AFFAIRE ANTHONE* CONSORTS
Chronique Judiciaire.
Actes officiels.
Bibliographie.
NOTRE SIÈCLE,
coin d'assises iik i.a flandre occidentale.
A«*c*uh»tluu ili' l»aiii|iier«»iit«> fi*;iu<iuli*ii.»tt*,
fauv en écrit ur<>w, etc.
Audience du 20 mars.
Il y a eu du monde toute la nuit dernière dans la
salle de la Cour d'assises, qui est restée ouverte au
public comme pour les suspensions d'audience ordi
naire.
La Cour et la défense avaient été averties, que vers
3 heures de l'après-midi, le jury aurait eu terminé ses
délibérations. Aussi dès avant cette heure déjà, la foule
remplissait la salle et beaucoup de monde se tenait aux
abords du Palais de-Justice. L'affluence giandit encore
lorsque le légendaire panier salade et la vigilante
contenant M"* Anthone amenèrent les accusés de la
prison.
Vers 4 heures, le bruit se répand qu'un des jurés,
M. Raes, de Courtrai, est assez sérieusement indisposé,
et les commentaires d'aller aussitôt leur train sur les
conséquences probables d'un pareil incident. Heureu
sement, M. Raes, au bout d'une heure, est suffisam
ment remis, et l'audience, suspendue depuis la veille
au matin 10 1/2 heures, après la lecture des questions
posées au jury, peut être reprise 5 heures.
A ce moment, la foule est énorme. Tous les premiers
rangs des places réservées sont occupés par des dames
dans le public également, le sexe faible mais avide de
fortes émotions, est nombreux et nous pouvons consta
ter, d'après les propos qui parviennent jusqu'à nous,
que ce n'est pas lui qui est le plus charitable
Lorsque le silence s'est fait, M. Ensor, chef du jury,
la main sur le cœur, donne lecture des réponses du
jury aux nombreuses questions qui lui ont été posées.
Cette lecture n'est terminée qu'à 6 h. 40.
Il n'y a que la 15e question seule qui a été résolue
par sept voix contre cinq.
Le jury ayant omis de répondre la 102" question
N° 9, et sa réponse étant dès lors insuffisante et incom
plète est renvoyé dans sa salle des délibérations pour
compléter sa déclaration en répondant la susdite
question.
Au bout d'un quart d'heure il revient avec une ré
ponse affirmative.
La Cour se retire pour délibérer sur la 15' question
des faits principaux qui a été résolue par 7 voix contre
5, et revient avec un jugement par iequel elle déclare
se joindre sur cette question la minorité du jury.
Les réporses du jury impliquant la condamnation de
tous les accusés, trois des défenseurs se rendent auprès
d'eux pour les préparer en recevoir la nouvelle.
Les accusés qui depuis peu après 3 heures étaient
renfermés dans cette chambre, sont introduits 7 1/2
heures. Dieu sait les angoisses qui ont torturé leur âme
pendant cette longue attente dans une chambre froide
et obscure où ils devaient entendre le murmure de la
lecture des questions dont dépendait leur sort.
ADthone garde toujours sa même contenance ferme
et résignée, son épouse pleure et sanglotte silencieuse
ment, le jeune Heuninck est tout abattu, Hector
Anthone conserve son air sombre il a les yeux profon
dément enfoncés dans les orbites, Evariste Claeys est
très pâle.
M. le Président charge le greffier de donner aux
accusés lecture des réponses du jury.
L'émotion du petit Heuninck redouble et peine a-t-
il entendu prononcer quelques oui qu'il pleure bruyam
ment et s'écrie douloureusement Ma mère! ma
mère! La lecture est interrompue un instant; le
défenseur de cet accusé s'efforce de le calmer. L'épouse
Anthone pleure de plus belle.
Cette scène pénible impressionne profondément le
public, beaucoup de dames ont de la peine retenir
leurs larmes. Le principal accusé les yeux gonflés, il
est profondément remué. Sa jeune femme, brisée par la
douleur, se trouvant presque serrée contre lui, on
s'aperçoit qu'il est livré des tortures morales atroces
néanmoins il se tient toujours ferme.
