N° 1,117. Jeudi,
45e A1JIÉE.
17 Septembre 1S85.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
RÉPARATION JUDICIAIRE.
LE PROGRÈS
PAHAISSAIT l-fc JECDI ET TE DIMANCHE.
VIRES ACQUIRIT EUNDO.
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Nous insérons sous toutes réserves le jugement
ci-a près
Nous LÉOPOLD DEUX Roi des Belges, tous pré
sents et venir, faisons savoir
Le tribunal de première instance séant Ypres,
Flandre Occidentale,a prononcé le jugement suivant:
Entre Dame Euphémie Comtesse de Bethune et son
époux Monsieur le Marquis Victor d'Ennetières, Comte
d'Hust, etc.. Bourgmestre de laCommune d'Elverdinghe,
intervenant celui-ci pour assister et autoriser son épouse
aux fins des présentes, demandeurs, représentés par
Maître René Colaert, avocat avoué Ypres.
En cause contre:
Monsieur Ange Van Eeckhout, Libraire-Editeur et
Imprimeur Ypres, ayant pour avoué Maître Alfred
Laheyne.
Faits. Dans son numéro du quatre Janvier mil hait
cent quatre vingt cinq et sous le titre, A Elverdinghe»
Le Journal, Le Progrès journal d'Ypres et de l'ar
rondissement, parlant de la prétendue guerre déclarée
aux écoles communales, s'est permis d'écrire: «Cette
dernière école (une école de iilles tenue par des reli-
gieuses) est établie dans l'ancien château de l'illustris-
i sime Marquis d'Ennetières dit d'Argencourt, dont
l'épouse, dit-on, a vu son immense fortune doublée
la suite de certaines circonstances assez peu connues
jusqu'à ce jour.
La demanderesse, vit, dans cette phrase, une imputa
tion malveillante et diffamatoire de nature porter at
teinte son honneur et sa considération.
Delà une demande en réparation du préjudice causé.
Après une inutile tentative de conciliation, elle assi
gna le défendeur devant le tribunal civil de première
instance d'Ypres, par exploit de l'huissier Costenoble
de cette ville, eu date du vingt huit Mars dernier, aux
fins énoncées dans cet exploit.
Par acte du dix Avril, enregistré, Maître Laheyne se
constitue pour le détendeur.
Avenir lui fut donné pour l'audience du Mercredi
vingt neuf Avril suivant.
L'affaire régulièrement introduite fut appelée l'au
dience de ce jour, où, Maître Colaert pour la demande
resse donna lecture des conclusions suivantes, précé
demment signifiées.
Attendu que dans son numéro du quatre Janvier mil
huit cent quatre vingt cinq du journal Le Progrès
dûment enregistré, journal dont le défendeur est 1 Edi
teur responsable, la demanderesse a été designée comme
ayant vu son immense fortune doublée la suite de
certaines circonstances assez peu connues jusqu'à ce
jour.
Attendu que cette imputation renfermée dans uu ar
ticle intitulé A E verdinghe et où le man de la de
manderesse est désigné sous le nom de Marquis d'En
netières, dit d'Argencourt, est malveillante et calom
nieuse au plus haut point.
Attendu, de plus, que cette imputation a infligé grief
la demanderesse en portant atteinte sa considération
et en l'exposant au mépris de ses concitoyens.
Pour ces motifs et vu l'article mille trois cent quatre-
vingt deux du code civil.
Plaise au tribunal déclarer que l'article en question
est calomnieux et dommageable au premier chef, par
suite condamner le défendeur, payer la demande
resse une somme de deux mille francs employer en
insertions du jugement intervenir dans des journaux
son choix
Secundo; insérer le même jugement dans son pro
pre journal Le Progrès la première page, ce deux
reprises et dans les quinze jours de la signification,
peine de trois cents francs de dommages-intérêts, le
tout avec dépens,
Demande évaluée deux mille cinq cents francs
pour fixer le ressort.
Immédiatement après la lecture de cet écrit, Maître
Colaert demande acte au tribunal de ce qu'il voulait
modifier ces conclusion', en certains points et aussitôt
il donna lecture des conclusions suivantes qui furent
siguiiiëes d'avoué avoué.
Maître Colaert déclare modifier ses conclusions signi
fié.s le vingt quatre Avril dernier, en remplaçant les
mots: Secondo, insérer le même jugement dans son
propre journal. Le Progrès la première page, ce
deux reprises et dans les quinze jours de la siguifi-
cation, peine de trois cents francs de dommages-in-
ip térèts, le tout avec dépens, y
Demande évaluée deux mille cinq cents francs
pour fixer le ressort.
Par les Suivants
Secondo,insérer le même jugement dans son propre
journal Le Progrès la première page et dans les
quinze jours de la sign.fication, deux reprises diffé
rentes,ce jusqu'à concurcnce de la somme de trois cents
francs, peine de trois cents francs de dommages-in
térêts.
