N° 289. Dimanche.
87e ANNÉE.
15 Avril 1877.
JOURNAL D'Y PRES ET DE L ARRON DISSE iï ENT.
6 FRANCS PAR AN.
Il lll 'i
PARAISSANT LE JEUM ET LE DUIANCIIE.
BULLETIN POLITIQUE.
Les électeurs libres.
On écrit d'Anvers l'Etoile
Jamais la pression exercée par les catholiques
sur les électeurs campagnards n'a élé aussi forle
sur 2,400 électeurs campagnards inscrits, 2,300 se
sont présentés au scrutin, non pas librement, mais
conduits, poussés.
Vous faire le tableau de toutes les scènes qui
se sont passées, ce matin, sous les yeux du public
m'entraînerait trop loin. Je ne puis résister au désir,
pour vous donner une idée de la pression exercée
sur les campagnards, de vous envoyer quelques
détails de ce que j'ai vu. Ainsi au 27e bureau
la Bourse où volaient les électeurs des com
munes d'Aerselaer, Edeghem, Reeth. Vremde,
Conlich, Moorlsel, Waarloos et Wilryck, sur
quatre cents cl quelques, électeurs inscrits, j'ai
compté 18 prêtres qui surveillaient leurs ouailles.
Le 27e bureau est situé au premier étage de la
Bourse et sur chaque marche, des deux côtés de
l'escalier qui conduit ce bureau, se trouvait un
membre d'un Cercle catholique reconnaissahle
la cocarde dont sa boutonnière était ornée
armé d'un gourdin et surveillant les faits et gestes
des paysans qui il éiait défendu de gravir les
marches plus d'un la fois.
Mais au 28e1»urcau, réservé aux électeurs de
firecbt et autres, le speciacle était bien plus triste
encore. Là j'ai vu. de mes yeux vu, au moment où
les électeurs pénétraient dans le bureau, un prêtre
agenouillé et récitant des prières Le bureau était
inabordable, contrairement la loi. qui exige que
la circulation demeure libre aux abords. Une dou
ble rangée de paysans, gardés vue par des prê
tres, rendait tout accès impossible.
Je suis parvenu me tenir un moment sur
l'estrade, derrière le bureau, et ai pu juger ainsi de
l'influence qu'exerce le prêtre ou celui qui le rem
place sur ces électeurs. Ceux-ci ne quittaient pas
des yeux leurs conducteurs.
Un de ces malheureux, de peur de se tromper,
s'est avancé jusqu'à quatre fois l'appel d'un nom
quelconque et sur un signal donné qu'il supposait
s'adresser lui.
Ici encore, pour démontrer d'une façon indis
cutable les moyens auxquels on a eu recours, il
suffira de cita un fait on a compté que 70 p. c.
des bulletins sortis de l'urne étaient écrits la
main
On a vu de ces bulletins sur lesquels le nom
de M. Osy était légalement écrit mais les lettres
majuscules du nom ou du prénom avaient des for
mes particulières.
Tous les électeurs élaient munis d'un bon pour
un dîner. J'ai eu en inains de ces bons valables
dans quatre établissements Les Trois Coins (den
Drijhoek), l'Homme sauvage (de Wildeman), A
VEurope (In Europa), et chez Verstegen.
Le menu, dans chacun de ces établissements,
comportait un bouillon, un bouilli, une saucisse
et trois verres de bière.
On cite plusieurs communes, notamment la
commune de Warloos, où les électeurs ont été
confesse hier, ce matin la communion, et de là
ont été conduits sous bonne escorte au scrutin.
Je n'en finirais pas, je le répète, s'il me fallait
citer Ions les fails de pression qui ont été constatés
aujourd'hui, mais force m'est bien de m'arrêler.
D'ailleurs, une enquête minutieuse va être ouverte
pour servir dans la discussion qui, on l'espère plus
que jamais, s'ouvrira bientôt la Chambre des
représentants.
On lit dans le Précurseur
Dès avant l'aurore, on pouvait voir des bandes
de gens en blouse quitter la ville et s'échelonner le
long des roules ils ont remonté les chaussées
jusqu'à une lieue hors des portes. Les véhicules
contenant le bétail électoral sont arrivés ces
avant-postes et quand la dernière voilure a passé,
le premier posle l'a suivi, ralliant en route tous les
factionnaires. Avant de rentrer en ville, les stok-
slagers ont élé inspectés par des nobilions cheval.
Pour citer des faits, nous allons donner comme
exemple ce qui s'est passé la porte de Deurne
Il esl enlré par cette porte 34 véhicules (voi
lures. omnibus, chars-à-bancs, etc.) portant tous le
cartel clérical, sauf une deini-douzaine environ.
Dans les 50 premières voitures, il y avait 7 prê
tres le détail des 4 dernières voitures esl des plus.
LE PROCHES
-
101.
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VIRES ACQU1R1T EUNDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif rl judiciaire d'Ypres. Ir. 6-<)0
Idem s Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 39.
INSERTIONS: Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10; Réclames: la ligne fr. 0-23.
La réponse du Divan au protocole a été officiellement
remise aux divers gouvernements.
Dans ce document, dont le résumé nous a été com
muniqué, la Sublime-Porte exprime en termes extrê
mement courtois, mais fermes, Je regret qu'on l'ait
exclue des délibérations Londres.
