Le Couronnement du Pape.
Ce redoublement d'activité a sa cause dans les
commandes considérables qui ont été faites cet
établissement.
La Russie a commandé, entre autres, 128 af
fûts pour de grosses pièces de campagne qui doivent
être terminées au 1er mai prochain.
Une commande de 700 fourgons de munitions
eu fer n'a pu être acceptée par l'usine, les délais
prescrits pour la fabrication étaul trop courts.
La Belgique et la Grèce ont fait aussi des
commandes considérables, de so te que la section
de la fabrication des canons Essen est pourvue
de travail pour longtemps. Le nombre d»-s ouvriers
de l usine Krupp se monte 8.500.
Si l'on en croit un télégramme de Rome. Léon
XIII avouerait qu'il n'est point captif au Valican
de la manière la plus éclatante en usant de sa
liberté pour en sortir. Le séjour du magnifique
palais de Rome ne convient point sa santé,
parait-il. et il a décidé de s'établir Castel-Gan-
dolfo. dans un château appartenant la Papauté
et que la loi des garanties lui a conservé. La nou
velle est donnée d'une manière positive Cependant
il convient de ne l'admettre que sous réserve, car
avant-hier encore l'Univers prétendait que le Pape
resterait enfermé au Vatican, absolument comme
Pie IX. Mais il est possible que les hommes de
VUnivers. qui étaient tout puissants la Cour de
Pie IX, n'aient plus tout fait la même situation
celle de Léon XIII, et qu'ils ne soient plus aussi
bien au courant de ce qui s'y passe.
On télégraphie de Rome, la date du 22, la
Gazette de Cologne
Les contours de la situation commencent se
dessiner; on se prépare nettoyer le Valican. La
prélature domestique est dans l'angoisse; chacun a
craindre l'épée de Damoclès. le seul peut-être
qui restera contre toute prévision son poste est le
cardinal Simeoni. dont le maintien compléterait la
bonne entente avec les puissances catholiques fondée
par le Conclave.
On parle beaucoup de toutes sortes de réformes;
mais ce ne sont que des bruits sans consistance.
On commencera d'abord par épurer la prélature et
soumettre une discipline sévère la presse dé
vergondée cléricale.
Dans huils jours le collège des cardinaux se
formera en congrégations spéciales qu'attend une
rude besogne. Les Eminences sont en émoi, car il
s'agit de questions très graves, mais les opinions
sont des plus disparates.
On vient déjà de découvrir dans l'administra
tion du ménage pontifical des fraudes considéra
bles; on a biffé des comptes de fourrage pour des
chevaux qui n'existent pas on a repoussé égale
ment un compte du chapitre vaticanesque, portant
une dépense de 25,000 lires pour 12 bougies au
tombeau du pape défunt. L'aumônier du Pape,
connu par son avarice, sera congédié. La claustra
tion du Vatican va cesser.
On écrit de Rome que c'est le cardinal Dechamps
qui a le premier donné l'accolade au nouveau Pape.
Puisque de divers côtés on signale de nombreux
commerces auxquels les jésuites se livrent par
personnes interposées, il est bon de constater que
les révérends pères ne sont pas leur coup d'essai
et qu'à toutes les époques ils ont eu un faible pour
toute espèce de trafics, tant sont grands et insatia
bles leurs désirs de gains et de richesses. Leur
goût pour le commerce même été l'occasion dé-
tcrmi..anle de leur chute.
Un de nos confrères résume dans ces termes leurs
opérations commerciales dans les denx derniers
siècles
Ils s'étaient rendus maitres du gouvernement du
Paraguay. Les crédules et naïfs habitants de ces
contrées, les Indiens s'étaient laissés aller travail-
If r pour le plus grand profit de la Compagnie de
Jésus, qui, par ce fait, réalisait un revenu de plu
sieurs millions.
Le pape Grégoire XIII donna aux jésuites le mo
nopole. du commerce des Indes, et bientôt ils éta
blirent des comptoirs dans tout l'univers.
