fait entendre une fois tous les six moisvraiment ce n'est pas gentil,estimable directeur! Voyez M. lUieroo la nature l'a doué d'un organe des plus purs et des plus sympathiques et c'est toujours avec un véritable bonheur qu'il se produit devant ses amis, devant ses co-socié- taires; une sage et intelligente réserve lui in dique le moment opportun, et chaque fois qu il chante, le succès le plus complet vient lui rappeler qu'il est l'enfant gâté du public. M. Deprins de Tourcoing est pour nous une vieille connaissance; il y a deux ans, il nous a émerveillés de son instrument ma gique et cette fois encore il a justifié l'ex cellente réputation qu'il s'est faite Suavité de son, délicatesse, légèreté, expression, il possède toutes les qualités qui constituent le véritable virtuose et dans les deux fantaisies sur Don Juan et sur la Somnambuledans l'accompagnement de la romance pour ténor et hautbois ainsi que dans le trio de Anna Bolena, son talent s'est présenté sous les faces les plus diverses et les plus brillantes. Quant M. De Wulfnotre éminent com patriote, il doit être heureux du magnifique succès qu'il a obtenu; \e trio concertant, la valse et le galop (deux de ses plus charmantes compositions) Extase, la Rêverietout en un mol n'a été qu'une suite continuelle de triomphes, et quand on sait comme lui élec- triser un auditoire (que le piano laisse sou vent si froid), quand on fait éclater une salle entière en bravos enthousiastes, c'est qu'on possède le feu sacré de l'art, qui manque chez tant d'artistes du plus haut mérite. A tout seigneur, tout honneur il nous reste parler deMlleZ.. Fqui, avec une modestie et une gracieuseté dignes des plus grands éloges, a mis sa jolie voix la dispo sition de la société. Le jfliserere du Trouvère daDs lequel elle a été parfaitement secondée par M. H. Thiebault et messieurs les cho ristes, nous a révélé chez elle des qualités éminemment dramatiques, en même temps que beaucoup d'aisance et beaucoup de jus tesse dans les intonations; dans le duo des Dragons de Villars, où la réplique lui a été donnée d'une manière admirable par M. E. Mieroo (auquel je dois encore une mention toute spéciale pour son solo du chœur Dans la forêt), sa voix se trouvant plus l'aise que dans le morceau précédent, elle a pu dé ployer une désinvolture et un brio qui lui al laient merveille et finalement par Pro tège-moi, de Beltjens, et mieux encore par la ravissante romance inédite de M. De Wulf Pars mon gentil prisonnier, elle a sou levé dans l'auditoire une triple salve d'ap plaudissements tout rompre. Merci, char mante demoiselle, pour le plaisir que vous nous avez fait votre début parmi nous a été une victoire éclatante recevez ici les félici tations bien sincères de tous les amis des beaux-arts -et permettez-nous d'espérer que vous embellirez souvent nos fêtes de votre précieux talent. Vendredi soir, M. le professeur Bergé a donné sa deuxième conférence, en présence d'un public de plus en plus nombreux et avec tout le succès que permettait d'augurer l heureux début de l'orateur. Reprenant le sujet qu'il avait peine ébau ché dans son premier entretien M. Bergé a fait connaître la naissance, les progrès et la transformation des divers systèmes d'éclai rage, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours. Nous regrettons de ne pouvoir suivre l'orateur dans cette marche travers les siècles, dont chaque étape marque un pas en avant dans la voie des améliorations soci ales les connaissances spéciales et l'espace nous font en même temps défaut, pour re produire les brillants développements que le conférencier a donnés sa vaste et intéres sante élude. Si M. Bergé est un orateur de mérite, dont la parole toujours claire et élégante, instruit et plaît tout la fois, il nous a encore révélé les qualités qui le distinguent comme pro fesseur de chimie expérimentale d'un des principaux établissements scientifiques du pays. A l'aide d'appareils d'une étonnante simplicité, M. Bergé a réussi produire des effets lumineux qui semblent tenir du prodige; le gaz de pétrole, le gaz de naphte ou aéro gène, la lumière de magnésium, les modes les plus nouveaux d'éclairage des phares, out successivement fourni matière aux expériences les plus variées et que l'auditoire a suivies avec les marques du plus vif intérêt. Résumant le Ira vailde sesdeux conférences, l'orateur est entré dans des considérations d'un