Les puissances, dit-elle, veulent des réformes rien
ne peut mieux réaliser ce but que la Constitution dont
le Sultan a doté ses sujets.
Cependant l'action du gouvernement turc est entra
vée par les armements de ia Russie, qui sont désormais
un élément extrêmement grave dans le débat.
La Sublime Porte est prête conclure la paix avec
le Monténégro, même au prix de certains sacrifices,
mais c'est Cettigne que les conseils de modération
doivent être présentés par les puissances.
Elle ne demande pas mieux que de désarmer; mais
la concentration de ses troupes est une mesure absolu
ment défensive elle licenciera des soldats dès que des
mesures analogues seront prises par la Russie.
Elle repousse la déclaration du comte Schouwaloff,
qu'elle trouve blessantes et injuste, mais elle n'hésite
rait pas témoigner la Russie toute déférence qui
serait réciproque.
L'envoi d'un ambassadeur St-Pétersbourg ne lui
semble pas avoir de rapport avec le désarmement, qui
§eut se faire sur des ordres transmis aux commandants
e troupes.
La circulaire conclut en exprimant la conviction que
les puissances, mues par deà sentiments d'équité, tien
dront compte des objections de la Porte et recherche
ront un autre mode de solution aux difficultés pen
dantes.
Cette réponse ne diffère en rien des précédentes. Elle
semble conciliante, mais en réalité elle n'accorde rien.
Tandis que la Turquie devrait s'efforcer de s'entendre
avec le Monténégro, elle invite les puissances user
de leur influence auprès du prince Nikita.
Ce n'est pas là une solution et comme l'armistice
expire depuis hier, il est probable que les doutes seront
complètement dissipés demain.
Les deux questions du désarmement et de l'envoi
d'un délégué Saint-Pétersbourg sont plus nettement
tranchées. La Porte ne désarme pas avant la Russie et
trouve qu'il y a moyen de s'entendre par télégrammes.
Le gouvernement du Czar n'est pas de cet avis. La
circulaire de la Porte a produit le plus détestable effet
Saint-Pétersbourg.
La guerre est considérée comme la seule solution
possible. Les mesures indispensables ont été prises
par la Russie, pour une entrée immédiate en campagne,
et par les consuls des puissances, pour la protection de
leurs nationaux sur les territoires eftgagés.
La seule chance d'une entente consiste désormais dans
l'exécution par les puissances d'une proposition de
garantîtes matérielles pour la protection des chrétiens
et la réalisation des réformes.
L'escadre américaine, croisant en Europe, a reçu
l'ordre de se rendre Constantinople, pour protéger
les sujets américains qui résident en Turquie.
Les cercles parlementaires de Berlin ont été désa
gréablement surpris par la nomination de M. de Hof-
mann comme remplaçant intérimaire du prince de
Bismark. Le prinçe avait désigné M. Camphausen, mais
le vice-président du conseil des ministres a reculé
devant la responsabilité de cette tâche. Les journaux
libéraux disent que M. de Hofmann, homme d'Etat très
honnorable d'ailleurs, n'est nullement la hauteur de
ses fonctions, et que, sous son administration, les af
faires de l'Empire n'ont pas été réglées avec le même
soin que sous celle de son prédécesseur, M. Delbruck.
A la Chambre des communes d'Angleterre, sir H.
Northcote a présenté le budget des dépenses.
Le rapport constate un excédant de 225,000 liv. st. Il
n'y aura donc ni augmentation, ni réduction des im
pôts.
L'état des finances est solide et prospère et le pays
pourrait, au besoin, supporter de grands sacrifices.
Le Denemark assiste en ce moment une lutte entre
les deux Chambres du Parlement, relative leur com
pétence réciproque en matière de budget et, analogne
celle qui a éclaté en France pendant la derniers ses
sion. Le désaccord s'étant maintenu, le Roi s'est vu
forcé, dans l'intérêt du bien-être de son pays, de signer
un arrêté fixant les recettes et dépenses, jusqu'à ce que
le budget de 1878 soit voté.
Le ministère a publié un mémoire dans lequel il dé
peint la conduite du Folkething l'égard du gouverne
ment. Cette Chambre, qui veut renverser le cabinet et
limiter le choix des conseillers du Roi, n'a accepté au
cun moyen de conciliation. Elle a même empêcté les
ministres le parler librement.
Le désaccord qui existe ne peut aboutir un chan
gement de la Constitution. Des élection seules peuvent
amener ce résultat.
En attendant, le Roi, comme défenseur de l'état de
choses existant, a le devoir de repousser toute tenta
tive de révision.
Les dissensions religieuses semblent renaître en
Espagne.
Une interpellation a été faite hier ce sujet la
Chambre des communes d'Agleterre. M. Bourke, sous-
secrétaire d'Etatj, a répondu que des représentations
avaientété faites au gouvernement espagnol au sujet de
la dispersion d'une congrégation protestante Cadix.
M. Canovas a promis ue faire une enquête et de pu
nir les coupables.
Post-scriptum.
L'armistice avec le Monténégro est expiré minuit.
Il n'a pas été prolongé. Il est probable cependant que
des deux côtés on observera la défensive.
Y près, le 14 Avril 187 7.