6 FRANCS PAR AN.
Ko 342. Jeudi,
38e ANNÉE.
10 Avril 1878.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Après
•ès Tournai, Louvain!
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DMANCHE.
BULLETIN POLITIQUE.
Le Parlement anglais a ouvert les débats sur le
message de la Reine qui mobilise les réserves. A la
Chambre des lords, le comte Beaconsûeld a ouvert
la discussion en proposant une adresse de remer
ciements ce message.
Le chef du cabinet a déclaré qu'une grande
révolution s'accomplit, que la liberté de l'Europe
est menacée et que le congrès qui. son avis, est
le meilleur moyen de concilier les choses, ne pou
vant, selon toute apparence, aboutir, l'empire
britannique devait prendre toutes les mesures
nécessaires pour se maintenir la hauteur de la
situation qu'il occupe en Europe, dût-il même
employer des efforts aussi grands que ceux qui ont
dû être mis en œuvre pour arriver sa constitution.
Lord Beaconsfield a justifié ses appréhensions,
en faisant ressortir tout le danger qui découle des
différents articles du traité de San Stefano pour la
Grande-Bretagne et pour l'Europe, en insistant
notamment sur la manière mystérieuse et secrète
dont ce traité a été conclu.
Quant l'Angleterre, elle veut prendre pour
bases des modifications qui doivent être introduites
dans la carte de l'Europe, par la force même des
choses, les traités de I8o6 et de 1871, par lesquels
toutes les puissances sont engagées.
Lord Granvillea répondu le premier au chef du
cabinet, en déclarant qu'il laissait au gouverne
ment toute la responsabilité de sa conduite.
Lord Derby a fait une réponse plus significative.
Je m'oppose la guerre, a-t-il dit, parce qu'une
alliance avec l'Autriche est douteuse et que c'est la
seule qui soit possible.
Le marquis de Salisbury a sévèrement blâmé
celte déclaration indiscrète et a vivement attaqué
la politique de la Russie.
Le résultat de la séance a été une grande victoire
pour le gouvernement la Chambre des lords a
adopté l'adresse, en réponse au message de la Reine,
sans vote.
Les informations que nous avons reçues relati
vement la nouvelle attitude prise par l'Allemagne,
Se confirment aujourd'hui.
Le Montagsblatt, de Berlin, croit pouvoir an
noncer de nouveau, d'après des renseignements
provenant, dit-il. d'une source excellente, que le
Czar a demandé l'empereur Guillaume de jouer
le rôle de médiateur entre la Russie, la Grande-
Bretagne et l'Autrichc-Hongrie.
Plusieurs interpellations ont été faites au Parle
ment italien sur l'attitude qu'observera le gouver
nement dans la question d'Orient. Tout ce que
nous savons pour le moment, c'est que M. Vis-
conti-Venosta a renoncé la sienne, après avoir
reçu en particulier de M. Corti l'assurance que la
politique du gouvernement italien ne sera nulle
ment sous l'influence de la Russie.
D'après une dépêche adressée de Rome au Mon
tagsblatt de Berlin, le pape aurait déclaré, dans
une audience donnée au cardinal Martel, qu'il avait
l'intention de supprimer les emplois politiques de
la cour du Vatican, désormais superflus, et de
donner en échange aux titulaires de ces emplois,
des postes ecclésiastiques qui ne seraient pas des
sinécures.
Cette dépêche ajoute que l'Encyclique, déjà prête
partir, va être quelque peu modifiée par suite de
la réponse faite par l'empereur d'Allemagne la
notification de l'avènement de Léon XIII.
Une longue discussion a eu lieu au Parlement
allemand au sujet du crédit demandé pour la créa
tion d'un emploi de sous-secrétaire des finances de
l'Empire. Les ultramonlains et les progressistes se
sont vivement opposés l'allocation de ce crédit,
mais ils n'ont pas obtenu gain de cause et le projet
a été adopté en première lecture.
Le résultat des élections françaises du 7 avril n'a
pas surpris les républicains.