Au lieu de s'occuper de la propagation de la
foi, leurs missionnaires font le négoce de vins,
sucres, cafés, de toiles de Hollande, de mouchoirs.
Ils créent de plus des Banques où ils perçoivent de
gros intérêts, 25, 50 p. c. et au delà
En 1842. Sévile ils arrêtent tout-à-coup leurs
paiements, font banqueroute et réduisent plus de
cinq cents familles la mendicité.
L'évêque Palafox de Mendox en écrivit au Pape
Innocent X, en ajoutant qu'ils avaient extorqué
Séville 400.000 ducats.
D'après le même évêque, les jesuiles possédaient
dans l'Amérique du Sud un grand nombre de fer
mes d une iinmcnseélendue. Deux de leurs collèges
avaient 300,000 moutons.
Au Mexique, ils étaient propriétaires de six raf
fineries de sucres, représentant une valeur de six
millions.
Le cardinal Saldanha, chargé par le pape de
vérifier le rapport, le trouva parfaitement exact.
En 1741, le pape Benoit XIV reprocha aux jé
suites de s'être livrés la traite des nègres et de
plus do vendre des Indiens couvertis. en les arra
chant leurs femmes et leurs enfants.
Le même Pape, comme ses prédécesseurs Urbain
XI1, Innocent XIII et Clément XII, dut leur inter
dire la vente des drogues et des recettes d'apothi
caire.
Au Portugal leurs excès furent tels qu'ils déter
minèrent le roi Joseph lancer un décret d'expul
sion.
En France, leur esprit de lucre donna naissance
un scandale.
Le père Lavalette, général des missions, avait
fondé Si- Domingue et la Martinique, un vaste
commerce de denrées coloniales. L'affaire était en
pleine prospérité, lorsqu'éclata en 1746 la guerre
entre la France et l'Angleterre. Les Anglais caput-
rèrent les navires de laCompagniet et le Père Lava
lette dut suspendre ses paiements.
De négociants de Marseille, porteurs de lettres
de change, reclamèrent auprès de la Compagnie.
Celle-ci prétendit qu'elle n'était point responsable,
et le père Lavalette offrit de solder les créances en
messes pour les trépassés. C'était porter trop loin
la plaisanterie et la mystification.
Il y eut procès. Les jésuites évoquèrent l'affaire
devant le parlement de Paris, où ils se croyaient
sûrs de triompher. Elle fut plaidée avec grande
solennité, et le 8 mai 1861, le supérieur-général,
et en sa personne la Société des jésuites furent con
damnés acqui'.er la somme de un million cinq-
cent-deux mille livres, plus cinquante mille francs,
en tout plus de trois millions de notre monnaie.
Ils continuèrent soutenir qu'en vertu de leurs
constitutions, ils'n'avaient pas répondre des det
tes faites par le père Lavalette. et offrirent de pro
duire ces constitutions.
L'offre fut acceptée. Les constitutions furent
produites, et l'examen auquel se livra le Parlement
aboutit la condamnation des maximes jésuitiques,
comme séditieuses, destructives de tout principe
de morale chrétienne, contraires la sûreté et la
vie des citoyens et la personne des souverains.
L'arrêt ordonnait que vingt-quatre ouvrages des
théologiens de la Compagnie seraient lacérés et
brûlés en la cour du Palais par la main du bour
reau et faisait défense aux jésuites de continuer
enseigner.
Cet arrêt, vivement approuvé par l'opinion, pro
voqua l'expulsion des jésuites de France.
Aujourd'hui, nous voyons les révérends, peu
corrigés par l'expérience, recommencer leurs trafics.
Il faut s'attendre de nouveaux désastres et de
nouvelles punitionsprovidentielles.
La faillite de la Société Jti chemin de fer d'Eecloo-
Bruges, qui vient d'être déclarée par le tribunal de
commerce ne paraît pas devoir cire favorable aux
obligataires de cette iigoc, bien que ce soit l'un
d'eux, nous assure-l-on, qui ait provoqué cette
mesure.
