N° 1,100. Dimanche,
6 FRANCS PAU AN.
JOURNAL DYPRES KT DE L'ARRONDISSEMENT.
L'impôt sur le paio.
CONDAMNATION
ET EXÉCUTION D'UNE TRUIE.
45e ANNÉE.
LE PROGR
l'VKAISSVVT LU JH III KT I.E 1)1.11 AACIIE. V1«KS ACOCIRIT EO.NOO
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Ypres, le 18 Juillet 1885.
Dans un procès récent, dont les débats ont eu lieu
devant le tribunal d'Ypres, un avocat, membre de la
Chambre des Représentants, daignait reconnaître
que tous les actes d'un homme politique sont sou
mis il la critique de l'opinion et de la presse et il ne
se faisait pas faute d'accorder ses adversaires le
droit de le combattre, de l'attaquer, de le traîner sur
la claie et de lui faire endurer mille morts, politi
quement parlant bien entendu.
Cet avocat, c'est MColaert.
Nous allons profiler de la permission que nous
donne l'aigle du barreau d'Ypres et faire voir au
corps électoral en quelles mains il a placé ses inté
rêts.
Reportons nous au mois de Février 4884.
M. Colaert, fauchant l'herbe sous le pied de son
estimable ami Van lepenhout, venait d'être proclamé
candidat la Chambre et prononçait au K. K. de la
rne des Chiens une de ces harangues vides et pré
tentieuses dont on donne la recette au petit sémi
naire de Roulers.
Voici un passage de ce factum
Tous les blés étrangers entrent chez nous ex-
empts de taxe, tandis que nos produits similaires
sont soumis, pour leur exportation, des droits
très-élevés. Les blés d'Amérique inondent nos
marchés et font nos produits une concurrence
contre laquelle nos cultivateurs ne peuvent lutter
avec quelque succès.
Voilà assurément une profession de foi nettement
protectionniste qui devait forcément faire plus lard
de M. Colaert un partisan de la loi de famine.
A cette époque, nous avons fait M. Colaert
l'honneur d'une réfutation en règle et nous lui avons
démontré, clair comme le jour, que l'adoption de ce
beau système aurait pour conséquence inévitable le
renchérissement du pain et une aggravation de la
misère des classes laborieuses.
M. Colaert nous a ri au ner, nous a, pour toute
réponse, envoyé son discours et le bouffon du Jour
nal d'Ypres, faisant chorus avec son nouveau baas, a
cherché étourdir le public par le bruit de ses
grelots.
MColaert fut nommé
Parbleu
Au mois de Juin suivant, notre accrobate parle
mentaire exécute quelques nouvelles variations sur
ce thème éminemment propre lui concilier les sym
pathies des campagnards et, grâce des promesses
fallacieuses qu'il savait ne pouvoir tenir, escalade
de nouveau l'entrée du Palais de la Nation. Van Ie-
penhout continuant lui faire la courte échelle et
jouer cet éternel rôle de dupe pour lequel il semble
avoir été mis au monde.
Un an s'est passé depuis lors.
Après des ajournements, des remises, des retards
et des longueurs de toute nature, la Chambre est
appelée statuer sur le projet Dumont.
Les ruraux de l'arrondissement d'Ypres aux
quels M. Colaert a formellement promis une taxe sur
les blés étrangers, sont sur les braises et ne doutant
pas du succès du grand orateur et de ses illustres
copains, MM. Slruye ei Berlen, s'apprêtent illumi
ner et faire une réception triomphale au Sauveur
de l'agriculture.
Les idiots
Pendant que la Chambre vaquait son rude la
beur et que protectionnistes et libre échangistes s'en-
tredéchiraient Bruxelles, Maître Renard, pardon
Maître Colaert, soignait sa clientèle Ypres, et se
souciant de l'agriculture et des agriculteurs comme
d'une guigne, travaillait paisiblement remplir son
porte-monnaie.
Les Annales nous apprennent en effet que M. Co
laert n'a pas pris part aux différents votes qu'a né
cessités la proposition de loi de ses collègues de
Nivelles.
Pour du sans-gêne, voilà du sans-gêne j'espère
(Suite et fin).
Pendant le xv* et le xvT siècles, ces condamnations d'ani
maux n'étaient pas rares. Nous verrons ci-après que l'on
accordait môme un défenseur aux prévenus et que toutes
les formalités d'ajournement, de remise étaient obser
vées k leur égard comme l'égard des personnes.
Dans le Voyage littéraire de deux Bénédictins de la con
grégation de St-Maur, on trouve aussi une sentence pro
noncée Caurroy contre un taureau qui avait tué un jeune
garçon de quatorze k quinze ans.
Nous demandons la permission de citer ici le passage de
l'ouvrage des deux savants Bénédictins, qui a trait k cette
sentence. Ce Voyage ne se trouve pas facilement et nous
croyons faire plaisir k nos lecteurs en leur communiquant
ce jugement.