M. le greffier réprend sa lecture qui n'est plus inter
rompue, les accusés se calmant insensiblement. La
lecture terminée, M. le président suspend l'audience
pour trois quarts d'heure afin d'accorder un peu de
repos Messieurs les jurés et de permettre aux accusés
de prendre un peu de nourriture.
De violentes huées éclatent aussitôt dans le public.
M. le substitut du procureur du Roi se lève et
s'écrie avec énergie qu'il est indigne de traiter ainsi
des accusés.
Il ordonne aux gendarmes d'amener la barre qui
conque se permet ces manifestations.
La foule est tellement grande qu'il est presque im
possible de maintenir l'ordre.
A 9 1/2 heures la Cour rentre en audience.
Les accusés sont de nouveau introduits.
M. le Président. La manifestation qui s'est produite
tantôt est réellement regrettable. Il est indigne de
manquer ainsi au respect dû la justice. On ne devrait
pas oublier que les accusés sont inviolables lorsqu'ils
se trouvent sous la protection des magistrats.
La parole est accordée au ministère public.
M le Substitut du procureur du Roi requiert con
tre les accusés l'application de la loi.
M. le Président demande aux avocats s'ils n'ont plus
rien ajouter.
Af* De Brauioere, défenseur du principal accusé,
n'a rien dire.
MCauwe dit qu'il a déjà fait ressortir toutes les
circonstances qui plaident en faveur de sa cliente et il
la recommande la bienveillance et la clémence de
la Cour.
Me Geuens fait la même recommandation pour Heu
ninck, et espère que la Cour se souviendra de son jeune
âge et de ses bons antécédents, et qu'elle descendra
jusqu'au minimum pour l'application de la peine.
M. Doudan recommande également son client Hec
tor Anthone la bienveillance de la Cour.
Me De Poortere invoque aussi la clémence de la
Cour et espère qu'elle se souviendra des bons antécé
dents d'Evariste Claeys.
Interpellés tour tour par M. le président, les accu
sés déclarent n'avoir plus rien dire.
La Cour se retire pour délibérer.
Pendant l'absence de la Cour, les cris assourdissants
de tous genres, dès chants même ne discontinuent pas
dans le public. La tenue d'une partie de ce monde est
réellement révoltante.
Il est 5 minutes avant II heures lorsque la Cour
rentre.
MCauwe remet M. le président un billet par
lequel les accusés demandent acte
1° De ce que dans la lecture des questions soumises
au jury, M. le président se soit fait remplacer par MM.
les assesseurs
2° De ce qu'après la clôture des débats l'audience a
été suspendue et que MM. les jurés ont été en relations
avec le public.
3° De ce que M. le greffier n'a pas donné lecture de
l'arrêt relatif la question N° 15, pour laquelle la
Cour a dû se retirer afin de délibérer et sur laquelle
elle s'est jointe la minorité du jury.
M. le Substitut du Procureur du Roi s'en réfère
l'appréciation de la Cour.
Après délibération, la Cour donne acte de ces trois
observations.
Les accusées sont ramenés.
"Verdict.
Il est 11 h. 20 lorsque M. le président commence la
lecture du jugement, qui condamne:
JULES ANTHONE, 1° du chef de banqueroute frau
duleuse, 2° banqueroute simple, 3° abus de confiance,
4° escroquerie, 5° faux en écriture de commerce et de
banque, quinze années de réclusion, 2,000 fr.
d'amende et la moitié des frais du procès. Il est en
outre privé perpétuité des droits civiques prescrits
par l'art. 31 du Code pénal.
LOUISE BLOMME, épouse Jules Anthone, 1° du chef
de complicité de banqueroute frauduleuse, 2° de faux
en écritures, cinq ans de réclusion, 26 fr. d'amende
et 1/6 des frais du procès. (Minimum de la peine).
LOUIS HEUNINCK, du chef de faux en écritures,
cinq ans de réclusion, 26 fr. d'amende et 1/6 des
frais du procès. (Minimum delà peine).
HECTOR ANTHONE, frère du premier condamné,
du chef de complicité de banqueroute frauduleuse,
quatre mois d'emprisonnement et 1/12 des frais du
procès.