Les rentiers des Flandres sont réellement bien
éprouvés depuis une quinzaine d'années. Les affai
res Langrand, dans lesquelles ils ont été entraînés
par des conseils intéressés, leur ont fait subir des
perles considérables. La Banque de l'Union et la
Banque de Belgique leur en ont fait voir d'autres,
et la faillite des Bassins Houillers, en avilissant le
revenu de la plupart des litres du réseau des Flan
dres, est venu combler le désastre. Par la lenteur
calculée que le Gouvernement met reprendre ce
réseau, la situation ne fait que s'aggraver chaque
jour et nos représentants n'ont garde d'élever la
voix en faveur de leurs commettants, de peur de
contrarier le Ministère.
Dans cette situation et pour ne pas laisser aug
menter les perles déjà si grandes, nous croyons
pouvoir donner un conseil ceux de nos lecteurs
qui sont obligataires de la ligne d'Eecloo-Gand. La
faillite de l'Eeeloo-Bruges ne louche en rien leur
position, qui est aussi bonne qu'elle l'ait jamais été.
Cette ligne d'Eecloo-Gand est indépendante de celle
qui vient d'être mise eu faillite. Elle n'est chargée
que de 6,000 obligations, dont le service financier
est parfaitement assuré par le trafic. Et de même
que nous avions des motifs puissants pour les
engager ne pas entrer dans les affaires Langrand,
nous avons pris bonne source des renseignements
qui nous permettent de leur dire que les obligations
d'Eecloo-Gand n'ont rien craindre, et que ce
serait peu réfléchir que de s'en défaire au moment
où une baisse légère mais momentanée, peut les
atteindre par la confusion qui serait faite des deux
lignes. (J. de Bruges).
Il paraît qu'au moment de signer, sous la réserve
de l'approbation des Chambres des deux pays, la
convention de Terneuzen, une difficulté a surgi
qui cependant n'aura pas pour effet d'amener une
nouvelle rupture. On assure même que le ministère
compte bien faire ratifier la convention avaul la fin
de la session actuelle.
On verra donc, la fin sans doute, manœuvrer
en sens inverse, la veille des élections de juin,
la fameuse machine électorale dont on a fait usage
il y a deux ans, pour les élections d'Anvers.
Serait-ce une nouvelle malouterie? Il faut le
croire. (J. de Bruges
Le dimanche qui suit l'élection du Pape, ontlieu
les formalités du couronnement.
Des sous diacres apostoliques viennent saluer le
pape, son lever, et lui apportent solennellement
un coq en bronze destiné lui rappeler, en ce jour
solennel, la faiblesse dont saint Pierre se rendit
coupable, en reniant trois fois son maître avant
que le coq ait chanté ainsi que Jésus le lui
avait prédit faiblesse laquelle tout homme est
exposé.
De sa chambre, le pontife se dirige en grande
cérémonie vers la chambre dite Lit des parements
d'où il sort revêtu de ses vêlements pontificaux et
la mîlre en tête. De celte chambre il passe la
salle ducale, où il monte sur la chaise papale
portée sur les épaules de douze huissieurs vêtusde
velours rouge.
Arrivé au portique de Saint-Pierre, il descend
de sa chaise papale et va s'asseoir sur un trône
qui se trouve élévé en face de la grille muréequ'on
nomme la porta santa et que l'on n'ouvrequepen-
dai.l les années du jubilité. Il reçoit premièrement
l'hommage de l'archiprètre, puis, debout, celui du
clergé de la basilique. Il remonte ensuite dans la
chaise et le cortège entre dans l'église.
Devant la chapelle du Saint-Sacrement, le pape
descend, ôte sa mîlre, se met genoux, fait une
très courte prière, remonte dans la chaise et s'arrête
enfin la chapelle de Saint-Grégoire, terme de la
pérégrination.
Un trône avec baldaquin est dressé dans cette
dernière chapelle. Le pape y monte et reçoit alors