ordre élevé sur la mission sociale de la science, hautement attestée par sa prodigieuse fécondité et la multiplicité de ses applications toutes les branches de l'activité humaine. Cette péroraison, d'une éloquence chaleureuse et entraînante, a été accueillie par des ap plaudissements unanimes elles mieux mérités. En présence du succès complet de cette soirée, nous croyons répondre au sentiment général en émettant le vœu de voir prendre racine et se développer parmi nous l'utile institution des conférences publiques. (Suite et fin.) Je ne terminerai pas ce rapport, sans dire quelques mots des bronzes considérés comme accessoires de la marbrerie. Le sujet dont il me reste m'occuper n'est pas, tous les hommes compétents le comprendront, sans diffi cultés, après ce que j'ai dit précédemment relativement l'industrie marbrière, en la considérant dans son ensemble en effet, il ne me reste en plusieurs points qu'à opter entre le mutisme ou les redites, et la ma tière est d'ailleurs, de sa nature, des plus ardues dans le détail des spécialités. La pendule, particulièrement, présente cet égard, le champ le plus étroit, le plus difficile. Ici le comble de la perfection consiste bien souvent se cacher, se dissimuler, empêcher qu'on ne puisse, un premier coup d'oeil, saisir ou découvrir le plus ou le moins de mérite de l'exécution du travail, et appré cier le degré de supériorité dans les moyens employés. Voici des socles en tout genre, des pendules admi rables. les raccords, les assemblages y sont parfaite ment adhérents, dissimulés sont-ils massifs ou bien se composent-ils de pièces réunies par le mastic ou par le plâtre? Impossible de se prononcer, moins d'un examen attentif. Ce n'est pas là, du reste, la seule difficulté que l'on rencontre dans l'appréciation des ouvrages de la nature de ceux dont je m'occupe. Outre la netteté et la soli dité, un travail de monture doit réunir encore diverses conditions, toutes également importantes, telles sont la correction des lignes, leur conservation dans le rac cordement des parties, dans les sections, et, enfin, dans les modifications si fréquentes que subit l'œuvre pendant l'exécution. Or, il est encore impossible de déterminer ici la part du travail. Voilà des pendules, des socles, des coupes d'un genre grec, renaissance, etc., le tout est léger, gracieux, c'est, pensc-t-on, na turel, tout cela devait être ainsi et, cependant, le confectionneur a dû, peut-être, s'écartant du dessin primitif, reconnu vicieux par son auteur même, cher cher longtemps, et modifier souvent, ou bien même dans certains cas, l'ouvrier abandonné ses propres lumières, a été condamné se livrer un travail pé nible d'essais et de combinaisons, pour tirer parti de ce qui n'était souven», qu'une ébauche, afin de com poser cet ensemble si symétrique, si harmonieux. Nonobstant ces difficultés pour asseoir un jugement équitable, je crois pouvoir déclarer cependant qu'en général, sous ces divers rapports, le travail français accuse une supériorité remarquable dont les autres na tions n'approchent qu'exceptionnellement. Cette supériorité cesse toutefois de se montrer aussi marquée, quand on envisage les produits sous le rap port de la bonne fabrication, et la différence entre la France et les autres contrées semble devenir moindre, quand le goût de l'ouvrier a une part moindre dans la fabrication, et quand l'exactitude et la précision mathé matique qui peuyent s'obtenir par l'exercice soutenu de la main, deviennent la condition la plus importante de la perfection du travail. On peut même ajouter que, dans ce dernier cas, les autres nations s'élèvent souvent la hauteur de la France. Ainsi, j'ai remarqué des spécimens d'ouvrages exécutés aussi nettement que ceux que présente la galerie française, et parmi ceux qui ont fixé mon attention, je citerai dans l'exposition belge des pendules d'une bonne architecture, d'un as semblage et d'un fini irréprochables. La plupart des observations qui précèdent sont éga lement applicables la tournure, dans les cas où il ne s'agit que de précision, de netteté dans l'exécution ou sous le rapport architectural et sous celui de la conser vation des profils. L'Exposition universelle offre plus d'un objet qui, ce point de vue, peut soutenir la com paraison avec des similaires français.

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Le Progrès (1841-1914) | 1868 | | pagina 2