Manifestation populaire
la mémoire de feu M. Vrambout.
A Malines.
La Pauvreté des Couvents.
Funérailles de M. Thiers.
Carlon des fonctions de commissaire de l'arrondis
sement d'Ypres, pour caser dans celle place le ne
veu de l'onele.
Outre ces litres, M. Ruzette n'en possédait d'au
tre que celui d'avoir, pendant 10 ans, conduit avec
beaucoup de grâce ou de chic, tous les cotillons du
monde bien pensant de la capitale et des faubourgs.
Depuis 1870, M. Ruzette occupe la place de
commissaire d'arrondissement Ypres, mais ses
amis seraient fort eu peine de faire connaître les
brillants services administratifs qu'il a rendus et
qui viennent d'être récompensés.
D'ailleurs, il lui eut été difficile de rendre des
services, puisque le Benjamin du ministère cléri
cal n'était commissaire d'arrondissement que de
nom; c'était M. Surmont, membre de la députa-
tion permanente, qui était le véritable sous pré
fet.
La position respective de ces deux personnages
ne sera pas modifiée.
M. le chevalier Ruzette sera gouverneur en ti
tre; M. Surmont sera gouverneur de fait. C'est
même, paraît-il, une des conditions du marché,
car sans cela le député permanent devenait un as
pirant-gouverneur assez sérieux ou, du moins, as
sez embarrassant.
Voilà donc, du coup, Haantje De Cock, sinon
mis pied, tout au moins complètement détrôné
de ses fonctions de factotum de la députation per
manente.
Nous venons de dire plus haut que M. Ruzette
est homme du monde on ajoute qu'il est aussi af
fable et en même temps aussi insinuant qu'un jé
suite.
Voilà les qualités par les quelles il s'est distingué
Ypres.
Pour le reste, le favori de M. Surmont, qui est
un wallon dépaysé, est aussi étranger la province
et sa langue qu'à ses intérêts et son administra
tion.
Nos populations flamandes accueilleront donc
avec enthousiasme ce nouvel acte de népotisme
Dimanche a eu lieu, au cimetière général de la
ville de Bruges, la manifestation organisée, au
moyen d'une souscription par la classe ouvrière,
la mémoire du regretté Gouverneur de la province.
Bien avant l'heure fixée pour le départ du cortè
ge toutes les rues qu'il devait parcourir étaient
encombrées de monde.
A 4 heures les manifestants ont quitté la Mai
son Rouge. La section d'harmonie de la Réunion
Musicale ouvrait la marahe, suivie par les sociétés
de la ville avec leurs drapeaux en deuil. Venait
ensuite un groupe d'ouvriers portant l'écusson de
la province voilé de crêpe.
La Société des Ouvriers décorés formait une es
pèce de garde d'honneur autour de la couronne fu
néraire qu'on allait déposer sur la tombe de celui
qui fut l'ami, le protecteur et le consolateur de la
classe ouvrière, laquelle il avait prodigué tant
de témoignages d'intérêt.
Devantle groupe portant la couronne marchaient
quatre personnes qui symbolisaient, d'une manière
touchante, la classe ouvrière. C'étaient un vieil ou
vrier et une vieille ouvrière, un garçon et une
jeune fille, dans le simple costume des travailleurs.
Les femmes avaient un voile noir sur leur bonnet
de Iule et les deux hommes portaient le crêpe
la casquette. Tous quatre tenaient des branches
de cyprès avec nœud noir.
Les souscripteurs fermaient le cortège qui,suivi
et précédé d'une foule énorme, s'est rendu au ci
metière au milieu d'un profond recueillement.
Deux discours ont été prononcés et une pièce
de vers a été dite sur la tombe de M. Vrambout,
après quoi la couronne funéraire, qui est d'une
grande dimension y a été déposée.
Cette couronne encadréee dans une boîte en
zinc munie d'une glace porte pour suscriplion
Aan Gouverneur Vramboutde dankbare wer-
kersvan Brugge, den 9 September 1877. (Au
Gouverneur Vrambout, les ouvriers de Bruges re
connaissants, 9 Septembre 1877).
La cérémonie terminée, tout le monde a voulu
voir de près le témoignage de regret et de recon
naissance qui venait d'être déposé sur le tombeau
et le défilé a duré jusqu'à la fermeture du cime
tière.
C'était là une de ces manifestations grandes
dans leur simplicité et qu'on prodigue fort rare
ment ceux qui ont occupé des postes élevés.
Elle prouve combien iM. Vrambout fut aimé de ses
administrés.
Les libéraux Malinois ont vaillamment relevé le
défi que leur avait jeté la presse cléricale.
Nos lecteurs savent que, dans une assemblée
générale, l'Association libérale a résolu, la pres-
qu'unanimité des voix, de fonder un collège libre,
destiné maintenir Malines l'enseignement laïque,
proscrit par la majorité cléricale du Conseil com
munal.
Cette résolution fait d'autant plus d'honneur
nos amis qu'ils ne se sont pas un seul instant dissi
mulé les difficultés, très réelles et très sérieuses,
de leur entreprise.
Et, d'abord, la question d'argent.
Le budget du nouveau collège s'élèvera, au bas
mot, une trentaine de mille francs.
Puis, il va falloir se procurer un local convena
ble, recruter tout un corps professoral...
Ces difficultés sont sérieuses, nous le répétons,
mais nos amis ne s'y sont pas arrêtés. On nous a
défiés, se sont-ils dit coûte que coûte, nous vou
lons montrer nos adversaires que nous ne sommes
point gens courber la tête sous leurs insolentes
mises en demeure et que les libéraux de Malines
ne le cèdent, ni en dévouement ni en énergie, aux
libéraux de Termonde,de Rcnaix et d'Alost.
