ÂssociatioD libérale et constitutionnelle
de Bruxelles.
Au moment où nous écrivons ces lignes, le
résultat du poil ouvert l'Association libérale
de Bruxelles, ne nous est pas connu mais
toutes les chances semblent être en faveur de
M. Janson; dans ce cas, M. Goblet retirera
sa candidature et la nomination de M. Jan
son nous semble presque assurée. Est-ce
dire que la majorité du corps électoral de la
capitale soit républicaine et socialiste et qu'elle
aura entendu voter pour un ancien membre
de l'Internationale.
Dieu merci il est loin d'en être ainsi, car
pour calmer les appréhensions du corps élec
toral et conquérir ses faveurs, M. Janson a
dû courir de meeting en meeting pour faire
les plus belles protestations de dévouement
la monarchie constitutionnelle et renier les
utopies sociales qu'il avait préconisées durant
une quainzaine d'années. On peut dire que
M. Janson s'est déshabillé en entrant l'As
sociation libérale et qu'il a laissé sa défroque
républicaine, socialiste, internationaliste la
porte de cette société constitutionnelle.
Nous reproduisons ici la lettre écrite in ex
tremis par ce candidat elle ne serait désa
vouée par aucun membre de la gauche et
moins de nouvelles palinodies on peut dire
que M. Janson est entré avec armes et baga
ges dans le camp des libéraux constitutionnels;
que l'on en juge
Il y a loin de là au fier tribun qui en 1869,
alors qu'il posait sa candidature au conseil
communal, ne voulait réussir ou succomber
qu'avec ses principes.
Aujourd'hui M. Janson n'est plus républi
cain que d'une façon idéale et n'est plus socia
liste que comme tout le monde et loin de
vouloir porter la moindre atteinte au capi
tal, la propriété ou au droit d'hérédité, il ne
veut que, comme tout le monde, améliorer la
situation des classes ouvrières.... avec le con
cours de tous les citoyens.
Nous avouons que nous sommes heureux de
cette conversion si inattendue, mais qu'en di
ront les anciens coréligionaires politiques de
M. Janson, ceux qui il a si souvent prêché
la haine contre la monarchie et l'excellence
des doctrines sociales
De son côté, la Société constitutionnelle des
électeurs libéraux s'est réunie Mercredi et a
fait choix d'un candidat en opposition M.
Janson. Ce choix est tombé sur M. Van Bece-
laere, commissaire de l'arrondissement de
Bruxelles. Voici comment M. E. Anspach a
justifié cette candidature
Les journaux de ce matin nous apportent
une lettre par laquelle M. Van Humbeek don
ne sa démission de Président et de membre
du comité de l'Association Libérale de
Bruxelles.
Cette résolution est basée, dit-il, sur ce que
les incidents de la lutte électorale lui ont dé
montré qu'il n'exerce plus dans l'Association
libérale et union constitutionnelle, l'autorité
morale indispensable au Président.
La Chambre commencera le lr Mai la dis
cussion du projet de réforme électorale. Deux
oints semblent devoir donner lieu une vive
iscussion d'abord le vote par ordre alphabé
tique dont le Gouvernement reconnaît lui-
même l'efficacité, sera réclamé par les libéraux
tandis que les Bachi-Bouchoucks insisteront
pour obtenir le vote la commune ou tout au
moins au chef-lieu de canton. D'après nos
renseignements aucun de ces deux points n'a
chance d'être accueilli.
Nous lisons dans le Journal de Bruges l'ar
ticle suivant, au quel nous donnons une com
plète adhésion.
Nous devons revenir sur ce qui se passe
Bruxelles.
La décision que l'Association libérale de cette
ville est appelée prendre sous peu est, quoi qu'on
en dise, de nature influer sur les destinées de la
cause libérale et, de ce chef, la presse libérale du
pays tout entier a le droit de dire son sentiment sur
les candidatures en présence.
Comme nous le disons, la presse brugeoise est
d'autant plus en droit de placer son mot dans cette
discussion que, dans une réunion publique, on a
été jusqu'à prétendre que l'arrondissement de
Bruges voyait d'un œil favorable la candidature de
M. Paul Janson
Après les regrettables tiraillements qui causèrent
la chute du ministère libéra!, notre parti, malheu
reusement divisé sur plusieurs points importants,
Vprts. le 98 Avril 1877.
