N° 1,119. Jeudi,
24 Septembre 1S85.
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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
45e ANNÉE.
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Gourtrai-Gand. 5-30 8-20 - 11-16 2-41 5-20.
Les vieilles anglaises réunies en ce me ment
Anvers pour restaurer la moralité publique en Bel
gique feraient beaucoup mieux.au lieu de nous don
ner des leçons, de prendre modèle sur ce qui se fait
dans notre pays. Nous avons notamment dans le
code pénal de 1867 un article 370 qui punit d'un
emprisonnement de deux ans cinq ans, s'il est
majeur, celui qui aura enlevé ou fait enlever une fille
au-dessous de seize ans accomplis. Le délit existe
alors même que la jeune fille a consenti son enlè
vement ou si elle a suivi volontairement le ravisseur.
Si le ravisseur est mineur, la peine est moindre;
l'emprisonnement est de trois mois un an.
La loi établit une échelle de pénalités proportion
nées la gravité de l'infraction.
L'enlèvement de mineurs, pratiqué par ruée, vio
lence ou menace, est puni d'un emprisonnement d'un
cinq ans.
Si la personne enlevée est une fille âgée de moins
de seize ans, la peine est la réclusion.
La loi prévoit ensuite le cas de l'enlèvement pra
tiqué sans ruse, ni violence, ni menace, avec l'as
sentiment de la personne enlevée. Si la jeune fille
est,âgée de moins de seize ans, la peine est de deux
ans cinq ans.
Il n'y a pas de délit s'il n'y a ni ruse,ni violence,
ni menace, et s'il s'agit d'une jeune fille de plus de
seize ans accomplis, qui a consenti son enlèvement
ou qui a suivi volontairement le ravisseur.
Si,au contraire.il s'agit d'une jeune fille de moins
de seize ans,alors même qu'il y aurait consentement
de sa part, l'article 370 édicté des pénalités sévères.
Telle est la loi. Nous n'avons pas indiquer les
raisons qui ont déterminé le législateur punir cer
tains faits et en laisser d'autres en dehors de l'ac
tion du code pénal. S'il fallait justifier les disposi
tions édictées par le législateur belge,nous ne serions
pas embarrassés. Nous voulons seulement protester
contre les accusations portées contre la magistra
ture belge. On a osé dire devant les vieilles Anglai
ses réunies Anvers toute leur vieille pudeur en
a tressailli que certains tempéraments avaient été
apportés dans l'application de la loi pénale unique
ment parce que, en général, les ravisseurs appartien
nent un monde que l'on veut ménager.
C'est tout simplement idiot, dit XEcho du Parle
ment. Dans l'espèce qui â'êté citée aux vieilles filles
et qu'elles ont évalée toute crue avec des airs pen
chés et les yeux baissés,il s'agissait d'une jeune foile,
âgée de plus de seize ans, qui ne demandait qu'à
quitter la pension où elle était enfermée et qui s'est
prêtée avec une rare complaisance aux combinaisons
imaginées pour lui procurer une autre existence. La
loi est formelle. L'enlèveritent en lui-même ne con
stituait pas une infraction,puisqu'il n'y a eu ni ruse,
ni violence, ni menace il n'y avait pas de ruse
au sens légal puisque le tout se passait d'accord
avec la jeune personne; ily;àvait consentement de sa
part. L'âge dépassait seize ans. Néanmoins il y a eu
poursuite et condamnation, mais seulement du chef
de faux et usage de faux, parce qu'on avait simulé
une lettre des parents pour tromper la vigilancéde
la maîtresse du pensionnât.
La justice a sévi contré les auteurs ét les complices
du faux et de l'usage du faux. Elle, ne pouvait aller
au delà.C'est donc par une incroyable ignorance que
l'on fait tressauter les vieilles Anglaises consacrées
la régénérations de la moralité publique de la Bel
gique en leur racontant un tas d horreurs que l'on
explique en faisant croire que la justice a dans notre
pays des poids et des mesures différents selon la
classe laquelle les coupables appartiennent.
11 y a une lacune dans nos lois. L'autorité com
munale a, en matière de police des mœurs, un pou
voir exorbitant; elle peut faire, au besoin, des ins
criptions d'office au bureau des mœurs, sans qu'il
y ait un recours possible de la part des intéressées.
En fait, quoi qu'on en ait dit, il n'y a jamais eu
d'abus bien constatés. Il en est de ces filles au sujet
desquelles on a réclamé comme de ces jeunes Anglai
ses qui ont, il y a quelques années, servi de prétexte
la campagne faite contre ce qu'on a appelé la traite
des blanches.Toutes savaient parfaitement pourquoi
elle venaient sur le continent, et quel genre d'exis
tence les y attendait. L'instruction a fait justice de
toutes les énormités qui se sont débitées cet égard.
Mais enfin des abus sont possibles et il suffit que
des abus soient possibles dans une matière pareille
pour que le législateur les prévienne.
C'est ce que l'administration libérale avait com
pris. Elle avait déposé un projet de loi qui ouvrait
un recours devant le tribunal civil contre les inscrip
tions faites par l'autorité légale au registre de la
prostitution mais, dans le élan des vieilles filles qui
ont entrepris le relèvement moral de la Belgique,on
est tellement peu au courant de ce qui se passe dans
notre pays qu'on en est compter sur la présence
dans le cabinet de MBeernaert un des grands
hommes du mouvement de la régénération par la
liberté de la prostitution pour espérer la présen
tation d'un projet de loi dont la Chambre des repré
sentants est saisie depuis plus de dix-huit mois.
Ces jours derniers, mouraient deux notabilités
politiques, une du parti libéral, M. Bouvier, repré
sentant de Virton, l'autre du parti clérical, M. Oscar
Delmer, rédacteur du Journal de Bruxelles.
Tandis que tous les journaux libéraux, faisant
trêve leurs inimitiés politiques, n'avaient que des
paroles de regret et de respect devant le lit de mort
de M. Delmer, les feuilles cléricales, avec la même
unanimité, ricanent et ne trouvent que des injures
ou des moqueries blessantes devant le cercueil du
représentant libéral.
Nous ne voulons point tirer vanité de cette situa-
lion, qui est notre avantage, mais nous tenons
la constater pour l'édification des honnêtes gens.
M. Bouvier a laissé une disposition testamentaire
déclarant qu'il voulait être enterré civilement et con
fiait M. Bergé la garde de cette disposition.
La Patrie dit, ce propos
La disposition testamentaire de M. Bouvier
prouve qu'il a voulu finir sa vie par un des nom-
breUx traits qui ont marqué sa carrière politique
un liait de paillasse.
Nous concevons que nos bons cléricaux soient
ravis de voir disparaître pour toujours un interrup
teur qui les gênait beaucoup..Mais avec quelle pas
sion s'exprime la Patrie envers un ennemi mort.