253. Dimanche.
37e année.
3 Juin 1877.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'Y.PRES ET DE L'ARRONDISSEMENT
Ce n'étaient que festons,
ce n'étaient qu'astragales.
paraissant le jeudi et le dimanche.
bulletin politique.
Dans l'une des dernières séances de la
Chambre, M. De Decker avait attaqué violem
ment l'honorable bourgmestre d'Anvers. Celui-
ci avait répondu vertement samedi dernier au
marchand d'huiles; prenant la parole devant le
conseil communal qu'il préside, M. De Wael
avait sommé l'honorable collègue de l'hono
rable M. Delaet d'apporter des preuves l'ap
pui de ses allégations: sinon,lui,bourgmestre
n'hésiterait pas dire, même ailleurs qu'au
conseil, M. De Decker qu'il avait lâche
ment et sciemment calomnié» l'administration
communale anversoise.
Le marchand d'huiles a donc essayé de
prouver mardi ce qu'il avait avancé, et ce,
clans un discours qui n'a point duré moins
d'une heure et demie tout cela propos de la
discussion de la réforme électorale un bon
moment a été celui où l'orateur, frémissant
d'une noble indignation, a tiré de sa poche et
montré l'auditoire un échantillon des fers
dont le tyran de Wael fait charger les cléricaux
qui tombent aux mains de son implacable po
lice. Ces fers pénètrent dans les chairs des
victimes qui risquent d'être estropiées pour la
vie ce sont là des supplices renouvelés de
l'inquisition. C'est odieux» ça s'est écrié
M. Barthélémy Dumortier, qui s'est immédia
tement détourné pour suivre l'exemple de toute
la Chambre et pouffer de rire son aise.
M. Bara a fait justice en quelques mots de
la diatribe de M. De Decker, qui amènera
probablement une seconde et victorieuse réfu
tation de M. de Wael puis on a entendu M.
Jacobs celui-ci a défendu les conclusions de
la section centrale, relatives l'article 46 du
projet de loi. A son avis, la loi doit respecter
toutes les prescriptions des cultes, qui exis
taient en Belgique au moment où la Constitu
tion a été votée. Les constituants connaissaient
ces prescriptions ils ont décrété la liberté des
cultes donc la loi est désarmée. M. Jacobs a
fait l'appui de sa thèse une étude des discus
sions du Congrès.
M. Tesch a répondu M. Jacobs il a dé
montré qu'en proclamant la liberté des cultes,
la Constitution avait eu en vue de sauvegar
der les droits individuels, sans reconnaître
aux cultes existants aucun privilège spécial.
M. de Landsheere a riposté en soutenant qu'il
ne s'agit pas d'accorder un prévilége au prêtre
mais qu'il ne faut pas permettre qu'on crée un
délit d'exception dont il serait seul victime.
M. le ministre était visiblement embarrassé;
mais la nuit porte conseil et le lendemain il
vint se tirer d'affaires l'aide d'une subtile
distinction entre la menace spirituelle et la
menace temporelle, la première échappant au
code pénal et la seconde tombant sous son ap
plication. C'était passablement hasardé, mais
M. le ministre a été plus loin. Il a inventé une
doctrine qui consacre la suprématie de l'Eglise
sur l'Etat; pour lui, les dogmes de la religion
dominent les lois de l'Etat et la Constitution
s'efface devant le Syllabus. MM. Frère-Orban
et Bara ont répliqué M. le ministre de la
justice et n'ont pas eu de peine démontrer
que ces principes tendent fonder la supré
matie temporelle du clergé, au risque d'élever
cette suprématie sur les ruines de nos institu
tions.
L'art. 46 de la loi électorale ne distingue
pas entre les prêtres et les laïques. Il les place
tous sur la même ligne et punit quiconque
viole le secret du vote. C'est la droite qui veut
faire au clergé une position spéciale et créer
en sa faveur le privilège de l'impunité. M. Ba
ra s'est surtout attaché démontrer que le mot
menace s'applique toutes les violences
morales et que la distinction faite entre les me
naces spirituelles et les menaces temporelles
ne repose sur rien et que cette distinction, si
elle était admise, créerait un privilège exhor-
bitant en faveur des ministres du culte. La
discussion continue et elle peut durer encore
une dizaine de jours, car le titre II notamment
semble devoir donner lieu des discussions
longues et animées.
Avez-vous lu le dernier numéro du Journal
dYpres?.... Quel air de fête!... Ce n'est plus
de la littérature, c'est une illumination per
pétuelle! Avez-vous remarqué comment nos
petits oints lèvent peu peu la tête en mar
chant dans les voies du seigneur et combien
ils sont pénétrés de l'idée de leur importance?