Parmi les partis qui combattaient le gouverne
ment, ce sont les bonapartistes qui éprouvent le
plus grand échec dans le scrutin. Neuf des leurs
étaient soumis la réélection huit se sont repré
sentés et tous les huit ont échoué complètement.
Ce résultat précipitera inévitablement cet émietle-
ment des partis dissidents, que l'on a pu constater
en plus d'une circonstance, et diminuera progressi
vement les résistances aux institutions établies.
On écrit de Louvain, la Flandre libérale,
le 8 Avril
Ainsi que je vous en exprimais la crainte, la
manifestation de la jeune garde catholique ne s'est
pas passée sans incidents.
Hier matin, 7 heures, le cortège, formé au
local de la Vlaamsche Katholieke wachts'est
rendu processionnellement la chapelle des RR.
PP. récollels, où s'est fait la bénédiction du dra
peau, prétexte de la manifestation.
Vers 11 heures, sont arrivés les Ware Signoren
d'Anvers, qui. la descente du train, se trouvèrent
fort surpris, et même assez décontenancés, de se
rencontrer avec une escouade d'agents de la police
judiciaire d'Anvers. L'impression dégréable qu'ils
ont ressentie ce moment, se trouve tout entière
dans l'exclamation de l'un d'eux Wij zijn ver-
kocht! Nous sommes trahis!
Vers les trois heures un nouveau cortège se
forma. Il ne compte pas deux cents personnes; et
pourtant il y a là la jeune garde catholique louva-
nisle, les fanfares de Corbeek-Loo, la Section
universitaire du Davidsfonds, le Nederdeutscbe
Kalholieken bond, les Xavériens de VVavrc, et les
Ware Signoren.
Sur le parcours, un agent de police est insulté
par un Anversois le commissaire adjoint arrête
celui-ci pour s'assurer de son indenlité et reçoit sur
la main, un formidable coup de gourdin. Procès
verbal est immédiatement dressé, mais la police,
ce moment, a fort faire pour rester maîtresse du
terrain.
Le cortège se disperse vers 6 heures: sauf les
Anversois, tous les étrangers se hâtent de reprendre
le chemin de leurs pénates.
Au théâtre De Bériôtsedonne unereprésentation
dramatique par les Ware Siqnoren.
Devant ce théâtre a lieu la première bagarre.
Les portes de la salle du spectacle s'ouvrent, et lais
sent voir une foule de bras levés, armés de casse-
têtes. Une personne digne de foi, prétend même
avoir vu un révolver. Ailleurs un individu bran
dissant un poignard se montre la tête. Enfin plu
sieurs procès-verbaux sont dressés pourporld'armes
prohibées.
L'intervention de la police au théâtre met fin au
tumulte. On découvre alors, dans l'embrassure
d'une porte, un catholique, annotant avec soin les
noms de toutes les personnes qu'il parvient recon
naître dans le groupe libéral.
Après le spectacle, il y a quelques rixes notam
ment au Café Mahieu. Ici aussi l'intervention de
la police est nécessaire. Un bourgeois, qui prétait
main forte aux agents, y est mordu la main.
Vers minuit et demi, des attroupements se for
ment devant le local de la jeune garde. Il y a de
nouvelles rixes plusieurs arrestations sontoperées.
Le piquet militaire a même été un moment sur
les lieux: mais le bourgmestre s'est empressé de le
renvoyer la garde.
Celte mesure a valu M. Vander Kelen une
chaleureuse ovation de la bourgoisie.
Cet honorable magistrat circule dans le foule,
et invite tout le monde se retirer. Beaucoup de
bourgeois obtempèrent cette invitation, et vers
trois heures du matin, la ville est lenlréc dans le
calme.
En résumé, la jeune garde catholique a réussi
mettre beaucoup de monde en route: mais sa
manifestation a fait fiasco les louvainistes ne s'y
sont pas railliés j'ai vu plusieurs des chefs du parti
catholique, même flamingants, qui n'ont pas honoré
de leur présence, le spectacle des Ware Signoren.
C'est là certainement la condamnation de la fête.
René.
Un mot d'ordre semble avoir été donné dans
toute la Belgique aux agents du cléricalisme.
LE
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