Dire que les frais des dites publications seront récu
pérables charge du défendeur sur le vu des quittances
des dits journaux jusqu'à concurrence de la somme to
tale de deux mille trois cents francs.
Ordonner l'exécution provisoire du jugement nonob
stant appel et sans caution;condamner le défendeur aux
dépens.
Demande évaluée du premier chef deux mille francs
et du second chef trois Cents francs, ensemble deux
mille trois cents francs pour fixer le ressort,
Le tribunal donne acte des déclarations de Maître
Colaert, et la demande de Maître Laheyne, remit l'af
faire l'audience du treize Mai.
A cette audience Maître Laheyne, pour le défendeur,
prit les conclusions suivantes
L'avoué soussigné, pour sa partie, déclare vouloir
user du bénéfice cTe l'article trente trois de la loi du
vingt cinq Mars mil huit cent septante six sur la com
pétence, et évaluer la somme de mille francs, la de
mande en insertion du jugement dans le journal du dé
fendeur ce qui porte la valeur totale du litige la somms
globale de trois mille francs, laquelle, pour autant que
de besoin, le défendeur déclare l'évaluer.
La défense rencontrant l'écrit de la demanderesse,
en date du neuf Mai mil huit cent quatrevingt cinq, dit
et soutient que la partie Colaert ne saurait avoir le droit
d'étendre, par simples conclusions, sa demande des
chefs non compris dans son exploit introductif et de mo
difier l'évaluation du litige faite dans l'assignation.
Qu'en conséquence, il ne saurait y avoir lieu! pour le
tribunal de s'arrêter A l'écrit prédit.
Pour le surplus, rencontrant les conlusions de l'ex
ploit introductif d'instance, le défendeur conclut comme
suit
Attendu que la phrase qui sert de base l'action de
la demanderesse, partie Colaert, ne contient aucune
imputation calomnieuse, insultante, ni simplement illi
cite et dommageable pour la demanderesse; que dès
lors, l'action de la demanderesse advient ni recevable,
ni fondée.
Par ces motifs, plaise au tribunal,débouter la deman
deresse de ses fins et conclusions et la condamner aux
dépens.
Ces conclusions furent signifiées par acte d'avoué
avoué.
L'affaire étant en état, fut remise pour les plaidoiries.
A l'audience du dix neuf Juin, les avocats des parties
développèrent leurs moyens et conclusions, et l'affaire
fut tenue en délibéré.
En droit la demande est-elle fondée
Dans l'affirmative y a-t-il lieu d'accorder la deman
deresse des réparations
Les quelles
La demanderesse pouvait-elle modifier ses conclu
sions au point de vue de l'évaluation du litige?
Touvâit-eRe demander que le jugement fut déclaié
exécutoire par provision nonobstant opposition ou a( -
pel et sans caution?
Etait ce là modifier la demande? Quid des dépens
Sur quoi délibérant.
Vu h s conclusions respectives des parties.
Sur la question de détermination du ressort
Attendu que dans son exploit introductif d'instance
la dame demanderesse a évalué l'action deux mille
cinq cents francs pour fixer le reisort, libel ant cette
somme en demande.
Primo, de paiement de deux mille francs employer
en insertions du jugement intervenir dans des jour
naux son choix;
Secundo, de condamnation en insertion du dit juge
ment, deux reprises, dans le journal Le Progrès
lui-même, sinon de paiement de trois cents francs de
dommages-intérêts
Attendu, que dans ses conclusions d'audience du neuf
Mai mil huit cent quatre vingt cinq, la demanderesse,
modifiant les termes de sa demande première en ce qui
concerne le second chef de condamnation a conclu la
condamnation en insertion du jugement intervenir
dans le journal du défendeur deux reprises, jusqu'à
concurrence de la somme de trois cents francs, peine
de trois cents francs de dommages-intérêts, défaut
d'insertion dans le délai de quinzaine et réduit son
évalution pour fixer le ressort deux mille trois cents
francs
Attendu, que dans les deux écrits ci-dessus, l'évalua
tion de la demanderesse n'excède pas le taux du der
nier ressort
Attendu, que le défendeur soutient que cette évalua
tion était inutile parce que toute demande en inser'.ion
forcée est non susceptible d'évaluation et partant tou
jours appelable
Attendu, que l'examen de la question de savoir si
toute demande èn insertion forcée est toujours suscep
tible d'appel n'incombe pas au tribunal de première
instance mais bien la juridiction d'3ppel en tant
qu'elle serait éventuellement saisie; que d'ailleurs,dans
l'espèce, cet examen serait sans raison puisque le défen
deur usant de la faculté que lui accorde le paragraphe
deux de l'article trente-trois de la loi du vingt-cinq
Mais mil huit cent Septante six, a, dans ses premières
conc usions sur le fonds du procès, déterminé le ressort
en évaluant l'objet de la demande trois mille francs
élevant ainsi cet objet au de là du taux du dernier ressort
Sur la question de savoir si le tribunal est lié quant