Mon cher Buis,
Vous me demandez, au nom de quelques-uns de vos amis
politiques, de résumer les déclarations éparses dans les diffé
rents discours que j'ai prononcés. J'y consens d'autant plus
volontiers qu'il est difficile la presse,quelle que soit sa bonne
volonté, de reproduire avec une entière exactitude les paroles
qu'elle doit saisir au vol.
Reprendre les positions perdues, organiser d'une manière
efficace les garanties nouvelles destinées affranchir la société
civile du gouvernement des prêtres, tel est, me semble-l-il,
le devoir, primordial du libéralisme. C'est dans cette pensée
que j'accepte de représenter la Chambre le corps électoral
de Bruxelles.
J'entends y poursuivre, avec toute l'ardeur et toute l'é
nergie dont je suis capable, la réalisation du programme de
l'Association libérale qui est compris tout entier dans mes
aspirations politiques. J'entends unir dans ce but mes efforts
h ceux de la gauche parlementaire, dont l'accord, en vue de
la lutte contre l'ennemi commun, est en ce moment le plus
puissant intérêt du pays.
En ce qui concerne spécialement les questions qui inté
ressent les classes ouvrières et qui ont toujours été l'objet de
mes préoccupations, je les considère comme d'une nature
essentiellement scientifique j'estime qu'il faut demander leur
solution l'élude et h l'examen des faits.Leur importance même
exige que, pour les examiner et les résoudre, il soit fait appel
non h une seule classe de la société, mais tous les citoyens.
Il faut celte fin qu'ils s'unissent dans une loyale recherche
de ce que commandent l'intérêt général et la jnstice.
C'est dans cet esprit de conciliation et de paix, par la
persuasion et la liberté, sans faire appel h la violence, que je
veux poursuivre la réalisation de tous les progrès sociaux.
Cette œuvre sera celle du lendemain mais, encore une
fois, la nécessité du moment, c'est la destruction de la puis
sance cléricale.
Recevez, etc. Paul Janso.x.
24 Avril 1877.
M. E. Anspach. Je juis heureux de voir, dans la lutte
que nous allons livrer contre le socialisme internationaliste,
le drapeau de notre Association tenu par des mains aussi
dignes que celle de N. Van Becelaere.
En acceptant le périlleux honneur de courir les chances
d'uue lutte électorale dans les conditions où elle se présente,
M.E.Van Becelaere a bien mérité de l'opinion libérale.(Longs
applaudissements.)
On a parlé de candidats de combat. La candidature de
M. Van Becelaere est plus que toute autre une candidature de
combat.
Elle est en opposition avec ce parti qui, dans son passé, a
deux faits sinistres, les journées de juin et la Commune. (Très
bien très bien Applaudissements.)
Ou a dit que la candidature de M. Janson était une candi
dature de combat
Etrange confusion d'idées et dt mots.
On veut lancer un boulet de canon dans l'hydre cléricale.
Et on ne voit pas que l'arme va éclater dans les mains qui
s'en servent et tuer ces imprudents. (Applaudissements en
thousiastes.)
Pour renverser un ministère clérical, c'est une majorité
libérale qu'il faut, et celte majorité est impossible reconsti
tuer, si S.Janson l'emporte. Ce n'est pas dans dix ans, ni dans
vingt ans, que l'effet déplorable produit sur le pays par une
pareille élection, serait effacé.
On se demande comment des hommes sensés ne compren
nent pas que la plus grande force qu'on puisse donner au
parti qui nous domine, c'est de lui fournir des arguments
pour calomnier le libéralisme et lui permettre de dire que
le libéralisme contient dans ses flancs le socialisme, la répu
blique et l'Internationale(Très bien très bien
Daos les réunions publiques, on a couvert M. Janson de
fleurs on lui a fait des succès faciles. Personne n'a eu le cou
rage de dire la vérité sur celte condidature.
Eh bien, ce courage, je l'aurai.
M. Janson n'est plus un caractère. Il s'est amoindri, en im
plorant le patronage d'une association qu'il a autrefois con
spuée en reniant les doctrines qu'il défendait jadis.
On dirait vraiment que M. Janson a été élévé l'école des
jésuites et qu'il est un de ses brillauts élèves, car il fait des
distinctions subtiles entre la thèse qu'il renie et l'hypothèse
qu'il défend pour les nécessités de sa candidature. (Applau
dissements prolongés.)
J'aurais compris que H. Janson se donnât pour un répu-
cain, socialiste et internationaliste, en disant au corps électo
ral Voilà ce que je suis et ce que je veux. Hais H. Janson
se dit l'allié des libéraux, dont ii est le plus implacable adver
saire il se donne comme la bête du bon Dieu, lui qui a été
de l'Internationale, lui qui a représenté la classe ouvrière
comme exploitée par les censitaires et opprimée par un Par
lement de ventrus (Applaudissements frénétiques.)