Est-ce que vous ne démêlez point dans la gran
de joie du Jubilé prochain, quelque grain de
jubilation personnelle
Depuis quelque temps, les figures de sacris
tie rayonnent d'un éclat particulier et il nous
semble que l'orgueil tencl de plus en plus se
développer dans le camp des cléricaux. Il y
aurait pourtant grand dommage, si nos oints
allaient laisser s'acclimater, chez eux, le pre
mier et le plus cossu des sept péchés capitaux.
Ce serait d'un mauvais exemple pour les
six autres.
Il nous a été donné d'observer ce progrès,
lors de la cérémonie de la Confirmation. Pen
dant que le profane vulgaire des enfants défi
lait devant Mgr Faict et recevait le Sacrément
qui implique entr'autres vertus la mansuétude
et la résignation chrétiennes, nous avons pu
remarquer côté de la grandeur réelle de la
cérémonie, la vaine grandeur humaine fleu
rissant et sepanouissant dans la personne
d'un gamin frisé, posant aux stalles, loin de
ses petits compagnons. Pourquoi cette excep-
VIRES ACQUIS IT Kl'MKI.
ABONNEMENT l'AR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres. Ir. 6-1)0
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne !e journal doit être adressé l'éditeur, rur de Dixmude, 59.
INSERTIONS: Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne fr. 0-25.
Des bruils d'un arrangement pacifique de la
queslion d'Orient ont circulé depuis quelques jours.
On a dit que le prince de Bismark, la suite des
événements de France, avait résolu d'intervenir
comme médiateur entre la Russie et la Turquie,
mettant profit ses excellentes relations avec Ed-
hem Pacha. On a dit aussi que la Russie se décla
rerait satisfaite de ses succès en Asie, et que le
Sultan, en présence de l'agitation qui régnait
Conslanlinople, serait tout disposé l'aire des con
cessions et s'avouer vaincu.
Nous ne demanderions pas mieux que de croire
ces rumeurs rassurantes. Mais le Nord dit qu'il
ne faut pas les prendre au sérieux.
L'agitation qui règne depuis huit jours Con-
stantinople semble ne pas devoir se calmer de si
tôt. Une dépêche publiée par le Times dit que,
mardi, 3,000 softas ont fait de nouvelles démarches
pour obtenir la destitution de Damat Pacha et de
Rédif Pacha. La dépêche anglaise ajoute que le
grand vizir a consenti la destitution de ce dernier.
On se rappelle que la destitution de ces deux mi
nistres avait déjà été demandée jeudi dernier par
les softas, dont la première manifestation fut suivie
de la mise de Conslanlinople en état de siège.
C'est donc sous le régime de l'étal de siège qu'avait
eu lieu la manifestation de mardi, et tandis que,
deux jours auparavant, l'intervention des softas
avait eu pour elîet de consolider la position de
Redif Pacha, mardi elle aurait amené le renvoi de
ce ministre.
Deux dépèches, envoyées l'une de Saint-Péters
bourg et l'autre de Conslanlinople, disent que le
rapport des généraux turcs, pas plus que ceux des
chefs russes, ne confirme la nouvelle de la reprise
d'Ardahan.
Eu Europe, les Turcs de l'Herzégovine sont en
marche dans la direction des défilés de Duga pour
ravitailler Niksich.
A Athènes le nouveau ministère est constitué
depuis hier 5 mais déjà un dissentiment est survenu
entre ses membres. M Condoslanolas, auquel avait
été donné le portefeuille de la justice, aurait préfé
ré celui des affaires étrangères et refuse d'entrer
dans le nouveau cabinet. M. Comoundouros se
chargera provisoirement de l'intérieur et de la
justice.
En Anglererre la Chambre des communes a re
pris ses séances avant-hier.
C'est aussi avant hier qu'a eu eu lieu Birmin
gham le meeting convoqué par M. Gladstone.
L'ancien leader de l'opposition a représenté la politi
que du gouvernement comme hésitante et mal défi
nie, et lui a attribué la responsabilité de la guerre.
11 s'est attaché ensuite justifier l'agitation popu
laire et a sévèrement condamné le système ottoman.
11 a conclu la dissolution du Parlement anglais.
En France, on se prépare aux élections. On
annonce aujourd'hui que le duc Decazcs posera sa
candidature au siège de sénateur inamovible, de
venu vacant par la mort de M. Ernest Picard.
Yprcs, le 3 JTuin 187 7.