1,063. Jeudi,
45e ANNÉE.
12 Mars 1885.
6 FRANCS PAR AN.
JOllRAAI. D'YPRES K'T DE L A H H O A D1S S E M E l\ T
LA LOI MA LOUE
Rousbrugge.
L'HORLOGE HISTORIQUE DE COBRTRAI.
Ypres, le 11 Mars 1885.
Précisons bien les faits
Dans le courant du mois de Novembre der
nier, M. Bara signalait la Chambre que
l'admiuistration communale de Rousbrugge-
Haringhe avait commis une flagrante illéga
lité en décrétant la suppression de l'école
communale mixte, très-bien fréquentée,établie
Rousbrugge, centre de la commune, pour
maintenir une autre école mixte établie dans
la section Haringhe, située 2 ou 3 kilomè
tres du principal aggloméré.
M. Thonissen, qui est d'ordinaire moins
bien renseigné que les membres de la gauche
sur les faits que ses amis ont intérêt lui
cacher, promit de prendre des informations.
Il en a pris pendant trois mois et sous pré
texte d'explications, de renseignements exacts
et de rectifications, voici les mauvaises plai
santeries qu'il a osé débiter au Parlement,
dans la séance du 24 Février dernier.
Nous citons textuellement d'après les An
nales
A l'égard de la commune de Rousbrugge-
Haringhe, les renseignements fournis
l'honorable M. Bara sont loin de se distin-
guer par leur exactitude.
La commune se compose de deux sections,
qui forment deux paroisses, d'une popula-
tion peu près égale, dont l'une s'appelle
Rousbrugge et l'autre Haringhe. Les deux
sections ne sont distantes que d'un quart île
lieue et reliées par une excellente chaussée.»
Nous nous bornerons répondre que Rous
brugge compte, d'après le dictionnaire des
communes, environ 1200 habitants tandis
qu'Haringhe n'en comprend que 800. De
l'église de Rousbrugge, sise au centre de cette
section, l'école communale de Haringhe qui,
dans l'espèce, doit être prise comme point
central de la section de ce nom, il y a deux
kilomètres et non pas un quart de lieue comme
l'affirme erronnément M. le ministre. Un
arrêté Royal de 1857 établit que Rousbrugge
est le chef lieu du canton et le siège de la jus
tice de paix C'est Rousbrugge et non
Haringhe qu'est le siège de l'administration
communale. Rousbrugge est donc sans
contredit le principal aggloméré. Cela n'est
pas contestable et il faut être un âne bâté
pour soutenir le contraire.
Avant la fondation de l'école de filles
Rousbrugge», dit M. Thonissen, (et ici le
Journal d Ypres emboîte effrontément le pas
derrière le ministre inpartibus)«en 1882, tous
les pères de familles, partisans de l'ensei-
gnement officiel, envoyaient leurs filles
1 école mixte de Haringhe et non l'école
mixte de Rousbrugge, tellement les commu-
nications sont faciles.
La réponse est bien simple et il est vraiment
étonnant que M. Thonissen, avec sa perspica
cité habituelle, ne l'ait point devinée.
La voici Si des pères de famille (en très
petit nombre d'ailleurs) envoyaient leurs filles
l'école mixte de Haringhe, c'est pareequ'il
n'existait Rousbrugge qu'une école de gar
çons. Il était donc absolument impossible aux
parents d'envoyer ieurs filles ailleurs qu'à
Haringhe.
L'explication n'était pas des plus difficiles,
comme on le voit. C'est peut être pour cela
que le grand ministre ne l'a point trouvée.
Quant au Journal qui a gobé cette pilule
comme tant d'autres badauds de sacristie, ne
nous en étonnons pas trop.
Il en a encore bien d'autres dans son sac
Il est vrai continuent M. Thonissen et
j le plagiaire du Journalqu'il y avait un peu
j plus d'élèves l'école mixte de Rousbrugge
qu'à celle de Haringhe; mais le nombre ae
LE PROGRÈS
PAU A ISS A AT LE JFL'DI ET LE DIMANCHE. vires acquirit eundo.
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La ville de Courtrai a possédé l'une des premières horlo
ges poids et k sonnerie qui aient été établies en Europe-
Au milieu du XIV* siècle, on aurait pu compter les villes
dans lesquelles une horloge publique donnait la marche du
temps. Jusque-là, il avait été réservé aux rois et aux em- j
pereurs de posséder, comme pièce de curiosité, des appa
reils qui mesuraient les heures, et que l'eau mettait en
mouvement en s'échappant d'un réservoir. C étaient d'énor
mes machines, qui se fabriquaient en Orient. Charlemagne,
en 807, en avait reçu une en présent du calife de Perse
Abdallah; et encore en 1232, Frédéric II était redevable de
celle qu'il faisait voir ses visiteurs comme une merveille,
au sultan d'Egypte Malek-Kamel.
