Obsèques de M. Vrambout, GOUVERNEUR DE LA FLANDRE OCCIDENTALE. deRigoletto a dénoté, chez cet enfant, les plus heu reuses dispositions. Le jeu est simple et correct, le coup d'archet élégant et sur les notes d'attaque bien posées, et d'une justesse parfaite. M. Van Eegro possède déjà les brillantes qualités qui dis tinguent les virtuoses formés par M. Beyer. Espérons qu'un jour, par ses succès, il saura, lui aussi, ren dre hommage au talent et au mérite la fois si modeste et si grand, de son maître. M. Vuylsteke, flûtiste, est un ancien professeur du Conservatoire Koyal de Gand. C'est assez dire que ses deux morceaux ont été magistralement interprétés. Insister d'avantage est inutile, car M. Vuylsteke est de ces artistes accomplis pour les quels on n'a pas apprécier l'interprétation d'un morceau. Nous nous estimerions trop heureux,si nos faibles hommages pouvaient ajouter quelque chose sa réputation. Arrivons aux grands morceaux d'ensemble. La Société Royale des Chœurs de Gand a chanté, dans la perfectiou, la Fraternité, de Gevaert. Irons nous ici faire l'éloge de cette biillante phalange artistique dont la renommée est euro péenne, et qui est placée au-dessus de toutes les victoires, pour les avoir remporté toutes? Non, pareille entreprise serait téméraire, voire même ridicule. Aussi, nous bornerons nous offrir l'orphéon Gantois l'expression de notre profonde admiration. Les derniers accords du Chœur venaient de finir, lorsque M.AIph.Vandenpeereboom, ministre d'Etat, président d'honneur de notre Société des Chœurs,' monta sur l'estrade, avec les chanteurs Yprois. II s'agissait d'offrir aux chanteurs de Gand un souve nir de leur visite, au nom des membres de la Société des Chœurs d'Ypres. On avait fait choix de la reproduction en plâtre de la Marguerite, l'œuvre magnifique de notre concitoyen Fiers. Cette statue était placée sur un piédestal en marbre, portant sculptée sur la plaque d'albâtre de la face antérieure, l'inscription suivante: A la Société Royale des Choeurs de Gand, la So ciété des Cnœurs d'Ypres. 5 Août 1877. M. Alph. Vandenpecreboom prit alors la parole, et, dans une de ces charmantes improvisations dont il a le secret, il fit la Société Royale des Chœurs de Gand la remise du souvenir offert par les Chœurs d'Ypres. S'inspirant des paroles du chœur qui venait d'être chanté, M. Vandenpecreboom fit une charmante allusion aux sentiments de fraternité qui unissent les deux sociétés chorales puis, en guise de péroraison, se tournant vers la Mar- guérite si, disait-il, celte statue pouvait par- 1er en effeuillant sa fleur, pour caractériser nos sentiments d'affection, elle ne dirait pas un peu, ni beaucoup, mais passionnément Impossi ble de décrire le tonnerre d'applaudissements, les hip bip hourra et les vivats, qui accueillirent ces paroles. M. Delcroix, vice-président de la Société de Gand, prononça alors quelques paroles de remercîment. Sa réponse, pleine de finesse, et d'à-propos, fut accueillie également par de bruyants applaudissements. Il nous reste dire un mot du chœur de Mireille, chanté par les élèves du Cours de M. De vos, avec accompagnement par la section de Symphonie des Chœurs d'Ypres, ainsi que du Chœur des Pèlerins et de la marche du Tannhaiiser, morceau capital du concert. Jamais, croyons-nous, il n'a été donné nos concitoyens d'entendre, chez eux, des masses vo cales et instrumentales aussi imposantes que celles qui ont concouru l'exécution des morceaux du Tannhaiiser. Cette page magistrale de Wagner a été rendue avec un ensemble parfait et avec une vigueur et une puissance indéfinissables. Le chœur religieux, sans accompagnement, repris ensuite l'unisson des voix soutenues par les instruments, a produit sur l'auditoire une de ces impressions pro fondes qu'on n'analyse pas: il faut les sentir. Mê me remarque pour la Marche des Nobles, quoique dans un ordre d'idées différent.Ici leChant Triom phal, l'interprétation duquel concouraient les ri chesses de l'harmonie, en même temps que les res sources du chœur combiné avec les dessins des soprani ce chant triomphal nous a paru subli me.'C'était le bouquet de la fête; il la couronnait dignement. Le public a particulièrement goûté le chœur du Ir acte de Mireille. El c'était justice car rien