Et bravement, résolument, ils ont décidé qu'ils
maintiendraient, tout prix, leur collège.
Nous applaudissons, avec toute la presse libérale,
celte virile résolution qui honore, dans l'Associa
tion libérale de Malines, le libéralisme tout entier.
Lesjournaux cléricaux ne diront plus maintenant
que les libéraux ne savent pas aller leurs poches.
eran ersrT—r-r
Pour prouver la frivolité des observations de la
presse libérale sur l'extension de la main morte
monacale, lesjournaux de sacristie font grand bruit,
depuis quelques mois, d'une statistique, produite
la Chambre par M. le ministre Beernaerl, etd'après
laquelles les couvents n'occuperaient en Belgique
qu'une infirme partie de sol, soit 866 hectares en
tout et pour tout.
Vous voyez bien, disent ces journaux aux popu
lations, vous voyez bien qu'on vous trompe, lors
qu'on vous fait passer tous les jours sous vos yeux
les prétendues acquisitions des congrégations reli
gieuses.
Il est bien vrai que la statisque officielle de
■1866 ne porte qu'au chiffre prémentionné les pro
priétés territoriales des couvents, mais il ne s'agit
là, ce que les pieux journaux se gardent bien de
dire, que des biens des couvents, reconnus person
nes civiles par la loi, des corporations hospitalières
des sœurs de charité, qui seules ont qualité légale
pour acquérir et posséder en commun.
La statisque laisse absolument de côté les riches
ses immobilières du gros bataillon des moines et
nonnes, des jésuites, des rédemptorites, des capu
cins, des bénédictins, des carmes chaux et déchaux,
des augustins, des petits-frères et des petites-sœurs,
des carmélites, des récolietiues, etc., etc.
Si l'on parvenait additionner les biens de toute
cette engeance, on arriverait un total effrayant,
40 50 mille hectares peut-être, sur lesquelles
sont bâties les maisons les plus somptueuses, les
palais les plus vastes, tous biens qui frauduleuse
ment sont soustraits la circulation et aux impôts
de mutation et de succession, qui frappent les au 1res
propiétés.
Ce qui n'empêche pas les moines de se dire les
plus pauvres gens du monde, de quêter et de faire
souscrire les bonnes âmes sous tous les prétextes.
Aujourd'hui le Journal de Bruxelles tâche de
réparer l'incouvenance qu'il a commise en disant
que la morte de M. Thiors était un bon débarras.
Il reconnaît que cette expression pourrait être
considérée comme malheureuse, il assure qu'il
n'a voulu que caractériser la portée politique de
l'événement et non émettre une appréciation qui
serait par trop sommaire.
Le meâculpâ est très-pâle et il n'empêche pas
que la feuille cléricale n'ait montré ce qu'elle était
réellement. Mais enfin c'est un meâ culpâ.
Samedi dès le matin tout Paris a été sur pied. Il est
venu un nombre énorme d'étrangers.
Sur le parcours du cortège, presque toutes les bouti
ques étaient fermées dans le centre, il n'y avait pour
ainsi dire pas un magasin ouvert.
Les abords de la maison mortuaire étaient gardés
par l'autorité de très bonne heure les mesures de
policie les plus sévères ont été prises des troupes
nombreuses barraient les rues avoisinant la place St-
Georges.
A midi, quand le cortège s'est mis en marche, lapluie
qui tombait depuis le matin a cessé.
Le service funèbre a été célébré l'église Notre-Dame
de Lorette. Il a duré jusqu'à une heure et demie.
Mme Thiers et Mlle Dosne ont assisté au service dans
la chapelle latérale elles ont suivi le cortège dans une
voiture.
M. Gambetta a été acclamé la sortie de l'église.
Le cortège a suivi tous les boulevards, pour aller au
Père-Lachaise, au milieu d'une foule inouïe, dépassant
toutes les prévisions et comme on n'en avait jamais
vue même Paris.
Toutes les maisons étaient encombrées de spectateurs
jusque sur les toits. Il y a eu de nombreux accidents.
L'escorte militaire était composée d'une division for
mée de ligne, d'artillerie et de cuirrassiers.
Le char funèbre, traîné par six chevaux, disparais
sait sous les amas de fleurs. Les couronnes étaient
portées part, derrière le char.
Sur tout le parcours le cortège a été salué par les
cris de Vive la République Ces cris ont été excessi
vement nombreux.
On voyait dans le cortège les sénateurs, les députés,
les ambassadeurs, l'Académie, les étudiants, et une
foule énorme de bourgeois et d'ouvriers.
MM. J. Simon, Cissey, Grévy, Pothuau, de Sacy, de
Vuitry tenaient les cordons du poè'le.
Le calme le plus complet a régné tout le temps.
Le cortège est arrivé trois heures et demie au
cimetière, qui était occupé militairement. Il n'y a eu
aucun désordre.
M. Jules Simon a parlé le premier au cimetière. Il
s'est exprimé en ces termes
Le premier sentiment qui envahit l'esprit après une
si grande perte, est le découragement mais M. Thiers
nous apprend par l'histoire de sa vie qu'il ne faut ja
mais désespérer, ni jamais reculer.
Lisez les livres de Thiers, lisez sa vie, le patriotisme
éclate partout en lui Thiers servit un roi, mais con
dition que ce roi serait lui-même le serviteur fidèle de
la Constitution.
L'orateur rappelle que M. Thiers combattit la guerre
et ensuite alla demander toutes les cours leur appui,
fût ce seulement moral, pour la France. Il dit comment
il se retira le 24 Mai et quelles manifestations suivirent;
il termine en disant adieu au nom du pays l'historien
de la révolution, au champion de la liberté, au libéra
teur du territoire, au premier président de la républi
que française.