L'écoulement de l'eau exigeait une surveillance conti
nuelle pour alimenter le réservoir. En Orient, il y avait,
dans les palais, un personnel particulier chargé de prendre
soin de ces pièces mécaniques et de les tenir constamment
en mouvement. C'étaient, par conséquent, des appareils de
luxe, exceptionnels, et qui ne pouvaient devenir d'un usage
générai. Mais quand on eut substitué un poids moteur
l'écoulement de l'eau, il suffit de remonter l'horloge cer
tains intervalles, et la machine put devenir pratique.
Cette substitution fut imaginée au IX' ou au X* siècle,
sans qu'on en sache positivement l'auteur. Toutefois, les
frottements des roues s'opposaient seuls k la chute du poids,
car on ne songea que beaucoup plus tard k adapter le pen
dule au mécanisme. Dans ces conditions, si le poids eût été
lourd, il aurait déroulé la corde en quelques instants, 1 ai
guille aurait tourné follement sur le cadran, puis tout serait
rentré au repos. On ne pouvait donc employer pour moteur
qu'un poids strictement suffisant pour vaincre les résistan
ces des rouages. Mais alors la moindre variation dans ces
résistances, ou bien arrêtait court la machine, ou bien en
troublait la marche entièrement.
Cette difficulté finit cependant par être vaincue, mais on
est également incertain de l'habile inventeur qui sut la ré
soudre. Il y parvint en employant un poids moteur beaucoup
plus considérable que les frottements ne l'eussent exigé,
mais en retardant en même temps sa descente par un volant
k ailes qui éprouvait une grande résistance dans l'air De
plus, il eut l'idée fort ingénieuse de lancer ce volant alter
nativement dans un sens, puis dans le sens contraire, k
1 aide d un échappement vertical, en sorte que le moteur
avait tour k tour k lui donner, puis k lui retirer sa vitesse.
C'était une sorte de pendule horizontal, ou plutôt de balan
cier comme celui de nos montres, mais agissant sans spira
le, et par la seule inertie de sa lourde masse.
Vers la fin du XIII" siècle, on commence k mentionner
des horloges construites d'après ce principe. Ce fut alors
qu'on vit pour la première fois des appareils mécaniques k
mesurer le temps, en dehors des cabinets de curiosités des
rois. L'abbaye de. Westminster, k Londres, fut dotée d'une
de ces horloges en 1288, et l'abbaye de Saint Albans, entre
Londres et Cambridge, d'une autre en 1315.
L'Italie en eut la première la spécialité sur le continent.
Jacques de Dondis mit en marche l'horloge de Padoue en
1443, après y avoir travaillé pendant seize ans. Celle de
Courtrai existait, selon toute apparence, depuis plusieurs
années, en 1363, date où elle est mentionnée par Froissart.
Mais qui l'avait construite, et comment Courtrai fut-elle la
seconde ville, au moins k la connaissance des historiens,
qui eut une horloge k poids et k volant sur le continent
Ces questions n'ont pas pu jusqu'à présent être éclaircies.
Il est certain que l'horloge de Courtrai était antérieure
la célèbre horloge de Strasbourg, qui est de 1368, et même
k celle du Palais, k Pans, qui fut montée en 1364. Cette
époque était le moment ou Henri de Vie construisait les pre
mières horloges d'Allemagne. Vers ce môme temps, au rap
port de Muratori, les horloges publiques qui sonnaient les
heures commencèrent également se répandre en Italie.
Mais Courtrai fut incontestablement une des premières
villes qui se trouvèrent pourvues de la nouvelle invention.
Son horloge était connue sous le nom de« Jacquemart
mot qui, cette époque, était simplement l'équivalent de
Jacques. On disait donc le Jacques de Courtrai mais cette
expression n'a jamais été expliquée d'une manière satisfai
sante Venait-elle de Jacques de Dondis, ou, comme d'au
tres l'ont supposé, d'un (certain Jacques Aimar, qui con
struisait aussi des horloges? Il est impossible de rien
affirmer sur ce point Bien que les Courtraisiens fussent
fort fiers de leur Jacques, fies hommes éclairés de ce temps,
en faisaient peut être encore plus de cas que les habitants.
La circonstance suivante l'atteste.
En 1363, le roi de France Charles V s'étant emparé de
Courtrai, voulut qu'on lui restituât les éperons dorés des
chevaliers de sa nation pris sur le champ de bataille en
1302. Les Courtraisiens s'y opposèrent. Alors le Roi, fu
rieux de ce refus, ordonna de mettre le feu k la ville. Mais
aussitôt que le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, eut
appris cette résolution, il envoya démonter le Jacquemart,
pour le sauver de la destruction. Ce fut le seul objet de va
leur qui échappa l'incendie, ce qui montre bien le cas
qu'on en faisait. L'horloge fut donc enlevée pièce par pièce;