6 FRANCS PAR AN.
27" ANNÉE.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT,
LA ROSIERE DE LA RUE SAIST-DERIS.
IV* 1,805. - Jeudi
19 Mars ISO».
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Chronique politique.
LE FR06BËS
VIRES ACQC1RIT EUNDO.
ABONNEMENT PAR AN Pour l'arrond* administratif et judiciaire d'Ypres. fr. 6-00
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 83.
INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire
Idem Réclames idem.
Les lettres et paquets doivent être affranchis.
fr. 0,13
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Le Moniteur français contient une longue liste
de maires qui viennent d'être nommés chevaliers
de la légiou d'honneur l'occasion de l'anniver
saire de la naissance du prince impérial. C'était
hier, en effet, 16 Mars, que le prince entrait dans
sa i3" année.
Les bureaux du Corps-Législatif ont nommé la
commission chargée d'examiner la demande en
autorisation de poursuite, adressée par les direc
teurs des jourr^ux, VA venir National, la Liberté
la Revue de* Deux Mondet et le Journal de*
Débat*. Contrairement au bruit qui circulait il y
a deux jours, on disait dans les couloirs de la
Chambre que la demande aérait accueillie et que
M. de Kervéguen lui-même désirait qu'elle le fut.
Le camp de Châlons s'ouvrira le i* Mai. Il rece
vra 8 divisions, d'infanterie 4 du Mai au
ir Juillet 4 autres du i* Juillet au 3r Août. On
«'y exercera spécialement aux grandes manœuvres
avec le fusil Cliassepot.
La Chambre des députés italiens a rejeté, la
majorité de 2i 3 voix contre io3, la question préa
lable proposée par M. Crispi, et adopté deux pro
positions de MM. Minghelti et Bargoni, aux
quelles s'était rallié le ministère, L'une de ces
propositions invite le ministère présenter, au
mois d'Avril, un projet de réforme des impôts et
d'économies, s'élevant au chiffre de ioo millions
sur le budget de i86y. La seconde recommande de
passer la discussion de l'impôt sur la mouture,
tout en réservant de délibérer, avant le vote défi
nitif de cet impôt sur d'autres mesures finan
cières.
Un télégramme de Belgrade, annonce qu'un
conflit a éclaté Graczanicka (Bosuie), entre les
bachibouzoucks et les chrétiens. Oe6 deux côtés,
il y a eu des morts et des blessés.
Le Journal de St-Péler*bourgdans son numéro
d'hier, considère les explications de l'Autriche
sur sa politique en Orient comme obscures et in
suffisantes La paix, dit-il, ne saurait être
assurée en Orient qu'à la condition que les
puissances obtiendraient de la Porte des concea-
sions de nature tranquilliser les chrétiens, et
PAS FRANCIS TESSON.
V
Le lendemain dès le point du jour Pierre Michon fut
sur pied.
Donne-moi l'argent, dit-il Fortunée; tandis
que tu garderas Andrée, je cours là-bas chercher le
petit.
L'argent qu'avait économisé la fleuriste n'était point
enfoui dans un vieux bas comme elle le prétendait
plaisamment la veille.
Mais, dans un coin de la chambre, au fond d'une
antique commode en noyer toute rongée des vers,
mais brillante encore sous la triple eouebe de cire qui
la recouvrait comme un fard adroitement appliqué sur
les rides du visage, derrière un tas de vieux linges, se
cachait une tirelire en terre cuite une vénérable tire
lire, faite tout exprès pour mettre l'abri d'une visite
indiscrète le dépôt qu'on lui confiait.
Une lente étroite, longue d'un pouce, laissait péné
trer les pièces mais une l'ois entré l'argent ne pouvait
plus sortir.
ae prononceraient pour le principe de non in-
tervention dans le cas d'un soulèvement des
chrétiens contre les mahométaus.
Ypres, le 18 Mars.
La voilà enfin terminée cette discussion
pleine de mystères et de traquenards qu'on
semblait redouter tout d'abord d'entamer! La
question de l'armée élait une nouvelle boîte
de Pandore qui devait laisser échapper sur la
Belgique des gaz méphitiques et pestilentiels
(style catholique), et inoculer le fléau du
militarisme (style radical).
La Chambre, après deux mois de discus
sion, pendant lesquels sa patience a été mise
une rude épreuve, a finalement voté les
projets du gouvernement une immense ma
jorité. Nous n'avons jamais douté de l'issue de
cette campagne militaire sans effusion de
sang, et si l'on traitait les questions de l'espèce
dans des congrès plus ou moins nombreux,
selon l'importance des points noirs liquider,
il y aurait beaucoup moins de pertes en
jiommes et en argent et l'on pourrait suppri
mer du coup ou tout au moins amoindrir un
appareildeguerrequi ruine toutes les nations.