EVARISTE CLAEYS, du chef de complicité de ban
queroute frauduleuse, quatre mois d'emprisonnement
et 1/12 des frais du procès.
Tous les coudamnés ont trois jours pour se pouvoir
en cassation.
M. le Président informe les deuxième et troisième
condamnés que la Cour est disposée solliciter en leur
faveur la clémence royale.
L'arrêt ordonne en outre que, pour ce qui concerne
la banqueroute, le jugement sera affiché aux lieux ac
coutumés, et inséré, aux frais des condamnés, dans le
Journal de Brugesla Patrie, l'Avenir des Flandres
le Burgerwelzijn et la Gazette van Brugge.
M. le Président félicité MM. les jurés pour le zèle,
l'activité, l'intelligence, le dévouement et l'abnégation
avec lesquels ils ont rempli leur pénible tâche. Ils ont,
dit-il, religieusement et scrupuleusement tenu le ser
ment solennel qu'ils ont prêté en entrant en fonctions.
Après quoi la première session de la Cour d'assises
pour 1878 est déclarée close.
Les accusés se retirent, Heuninck est complètement
défait. Le départ du principal accusé est salué par les
huées et les sifflets de la foule.
Nous renonçons décrire les scènes qui ont accom
pagné le transport des condamnés la prison. C'était
un vacarme épouvantable mais qui s'adressait seule
ment Jules Anthone. La foule accompagnait les voi
tures en chantant 1' Ongediert der papen.
Ainsi finit le dernier acte de ce procès qui a eu tant
de retentissement parmi notre population et qui a occu
pé huit jours d'audiences.
Commissaire de police. M. Vanderschaeghe est
est nommé commissaire de police de la ville de Wervicq, ar
rondissement d'Yprrs, en remplacement de II. Dctillonx.
L'Illustration Européenne 10,50 fi s. franco par an)
Sommaire du N°. 20.
Gravures L'Etat-Major autrichien devant le corps de
Marceau, d'après M. J. P. Laurens Cromwell et sa fille lady
Claypole, d'après M. Ch. Soubre. Le Tombeau de Daniel
O'Connell. Les Tours rondes de la Sardaigne. Femme
abyssinienne jouant avec des Serpants.
Texte. Nos Gravures. Chronique littéraire. Ua
Pamphlet sous Louis XIV. Compositeuretcantalrice. Episode
de la vie d'un grand Artiste. Les Prétextes. Fable. Dans
les Pyrénées. Impressions et Souvenirsd'un Touriste belge.
Le Crime de Tolumont, par un Magistrat Liégeois. Trois
Vautours pour une Colombe. La Boite aux Jeux d'Esprit
Enigme.
Le Musée du Jeune Age (4,25 frs. franco par an)
Sommaire du N°. 4.
GravuresLes Pigeons. L'Héritage d'une Mère.
Madame gardera sans doute bien une servante? Un jeune
Déserteur. Leçon de Dessin N°. 2.
Texte Histoire naturelle. Les Pigeons. L'Héritage
d'une Mère. La Clef des Champs. Causeries instructives
et amusantes. L'Histoire des Marionnettes. Style incor
rect. Comment un Enfant doit se conduire la Promenade.
Un Peuple qui mange de la Terre. Une bonne OEuvre.
Comment on doit prier. Les Récréations. Enfants
et Vieillards. L'Histoire du Verre.
L'Administration de L'ILLUSTRATION EUROPÉENNE
vient de faire paraître le premier fascicule d'une œuvre de
la plus haute importance, intitulée
Revue biographique internationale des notabilités
de tous les pays.
La rédaction de cette revue est confiée une société de gens
de lettres
sous la direction de Gustîive Oppelt,
Historiographe de la Cour de Saxe-Cobourg-Gotha, etc., etc.
NOTRE SIÈCLE est un ouvrage indispensable aux biblio
thèques publiques et particulières, aux magistrats, aux avo
cats, aux avoués, aux médecins, aux journalistes, aux hom
mes de cabinet, aux conseillers provinciaux et communaux,
aux fonctionnaires civils et militaires, aux membres de l'en-