de plus doux, de plus coquet, de plus charmant que les voix pures et cristalines des enfants, interpré tant avec un sentiment de l'art peu commun cet âge, l'adorable musique de Gounod: aussi est-ce au milieu d'un véritable enthousiasme que le chœur a été repris en entier. L'excellent quatuor de la section de Symphonie a accompagné ce morceau délicat de la façon supé rieure qui lui est habituelle: l'éloge de ces artistes- amateurs a été fait déjà bien des fois, et nous ne pouvons qu'enregistrer un succès de plus. Au moment où notre lâche semble accomplie, le lecteur s'étonne, sans doute, de n'avoir pas ren contré, en parcourant ces lignes, un nom qui se trouve dans toutes les bouches; "le nom de celui qui peut revendique* une bien large pari dans le succès de la fête, car il en a élé la cheville ou vrière: nous avons nommé M. Edouard Devos, l'érainent professeur du Conservatoire de Gand, et directeur de la Société Royale qui nous a honorés de sa visite. On ne nous taxera pas d'oubli, car ce nom était au fond de tous les éloges que nous avons été heu reux de pouvoir décerner, mais nous avons pensé que c'était un devoir de rendre ici, par une men tion spéciale, un hommage public cet homme dont la profonde modestie égale les hautes capaci tés musicales. Le public a pu juger par l'audition du chœur de Mireille, chanté par des enfants inex périmentés,et pour la plupart après un an d'études, de ce que peuvent produire le talent et la science unis un dévouement absolu. Combien donc l'E cole de Musique d'Ypres ne doit-elle pas se félici ter, de ce qu'un homme, pour qui la théorie et la pratique de l'art musical n'ont pas de secrets; qui jouit de la plus haute considération auprès des plus grands musiciens; qui a organisé et magistralement dirigé des solennités musicales restées jamais célèbres, que cet homme, disons-nous, ait con senti inculquer nos enfants les premières no tions de cet art dont il a pénétré tous les arcanes. C'est lui encore qui a bien voulu apporter notre Société de Chœurs le puissant concours de ses lu mières et de son immense talent; c'est Devos enfin,que nous devons la bonne fortune d'avoir pu applaudir aujourd'hui, comme il y a trois ans, les chanteurs d'élite qu'il a sous sa direction. Qu'il veuille agréer ici l'expression de nos plus chaleureux remerciments, et bien qu'accoutumé tous les triomphes, accepter la palme que la popu- lation Yproise lui décerne T7t rern IÏB La mort de M. Vrambout constitue un véritable deuil public; notre gouverneur ne possédait-il pas l'estime et l'affection de toutes les classes de la société. S'il en fallait une preuve éclatante, on la trouverait dans l'empressement de la foule aller lui rendre les derniers devoirs. Non seulement de tous les côtés de la province, mais de tous les coins du pays, le monde afflua Bruges. Des sociétés nombreuses, qui n'ont aucun rapport avec l'administration de la province, allaient se joindre la foule du monde officiel pour rendre un dernier hommage M. Vrambout. M. Vrambout n'était point un homme qu'on pût aimer ni haïr demi. Voilà l'appréciation de Robert, dans l'article que la Gazette consacre notre défunt Gouverneur. Il est, certes, impossible de dire mieux la vérité en moins de mots. Et Robert est compétent juger l'homme et le fonctionnaire il appartenait jadis la presse brugeoise et a vu M. Vrambout l'œuvre comme conseiller provincial et député permanent. Nature d'artiste, dit Robert une fois les affaires du gouvernement terminées, il devenait le plus spirituel, le plus gai, le plus aimable des causeurs et des épicu riens. La littérature, l'art, la science, le théâtre lui étaient familiers. Ajoutez que jamais gouverneur n'eut moins de morgue, nul n'oublia plus volontiers, ni ne se dépouilla plus allègrement des splendeurs officielles. Ajoutez cela le culte qu'il professait pour la langue de nos populations flamandes. On ne pouvait le haïr demi c'est une vérité, car il était impossible M. Vrambout de mettre son drapeau politique en poche. Son libéralisme était actif et au lieu de voiler ses opinions d'une ombre discrète, il les affichait. Il était d'une race et d'une trempe rares. Aussi ses ennemis étaient-ils implacables. M. Vram bout avait la conviction du devoir accompli, mais