Hélas! ce n'est pas nous, pauvres petits qui
pourrons entamer cette réforme, selon nous
très-essentielle et bienfaisante car nous
ne sommes pas atteints au degré aigu du
besoin de prendre quelque chose et d'an
nexer des pays, sous prétexte de rectification
de frontières. Mais la Belgique située entre
des puissances de premier ordre et qui peu
vent se chamailler, doit pouvoir fournir un
état militaire respectable, sans être exagéré.
Les événements extérieurs ont obligé notre
gouvernement se mettre en mesure de
remplir la mission la plus importante que
l'Europe nous ait imposée, celle de sauve
garder notre neutralité. Pour des raisons sur
lesquelles nous ne pouvons nous étendre, des
Le nid gardait ses oisillons
La prison gardait ses prisonniers
La caisse gardait son trésor.
11 eût fallu briser la tirelire en terre cuite pour en
tirer le dépôt que recelaient ses flancs.
La m9in de Fortunée tremblait légèrement lors
qu'elle tira de sa caebette la tirelire qui contenait son
épargne et qu'elle avait remplie pièce pièce, grâce
ses veilles obstinées la lueur d'une lampe fumeuse,
quand l'horloge laissait tristement tomber dans l'es
pace le tintement des heures de la nuit, quand la bise
ébranlait les fenêtres mal closes de la chambre quand
le froid bleuissait ses mains amaigries et glaçait sous
ses doigts opiniâtres la molle étoffe dont elle confec
tionnait ses roses.
Dieu seul pourrait nous dire quel poëme de larmes,
de privations, de souvenirs et d'espérances contenait
cette frêle enveloppe de terre vernie.
C'est le rachat de mon enfant, murmura For
tunée et sans plus hésiter elle brisa la tirelire contre
le pavé.
Il s'en échappa une joyeuse volée de piécettes de
toutes couleurs et de toutes valeurs
modifications indispensables devaient être
introduites dans notre système militaire; l'ar
mement a dû être changé forcément, moins
qu'on ne veuille exiger que les défenseurs de
la Belgique ne doivent se présenter devant
l'assaillant qu'armés d'armes démodées et im
puissantes, autant les envoyer la frontière
armés d'arcs et d'arbalètes, comme au bon
vieux temps.
La Belgique doit s'enorgueillir de la con
clusion de ces débats longs et fastidieux, qui,
sans les mauvaises passions qui ont voulu
s'en emparer pour agiter le pays, eussent pu
finir plus tôt. Sans prétendre que la nouvelle
organisation sera la hauteur de tout ce que
les circonstances pourront exiger en fait do
sacrifices, nous avons appris par les discus
sions qui ont eu lieu au Parlement, que nos
institutions militaires devaient être remaniées
forcément, afin denepas nous voir pris au dé
pourvu.
Le parti libéral peut se flatter d'avoir fait
aboutir victorieusement celte affaire si im
portante et si essentielle par l'influence qu'elle
3ura l'extérieur. Le parti national quand
même a pourvu dans la mesure du possible
la sécurité du pays et ce n'est pas un mince
service que d'avoir fait adopter les dépenses
indispensables la bonne organisation de nos
forces défensives. Ces besoins de leur nature,
ne sont compris que par un petit nombre de
personnes et sont en général impopulaires,
parce que la prévoyance n'est pas innée chez
les populations.
Nous avoos dit, que ces débats ont duré
deux mois et la démonstration péremptoire
que les dépenses nécessaires l'armée et les
obligations quelles entraînent ne sont pas
aussi antipathiques la population, résulte de
ce qu'on a, au commencement, organisé par
tout des meetings et que, vers la fin les ora
teurs ambulants de ces parades burlesques
Des gros sous rongés de rouille
Des pièces de dix sous, de viugt sous, de trente sous,
de cinquante sous
Des décimes démonétisés, mais ayant doublé de
valeur chez les orfèvres
De gros écus de cinq francs étonnés de n'avoir pas
encore rendu visite la chaudière de la Monnaie.
Et jusqu'à un royal louis d'or, l'effigie de Louis
XVIII, presque honteux de s'être venu eocaDailler au
milieu de cette foule bigarrée.
Fortunée battit des raaios la vue de cette petite
fortune ainsi éparpillée au grand air.
Puis elle ramassa les pièces éparses, les compta, les
rangea: le beau louis d'or d'un côté, les pièces d'argent
d'un autre, les gros sous part.
Elle compta en tout deux cents treize francs et plu
sieurs centimes.
C'était une somme mirifique que deux cent treize
francs, pour cette pauvre eufaot qui parfois n'avait
pas de quoi dîner le soir.
Certes, ce chiffre, tout modeste qu'il paraisse mes
lecteurs, éblouit la fleuriste. Jamais elle n'avait tant
possédé d'un coup.