Arrivés k l'abbaye de Beaupré, de l'ordre des Citaux, ces
deux savants y visitèrent les archives: Nous vîmes le char-
trier disent-ils et nous parcourûmes le cartulaire.
Nous y trouvâmes une chose singulière qui est une sentence
rendue contre un taureau qui avait tué un homme, avec
toutes les informations faites contre cet homicide. Par cette
sentence le taureau est condamné k être pendu aux fourches
partibulaires et comme elle me paraît extraordinaire, pour
la rareté du fait, je la rapporterai ici toute entière.
A tous ceux qui ces présentes lettres verront. Jean
Sondar, Lieutenant du Bailly du temporel de l'église et
abbaye nôtre Dame de Beauprés de l ordre de Cisteaux,
pour mterables et discrètes personnes et mes tres-kanorez
seigneurs, messeigneurs les religieux abbé et couvent de
ladite abbaye, salut. Comme la requeste du procureur de
mesdits seigneurs, et par leur justice temporelle qu'ils ont
en leur terre et seigneurie du Caurroy eût été nagaires
prins et mis en la main d'icelle leur justice ung thorreau
de poil rouge, appartenant Jean Boulet censier et fermier
de mesdits seigneurs, demeurant en leur maison et cense
dudit Caurroy, lequel thorreau étant aux champs et sur le
territoûere d'icelle d'église, auroit par furiosité occis et mis
mort un joine fils, nommé Lucas Dupont, de l'âge de
quatorze quinze ans, ou environ, serviteur dudit censier,
lequel il avait mis la garde de ses bestes corne, entre
lesquelles estoit ledit thorreau. Duquel thoi-reau ledit pro
cureur de mesdits seigneurs requeroit la justice estre faite,
et qu'il fut exécuté jusqu'à mort inclusivement par la justice
de mesdits seigneurs pour occasion d'icelui crimme d'omi-
cide et de la detestation d'iceluy. Sur quoy enqueste et in
formation eussens été faites de la forme et maniéré iceluy
homicide, par laquelle ledit procureur nous eust requis sur
ce luy estre fait droit. Savoir faisons que veu ladilte en
queste et information et sur tout eu conseil et advisnous
par nostre sentence et jugement, avons dies et jugié,' que
pour raison de l'omicide, dont dessus est touchié, fait par
ledit thorreau en la personne d'iceluy Lucas, et pour la
detestation du crime d'iceluy homicide, ledit thorreau
nommé confisqué mesdits seigneurs sera exécuté jusques
mort inclusivement par leurdite justice, et pendu une
fourche ou potence es mettes de leurdite terre et seigneurie
dudit Caurroy, auprès du lieu où solloit estre assise la
justice. Et ad ce le avons condamné et condamnons. En
lesmoing de ce avons mis nostre scel ces lettres qui furent
faites et pronmchiés audit lieu du Caurroy en la presence
de Guillaume Gave du Mottin, Jehan Custien l'aisni,
Jehan Henri, Jehan Boullet, hommes et subjets de mesdits
seigneurs, Jehan Charles, et Clement le Carpentier, et
plusieurs autres, le seizième jour de May l'an mil quatre
cens puatre-vingt-dix-neuf. Ainsi signé, Ileugles, ad ce
commis.
Toutes les informations et procédures du procès sont
au monastère de Beaupré.
M. Gachard, dans ses Annalectes Belgiques, (Bruxelles,
1830, in-8 rapporte le fait raconté par nos deux Bénédic
tins et dit que k celte époque les procès criminels intentés
contre les animaux étaient presque aussi communs que ceux
contre les sorcière. Il déclare avoir vu un monument du
même genre, qui est un acte du 22 Septembre 1486, certi
fiant que le 10 Juin précédent, le sous-bailli de Bailleul
avait fait exécuter, par les mains du bourreau, Ypres, un
pourceau qui avait meurtri et mangé un enfant Après
l'exécution, l'animal immonde fut exposé de la même ma-
mière que l'étaient les cadavres des criminels (1). En
1829, M. Cannaert, ancien Conseiller de la Cour supérieure
de Justice, Bruxelles, en avait donné une traduction hol
landaise dans un ouvrage édité Bruxelles chez Brest van
Kempen et imprimé par Hayez, portant pour titre Bijdra-
gen tôt het oude strafregt in Belgie (2).
Nonobstant cette traduction, notre savant archiviste-géné
ral du royaume, a publié in extenso l'original français, et
(1) Gachard. Ouvrage eilé, p. 60.
(2 Cet ouvrage eut trois éditions. La première parut en 1826,
sous le titre de tels over het oude St afrecht in Belgie. La seconde
en 1829, sous le titre que tious venons de citer; et la troisième en
t833, Gand, chez Gyselynck, sous le titre île Bijdragt n lot di
Kemis oeui het mie Straftecht in VlamUren.