Il se donne comme partisan de la paix et de la liberté
Oui, il a cette audace, et il se trouve des libéaux assez aveu
gles pour le croire et l'applaudir
On est frappé de stupeur en voyant ce que se passe.
Où allons-nous
Dans toute agglomération nombreuse il y a toujours une
infime minorité révolutionnaire qui voudrait tout reverser.
Par un coucours de circonslances un homme de talent a tiré
cette minorité de l'obscurité elle lui a fait une maiche tri
omphale son cortège est bruyante! quand ceux qui le com
posent disent qu'ils représentent l'opinion publique ils men
tent non ils ne représentent pas l'opinion publique, car
l'opinion publique repousse les candidats socialistes et répu
blicains elle le prouvera eu soutenant le libéralisme consti
tutionnel et monarchique de H. Van Becelaere. (Oui oui
et en assurant la victoire de notre candidat. (Applaudissement
prolongés).
Le poil a été clôturé hier, 10 heures.
Le dépouillement a donné les résultats suivants:
Nombre des votants, 780 voix.
Bulletins blancs, 1
Bulletins nuls, 1
H. Janson a obtenu, 630
M. Goblet a obtenu, 148
En conséqurnce, H. Janson a été proclamé candidat de
TAssociation libérale.
Ce résultat a été salué par de bruyantes acclamatious.
Quelques minutes après le poilH. Janson monte au local
de l'Association. Il y est accueilli par des acclamations
enthousiastes. De tous côtés il reçoit de chaleureuses félicita
tions.
Il monte la tribune et prononce le discours suivant:
Permettez-moi, Messieurs, de dominer l'émotion qui m'ac
cable et de faire taire uo instant mes sentiments de gratitude
pour vous parler encore une fois de principes.
Le scrutin qui ,vient de se fermer est la conséquence de
l'exercice même des libertés, que l'on m'a accusé de répudier.
(Applaudissements).
11 est le résultat de la liberté de la presse qui m'a défendu
et de la discussion franche qui a affirmé une fois de plus
l'exercice du droit d'association. (Bravo).
A ce point de vue, je me "félicite du succès que je viens
d'obtenir.
Nous devons remercier la presse cl tous ceux qui ont
apporté au succès de ma candidature tout leur zèle, tout leur
dévouement. (Applaudissements).
La parole est maintenant l'action. Il s'agit de faire con
firmer, par le corps électoral, la sentence que vous venez de
rendre. (Acclamations).
Nous allons combattre ceux que je n'aurais pas voulu
rencontrer comme adversaires.
Mais luttons sans haine, luttons pour que ces adversaires
comprennent enfin les véritables intérêts du parti libéral.
(Tonnerre d'applaudissements).
Aussi la lutte sera utile, féconde, et jettera peut-être les
première basses de l'union. (Applaudissements).
Nous allons rencontrer aussi, je l'espère car je les pro
voque la lutte nos véritables ennemis.
J'espère qu'ils n'iront pas porter leurs suffrages une frac
tion dissidente de notre parti. (Bravo).
Je pense que si tel était leur système, celte fraction dissi
dente répudieraitleurs suffrages. (Applaudissementspro
longés).
C'est au corps électoral juger. Si ceux qui nous combat
tent remportaient la majorité, notre devoir est tout tracé au
scrutin de ballottage, nous marcherions comme un seul
homme et nous volerions pour le candidat libéral. Longues
acclamations).
C'est ainsi que je comprends les véritables intérêts du parti.
Maintenant que la lutte inter amicos est terminée, je
rends un légitime hommage mon concurrent, qui ne s'est
jamais attaqué ma personne et qui s'est même déclaré
partisan de plusieurs de mes idées. Applaudissements
Il sort vaincu de la lutte, pour y rentrer bientôt et rem
porter un triomphe prochain. (Acclamations enthou
siastes).
Ces acclamations se prolongent pendant plusieurs minutes.
L'on n'entend plus qu'un formidable cri de Vive
Janson.
M. Jottrand qui préside déclare que le comité va se mettre
immédiatement l'œuvre pour faire triompher, le 30 courant,
le candidat choisi par l'Association libérale et Union
Constitutionnelle de Bruxelles.
L'enthousiasme est son comble. L'assemblée se sépare
confiante dans le résultat de la lutte qui s'apprête.