son sangfroid n'était pas tel qu'il put devenir insensible aux injures qui lui étaient prodiguées tout instant et aux insinuations déloyales qui devaient inévitablement blesser sa délicatesse. Malgré son état maladif, ses ennemis jurés n'ont pas voulu, ses derniers jours, lui épagner l'outrage et, s'il leur reste quelque pudeur, le rouge doit aujourd'hui monter au front île ceux qui, il y a dix jours peine, proposaient, mus par une inten tion méchante, de faire l'inventaire des meubles du gouvernement provincial afin de connaître ceux qui appartenaient personnellement M. Vrambout. Avaient- ils donc le pressentiment de sa perte Si ces gens-là croient la Providence, quels comptes n'auront-ils pas lui rendre pour avoir si lâchement torturé un homme de bien Remplissons le pénible devoir de rendre compte, en peu de mots, de cette triste cérémonie qui jette une si vive émotion au milieu de notre population et qui était annoncée par le glas funèbre des cloches de notre carillon. Lundi dernier, avant 10 heures du matin, les troupes de la garnison, sous le commandement supérieur du général Riche, se trouvaient rangées sur la Grande Place, devant l'hôtel du gouvernement provincial. Bientôt la compagnie des Chasseurs-Ëclaireurs et la légion de la Garde Civique y prenaient également place. Pendant ce temps, toutes les autorités, tous les amis se rendaient l'hôtel du Gouverneur, présenter leurs compliments de condoléance aux membres de la famille de M. Vrambout. Le corps du regretté gouverneur était exposé dans une chapelle ardente, aménagée dans une des dépen dances du vestibule la décoration en était plus décente que vendredi. Vers 11 heures, le clergé de Ste-Walburge fit son entrée l'hôtel.En ce moment, la famille, les autorités, les invités, les amis se pressaient autour du cercueil de M. Vrambout. La foule était immense; on se bouscu lait, on étouffait. Bientôt un religieux silence s'établit. M. Eug. De Cock, membre de la Députation permanente, faisant fonctions de gouverneur, prit la parole. D'une voix émue,il prononça un discours en sa qualité de président du Conseil provincial et de membre de la Députation." Nous n'avons pu obtenir ce discours, M. De Cock en réservait, sans doute, la primeur la Patrie. Nous nous bornerons donc consiater que M. De Cock fait un panégyrique de la carrière de M. Vram bout aussi élogieux que- pourrait le faire le meilleur ami de notre regretté gouverneur. Nous sommes loin de suspecter la sincérité des paroles de M. De Cock. Nous nous permettrons simplement de constater que chacun faisait cette reflexion tant d'enthousiasme aujourd'hui l'endroit des actes du gouverneur, alors que, pendant des années, on a fait ces mêmes actes une guerre acharnée 0 inconstance de l'homme Une grande partie du discours de M. De Cock était consacrée l'amplification de l'article de la Patrie, au sujet des sentiments religieux de M. Vrambout lors qu'il a senti sa fin s'approcher. M. De Cock a terminé en exprimant l'espoir de revoir son gouverneur dans un monde meilleur. Nous n'apprécierons pas ces paroles toutefois, nous aurions préféré les entendre prononcer par un homme moins sceptique que M. De Cock. C'est le seul discours qui ait été prononcé l'hôtel du gouvernement provincial. A la levée du corps, le 2régiment de ligne a fait un feu de bataillon. Le cortège funèbre se mit en marche dans l'ordre suivant La musique et le corps des Chasseurs éclaireurs ouvrant le cortège. Ils sont suivis du général Riche et du lieutenant-colonel de la garde civique. Des batail lons de la milice citoyenne et de la ligne forment la haie. Suivent le 2me régiment de ligne et le 2n,° régi ment des chasseurs, accompagnés de leur corps de musique et de leur drapeau en deuil. Viennent ensuite des députations de la plupart des sociétés de notre ville avec leurs drapeau et insignes. Le clergé de Ste Walburge, suivi des dépouilles du fouverneur Vrambout. Sur le cercueil se trouvait habit du défunt, couvert de ses nombreuses décora tions. Les coins du poêle étaient tenus par M. De Cock, membre de la députation permanente n. de gouverneur M. le général-major Courtin, commandant la province

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Le Progrès (1841-1914) | 1877 | | pagina 2